jeudi 25 août 2016

Luc 14/25-33 Porter sa croix Dimanche 8 septembre 2019


Texte de 2010 revue et corrigé

Luc 14: 25

De grandes foules faisaient route avec lui. Il se retourna et leur dit :26 Si quelqu'un vient à moi et ne déteste pas son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères, ses sœurs et même sa propre vie, il ne peut être mon disciple. 27 Et quiconque ne porte pas sa croix pour venir à ma suite ne peut être mon disciple.

28 En effet, lequel d'entre vous, s'il veut construire une tour, ne s'assied pas d'abord pour calculer la dépense et voir s'il a de quoi la terminer, 29 de peur qu'après avoir posé les fondations, il ne soit pas capable d'achever, et que tous ceux qui le verront ne se moquent et ne disent : 30 « Cet homme a commencé à construire, et il n'a pas été capable d'achever.»
31 Ou bien quel roi, s'il part en guerre contre un autre roi, ne s'assied pas d'abord pour se demander s'il peut, avec dix mille hommes, affronter celui qui vient au-devant de lui avec vingt mille ? 32 Sinon, tandis que l'autre est encore loin, il lui envoie une ambassade pour demander les conditions de paix. 33Ainsi donc, quiconque d'entre vous ne renonce pas à tous ses biens ne peut être mon disciple. 



La tradition a rendu populaire une certaine image de Jésus que Théodore Botrel parmi tant d’autres a chanté dans le folklore breton. Jésus y est présenté comme le doux Sauveur à barbe blonde avec de grands yeux doux. Le cinéma américain a contribué pour sa part à vulgariser cette image. Les peintres classiques n’ont pas échappé à ce canon de beauté pour présenter le visage du Seigneur. Mais ce serait mal lire l’Evangile que de voir Jésus sous ce seul portrait. Le texte que nous avons lu nous présente un autre aspect de Jésus, plus rude, d’où la tendresse est absente. Serait-il plus conforme à celui que les spécialistes actuels tentent de vulgariser  en faisant de Jésus un homme de taille moyenne , brun  au regard fuyant,( je vous livre ici 2 portraits publiés dans la presse)  Le rôle de Jésus est avant tout celui de nous faire découvrir Dieu. Ici il le fait sans ménagement car le Dieu dont il est le témoin est différent de celui que Jésus lui-même nous a habitué à découvrir dans ses propos.


Qui est Dieu pour vous ? En quoi votre existence est-elle affectée par la réalité de Dieu ? Comment agit-il en vous ? Ces questions tant de fois répétées, tant de fois formulées nécessitent qu’on ose se les poser au moins une fois de temps en temps. Chacun y répondra mentalement et à sa façon. On pourra dire que Dieu est une force qui vient d’en haut et qui s’empare de nous, qui habite notre âme et notre esprit. On dira aussi que c’est une certitude rassurante sans laquelle notre vie serait ballottée au rythme des hasards dans une société globalisante. Nous dirons aussi que Dieu donne du sens à notre être. Nous nous garderons de vérifier si notre réponse est conforme à la théologie en vigueur dans notre église. Mais nous savons fondamentalement, que nous ne chercherions pas Dieu s’il ne nous avait déjà trouvés, et que c’est lui qui nous pousse à le chercher. Nous percevons intuitivement qu’il y a un lien entre lui et nous et nous croyons qu’il a quelque chose à voir avec notre existence dans ce monde.
Il est donc normal que nous cherchions Dieu, sans pour autant jamais le trouver complètement. Écoutez ce que dit le poète Kalil Gibran : « Contemplez le ruisseau, écoutez sa mélodie. Éternellement, il sera en quête de la mer, et bien que sa recherche n’ait pas de fin, il chante son mystère de crépuscule en crépuscule. Puissiez-vous chercher le Père comme le ruisseau cherche la mer » (1)

