vendredi 27 septembre 2019

Luc 17/11-19 Les dix lépreux - dimanche13 octobre 2019


Les dix lépreux : Luc17: 11-19

11 Au cours de son voyage vers Jérusalem, Jésus passait entre la Samarie et la Galilée. 12 Comme il entrait dans un village, dix lépreux vinrent à sa rencontre et se tenaient à distance. Ils élevèrent la voix et dirent : 13 Jésus, Maître, aie pitié de nous ! 14 En les voyant, il leur dit : Allez vous montrer aux sacrificateurs. Et, pendant qu'ils y allaient, il arriva qu'ils furent purifiés. 15 L'un d'eux, se voyant guéri, revint sur ses pas et glorifia Dieu à haute voix. 16 Il tomba face contre terre aux pieds de Jésus et lui rendit grâces. C'était un Samaritain. 17Jésus prit la parole et dit : Les dix n'ont-ils pas été purifiés ? [Mais] les neuf autres, où sont-ils ? 18 Ne s'est-il trouvé que cet étranger pour revenir et donner gloire à Dieu ? 19Puis il lui dit : Lève-toi, va ; ta foi t'a sauvé.





Que de malheureux sur les routes du monde ! Des lépreux, des affamés, des déplacés, des malades de toutes sortes ! Quand, il arrive qu’on réussisse à répondre à la détresse de certains et à améliorer leur sort peu enviable, c’est alors que l'on considère comme normal  que les défavorisés, qui retrouvent le même sort que les autres, remercient, ceux qui les ont secourus. Tout se passe comme si ceux qui sont du bon côté devaient  être félicités  à cause  du  privilège qui leur a permis de remédier à l'injustice faite à ceux qui étaient du mauvais côté . C'est ce que ne font pas les neuf lépreux et c'est ce qui nous choque.

A la lecture de ce passage, nous constatons aussi que la société crée des clivages parmi les hommes. Même les plus pauvres peuvent trouver encore plus pauvre qu’eux, cependant quand on est arrivé au niveau le plus bas, les clivages disparaissent. L’histoire nous montre que ces dix rejetés de la société cheminent ensemble, sans aucune distinction de classe ni d'origine. Pourtant s'ils n'avaient pas été dans cette situation de détresse , l’un d’eux aurait  sans doute été rejeté par les 9 autres, car il aurait été considéré de rang inférieur en tant que Samaritain.

Mais au point de déchéance où ils étaient, ils étaient   revenus à égalité. Ils étaient condamnés à survivre dans un ghetto infâme, au risque d’être tués par les bien portants s’ils en sortaient. Pourtant ils en sont sortis, et audace suprême, ils interpellent Jésus. Même au plus profond de la déchéance, ils ont gardé une lueur d’espérance. C’est cette espérance  qui leur a donné le droit  d'interpeler Jésus et qui les a maintenus dans le monde des humains. car l’être humain est avant tout un être de désir et quand son désir disparaît, il cesse d’être humain.  Nous allons voir aussi que désir et salut font cause commune. 

On ne sait comment la renommée de Jésus est parvenue jusqu’à eux.  Ils ont bravé les interdits pour le rencontrer. Les voilà donc à portée de voix du maître au risque de leur vie, c’est dire leur désir de guérison. La petite graine de l’espérance n’est pas morte en eux. Ils tentent le tout pour le tout en espérant encore que la puissance qui émane de Jésus peut les sauver. Cette espérance qui les a poussés à agir est incontrôlée et irréfléchie. C’est une pulsion de vie, apparentée à la foi qui les anime déjà. 

Pourtant, si c’est Dieu qui agit en Jésus, pourquoi ne les a-t-il pas déjà guéris ? Et si Jésus, au nom de Dieu peut quelque chose pour eux, pourquoi ne descend-il pas dans le ghetto des lépreux pour tous les libérer ? Voilà encore une fois Dieu mis en accusation face au problème du mal auquel il n’apporte pas de réponse.

Quoi  qu’il en soit Jésus réagit comme s’ils étaient déjà guéris tous les dix, alors qu'il ne s'est encore rien produit. Il les envoie aux prêtres qui seuls sont habilités à constater leur état de guérison. Ce n'est qu'après, que la guérison se produira. Alors qu’ils faisaient la démarche, auprès de Jésus,  ils étaient toujours malades et  ils étaient encore unis dans le même destin.

Mais  à peine la lèpre les a-t-elle quittés qu’ils se séparent. Le Samaritain guéri exprime sa reconnaissance et pas les autres. Que se passe-t-il en eux pour que la différence sociale réapparaisse? En fait, nous avons là une remarque désabusée de l'Evangéliste qui exprime par ce détail que l'homme  dans son état normal à tendance  à s'opposer à ses semblables  et que rien ne peut nous séparer du péché qui est toujours prompte à se manifester. Ainsi un sur dix a su s'opposer à la pression du monde. Mais ce n'est qu'une démarche désabusée qui ne change rien à la suite. 

Nous constatons que Dieu n'est pas inactif face à une création encore inachevée. Il continue à agir  afin d’améliorer les choses. Tout se passe comme si il poursuivait son œuvre  de création  entreprise dès les origines, si bien que les dysfonctionnements de la nature restent encore apparents.

Il est clair que pour Jésus cette situation est anormale et doit être corrigée, c’est pourquoi Jésus s’adresse aux dix lépreux comme si, , ils étaient déjà guéris, comme si la guérison était de l'ordre du normal. Là où les choses se compliquent, c’est que l’un d’entre eux revient pour rendre grâce à Jésus. 

Les autres qui ont été guéris  se comportent  comme si le retour à la normale n'impliquait aucun  comportement particulier de leur part, comme si c'était un du. Pourtant, ils ont  sans doute eu  un élan de reconnaissance quand ils ont quitté l'univers des lépreux .  Ils ont considérés que leur bon état de santé était de l'ordre du normal?  En ce sens ils avaient raison.

 Dans l'évolution du monde en vue d'un un mieux être pour tous, le projet de Dieu réside dans le fait qu'il confie à des hommes compétents   la charge de travailler à la guérison des défavorisés. Leur guérison est alors le produit de deux facteurs conjugués. La compétence du praticien et le désir. C’est quand les deux sont conjugués qu’il y a espoir de guérison. Ici le praticien est Jésus et l’espoir de guérison des lépreux se manifeste par leur démarche vers les prêtres.

 Mais les hommes compétents n'agissent pas toujours en fonction du désir de Dieu. Ils n'ont pas forcément conscience que c'est Dieu qui les envoie. Or Dieu s’appuie sur la compétence des hommes pour répondre à la demande de ceux qui sont dans le besoin et le manque de bonne volonté des gens compétents le rend impuissant. 

Dans  l’histoire des lépreux, les 9 qui sont soulagés, considèrent qu'ils sont revenus dans l'ordre normal des choses et n’ont pas le désir d’aller plus loin. Ils n'ont plus qu'un désir, celui d'un retour à la normale.  Ils sont soulagés! Qu’espérer de plus ? Leur histoire s’arrête là.

 Pourtant un des dix reste insatisfait. Étant entré en lui-même, il discerne le doigt de Dieu dans l’événement qui l’a ramené à la santé. Il n’est pas évident de voir le doigt de Dieu ! Dieu se rend visible à ceux qui savent descendre en eux-mêmes et qui savent écouter sa voix. Elle leur révèle que leur situation nouvelle ne prend de sens que s’ils entrent dans le projet de Dieu  pour participer à l’évolution du monde. 




