mardi 14 janvier 2020

Jean 1 29-34 Jésus Fils de Dieu dimannche 19 janvier


Jean  1 :29-34 Le fils de Dieu - dimanche  19 janvier 2014


29 Le lendemain, Jean vit Jésus venir à lui, et il dit : « Voici l'Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde. 30 C'est de lui que j'ai parlé quand j'ai dit : “Un homme vient après moi, mais il est plus important que moi, car il existait déjà avant moi.” 31 Je ne savais pas qui ce devait être, mais je suis venu baptiser avec de l'eau afin de le faire connaître au peuple d'Israël. »

32 Jean déclara encore : « J'ai vu l'Esprit de Dieu descendre du ciel comme une colombe et demeurer sur lui. 33 Je ne savais pas encore qui il était, mais Dieu, qui m'a envoyé baptiser avec de l'eau, m'a dit : “Tu verras l'Esprit descendre et demeurer sur un homme ; c'est lui qui va baptiser avec le Saint-Esprit.” 34 J'ai vu cela, dit Jean, et j'atteste donc que cet homme est le Fils de Dieu. » 


De temps en temps, grâce au hasard de notre liste de lectures,  nous sommes amenés à nous poser des questions  concernant  les fondements de notre foi.  C’est  l’attribution du titre  de Fils de Dieu à Jésus qui nous interpelle aujourd'hui.  C’est ce titre qui est donné à Jésus par l’Evangéliste  Jean dès le premier chapitre  de son évangile :  « Et moi, j’ai vu et j’ai rendu témoignage que c’est lui le fils de Dieu ». Nous sommes tellement habitué à donner ce titre à Jésus que nous ne mesurons pas toujours la portée de ce qu’il recouvre.  Nous avons du mal à réaliser que ce titre lui a été donné par les hommes et qu’il ne se l’attribue pas à lui-même quand il parle de lui, à l’exception d’une seule fois où il cite une parole qu’on lui attribue, et encore utilise-t-il  dans une expression  plutôt curieuse : « parce que j’ai dit que je suis le fils de Dieu » Jean 10/ 36 Il préfère pour sa part se désigner par le titre de Fils de l’homme. Ceux qui lui donnent le titre de Fils de Dieu sont dans l’ordre : le diable, des possédés, ses disciples, Pierre, ses accusateurs,  un païen.

Il est bon de nous interroger pour savoir exactement ce que nous entendons vraiment  par ce titre quand nous l’utilisons.  Ce  sur quoi il est important de porter notre réflexion,  c’est de savoir pourquoi  nous avons privilégié cette formule, et de nous demander  ce que recouvre pour nous un tel titre.  En fait  nous répétons, selon la tradition,  ce que les Pères de l’Eglise ont dit dans les premiers siècles et ont inscrit dans les confessions de foi. Jésus a ainsi été enfermé dans cette réalité depuis les premiers temps de  l’Eglise et nous croyons que c’est une formule immuable qui s’impose d’elle-même. Nous pensons qu’elle fait partie de l’être même de Jésus. Nous l’affirmons dans nos discussions avec les juifs et les musulmans et nous restons surpris de ce qu’ils ne reconnaissent pas Jésus dans les mêmes termes que nous. Nous pensons que c’est sur ce titre que repose le point de rupture entre eux et nous. Cela reste à démontrer.

Jésus n’aurait sans doute pas aimé qu’on l’enferme dans une définition, même si elle exprime le mieux possible les critères de la foi. Tout au long de  sa vie Jésus a résisté à ce genre de tentative, c’est pourquoi il a accepté qu’on le désigne sous divers titres. Il est le Messie, le fils de l’homme, l’Emmanuel, le Nazoréen.  Il n’a voulu être vraiment ni prophète, ni rabbi, ni guérisseur, il était tout à la fois. Ainsi, même les Ecritures divergent sur l’accusation portée contre lui lors de son procès et on ne sait pas sur quel chef d’inculpation il a vraiment été exécuté. Ponce Pilate a signé à contre cœur la sentence de mort qui l’a envoyé à la potence comme roi des juifs, mais les grands prêtres ont vu en lui  un blasphémateur qui aurait mal parlé contre Dieu et contre le Temple. On précise même qu’on a eu du mal à  trouver des faux témoins capables de se mettre d’accord entre eux. Si Ponce Pilate essaye une ultime tentative pour le sauver, c’est qu’il n’y a pas de vrais critères qui l’accusent formellement.