Nous savons que Dieu a laissé son empreinte en nous, c’est pourquoi Jésus nous aide à le trouver. Mais ce Dieu que Jésus nous aide à trouver est très différent de tout ce que l’on a dit, car il nous devient personnel. Dans le texte de ce matin Jésus s’implique dans notre recherche et nous provoque volontairement. Il ne s’encombre d’aucun a priori, et d’une manière surprenante il saute à pieds joints par-dessus les conventions. Il parle de haine alors que nous nous attendons à ce qu’il parle d’amour. « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » nous plaisons-nous à répéter après lui et nous nous appuyons sur l’Evangile de Jean pour dire que Dieu est amour.
Aujourd’hui, ce n’est pas le cas, Jésus recommande de haïr ses proches, son père, sa mère ses frères et ses sœurs sa femme et les autres. Il n’a aucune parole rassurante pour mettre un baume sur nos inquiétudes. Pour nous stimuler, il nous promet de porter notre croix, comme W. Churchill promettait à son peuple du sang et des larmes  . Il ouvre devant nous une perspective de souffrance et de mort.
Ainsi provoqués, nous allons pouvoir exercer notre sagacité. En fait, le jeu en vaut la chandelle. Jésus a l’intention de nous faire sortir des chemins battus. Il nous montre que Dieu n’a rien à voir avec les critères soigneusement recensés par les religions. Dieu pour lui ne se trouve pas dans un code de morale. Il est ailleurs que dans nos définitions théologiques. Dieu se situe avant tout dans une relation avec nous. Comme il a sacrifié sa divinité pour venir jusqu’à nous, il s’attend à ce que nous lui consacrions notre humanité.
Il nous propose sagement de faire le bilan de notre foi en nous racontant cette parabole banale du roi qui compte ses hommes, puis qui compte les hommes de l’adversaire et qui négocie la paix en fonction de ses propres forces parce qu’il préfère se soumettre plutôt que de risquer un combat perdu d’avance. La paix dans ce contexte devient un accord de moindre mal, un « gentleman agreement » que l’on a du mal à fonder théologiquement. Or nos vies ressemblent la plupart du temps à ces côtes mal taillée où l’on essaye de donner à chacun sa part. Dieu y compris. Nous composons avec Dieu, avec les hommes, avec notre vertu, avec le temps, si bien que notre existence ne ressemble plus à rien si non à un « melting pot » sans goût ni grâce ni saveur ni prétention. Il nous faut donc changer notre approche concernant Dieu.
En quelques phrases, Jésus a mis à mal tout notre édifice spirituel, pour que nous nous efforcions de le reconstruire. Nous n’osons même pas continuer notre lecture de l’Évangile de peur d’être encore plus déstabilisés car ajoute Jésus, «quiconque ne renonce pas à tout ce qu’il possède ne peut être mon disciple ». Il faut comprendre clairement que cela veut dire qu’on ne peut pas découvrir Dieu en vérité sans abandonner tous les préjugés et tous les acquis de la société. Le chercheur de Dieu doit donc aller à contre courant d’une société qui centralise tout sur l’homme.
Jésus met notre manière de raisonner totalement en cause en nous rappelant qu’avec Dieu, c’est tout ou rien. Pas question de partager prudemment entre Dieu et le monde. Pas question de demander à Dieu de se charger de notre âme d’une part et de choisir de gérer nous-mêmes et à notre gré nos autres activités. Il nous rappelle ainsi que Dieu est envahissant.
Jésus contemple alors la foule qui le suit comme un troupeau bêlant. Il nous décrit comme des moutons cherchant à être pris en charge par un bon berger. Ils cherchent seulement un confort spirituel auprès d’un maître à la mode qui paraît pour lors efficace. Jésus renonce à se laisser manipuler par eux, il n’est pas un gourou rassurant qui profiterait des avantages de ses dons de guérisseur et de prédicateur pour s’assurer une notoriété. Il provoque la foule dont nous faisons tous partie pour que chacun sorte de lui-même et assume le poids de la croix qu’il doit porter.
Vous voulez être rassurés sur l’avenir de votre âme, vous voulez une religion facile qui soit distincte des religions traditionnelles . Vous voulez échapper aux tourments de la vie et être les privilégiés de Dieu, vous ne voulez plus être malades et vous voulez manger tous les jours à votre faim ! Mais vous valez mieux que cela, vous n’êtes pas des moutons promis à l’abattoir. Vous avez en vous la capacité d’être des rebelles, de vivre une passion dévorante, cette passion peut se vivre avec Dieu, mais elle réclame une rupture.