Dieu  pour se manifester a besoin que les hommes le reconnaissent. C’est ainsi qu’il agit sur le monde et prévoit son évolution harmonieuse. Il projette des solutions pour remédier aux soubresauts de la nature en mouvement,. Ces projets ne se réalisent que lorsque les hommes compétents reconnaissent que c’est Dieu qui leur désigne les causes auxquelles ils doivent s’atteler et mettre leurs compétences à leur service. C’est alors que le désir s’installe en eux et qu’ils deviennent utiles dans  son plan pour le monde. 

mardi 24 septembre 2019

Luc 17/5-10 vous êtes des serviteurs inutiles - dimanche 6 octobre 2019


Luc 17/5-10



5 Les apôtres dirent au Seigneur: «Augmente notre foi.» 6 Le Seigneur dit: «Si vous aviez de la foi comme une graine de moutarde, vous diriez à ce mûrier: 'Déracine-toi et va te planter dans la mer', et il vous obéirait.
7 »Si l'un de vous a un esclave qui laboure ou garde les troupeaux, lui dira-t-il, à son retour des champs: 'Viens tout de suite te mettre à table'?
8 Ne lui dira-t-il pas au contraire: 'Prépare-moi à souper, ajuste ta tenue pour me servir jusqu'à ce que j'aie mangé et bu; après cela, toi, tu mangeras et tu boiras'?
9 A-t-il de la reconnaissance envers cet esclave parce qu'il a fait ce qui lui était ordonné? [Je ne pense pas.]
10 Vous de même, quand vous avez fait tout ce qui vous a été ordonné, dites: 'Nous sommes des serviteurs inutiles, nous avons fait ce que nous devions faire.'»





Savez-vous ce qui s’est passé quand  Dieu  a créé le monde et qu’il y a mis l’homme ? A peine a-t-on ouvert la Bible en se posant la question que la Bible elle-même ne nous donne pas le temps de réfléchir. Elle nous raconte  qu’à peine créé, l’homme s’est mis à douter de Dieu, il s’est chicané avec sa femme et ses enfants se sont mis à se quereller, si bien que l’un d’entre eux a perdu la vie ?  Mais cette question reste latente. Quel était le projet de Dieu, même s’il a dérapé ? Au fil des chapitres les prophètes reviennent sur le problème et ils en font état dans leurs propos. Ils imaginent un univers sans violence auquel même la nature se soumettrait. L’ours et la vache mangeraient ensemble de l’herbe et les serpents seraient inoffensifs au point que les petites enfants pourraient jouer avec eux. 


Bien évidemment le lecteur ne tient pas compte de ces visions idylliques où Dieu semblerait contester sa propre création en proposant des projets contre nature qu’il n’aurait pas créés ainsi. L’ours est omnivore et il ne serait pas dans sa nature de ne manger que de l’herbe sans mourir. Le serpent quant à lui doit  se servir de son venin pour neutraliser ses proies pour pouvoir manger si bien que l’enfant ne pourrait être en sureté en présence des serpents. Bien évidemment, ceux qui veulent argumenter vont opposer couleuvres et  vipères, mais ces arguments ne mèneront pas loin. La nature créée par Dieu ne peut évoluer en harmonie sans  qu’il y ait interférence entre les divers éléments et que les herbivores soient mangés par les carnivores. En fait le vrai problème reste celui du rôle de l’homme au sein de la création, c’est lui qui devrait la maintenir en harmonie, et c’est l’équilibre qui devrait en être la règle, si bien que le monde idéal, voulu par Dieu devrait être un monde sans problème.


L’histoire d’Adam et Eve ainsi que  le récit de Caïn et Abel,  visent à montrer que dès que l’homme fait son apparition sur terre, il s’ingénie à mettre le monde en déséquilibre, à en perturber l’harmonie  et à se mettre en opposition avec Dieu en ignorant la règle fondamentale de la bonne marche des choses. Selon l’Ecriture cette bonne marche des choses  transparait dans la maxime  qui se voudrait universelle, selon laquelle « tu  dois aimer ton prochain comme toi-même », pour que tout se passe bien. C’est à cause de ce manquement que le monde dysfonctionne  depuis toujours, même si ce n’est pas cela que’ Saint Augustin appelait le péché originel qui était  l’offense à Dieu, pourtant, il semblerait plus exact que ce soit le manquement à l‘harmonie de la planète qui soit cause du dérèglement général. 


Toutes ces considérations ne nous ont que temporairement écartés des propos de Jésus. Sans doute Jésus  n’ignorait-il pas tout ce que nous avons évoqué.  Il savait tout cela quand il proposa à  ses interlocuteurs cette parabole qui nous provoque ce matin. Il n’y culpabilise personne mais se contente de faire un constat qui relève de l’évidence. Il  entre dans une logique d’équilibre et de justice.  C’est là où il rejoint  tous ceux qui parlent de dysfonctionnement de la planète, mais propose une autre approche. 


Quand on aborde ce problème, il est d’usage de culpabiliser ceux qui sont la cause de la situation qu’ils dénoncent. Dès l’origine du Christianisme, les théologiens ont très vite inscrit l’histoire des hommes dans une situation de faute en parlant du péché originel. Cette ambiance de la faute primitive nous met mal à l’aise et fausse notre raisonnement.  C’est ce à quoi nous assistons en ce moment dans  les controverses sur  les causes du déséquilibre climatique. A qui la faute disent les plus jeunes avec bonne conscience, oubliant que depuis toujours les hommes ont toujours agi en profitant pour eux-mêmes de la situation si bien que ceux qui  culpabilisent  les génération passées en les accusant de  de négligence ou d’indifférence, continuent à partager la faute collective en voyageant en avion, en utilisant des portables consommateurs de métaux rares dont l’usage réduit en esclavage les ouvriers qui les exploitent.  Il serait surprenant que ceux qui accusent les autres de négligence, soient eux-mêmes exempts  de faute  à des degrés plus ou moins différents. Nous y reviendrons.


Jésus en utilisant  ici des propos  choquants qui nous mettent mal à l’aise  ne culpabilise personne car tel n’est pas son but. Il dit simplement qu’il serait logique que celui qui ne se fatigue pas en accomplissant des travaux pénibles fasse au moins le repas pour ceux qui ont trimé au gros soleil. Il imagine que la juste distribution des tâches devrait être la base de la société. Ne serait-ce pas ainsi que Dieu aurait conçu la création ? Jésus  fait juste une suggestion car il sait  que ça ne marchera pas, même si c’est inscrit dans le projet créateur de Dieu. Sans vouloir faire un cours d’histoire, rappelons que les hommes ont déjà essayé de mettre en pratique de telles propositions, et si ça a marché dans  des petites sociétés  réduites, retirées à l’écart du monde,  ça n’a pas duré. Quand des états ont essayé d’appliquer ces mêmes principes, ils ont cru devoir s’opposer à Dieu et se sont constitués en dictatures injustes.