Même dans sa mort, ses amis et ses ennemis n’ont pas su se mettre d’accord. De son vivant, Jésus s’est lui-même tourné en dérision. Il s’est plu à se présenter comme un buveur et un mangeur. Il avait une étrange liberté dans son comportement vis-à-vis de ceux qui l’entouraient si bien qu’ il était inclassable. C’est ainsi qu’il renvoie tout triste un jeune homme pieux et bon pratiquant de la Loi alors qu’il fait la fête  chez un riche péager sans mettre ses revenus douteux en cause. Il laisse une  femme aux mœurs légères le caresser en publique et flirte  avec une autre auprès d’un puits, mais il refuse que sa mère s’approche de lui.

Nous n’épuiserons pas  la liste des attitudes surprenantes qu’il a pu avoir. Le monde dans lequel il évoluait et qu’il appelait son Royaume était fait de règles dont lui seul savait les définitions. S’il interdisait le divorce, il semblait tolérer l’adultère.  Nul n’a jamais réussi à le faire entrer dans une catégorie bien définie et  il s’est bien gardé de nous aider à le faire. C’est sans doute à cause de cela que l’on s’est mis d’accord sur le titre le plus difficile à porter, celui de Fils de Dieu.

C’est au moment de sa mort que les choses paraissent le plus compliqué à comprendre. C’est pourtant elle qui nous  donnent la clé qui nous permet d’accéder à ce mystère. Alors que ses accusateurs interrogent  Jésus  sur sa véritable nature, en utilisant ce titre de Fils de Dieu en forme de  dérision, c’est un païen qui, pris d’émotion  l’utilise pour exprimer son désarroi.  L’officier romain en constatant la mort de Jésus dit alors, « Celui-ci était véritablement le Fils de Dieu ».  Mais c’était trop tard, Jésus n’était plus.  C’est ainsi que s’accomplissait  le processus qui entraînait Jésus vers la mort par obéissance à Dieu, comme si Dieu lui-même voulait qu’il passe par là. Dieu qu’il appelait son Père s’était tu, bien qu’il fût présent alors qu’il agonisait,  et que Jésus malgré tout espérait une autre fin que celle qui était en train de se produire.  « Que cette coupe passe loin de moi avait-il dit » mais  Dieu n’intervint pas. Il refusa   de modifier le cours des choses. Au moment suprême, la dernière parole de Jésus fut une parole de désespoir qui  semblait  établir  une rupture entre lui et Dieu :  « Mon Dieu mon Dieu pourquoi m’as-tu abandonné ? ».

Nous avons ici assisté à un combat de Jésus contre lui-même et contre Dieu. Même si  ce combat devait s’ouvrir sur la résurrection et sur une promesse de vie pour Jésus et pour tous ceux qui croiraient  en lui, ce n’est tout de même pas cette issue qui a  rendu  le titre de Fils de Dieu évident.

Il  est très difficile dans ces conditions de rendre compte de ce qui s’est passé ce jour-là, le 7 avril de l’an 30.  Le projet de salut de Dieu en la personne de Jésus était rendu  cependant manifeste par la résurrection.   La vie de chaque croyant entrait avec Jésus ressuscité dans l’intemporalité de Dieu et  était absorbée par le divin.  Il y avait comme un chassé-croisé entre la mort de Jésus et la nôtre, entre la résurrection de Jésus et notre propre vie. Une telle réalité nous permettait de reconnaître en  Jésus le fils de Dieu mais  destinait en même temps chacun de ceux qui croient à devenir ses frères, si bien que quand nous  disons que Jésus est fils de Dieu, nous nous impliquons dans ce grand mouvement  de résurrection qu’il a initié. Nous nous trouvons alors personnellement impliqué dans ce titre que nous lui donnons.


C’est à cause de cela  que Jésus était insaisissable de son vivant  par des gens qui n’étaient pas encore  impliqués avec lui dans le mystère de sa passion.  Le titre de Fils de Dieu ne vise pas à enfermer  la personne de Jésus dans un dogmatisme étroit, mais à donner toute sa valeur  à la vie que nous recevons de lui au travers du mystère de sa passion.

  Ce n’est pas dans nos discours théologiquement correctes que jaillit l’espérance, mais c’est parce qu’un jour Dieu a laissé sa gloire anéantie dans la mort de Jésus  pour ressurgir dans la vie nouvelle qu’il nous offre.

Depuis cet évènement un immense souffle de liberté s’est emparé de l’humanité car tout geste qui fait vivre est désormais porteur de salut pour quiconque le reçoit. C’est la vie que Dieu lui donne qui élève Jésus au rang de Fils de Dieu et il  se passe la même chose pour  nous. La résurrection fait aussi de nous, à notre tour, des enfants de Dieu.  En donnant ce titre de Fils de Dieu à Jésus, nous impliquons aussi qu’il nous concerne personnellement.



Illustrations de Georges Rouault

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