Dans l’Écriture, la rupture est parfois féconde et créatrice, car elle demande à être habitée par un esprit inventif. La rupture c’est la distanciation nécessaire qu’il nous faut prendre par rapport aux conventions sociales qui nous enferment dans des catégories ou des préjugés. Il n’est donc pas étonnant que Jésus prenne la famille pour cible, parce qu’elle a un pouvoir contraignant et enfermant sur les individus. Pour que Dieu puisse s’emparer de nous il ne faut être retenu par aucun autre intérêt. C’est ainsi libérés et placés tout entier sous le charme de Dieu que nous pourrons devenir les conquérants d’un monde nouveau. De même que l’homme doit quitter son père et sa mère  s’il veut aimer sa femme, de même il faut mettre les exigences familiales au second degré de nos préoccupations pour laisser l’intuition de Dieu nous saisir et mettre nos vies à la disposition de Dieu.


Combien parmi nous ne trouvent-ils pas leur existence fade et sans avenir ? Ils se comportent généralement  comme le roi de la parabole racontée par Jésus. Ils recherchent  leurs intérêts, ils font la part des choses, et ils donnent  une importance calculée aux choses et aux êtres, ils ne négligent cependant pas Dieu,  mais ils lui réservent seulement une partie de l'aventure. Ils se construisent une vie raisonnable faite de concessions, sans que le hasard et l’aventure n’y aient leur place. Dieu mérite mieux que nos petites dispositions de sagesse humaine, il réclame toute notre activité, tous nos soucis, toutes nos préoccupations, la totalité de nos personnes. Dieu réclame de devenir le partenaire de notre vie et de la partager en totalité.
Affranchis des contingences humaines, Dieu nous rend libres et responsables. Il se peut que cette joyeuse liberté déplaise aux hommes qui cherchent à nous la prendre en nous enlevant la vie. Ce fut le cas de Jésus et de bien d’autres après lui. Mais leur mort ne fut-elle pas un cri de liberté et une ouverture vers la délivrance. Leur vie était en Dieu et la vie en Dieu est sans limite puisqu’elle lui est toute consacrée et qu’elle débouche quand tout est accompli dans la plénitude éternelle de Dieu, sans limite de temps et d’espace.



dimanche 14 août 2016

Luc 14:1-14 choisir la bonne place - dimanche 28 août 2016




 1Un jour de sabbat, il était venu manger chez l’un des chefs des pharisiens, et ceux-ci l’observaient. 2 Un hydropique était devant lui. 3 Jésus demanda aux spécialistes de la loi et aux pharisiens : Est-il permis ou non d’opérer une guérison pendant le sabbat ? 4 Ils gardèrent le silence. Alors il prit le malade, le guérit et le renvoya. 5 Puis il leur dit : Lequel de vous, si son fils ou son bœuf tombe dans un puits, ne l’en retirera pas aussitôt, le jour du sabbat ? 6 Et ils ne furent pas capables de répondre à cela.
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Choisir la dernière place
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7 Il adressa une parabole aux invités parce qu’il remarquait comment ceux-ci choisissaient les premières places ; il leur disait : 8 Lorsque tu es invité par quelqu’un à des noces, ne va pas t’installer à la première place, de peur qu’une personne plus considérée que toi n’ait été invitée, 9 et que celui qui vous a invités l’un et l’autre ne vienne te dire : « Cède-lui la place. » Tu aurais alors la honte d’aller t’installer à la dernière place. 10 Mais, lorsque tu es invité, va te mettre à la dernière place, afin qu’au moment où viendra celui qui t’a invité, il te dise : « Mon ami, monte plus haut ! » Alors ce sera pour toi un honneur devant tous ceux qui seront à table avec toi. 11 En effet, quiconque s’élève sera abaissé, et celui qui s’abaisse sera élevé.

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Inviter les pauvres

 
12 Il disait aussi à celui qui l’avait invité : Lorsque tu donnes un déjeuner ou un dîner, ne convie pas tes amis, ni tes frères, ni les gens de ta parenté, ni des voisins riches, de peur qu’ils ne te rendent ton invitation et qu’ainsi tu sois payé de retour. 13 Mais lorsque tu donnes un banquet, invite des pauvres, des estropiés, des infirmes, des aveugles. 14 Heureux seras-tu, parce qu’ils n’ont pas de quoi te payer de retour ! En effet, tu seras payé de retour à la résurrection des justes.