Jésus a donc eu raison d’envisager sa proposition comme une hypothèse irréalisable. Pourtant sa proposition relevait du bon droit et de la stricte justice, mais ça ne marche pas dans un monde dominé par l’homme. Quant à imaginer un monde  dominé par Dieu, on l’a déjà fait, c’est toujours des hommes qui y ont pris le dessus et jamais le  Dieu d’amour et du partage. C’est  dans ces travers  que sont tombées l’inquisition ou la société Genevoise de Calvin. Mais on ne discute pas  avec Jésus quand il essaye de nous faire comprendre des choses sur Dieu. Selon lui, il relèverait bien de la volonté de Dieu que les tâches entre les humains soient équitablement partagées et qu’il n’y ait plus de privilégiés pour profiter de la sueur des autres sans se mettre eux-mêmes à la tâche.


Si nous prenons en compte  tout cela et que nous contestons la société injuste dans laquelle nous évoluons, si nous décidons  de militer de toutes les façons possibles pour une société plus juste et si en faisant cela nous pensons avoir bien mérité de Dieu, c’est alors une parole déstabilisante que Jésus nous adresse : « Vous  êtes des serviteurs inutiles !» Cela veut tout simplement dire que l’efficacité et la bonne volonté que nous croyons offrir à Dieu pour défendre les causes nobles ne seraient que des éléments normaux de notre comportement. Il semblerait que cela fasse partie des attitudes normales requise par Dieu. Les actions  que nous classerions volontiers comme des  comportements louables ne sont que des applications  banales du projet créateur de Dieu pour lequel Dieu s’efforce de nous mettre en mouvement pour que nous en fassions plus encore. 




Ainsi, si nous-mêmes et nos Eglises nous engageons dans  des projets humanitaires, si nous militons avec elles pour les droits de l’homme, si nous participons à l’amélioration de la création, nous ne faisons que ce que nous devons faire, car Dieu nous a missionné pour cela. Si nous nous prenons pour des héros parce que nous agissons pour la sauvegarde de la planète, nous restons des serviteurs inutiles car nos actions  restent apparemment insuffisantes. Tout cela devrait nous entraîner à toujours nous dépasser au service de Dieu sans en espérer de compensation.

vendredi 20 septembre 2019

Luc 16/19-31 Crois-tu en Dieu? dimanche 29 septembre 2019




Evangile selon Luc - chapitre 16 versets 19 à 31

 


19 Or il y avait un homme riche qui se vêtait de pourpre et de fin lin, et qui faisait joyeuse chère, chaque jour, splendidement.

20 Et il y avait un pauvre, nommé Lazare, couché à sa porte, tout couvert d’ulcères,

21 et qui désirait de se rassasier des miettes qui tombaient de la table du riche ; mais les chiens aussi venaient lécher ses ulcères.

22 Et il arriva que le pauvre mourut, et qu’il fut porté par les anges dans le sein d’Abraham. Et le riche aussi mourut, et fut enseveli.

23 Et, en hadès, levant ses yeux, comme il était dans les tourments, il voit de loin Abraham, et Lazare dans son sein.

24 Et s’écriant, il dit : Père Abraham, aie pitié de moi et envoie Lazare, afin qu’il trempe dans l’eau le bout de son doigt, et qu’il rafraîchisse ma langue, car je suis tourmenté dans cette flamme.

25 Mais Abraham dit : [Mon] enfant, souviens-toi que tu as reçu tes biens pendant ta vie, et Lazare pareillement les maux ; et maintenant lui est consolé ici, et toi tu es tourmenté.

26 Et outre tout cela, un grand gouffre est fermement établi entre nous et vous ; en sorte que ceux qui veulent passer d’ici vers vous ne le peuvent, et que ceux qui [veulent passer] de là ne traversent pas non plus vers nous.

27 Et il dit : Je te prie donc, père, de l’envoyer dans la maison de mon père,

28 car j’ai cinq frères, en sorte qu’il les adjure ; de peur qu’eux aussi ne viennent dans ce lieu de tourment.

29 Mais Abraham lui dit : Ils ont Moïse et les prophètes ; qu’ils les écoutent.

30 Mais il dit : Non, père Abraham ; mais si quelqu’un va des morts vers eux, ils se repentiront.

31 Et il lui dit : s’ils n’écoutent pas Moïse et les prophètes, ils ne seront pas persuadés non plus si quelqu’un ressuscitait d’entre les morts.

 



 C’est ici l’histoire d’un mendiant affalé à la porte d’un notable et dont personne ne se soucie. C’est aussi l’histoire d’un notable qui après une existence d’insouciance meurt dans l’indifférence de tous et se trouve inaccessible à la miséricorde de ceux qui l’ont devancé dans le monde de l’au de-delà. Nous  sommes, nous aussi, comme ces deux hommes, dans un monde où la miséricorde fait défaut et où Dieu est le grand absent. La question qui se pose est  celle de savoir si même il y a un  Dieu.  Après ce récit peut-on te demander si tu crois en Dieu? Et si tu réponds oui, le Dieu auquel tu crois est-il celui qui est ici absent de  l’existence de Lazare ou absent du monde de l’au-delà où le riche souffre. En effet,  on n’a perçu sa présence ni dans le souci quotidien de Lazare sur terre ni dans la demande de salut du riche en enfer.


Une partie de ce  sermon sera écrite à la première personne, c’est inhabituel ! Mais en donnant une forme personnelle à mon intervention, j’aurais aussi l’audace de penser  que je parle aussi en votre nom, ou en tout cas au nom de beaucoup. En fait qu’est ce qui résonne en moi quand je dis : « je crois en Dieu » ? Pour dire cela, il faut que je me sente concerné, il faut qu’il se soit produit en moi quelque chose de suffisamment significatif pour que je puisse me sentir mis en cause d’une manière personnelle par l’existence de Dieu. Il me semble qu’à la place du « je crois, » il serait plus opportun de dire : « j’espère ».  En effet, si j’espère en Dieu, j’ouvre la porte à toute une série de possibles sans vraiment en favoriser un. Je rejoins parmi  d’autres la logique de Voltaire  selon qui, toute horloge doit avoir un horloger. Je réalise aussi que je ne suis pas seul sur terre à m’interroger de la sorte et que dans la longue liste d’expériences des croyants qui se sont posé les mêmes questions, certains sont susceptibles de m’éclairer.


Si je me penche sur moi-même et que je réfléchis aux différentes époques de ma vie, je réalise que Dieu a plusieurs fois changé de visage. A l’époque de mon enfance, le Dieu  dont on m’a parlé était tout puissant, père et confident de Jésus Christ, capable de miracle et à qui l’entièreté du monde était soumise. Par la force des choses, je croyais en lui.  Puis, le doute venant habiter mon esprit, Dieu a perdu toutes  ses qualités au point de se réduire à un questionnement constant : « Où est-il ?  Existe-t-il ? A-t-il un ascendant sur moi ? » Toutes ces questions recevaient des réponses aléatoires suivant le moment. Mais son ombre n’a jamais cessé  de m’habiter et il a gardé une présence dans mon esprit. Il s’est alors fait questionnement. Est-il l’inspirateur de Jésus Christ ? Est-il présent de la même façon dans les autres religions ? Alors que signifie vraiment pour moi « croire en lui ? »


A l’Eglise on m’a dit que Dieu parlait aux hommes. En fait, à l’Eglise je n’entends que  la voix des pasteurs qui racontent leurs propres expériences sur Dieu  dans des  sermons plus ou moins ennuyeux. Le cas échéant, ils font de la philosophie. Mais jamais, c’est le son de la voix d’un Dieu quel qu’il soit que j’entends.   Si  je me réfugie en moi-même et que j’écoute ce qui s’y passe, je ne perçois que le murmure que produisent mes propres réflexions, mais ce n’est que moi-même qui parle en moi et je n’aurais pas l’outrecuidance de confondre sa voix avec la mienne. Je  réalise alors que j’ai besoin de Dieu sans vraiment savoir comment j’ai besoin de lui. Aurais-je alors la faiblesse d’inventer sa présence pour me rassurer, si bien que si je crois en lui, c’est à ma propre invention que je croirais.  Je n’ai rien exprimé d’original, j’ai seulement fait l’inventaire des choses qui se passent en moi, quand  on me dit « crois-tu en Dieu ? »  Mais cette réflexion ne me lâche pas, elle se fait parfois discrète mais vient me hanter au moment où je ne m’y attends pas. Il est donc évident que je vais poursuive mon investigation au sujet de Dieu.


