mardi 4 février 2020

Matthieu 5/13-16 lla lumière du monde Dimanche 9 février 2020



13 C'est vous qui êtes le sel de la terre. Mais si le sel devient fade avec quoi le salera-t-on ? Il n'est plus bon qu'à être jeté dehors et foulé aux pieds par les hommes. 14 C'est vous qui êtes la lumière du monde. Une ville située sur une montagne ne peut être cachée. 15 On n'allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau, mais on la met sur le chandelier, et elle brille pour tous ceux qui sont dans la maison. 16 Que votre lumière brille ainsi devant les hommes, afin qu'ils voient vos œuvres bonnes, et glorifient votre Père qui est dans les cieux.





Il y a une habitude qui  habite notre esprit, c’est celle qui consiste à désigner par « siècle des lumières » celui des  philosophes du XVIII eme siècle dont une des particularités          est de mettre en doute la réalité de Dieu. Elle les met en opposition avec les discours de la Bible  qui utilisent l’image de la lumière pour désigner la présence de Dieu parmi les hommes.  Cette expression de siècle des lumières a fait école et c’est  par elle que l’on désigne l’époque où on a commencé à prendre  ses distances par rapport à Dieu. Or le texte de l’Evangile que nous lisons aujourd’hui utilise l’expression de «  lumière du monde » pour désigner  l’homme quand il est sensé ressembler le plus à Dieu. N’y a-t-il pas discordance quelque part ? 


En opposition à ce qui vient d’être dit, à l’époque de Jésus  l’expression de lumière qualifiait l’action divine.  Dans les textes de la nativité que nous venons de vivre, c’est la lumière d’une étoile qui annonce la venue de Dieu en  Jésus sous forme humaine.  Dieu  s’incarne dans la lumière d’une étoile pour diriger ceux qui le cherchent vers le lieu où il a pris naissance. C’est également  en créant la lumière que Dieu donne  le coup d’envoi de la création  du monde. Nous nous interrogerons donc sur  la manière  dont les Ecritures utilisent la lumière pour  désigner l’intervention de Dieu dans le monde.  Nous mettrons donc  cette lumière en opposition  avec cette époque où les hommes ont défié Dieu en s’appropriant une image qui jusqu’ici lui était  réservée. Comment se fait-il que l’homme se soit servi des attributs de Dieu pour mieux le contester ?


En faisant cette remarque nous n’oublierons pas   la prophétie de Siméon lors de la présentation  de Jésus au temple qui annonçait que cet enfant serait la lumière du monde, mais aussi un signe qui provoquera la contradiction. La contradiction dans la manière de penser les choses devient évidente dans les constations  que nous venons de mentionner.

Au XVIII eme siècle les philosophes se sont crus suffisamment éveillés à la critique du monde pour se passer de Dieu dans la formulation de leurs pensées. Ils en ont profité pour s’attaquer à lui en s’appropriant  l’image de la lumière le désignant habituellement. On ne peut désormais  avoir un discours sur Dieu  sans songer à ceux qui avaient  inauguré une nouvelle manière de penser le monde en enlevant  ses responsabilités à Dieu.


Avant d’entrer dans le débat, revenons à Jésus qui a fait  cette affirmation surprenante en revêtant les hommes que nous sommes des attributs de Dieu : « vous êtes la lumière du monde ». Est-ce à dire que selon Jésus les hommes devraient tenir un rôle capital dans la manifestation de Dieu au monde ? Jésus suggérerait-il que c’est  par le comportement des humains que le monde accéderait à la connaissance de Dieu ? En fait, il semblerait que «  être la lumière du monde »  devrait être la fonction de celui qui répond à l’appel de Jésus et qui choisit de se mettre à sa suite en décidant de suivre son enseignement dont il vient de donner la teneur dans les béatitudes. En effet, Jésus vient de donner les béatitudes, comme le sommaire de tout son enseignement à venir. Il y fait de l’amour inconditionnel le centre de la pratique qu’il enseigne.  Il recommande de tout sacrifier à son prochain d’une telle manière que nous aurions vraiment du mal à l’appliquer. Il s’agirait de s’oublier personnellement  au profit de quiconque croise son chemin et de réserver de l’attention à ceux qui nous ignorent, nous méprisent voire même nous persécutent. C’est par ce genre de pratique que la lumière de Dieu se mettra à briller sur notre chemin. Cette lumière sera précisément celle que Jésus  nous charge de faire briller pour manifester l’attention que Dieu porte aux hommes.   Curieusement, les philosophes chercheront par leurs discours à obtenir les mêmes effets, c’est-à-dire l’amélioration du sort de l’humanité.  Mais une telle démarche les conduira  pour la plupart à la négation de Dieu alors qu’ils chercheront à  obtenir les mêmes effets  que ceux recherchés par Jésus.