Il est des gens qui, forts de leurs expériences spirituelles se croient tout naturellement invités à occuper les premières places du banquet que  Jésus présidera à la fin des temps. Ils  racontent à qui veut l’entendre les merveilles que Dieu a faites pour eux. Ils ne se lassent pas de parler de leur conversion qui, selon eux relève du miracle permanent parce que leur vie a été changée et qu’ils ont réussi à améliorer leur situation sociale ou matérielle ou qu’ils ont été guéris de la maladie qui les accablait. En se donnant en exemple,  ils se proposent de guider sur les chemins de la foi ceux qui n’y sont pas encore parvenus. Ils ont déjà pris  place à la table et se sont approprié  les places d’honneur. Ils proposent leurs conseils aux  autres pour les aider à trouver les bonnes méthodes pour les imiter.
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Nous nous réjouissons avec eux de la manière dont Jésus a su toucher leur cœur et transformer leur vie, mais nous entendons aussi le maître leur suggérer qu’ils n’emploient pas la bonne méthode et que la modestie sied mieux aux croyants.  C’est ainsi qu’il les  invite à descendre vers le bas de la table car nul ne peut s’ériger en donneur de leçon si non le maître lui-même.

Sans s’en rendre compte et en croyant bien faire, ils se servent de Dieu pour se valoriser au détriment des autres. Ils ne savent toujours pas que le maître ne nous valorise pas par les honneurs mais qu’il s’intéresse plutôt à la manière dont chacun saura conduire sa vie pour que celle-ci plaise à Dieu. Or la vie qui plait à Dieu c’est celle de celui qui valorise les autres en s’effaçant lui-même.

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Pourtant, dans cette course à la meilleure place, nous en prenons tous pour notre grade, car nous estimons qu’il est nécessaire que notre vie de croyant soit reconnue par les autres car c’st ainsi que les autres comprendront l’action de Dieu en nous et qu’on évangélisera. Il est donc nécessaire que nous soyons distingués par des signes aux yeux des autres.

Nombreux sont les croyants qui pensent que l’intervention de Dieu dans leur vie doit se manifester par des signes visibles sous forme de miracles. C’est ainsi que doit se révéler selon eux la faveur de Dieu, pensent-ils. Par ces signes, il sera clair pour eux et pour les autres  que Dieu agit en eux. Ces signes peuvent être  le rétablissement de leur santé ou l’amélioration de leur situation sociale ou tout autre avantage qui les distinguerait aux yeux de la société. Si cela ne se produisait pas, ils se sentiraient frustrés. Ils ne penseraient pas que Dieu serait à l’œuvre en eux. Ils se considéreraient alors comme trop pécheurs pour mériter l’attention du Seigneur. En se  culpabilisant  ainsi ils se mettent en dehors  du pardon de Dieu.
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Sans ces signes, visibles  parfois par eux seuls, ils  se mettraient à chercher ce qu’ils ont fait pour que soit barrée en eux l’action de Dieu. Nous savons qu’ils ont tort, mais comment leur faire comprendre que Dieu les aime et qu’il ne le montre pas forcément par les signes visibles? Comment leur faire comprendre que Jésus a renversé l’échelle des valeurs de la culpabilité et que tous les péchés, même les moins acceptables peuvent être pardonnés par l’effet de sa seule bonté ?

S’ils  croient qu’ils ne peuvent  se sentir libérés que par des signes concrets, c’est qu’ils  n’osent pas  prendre l’évangile à la lettre et se croire pardonnés  sans que ça se voit, si bien qu’ils restent enfermés en eux-mêmes. Ils  ressassent une situation que Dieu ne demande qu’à améliorer pour peu qu’ils acceptent le pardon gratuit qui leur est déjà offert.

En fait l’action de Dieu en nous,  avant d’être rendue visible aux yeux des autres doit d’abord opérer une transformation en nous-mêmes. Cette transformation est une transformation du cœur, si bien que tout se passe d’abord dans l’intimité de notre être. Cette transformation a pour première conséquence  de changer notre regard sur nous-mêmes.  Ce sont les autres qui prennent alors de la valeur à nos propres yeux. C’est eux qui doivent  mobiliser notre intérêt et qui motivent nos actions.  .



Notre intérêt personnel passe donc au deuxième plan, si bien que ce qui devient visible aux yeux des autres, c’est le souci que nous avons pour eux.  Nous ne cherchons plus à capter leur attention pour nous valoriser nous-mêmes, mais nous faisons d’eux nos plus proches prochains et c’est pour leur mieux être que nous mobilisons nos actions. 