Je réalise que ça m’agace quand on essaye de me dire Dieu. C’est ce qui se passe quand on récite la confession de foi au cours du culte. Sans doute suis-je le produit cartésien de cette société qui est la nôtre. Je n’aime pas qu’on me dise ce que je dois croire et comment je dois croire. Si l’expérience des autres est susceptible de m’éclairer, elle n’est pas normative. Je ne sais donc pas si je crois en Dieu, mais je sais que cette question est lancinante et qu’elle me pousse à cheminer continuellement  en compagnie de  cette idée  de « croire en  Dieu » qui occupe des phases plus ou moins significatives dans les divers moments de ma vie.


Je me tourne alors vers Jésus, cet infatigable témoin de Dieu, et je me demande si l’un  des buts de son enseignement  n’était pas de nous amener à ce point de notre réflexion ou nous réalisons que Dieu est insaisissable pour un esprit humain rationnel. On découvre que l’on n’a pas vraiment de nom à lui donner. On rejoint alors la tradition biblique où il est dit que son nom est imprononçable. Il nous faut toujours repartir de là si on veut avancer dans cette recherche de Dieu. Il nous est alors dit que l’homme est  fait à son image. C’est cette image de chercheur qu’il nous est donné de saisir  quand nous cherchons Dieu. Nous cherchons Dieu, car c’est lui qui nous cherche. Ceux qui vivent cette même expérience  se trouvent alors engagés dans cette recherche lancinante de Dieu qui les conduit à se chercher eux-mêmes. Nous sommes alors renvoyé vers un ailleurs où est Dieu, où nous nous retrouvons nous-mêmes  et où en compagnie de Dieu nous ne sommes plus seuls. En poursuivant ma réflexion, je constate que je suis insensiblement passé du « je » au « nous ». Ne serait-ce pas à cause du fait que Dieu ne peut prendre de réalité que si celle-ci elle est partagée avec les autres ?


En revenant à cette parabole que Jésus a volontairement marquée de l’absence de Dieu, on ne peut pas ne pas se poser la question sur le pourquoi de cette absence. Peut-être y est-il quand même, mais où se cache-t-il ? Il est clair qu’il n’a pas sa place dans le monde de la mort, or le monde de la mort occupe tout ce texte. Il n’y a aucune vie dans la maison à la porte de la quelle se tient Lazare qui par sa passivité n’aspire pas à vivre. Le riche n’a même pas de nom car il n’a pas d’existence. Replié sur lui-même et sur sa propre satisfaction, il n’a pas de vie dans le monde des vivants. Lazare n’a pas davantage de vie dans l’au-delà, sa présence passive  dans le sein d’Abraham ne le  change pas de l’existence qu’il menait avant.  Dieu est absent de ce texte, car il n’y a pas d’aspiration à vivre. 


Le visage de Dieu se précise cependant. On ne peut le trouver que si on devient soi-même chercheur de vie, non pas pour soi, mais pour tout autre qui est appelé à la partager.  L’espérance apparaît dans ce passage quand le riche  éprouve de l’intérêt  pour Lazare. Le texte dit qu’il est trop tard. Telle est la réponse d’Abraham !  Mais est-il vraiment trop tard  pour Dieu? Dans les paraboles rapportées par Jésus, la réponse  à la question qu’elles posent est rarement dans le texte, elle nous pousse à la trouver au-delà du texte si nous nous donnons la peine d’y projeter notre réflexion. Au-delà du texte, n’est-ce pas le lieu où est Dieu. Notre recherche de Dieu se prolonge alors au-delà de ce texte. Elle trouve peut-être sa réponse dans le fait qu’une espérance se met à naître  dans le moment  ou  les deux hommes s’étant regardés le riche peut se mettre  à espérer. C’est en tout cas sur ce  terrain que l’on peut trouver Dieu.


 Aujourd’hui, l’avenir du monde et de  cette planète n’a de sens que si notre recherche de Dieu nous entraîne à regarder les autres hommes et à produire de la vie et de la vie en abondance. Je crois alors à ce Dieu qui donne à la vie avec lui la dimension de l’espérance.

vendredi 13 septembre 2019

Luc 15/1-13 Dieu et l'argent - dimanche 22 septembre 2019


Luc 16/1-13


Parabole de l'intendant infidèle


16 Jésus dit aussi à ses disciples: «Un homme riche avait un intendant. On vint lui rapporter qu'il gaspillait ses biens.
2 Il l'appela et lui dit: 'Qu'est-ce que j'entends dire à ton sujet? Rends compte de ta gestion, car tu ne pourras plus gérer mes biens.'
3 L'intendant se dit en lui-même: 'Que vais-je faire, puisque mon maître m'enlève la gestion de ses biens? Travailler la terre? Je n'en ai pas la force. Mendier? J'en ai honte.
4 Je sais ce que je ferai pour qu'il y ait des gens qui m'accueillent chez eux quand je serai renvoyé de mon emploi.'
5 Il fit venir chacun des débiteurs de son maître et dit au premier: 'Combien dois-tu à mon maître?' 6 Je dois 100 tonneaux d'huile d'olive', répondit-il. Il lui dit: 'Voici ton reçu, assieds-toi vite et écris 50.'
7 Il dit ensuite à un autre: 'Et toi, combien dois-tu?' 'Je dois 100 mesures de blé', répondit-il. Et il lui dit: 'Voici ton reçu, écris 80.'
8 Le maître fit l'éloge de l'intendant malhonnête à cause de l'habileté dont il avait fait preuve. En effet, les enfants de ce monde sont plus habiles vis-à-vis de leur génération que ne le sont les enfants de la lumière.
9 »Et moi, je vous dis: Faites-vous des amis avec les richesses injustes, afin qu'ils vous accueillent dans les habitations éternelles lorsqu'elles viendront à vous manquer.
10 Celui qui est fidèle dans les petites choses l'est aussi dans les grandes, et celui qui est malhonnête dans les petites choses l'est aussi dans les grandes.
11 Si donc vous n'avez pas été fidèles dans les richesses injustes, qui vous confiera les biens véritables?
12 Et si vous n'avez pas été fidèles dans ce qui est à autrui, qui vous donnera ce qui est à vous?
13 Aucun serviteur ne peut servir deux maîtres, car ou il détestera le premier et aimera le second, ou il s'attachera au premier et méprisera le second. Vous ne pouvez pas servir Dieu et l'argent.»