Mais nous n’en avons pas fini avec ces contradictions au sujet de la lumière et de l’emprise de l’homme sur elle. Conduit-elle à la découverte de Dieu ou à sa négation ? Poursuivons notre propos à partir de ce que nous découvrons encore dans la Bible.  Curieusement  la Bible s’ouvre par le  récit de la création de la lumière, car pour la Bible  tout commence  par elle, c’est en la créant que Dieu prend  le monde en charge. Dieu achève la création au septième jour en créant l’homme comme si, Dieu avait créé l’un et l’autre, lumière et humanité comme commencement at achèvement de la création. Ils seraient ainsi devenus  complémentaires l’un de  l’autre. C’est la lumière qui donne de la réalité au monde, tandis que l’homme créé à l’image de Dieu donne du sens  à ce que la lumière ouvre à la vie.


Voilà la mission qui semble nous être confiée par Dieu et que Jésus met en évidence. Pourtant l’homme n’a jamais vraiment  compris que telle était sa fonction. Quand l’homme songe  à son rôle sur terre, il  s’enferme dans le rôle de coupable où il se plait à croire que Dieu l’a condamné et il cherche à en sortir pour plaire à Dieu. Les théologiens de tous les  temps l’ont enfermé dans ce rôle alors qu’à l’origine Dieu  a voulu faire de lui une lumière pour révéler sa volonté au monde qui est de faire le bonheur de tout ce qui y vit et dont l’homme serait l’instrument de prédilection. 


Ceux qui nous ont transmis l’histoire de l’homme à travers toute la Bible ont insisté sur ses erreurs. C’est le déluge qui a retenu leur attention, c’est au récit de la tour de Babel qu’ils se sont  attachés, ce  sont les mauvais comportements des rois d’Israël qu’ils ont retenus et qui selon eux ont rempli le cœur de Dieu de tristesse  et ont attisé sa colère  contre les hommes. Depuis longtemps, pourtant  des voix prophétiques  s’étaient élevées, elles avaient dit les actions qui plaisaient à Dieu et qui étaient à la portée de chacun.  Elles véhiculaient déjà  l’idée de partage et de collégialité de l’humanité. Jésus a repris ces propos après eux.  Mais malgré les évangiles,  malgré les propos de compassion de Jésus,   les théologiens sont restés sourds à l’enseignement  de Jésus qui voulait dépasser  l’univers de la faute dans lequel les hommes s’enfermaient pour les ouvrir à une autre possibilité  d’action, celle qui consistait à tisser des liens entre les hommes, de bannir la haine et de faire de la place à l’espérance de promouvoir l’amour du prochain en toute occasion. C’est cela qui était vraiment  la parole de Dieu et qui manifestait  la lumière que Dieu  avait chargé les hommes de répandre depuis la création. 


Reprenant l’idée de lumière, les philosophes du XVIII eme siècle en ont profité pour s’en attribuer le privilège et le  retirer à Dieu. Nous voilà tombés en pleine contradiction comme  le vieux Siméon le prophétisait à Jésus. D’une part les croyants cherchaient à plaire à Dieu en se retirant du monde pour ne pas l’accabler de leurs erreurs, d’autre part les autres  voulaient changer le monde en  refusant toute action de Dieu sur lui. Les choses continuent à suivre leur cours en oubliant qu’à l’origine Dieu a cherché à éclairer le monde en mettant  l’homme à son service par la pratique du partage et de l’espérance.  Aujourd’hui encore les hommes s’enfoncent dans leur irresponsabilité en s’accusant  eux-mêmes de tout ce qui ne va pas sur la planète, mais refusent de mettre en action la  seule chose qui leur a été demandé depuis les origines celle de regarder leurs semblables avec le même regard  que celui de Dieu pour eux, celui de frères.


Quoi qu’il en soit, les récits sur la création rappelle aux hommes que Dieu les charge de puiser dans les Ecritures le message que Dieu révèle aux hommes depuis toujours  afin d’orienter le monde vers les projets d’origine de Dieu qui est d’inscrire l’amour, le partage et l’espérance dans le destin du monde. C’est ainsi qu’il évoluera et sera sauvé.

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