Bien évidemment les choses ne vont pas de soi. Celui qui est  habité par Dieu et qui est poussé à l’action par lui, n’est pas tout naturellement accepté par les hommes comme  quelqu’un qui est animé par Dieu et transformé par lui. Au contraire, on conteste que ce soit Dieu qui inspire son action en faveur des autres.  On l’accuse de casser la société établie et de travailler plutôt contre Dieu.  Ce fut le cas de la plupart des esprits généreux qui inspirés par Dieu ont voulu changer la société en remettant de l’ordre et de la justice dans les affaires des hommes.  Le plus connu dans nos temps modernes est Martin Luther King, mais il y en a eu bien d’autres avant lui et il y en aura d’autres après lui et chaque jour de nouveaux  inspirés se dressent   parmi-nous et rares sont ceux  qui ont accès aux premières place de la société.
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En fait, le problème n’est pas là. Jésus ne cherche pas à ce que nous soyons humiliés ou persécutés. Si c’était le cas, ce  serait même  une autre façon d’affirmer que le salut s’obtient par les œuvres.   A la différence des croyants dont je parlais tout à l’heure,  qui pensent que l’intervention de Dieu dans leur vie doit se manifester par des miracles visibles, Jésus nous propose de porter un autre regard sur nous-mêmes. Il ne veut pas que nous nous mettions dans la situation des assistés qui attendent qu’un prodige transforme leur vie. De tels  hommes seraient dans une situation de dépendance qui ne ferait pas d’eux des  hommes responsables mais des hommes sans caractère en attente de libération sans jamais y parvenir.

Or Jésus veut faire de nous des hommes responsables, capables d’intervenir dans les affaires du monde pour le pousser à faire les bons choix  de société. Il veut que nous nous intéressions aux affaires de notre   prochain  pour l’aider à améliorer sa situation. Ce n’est pas en espérant ou en revendiquant une situation de notables que les choses évolueront, mais en nous mettant au service des gens qui ont besoin d’être aidés. C’est parce que nous aurons agi au niveau de la détresse des autres que nous serons reconnus par eux et que les miracles espérés pourront se produire. Ils se produisent rarement comme un don tombé du ciel mais comme le résultat de longs efforts menés patiemment par des hommes animés par Dieu au cœur même des difficultés de leurs semblables.
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N’oublions jamais que Dieu renforce nos âmes et fait de nous des fidèles aguerris, en nous invitant à devenir les serviteurs de nos semblables les plus malchanceux. Notre société ne reconnaît que rarement les mérites de ceux qui se font les serviteurs des autres, cependant c’est par leur action, souvent anonyme que les choses avancent. Jésus a une vision du monde radicalement différente de la nôtre. Il faut nous y faire.

dimanche 7 août 2016

Luc 13:22-30 - dimanche 21 août 2016



La porte étroite Luc 13: 22-30 dimanche 21 août 2016

Luc 13: 22-30

22 Il traversait les villes et les villages, et il enseignait en faisant route vers Jérusalem. 23 Quelqu'un lui dit : Seigneur, n'y aura-t-il que peu de gens sauvés ? Il leur répondit : 24 Efforcez-vous d'entrer par la porte étroite. Car, je vous le dis, beaucoup chercheront à entrer et ne le pourront pas. 25 Dès que le maître de maison se sera levé et aura fermé la porte, et que, restés dehors, vous commencerez à frapper à la porte et à dire : « Seigneur, ouvre-nous ! », il vous répondra : « Vous, je ne sais pas d'où vous êtes. » 26 Alors vous commencerez à dire : « Nous avons mangé et bu devant toi, et tu as enseigné dans nos grandes rues ! » 27 Et il vous répondra : « Vous, je ne sais pas d'où vous êtes ; éloignez-vous de moi, vous tous qui commettez l'injustice ! » 28 C'est là qu'il y aura des pleurs et des grincements de dents, quand vous verrez Abraham, Isaac, Jacob et tous les prophètes dans le royaume de Dieu, et que vous serez chassés dehors. 29 On viendra de l'est et de l'ouest, du nord et du sud pour s'installer à table dans le royaume de Dieu. 30 Ainsi, il y a des derniers qui seront premiers et des premiers qui seront derniers.