Nous voilà plongés dans une affaire  de finances pas nettes. C’est l’histoire d’un magouilleur en eau trouble qui entraîne dans ses combines des gens dont il pourra se servir en cas de nécessité si le besoin s’en fait sentir. Dans son aventure, et c’est là une des clés de l’énigme. Il il n’a pas encore réalisé qui se cache derrière le maître  qu’il est en train de gruger et qu’il tente de tromper encore davantage pour sortir du mauvais pas où sa nature perverse l’a entraîné.  Cependant rien n’échappe à son maître, c’est ce que nous allons voir et celui-ci, contrairement aux apparences n’agit ni comme un grand naïf ni comme un être vulnérable.  


Si Jésus lui prête  des propos qui l’entraînent à féliciter son intendant malhonnête pour son art de se sortir d’affaire, il n’est dit nulle part qu’il l’approuve. Il y a des mystères dans tout cela dont il faudra soulever le voile. En fait ce qui doit être  bien clair ici, c’est que chacun de nous doit se reconnaître dans ce gérant indélicat.  Le personnage malhonnête ici,  c’est moi, c’est toi. N’allez pas croire que Jésus va couvrir ici toutes nos manigances frauduleuses et nos doubles comptabilités douteuses sous prétexte que l’argent relèverait de la responsabilité de Mammon et non de la sienne. Ce serait se fourvoyer dans une théologie dualiste  trop facile.


N’oublions pas que Jésus se situe dans un monde où tout appartient à Dieu et qu’il en a fait de chacun de nous des gestionnaires. Il nous entraîne dans cette réalité dont nous n’avons pas toujours conscience.  Cette parabole nous parle donc d’un monde dont Dieu est le maître et il nous demande de nous reconnaître nous-mêmes dans le portrait de cet intendant qui s’attribue des avantages frauduleux en les empruntant à son maître. Quel que soit notre fonction dans ce monde  nous  empruntons à Dieu tout ce que nous prétendons nous appartenir. Tout ce que nous utilisons à notre profit, c’est à Dieu que nous le prenons. Voilà l’univers de cette parabole.


Quand l’intendant se fait des amis en truquant les  comptes de son maître, il  fait des générosités avec les biens de celui-ci. Tout se passe comme si c’était le maître lui-même qui lui acquérait des amis avec son propre argent. Nous sommes  placés dans la même situation que celui qui croit s’approprier les faveurs de Dieu en faisant des bonnes œuvres, comme s’il ignorait que les générosités qu’il fait, il les fait avec  ce qui appartient à Dieu. 

Quand nous faisons les généreux, c’est avec les biens de Dieu que nous le faisons, c’est comme si c’était Dieu lui-même qui nous utilisait pour le faire. Nous comprenons alors le jugement porté par le maître de la parabole qui trouve judicieuse l’attitude de l’intendant qui croit détourner de l’argent de son maître, alors que c’est  en réalité le maître qui est son pourvoyeur en amitié et qui assume la responsabilité de ce qui a été fait avec ses biens ?  


C’est à cause de cela que l’intendant  court un gros risque car il encourt la colère de son maître et c’est pour  s’en épargner les conséquences qu’il a entrepris toute cette machination.  De même chacun de nous encourt la colère de Dieu pour laisser se faire les injustices dont nous sommes témoins dans ce monde sans utiliser les biens  que Dieu met à notre disposition pour le faire. C’est cette colère que nous risquons de subir,  non pas pour avoir fait ce que nous aurions dû faire avec ce que Dieu a mis à notre disposition, mais pour ne l’avoir pas fait.  C’est en cela que réside notre salut. 


Regardons alors, comment cela se passe dans la parabole. Le maître ici ne se met pas en colère. S’il relève l’intendant de ses fonctions, il lui laisse du temps pour présenter ses comptes et l’intendant en profite  pour le duper en se faisant malhonnêtement des amis  pour s’en sortir. Mais par la force des choses et par le biais de la duperie, c’est son maître qui lui procure ses amis, et qui malgré lui, lui offre cette porte de sortie.  En écoutant les propos de son maître, il n’a plus qu’à reconnaître que  son maître qui assume ce qu’il a fait n’est pas un naïf qui s’est fait avoir mais qu’il  est d’une bonté inimaginable et qu’il le sauve en lui procurant l’amitié dont il avait besoin.


En laissant se faire les choses et en reconnaissant les avantages que l’intendant reçoit de  cette situation nouvelle, il lui offre une solution  qui devrait susciter sa reconnaissance. L’intendant n’a plus qu’à se jeter à ses pieds avec reconnaissance ! Le fera-t-il ? Les paraboles laissent souvent la réponse en suspens en nous offrant la liberté de réagir selon la manière dont notre foi naissante nous pousse à le faire. Tel est le Dieu auquel nous avons à  faire.  Il nous laisse utiliser ses biens en nous laissant croire  que ce sont les nôtres, il nous laisse croire, pour un temps de réflexion, ou de maturation de notre foi,  que  nous gagnons des mérites en utilisant ce qui lui appartient. Il n’attend plus qu’une chose, et il nous laisse libres de le faire,  c’est que nous comprenions les générosités qui sont les siennes en nous laissant du temps pour comprendre. Ainsi nous pouvons grandir dans la foi  grâce à nos fausses bonnes actions dont il est à l’origine malgré nous. Il attend patiemment notre conversation qui sera l’expression de notre amour pour lui.


Jésus a profité d’une affaire d’argent sale pour que nous comprenions quel type de relation nous devons cultiver avec Dieu. Dans cette parabole, il est souligné que l’attitude du maître est conditionnée par les liens d’amitié qui sont créés entre  l’intendant et ceux dont il  fait ses complices en duplicité. Même si tout cela est lié à une magouille compromettante dans laquelle il entraîne les débiteurs de son maître, c’est le lien d’amitié qu’il faut retenir. Certes tout le monde y trouve son compte et la morale n’est pas sauve. Mais même des chemins tortueux peuvent mener à Dieu. Dieu ne se soucie pas du fait que des moyens peu acceptables ont amené certains hommes à lui. Dans  tous les cas c’est au cœur que frappent les éléments déclenchant qui à partir des bonnes relations provoquées par les hommes mènent à Dieu. L’homme que je suis ou que vous êtes est pécheurs, ses sentiments sont flous et ses projets ne sont pas toujours nets, malgré tout Dieu ne dédaigne pas ces instruments médiocres que nous sommes pour gagner à lui ceux que nous côtoyons.


Quand on aborde cette parabole on cherche la leçon de morale qu’elle dissimule. Il n’y en a pas.  Ce monde où on espère voir Dieu à l’action est un monde de magouilleurs et on réalise que  Dieu ne répugne pas à utiliser nos magouilles pour que le monde trouve la direction où il le conduit.


Il ne faut pas chercher dans cette parabole, une règle qui aiderait les banquiers à gérer sainement le monde de la finance, à moins qu’ils ne  réalisent que tout est à Dieu et que rien ne leur appartient, pas même leurs bénéfices et leurs dividendes. Il n’y a pas d’argent propre ou d’argent sale puisque tout appartient à Dieu et que la seule manière de le gérer et de l’utiliser pour aller  dans le sens de l’harmonie du monde. C’est ainsi  que la vie de tous sera possible sur cette terre et que tout homme pourra devenir grâce aux biens que l’on ne possède pas vraiment, l’ami de tous les hommes.