Les portes du salut se fermeront-elles à tout jamais devant les pas de celui qui cherche à se sauver par lui-même, car ce n’est pas en accumulant des actes qui sont sensés plaire à Dieu que l’on gagne son salut ! Les bonnes actions et les dévotions font partie de toutes ces actions vides d’avenir si elles n’ont d’autre but que d’attirer l’attention de Dieu sur celui qui les commet. Depuis longtemps l’Ecclésiaste a attiré l’attention du lecteur biblique pour le mettre en garde contre la vanité des entreprises humaines qui ne visent qu’à valoriser leur auteur.
Ces réflexions blasées devraient aider le lecteur à comprendre ici les propos de Jésus qui semblent confirmer l’affirmation selon laquelle celui qui cherche à être sauvé par ses propres moyens ne fait qu’entreprendre une vaine poursuite du vent qui le mène à la vanité et non pas au salut. Sans doute faut-il que celui qui cherche le salut comprenne que ce n’est pas une chose qu’il peut acquérir mais c’est une chose qui lui est donnée sans qu’il cherche à s’en saisir. Encore faudra-t-il qu’il découvre ce que signifie « être sauvé » ! Quel danger le menace-t-il pour qu’il cherche à en être sauvegardé et contre lequel il devrait être protégé ? Où donc est le péril ?
C
ette recherche est vide de sens si on ne dit pas ce que l’on redoute. Ainsi sommes-nous entourés de gens qui ont peur de quelque chose qu’ils n’arrivent pas à définir. Ce n’est pas un travers du Moyen Âge contre lequel la Réforme a essayé d’apporter des solutions, ce n’est pas un travers contemporain qui serait alimenté par l’angoisse d’un avenir incertain, cela existait déjà du temps de Jésus. Et Jésus essaye de répondre à cette préoccupation en dénonçant le mal fondé de leurs angoisses. Jésus a longuement dénoncé ces angoisses qui reposaient sur la crainte d’un jugement de Dieu. Il a voulu rassurer ceux qui au dernier jour redoutaient que les bons soient séparés des mauvais comme l’on sépare les brebis d’avec les boucs ou le blé de l’ivraie.
Si aujourd’hui la crainte du jugement s’est estompée, les hommes cherchent toujours à tirer inconsciemment profit de leurs bonnes actions si bien que quand un coup du sort les frappe, ils expriment leur incompréhension en disant qu’ils ne méritaient pas cela.
Bien que Jésus ait formulé des réponses claires, les humains ne semblent pas les entendre et cherchent inconsciemment à faire du bien pour que cela leur soit porté à crédit. Pourtant ils savent que les critères de Dieu ne sont pas les mêmes que les leurs. Jésus nous montre que pour Dieu tous les hommes entrent dans la même catégorie, car aucun ne serait capable de se tenir devant lui à cause de l’excellence de ses vertus. Cependant Dieu ne fait pas d’exception, il aime tous les hommes et propose à chacun d’entre eux de partager leur vie et de cheminer sur la même route qu’eux. Le salut n’est donc pas réservé au petit nombre des vertueux, mais il consiste à savoir que Dieu habite en nous et travaille notre esprit pour que nous nous impliquions dans un mode de vie qui lui convient.
D’emblée Jésus ouvre son propos en fermant toutes les possibilités aux hommes d’avoir accès au salut par eux-mêmes. S’il est dit dans les premiers versets que la porte est étroite pour atteindre Dieu, elle sera bien vite fermée complètement par la suite par le maître qui laisse dehors ceux qui se réclament de lui. Ceux qu’il laisse dehors lui rappellent pourtant en parlant à travers la porte fermée qu’ils ont mangé avec lui et qu’il a prêché la « bonne nouvelle » chez eux.
Il nous faut reconnaître dans ces premiers visés tous les gens de la communauté de ceux qui ont suivi Jésus et qui n’ont toujours rien compris bien qu’ils rompent le pain avec lui et partagent sa coupe. Ils ont beau communier régulièrement, ils ont beau écouter la prédication de l’Évangile, ils ont beau venir au culte le dimanche, ils continuent à ne rien comprendre. Ils se croient supérieurs aux autres parce qu’ils font partie des intimes du Seigneur. Ils ont tort. Leur compagnonnage avec le Seigneur ne les rend pas meilleurs que les autres et ne leur garantit en rien leur salut, puisque le salut ne correspond à aucun critère de vertu.
Jésus semble avoir ouvert ici la boîte de Pandore en mettant à mal tous les arguments de ceux qui se croient sauvés par leurs propres vertus. Il évoque dans cet enseignement qui paraît un peu décousu tous les personnages qui nous sont déjà rendus familiers par les paraboles qu’il a prononcées, même si elles sont citées après ce passage dans cet Évangile ou même si elles sont citées dans d’autres évangiles et pas dans celui-ci.
Il commence par parler de la porte étroite. Il fait peut être allusion à une des portes de Jérusalem qui était si étroite que l’on devait décharger les chameaux pour qu’ils puissent la franchir. Jésus s’est sans doute servi de cette particularité pour en tirer un enseignement selon lequel il était plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d' entrer dans le Royaume de Dieu. Il signifiait par là qu’aucune qualité humaine ne permettait de s’approprier le Royaume de Dieu, pas même la richesse grâce à laquelle on pouvait faire de nombreuses générosités et améliorer le sort des plus démunis.
En parlant de la porte fermée au nez des amis, ne fait-il pas allusion à la parabole des cinq vierges sages et des cinq vierges folles ? Les vierges folles qui n’ont pas d’huile ne pourront s’en procurer nulle part ni l’échanger avec leurs copines ? l’huile signifierait-elle la foi qui ne peut se monnayer en aucune façon ? Les bonnes grâces de Dieu ne s’achètent pas elle nous sont données dans une relation toute personnelle avec Dieu. Cette relation est toujours possible sauf au cas où la porte se ferme et où la vie s’arrête. A ce moment là nul ne peut dire la suite de l’histoire qui nous est suggérée par la parabole du pauvre Lazare et du riche inconscient. Ce dernier arrivé dans l’au-delà ne peut accéder à Dieu malgré sa bonne volonté, et c’est malgré lui qu’il voit Lazare en compagnie d’Abraham et des patriarches jouissant de la béatitude éternelle.
Bien évidemment ce n’est pas la fin de ces paraboles qu’il faut retenir comme enseignement, mais l’impossibilité d’acquérir par ses propres moyens les faveurs de Dieu. En faisant allusion d’une manière plus ou moins voilées à des paraboles déjà prononcées Jésus veut rappeler qu’il a de nombreuses fois prêché sur ce même type d’enseignement. Les hommes ont en effet du mal à comprendre que c’est Dieu lui-même qui vient à leur rencontre. C’est Dieu lui-même qui multiplie les occasions pour que chacun d’entre nous réalise que c’est lui qui frappe à la porte de notre cœur et qui nous sollicite pour que nous lui ouvrions.
Les valeurs sont complètement renversées. Ce n’est pas l’homme qui cherche Dieu, c’est Dieu qui le cherche. Ce n’est pas l’homme qui trouve Dieu, c’est Dieu qui trouve l’homme. L’initiative n’appartient pas à l’homme mais à Dieu. Le salut est donc l’état de celui qui sait que Dieu l’a trouvé et qui a su répondre à cette situation. On ne gagne pas son salut, mais on découvre que l’on est sauvé.
Dans ce récit, Jésus ne ferme la porte à personne pour le priver de son salut, mais il ferme la porte à toutes les mauvaises idées qui nous passent par la tête et que nous croyons bonnes pour nous placer sur le chemin de Dieu. Ce n’est donc pas pour être sauvés que nous faisons de bonnes actions, c’est parce que nous savons que nous sommes visités par Dieu et qu’il nous inspire les bonnes actions que nous faisons. Nous pouvons d’ailleurs être visités par lui sans en avoir encore pris conscience. Nous sommes donc invités à voir les choses d’une toute autre manière. C’est pour cela que l’Évangile de Matthieu commence par les béatitudes qui proposent une lecture des événements de ce monde en contradiction totale avec la réalité apparente de nos sociétés :

« Heureux les pauvres en esprit, car le Royaume des cieux est à eux, Heureux ceux qui pleurent, ils seront consolés, Heureux ceux qui sont doux car ils hériteront la terre, Heureux ceux qui on faim et soif de justice car ils seront rassasiés, Heureux les miséricordieux car ils obtiendront miséricorde, Heureux les cœurs purs car ils verront Dieu, Heureux ceux qui procurent la paix car ils seront appelés fils de Dieu, Heureux ceux qui sont persécutés, car le Royaume des cieux est à eux, Heureux serez vous lorsque l’on vous insultera, car votre récompense sera grande dans les cieux. »