Quant à cet argent que notre société continue à appeler de l’argent sale, il n’y a qu’un seul moyen de le blanchir c’est de s’en faire des amis en le libérant  des lieux secrets où il se trouve pour qu’il contribue à créer des amitiés entre les hommes et que Dieu puisse  regarder l’humanité s’épanouir.
















lundi 9 septembre 2019

Luc 15/1-32 la parabole des deux fils dimanche 15 septembre 2019


Luc 15/1-32

Paraboles de la brebis et de la pièce perdues

1 Tous les péagers et les pécheurs s’approchaient de Jésus pour l’entendre.
2 Les Pharisiens et les scribes murmuraient et disaient : Celui-ci accueille des pécheurs et mange avec eux.
3 Mais il leur dit cette parabole
4 Quel homme d’entre vous, s’il a cent brebis et qu’il en perde une, ne laisse les 99 autres dans le désert pour aller après celle qui est perdue, jusqu’à ce qu’il la trouve
5 Lorsqu’il l’a trouvée, il la met avec joie sur ses épaules.
6 et, de retour à la maison, il appelle chez lui ses amis et ses voisins et leur dit : Réjouissez-vous avec moi, car j’ai trouvé ma brebis qui était perdue.
7 De même, je vous le dis, il y aura plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se repent, que pour 99 justes qui n’ont pas besoin de repentance.
8 Ou quelle femme, si elle a dix drachmes et qu’elle perde une drachme, n’allume une lampe, ne balaie la maison et ne cherche avec soin, jusqu’à ce qu’elle la trouve
9 Lorsqu’elle l’a trouvée, elle appelle chez elle ses amies et ses voisines et dit : Réjouissez-vous avec moi, car j’ai trouvé la drachme que j’avais perdue.
10 De même, je vous le dis, il y a de la joie devant les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se repent.


Parabole du fils perdu et de son frère

11 Il dit encore : Un homme avait deux fils.
12 Le plus jeune dit à son père : Mon père, donne-moi la part de la fortune qui doit me revenir. Et le père leur partagea son bien.
13 Peu de jours après, le plus jeune fils rassembla tout ce qu’il avait et partit pour un pays lointain où il dissipa sa fortune en vivant dans la débauche.
14 Lorsqu’il eut tout dépensé, une grande famine survint dans ce pays, et il commença à manquer (de tout).
15 Il se lia avec un des habitants du pays, qui l’envoya dans ses champs faire paître les pourceaux.
16 Il aurait bien désiré se rassasier des caroubes que mangeaient les pourceaux, mais personne ne lui en donnait.
17 Rentré en lui-même, il se dit : Combien d’employés chez mon père ont du pain en abondance, et moi ici, je péris à cause de la famine.
18 Je me lèverai, j’irai vers mon père et lui dirai : Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi
19 je ne suis plus digne d’être appelé ton fils ; traite-moi comme l’un de tes employés.
20 Il se leva et alla vers son père. Comme il était encore loin, son père le vit et fut touché de compassion, il courut se jeter à son cou et l’embrassa.
21 Le fils lui dit : Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi, je ne suis plus digne d’être appelé ton fils.
22 Mais le père dit à ses serviteurs : Apportez vite la plus belle robe et mettez-la lui ; mettez-lui une bague au doigt, et des sandales pour ses pieds.
23 Amenez le veau gras, et tuez-le. Mangeons et réjouissons-nous
24 car mon fils que voici était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé. Et ils commencèrent à se réjouir.
25 Or, le fils aîné était dans les champs. Lorsqu’il revint et s’approcha de la maison, il entendit de la musique et des danses.
26 Il appela un des serviteurs et s’informa de ce qui se passait.
27 Ce dernier lui dit : Ton frère est de retour, et parce qu’il lui a été rendu en bonne santé, ton père a tué le veau gras.
28 Il se mit en colère et ne voulut pas entrer. Son père sortit pour l’y inviter.
29 Alors il répondit à son père : Voici : il y a tant d’années que je te sers, jamais je n’ai désobéi à tes ordres, et à moi jamais tu n’as donné un chevreau pour me réjouir avec mes amis.
30 Mais quand ton fils que voilà est arrivé, celui qui a dévoré ton bien avec des prostituées, pour lui tu as tué le veau gras
31 Toi, mon enfant, lui dit le père, tu es toujours avec moi, et tout ce que j’ai est à toi
32 mais il fallait bien se réjouir et s’égayer, car ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé.



Parabole des  deux frères :


Pour nous l’avenir consiste à  aller  de l’avant  vers une aventure  que l’on espère favorisée par notre bonne étoile. Nous avons pour bagage l’héritage que la vie nous a donné, et aussi tous les acquis que notre éducation nous a permis d’obtenir. Notre but est de réussir notre carrière  mieux que son père si possible. Tel est le destin qui s’ouvre devant chaque individu. Qu’il réussisse ou qu’il échoue dans ses projets, il essaye au mieux d’accomplir sa vie.


 C’est cela,  la philosophie de la vie, universellement partagée, mais ce n’est pas cela qui nous est raconté ici.  Ici, nous avons  l’histoire d’un jeune homme qui croit que l’audace et l’ambition lui permettront de mettre  les faveurs du destin de son côté sans s’en donner la peine. Tout lui est dû d’avance dans ce monde où tout lui semble être déjà acquis.


A vue humaine, il part perdant. Son maître mot, c’est la jouissance. Parti perdant, il ne saurait revenir gagnant, mais il n’a nullement l’intention de revenir vers un passé qu’il rejette apriori. Curieuse façon de penser disons-nous.  Mais c’est la nôtre aussi ! Nous allons voir que c’est la manière d’agir de beaucoup de gens  qui vivent  dans ce  monde où nous sommes. Ils  avancent à l’aveugle, au mépris des réalités du monde qui les entoure. Ils usent des  êtres et des choses comme si elles constituaient une réserve  inépuisable de profits.


Jésus raconte cette histoire, comme s’il avait senti venir à l’avance le dérapage de notre société moderne qui continue à ne pas voir le décalage qu’il y a entre la réalité dans laquelle elle est et ses ambitions. Elle continue à croire que l’on peut profiter de tout et que l’on peut avancer sur le chemin de la vie  sans se soucier des autres et des choses. Sans doute, tous les habitants de la planète  n’ont pas fait ce pari, mais il ressort cependant, que c’est le constat alarmant qui est fait sur la situation de notre monde et qu’il ne doit laisser personne indifférent. Nous recevons ces propos non pas comme une leçon de morale qui serait adressée à ceux qui égoïstement méprisent Dieu et les autres et qui se croient  dispensés d’agir en fonction de leur prochain, mais comme une allégorie qui concerne l’évolution de notre société et qui nous amène à constater  l’état d’échec dans lequel nous nous situons actuellement.


Il s’est produit ce qui était apparemment prévisible. L’insouciance avec laquelle les hommes ont usée de la planète, n’a pas prévu que  notre mode de fonctionnement entrainerait un dérèglement général. Nous nous servirons donc de cette parabole comme d’un fil conducteur pour aider ceux qui veulent réfléchir à la situation et qui culpabilisent les générations passées en les accusant d’égoïsme, d’insouciance et de surdité mentale.


Nous commencerons à réfléchir à cette parabole en la prenant à l’envers. Nous nous sentirons d’abord  interpelés par le frère ainé.  Il n’aurait sans doute pas fait ce qu’a fait son cadet et il se sert  de son bon droit pour  faire peser sur lui une amère critique. Il se croit plus sage et plus intelligent que lui et croit sa critique frappée au coin du bon sens. Il pense que son frère a bien mérité ce qui lui arrive et ne comprend pas pourquoi il devrait en assumer les conséquences. Par son attitude de blocage, il jette le désarroi dans le projet de vie familiale que le Père essaye de mettre en place. Il refuse toute attitude de collaboration avec lui et rend les possibilités de vie avenir improbables.


Le plus jeune quant à lui  n’a pas besoin qu’on lui donne de leçon de morale pour comprendre le drame dans lequel il s’est fourvoyé. Il comprend vite qu’aucune solution n’est vraiment possible sans la bonne volonté bienveillante des autres. Le retour à la case départ demande une transformation totale de son comportement appuyé sur  la collaboration de ses semblables. Il doit troquer ses positions de possédant contre celle de serviteur.


S’il change son regard sur la réalité des choses, peut-être cela ne sera-t-il pas trop tard ? Pour son ainé, il n’y a plus d’issue pour le plus jeune, puisqu’il a tout gâché, il n’a plus sa place dans l’entreprise familiale. Ce n’est donc pas celui qui s’est mal conduit qui aggrave les choses, c’est celui qui n’a rien fait. Ne serait-il pas le collapsologue de service qui se cantonne dans une attitude d’accusateur, plutôt que dans celle de celui qui cherche par tous les moyens comment cela pourrait aller mieux.


C’est alors que le Père intervient, on l’a un peu laissé de côté, comme souvent on laisse de côté ceux qui, peut-être, apportent les bonnes solutions aux problèmes. Son souci est de constater que tel qu’il est engagé, l’avenir n’est pas possible. Les deux fractions rivales doivent renoncer à ce qui les opposent si on veut avancer vers un avenir possible : le fils ainé avec l’arrogance de celui qui croit avoir raison et le cadet avec  sa demande d’espérance possible. Face à  cette double demande, il faut que quelque chose de nouveau se produise. 


C’est sur un air de fête que se profile la solution, c’est ainsi que le Père essaye de la mettre en œuvre.  Mais si le frère en détresse, quelle que soit la cause de sa situation espère quelque chose pour vivre, il faut que l’ainé entre dans la danse et modifie à son tour son attitude.


Dans tout cela le Père ne reste pas inactif en face des deux fils qui eux ne font rien. L’un espère, le second boude. Le père ne  cesse de faire  des vas et viens. Il court vers l’un et sort même du domaine pour convaincre l’autre. Il cherche des arguments pour que la mort ne s’empare pas du plus faible du moment, car il est impératif qu’il vive et l’autre ne peut rester les bras ballants en tentant de conserver ses privilèges que la situation est en train de lui reprendre.


Evidemment, en appliquant cette parabole à notre situation actuelle, nous réalisons que les  choses ne sont pas vraiment comparables car les victimes du dérèglement écologique  ne sont pas forcément coupables, comme l’est le fils cadet du récit, mais vous remarquerez qu’il n’est tenu ici aucun compte de la culpabilité de qui que ce soit. Ce qui est important c’est que celui qui est en danger ne le soit plus, la responsabilité des uns et des autres est une autre question et n’est pas abordée par le père qui préconise que la vie l’emporte sur toute autre solution. Ce qui est important c’est de rejoindre le père et d’agir activement pour débloquer la situation.


On comprend ici que la parabole propose de voir dans l’action du  Père une image de Dieu. Il n’est pas un Dieu qui agirait miraculeusement pour remettre les choses en ordre.  Le Dieu qu’on identifie ici au Père, c’est celui qui pousse les uns  et les autres  à se comporter  de telle sorte que  ce soit la vie qui reprenne le dessus. La responsabilité des uns et des autres ne jouent aucun rôle car tous, quelle que soit leur situation doivent changer leur comportement afin que l’harmonie s’installe là où le chaos cherche à s’imposer à ceux qui ne veulent pas modifier leurs comportement à l’image de l’ainé qui joue ici le rôle principal.




samedi 7 septembre 2019

Luc 14/25-33 Quel est le Dieu de Jésus? dimanche 8 septembre 2019




Texte de 2010 revue et corrigé



Luc 14: 25



De grandes foules faisaient route avec lui. Il se retourna et leur dit :26 Si quelqu'un vient à moi et ne déteste pas son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères, ses sœurs et même sa propre vie, il ne peut être mon disciple. 27 Et quiconque ne porte pas sa croix pour venir à ma suite ne peut être mon disciple.



28 En effet, lequel d'entre vous, s'il veut construire une tour, ne s'assied pas d'abord pour calculer la dépense et voir s'il a de quoi la terminer, 29 de peur qu'après avoir posé les fondations, il ne soit pas capable d'achever, et que tous ceux qui le verront ne se moquent et ne disent : 30 « Cet homme a commencé à construire, et il n'a pas été capable d'achever.»

31 Ou bien quel roi, s'il part en guerre contre un autre roi, ne s'assied pas d'abord pour se demander s'il peut, avec dix mille hommes, affronter celui qui vient au-devant de lui avec vingt mille ? 32 Sinon, tandis que l'autre est encore loin, il lui envoie une ambassade pour demander les conditions de paix. 33Ainsi donc, quiconque d'entre vous ne renonce pas à tous ses biens ne peut être mon disciple. 






La tradition a rendu populaire une certaine image de Jésus que Théodore Botrel parmi tant d’autres a chanté dans le folklore breton. Jésus y est présenté comme le doux Sauveur à barbe blonde avec de grands yeux doux. Le cinéma américain a contribué pour sa part à vulgariser cette image. Les peintres classiques n’ont pas échappé à ce canon de beauté pour présenter le visage du Seigneur. Mais ce serait mal lire l’Evangile que de voir Jésus sous ce seul portrait. Le texte que nous avons lu nous présente un autre aspect de Jésus, plus rude, d’où la tendresse est absente. Serait-il plus conforme à celui que les spécialistes actuels tentent de vulgariser  en faisant de Jésus un homme de taille moyenne , brun  au regard fuyant,( je vous livre ici 2 portraits publiés dans la presse)  Le rôle de Jésus est avant tout celui de nous faire découvrir Dieu. Ici il le fait sans ménagement car le Dieu dont il est le témoin est différent de celui que Jésus lui-même nous a habitué à découvrir dans ses propos.






Qui est Dieu pour vous ? En quoi votre existence est-elle affectée par la réalité de Dieu ? Comment agit-il en vous ? Ces questions tant de fois répétées, tant de fois formulées nécessitent qu’on ose se les poser au moins une fois de temps en temps. Chacun y répondra mentalement et à sa façon. On pourra dire que Dieu est une force qui vient d’en haut et qui s’empare de nous, qui habite notre âme et notre esprit. On dira aussi que c’est une certitude rassurante sans laquelle notre vie serait ballottée au rythme des hasards dans une société globalisante. Nous dirons aussi que Dieu donne du sens à notre être. Nous nous garderons de vérifier si notre réponse est conforme à la théologie en vigueur dans notre église. Mais nous savons fondamentalement, que nous ne chercherions pas Dieu s’il ne nous avait déjà trouvés, et que c’est lui qui nous pousse à le chercher. Nous percevons intuitivement qu’il y a un lien entre lui et nous et nous croyons qu’il a quelque chose à voir avec notre existence dans ce monde.

Il est donc normal que nous cherchions Dieu, sans pour autant jamais le trouver complètement. Écoutez ce que dit le poète Kalil Gibran : « Contemplez le ruisseau, écoutez sa mélodie. Éternellement, il sera en quête de la mer, et bien que sa recherche n’ait pas de fin, il chante son mystère de crépuscule en crépuscule. Puissiez-vous chercher le Père comme le ruisseau cherche la mer » (1)



Nous savons que Dieu a laissé son empreinte en nous, c’est pourquoi Jésus nous aide à le trouver. Mais ce Dieu que Jésus nous aide à trouver est très différent de tout ce que l’on a dit, car il nous devient personnel. Dans le texte de ce matin Jésus s’implique dans notre recherche et nous provoque volontairement. Il ne s’encombre d’aucun a priori, et d’une manière surprenante il saute à pieds joints par-dessus les conventions. Il parle de haine alors que nous nous attendons à ce qu’il parle d’amour. « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » nous plaisons-nous à répéter après lui et nous nous appuyons sur l’Evangile de Jean pour dire que Dieu est amour.



Aujourd’hui, ce n’est pas le cas, Jésus recommande de haïr ses proches, son père, sa mère ses frères et ses sœurs sa femme et les autres. Il n’a aucune parole rassurante pour mettre un baume sur nos inquiétudes. Pour nous stimuler, il nous promet de porter notre croix, comme W. Churchill promettait à son peuple du sang et des larmes. Il ouvre devant nous une perspective de souffrance et de mort.



Ainsi provoqués, nous allons pouvoir exercer notre sagacité. En fait, le jeu en vaut la chandelle. Jésus a l’intention de nous faire sortir des chemins battus. Il nous montre que Dieu n’a rien à voir avec les critères soigneusement recensés par les religions. Dieu pour lui ne se trouve pas dans un code de morale. Il est ailleurs que dans nos définitions théologiques. Dieu se situe avant tout dans une relation avec nous. Comme il a sacrifié sa divinité pour venir jusqu’à nous, il s’attend à ce que nous lui consacrions notre humanité.



Il nous propose sagement de faire le bilan de notre foi en nous racontant cette parabole banale du roi qui compte ses hommes, puis qui compte les hommes de l’adversaire et qui négocie la paix en fonction de ses propres forces parce qu’il préfère se soumettre plutôt que de risquer un combat perdu d’avance. La paix dans ce contexte devient un accord de moindre mal, un « gentleman agreement » que l’on a du mal à fonder théologiquement. Or nos vies ressemblent la plupart du temps à ces côtes mal taillée où l’on essaye de donner à chacun sa part. Dieu y compris. Nous composons avec Dieu, avec les hommes, avec notre vertu, avec le temps, si bien que notre existence ne ressemble plus à rien si non à un « melting pot » sans goût ni grâce ni saveur ni prétention. Il nous faut donc changer notre approche concernant Dieu.



En quelques phrases, Jésus a mis à mal tout notre édifice spirituel, pour que nous nous efforcions de le reconstruire. Nous n’osons même pas continuer notre lecture de l’Évangile de peur d’être encore plus déstabilisés car ajoute Jésus, «quiconque ne renonce pas à tout ce qu’il possède ne peut être mon disciple ». Il faut comprendre clairement que cela veut dire qu’on ne peut pas découvrir Dieu en vérité sans abandonner tous les préjugés et tous les acquis de la société. Le chercheur de Dieu doit donc aller à contrecourant d’une société qui centralise tout sur l’homme.

Jésus met notre manière de raisonner totalement en cause en nous rappelant qu’avec Dieu, c’est tout ou rien. Pas question de partager prudemment entre Dieu et le monde. Pas question de demander à Dieu de se charger de notre âme d’une part et de choisir de gérer nous-mêmes et à notre gré nos autres activités. Il nous rappelle ainsi que Dieu est envahissant.




Jésus contemple alors la foule qui le suit comme un troupeau bêlant. Il nous décrit comme des moutons cherchant à être pris en charge par un bon berger. Ils cherchent seulement un confort spirituel auprès d’un maître à la mode qui paraît pour lors efficace. Jésus renonce à se laisser manipuler par eux, il n’est pas un gourou rassurant qui profiterait des avantages de ses dons de guérisseur et de prédicateur pour s’assurer une notoriété. Il provoque la foule dont nous faisons tous partie pour que chacun sorte de lui-même et assume le poids de la croix qu’il doit porter.

Vous voulez être rassurés sur l’avenir de votre âme, vous voulez une religion facile qui soit distincte des religions traditionnelles. Vous voulez échapper aux tourments de la vie et être les privilégiés de Dieu, vous ne voulez plus être malades et vous voulez manger tous les jours à votre faim ! Mais vous valez mieux que cela, vous n’êtes pas des moutons promis à l’abattoir. Vous avez en vous la capacité d’être des rebelles, de vivre une passion dévorante, cette passion peut se vivre avec Dieu, mais elle réclame une rupture.


Dans l’Écriture, la rupture est parfois féconde et créatrice, car elle demande à être habitée par un esprit inventif. La rupture c’est la distanciation nécessaire qu’il nous faut prendre par rapport aux conventions sociales qui nous enferment dans des catégories ou des préjugés. Il n’est donc pas étonnant que Jésus prenne la famille pour cible, parce qu’elle a un pouvoir contraignant et enfermant sur les individus. Pour que Dieu puisse s’emparer de nous il ne faut être retenu par aucun autre intérêt. C’est ainsi libérés et placés tout entier sous le charme de Dieu que nous pourrons devenir les conquérants d’un monde nouveau. De même que l’homme doit quitter son père et sa mère  s’il veut aimer sa femme, de même il faut mettre les exigences familiales au second degré de nos préoccupations pour laisser l’intuition de Dieu nous saisir et mettre nos vies à la disposition de Dieu.



Combien parmi nous ne trouvent-ils pas leur existence fade et sans avenir ? Ils se comportent généralement  comme le roi de la parabole racontée par Jésus. Ils recherchent  leurs intérêts, ils font la part des choses, et ils donnent  une importance calculée aux choses et aux êtres, ils ne négligent cependant pas Dieu,  mais ils lui réservent seulement une partie de l'aventure. Ils se construisent une vie raisonnable faite de concessions, sans que le hasard et l’aventure n’y aient leur place. Dieu mérite mieux que nos petites dispositions de sagesse humaine, il réclame toute notre activité, tous nos soucis, toutes nos préoccupations, la totalité de nos personnes. Dieu réclame de devenir le partenaire de notre vie et de la partager en totalité.



Affranchis des contingences humaines, Dieu nous rend libres et responsables. Il se peut que cette joyeuse liberté déplaise aux hommes qui cherchent à nous la prendre en nous enlevant la vie. Ce fut le cas de Jésus et de bien d’autres après lui. Mais leur mort ne fut-elle pas un cri de liberté et une ouverture vers la délivrance. Leur vie était en Dieu et la vie en Dieu est sans limite puisqu’elle lui est toute consacrée et qu’elle débouche quand tout est accompli dans la plénitude éternelle de Dieu, sans limite de temps et d’espace.