(Contrairement à ce que propose la liste, je ne crois pas qu’il faille
couper le texte au verset 21 car à mon avis la portée du texte se trouve dans
le rejet de Jésus.)
4 Jésus retourna en Galilée, avec la puissance de l'Esprit ; le bruit s'en
répandit dans toute la région. 15 Il enseignait dans leurs synagogues, et il
était glorifié par tous. 16 Il vint à Nazareth, où il avait été élevé, et il se
rendit à la synagogue, selon sa coutume, le jour du sab
bat. Il se leva pour faire la lecture, 17 et on lui remit le livre du prophète Esaïe. Il déroula le livre et trouva le passage où il était écrit : 18 L'Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu'il m'a conféré l'onction pour annoncer la bonne nouvelle aux pauvres ; il m'a envoyé pour proclamer aux captifs la délivrance, et aux aveugles le retour à la vue, pour renvoyer libres les opprimés, 19 pour proclamer une année d'accueil de la part du Seigneur. 20 Puis il roula le livre, le rendit au servant et s'assit. Les yeux de tous, dans la synagogue, étaient fixés sur lui.
bat. Il se leva pour faire la lecture, 17 et on lui remit le livre du prophète Esaïe. Il déroula le livre et trouva le passage où il était écrit : 18 L'Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu'il m'a conféré l'onction pour annoncer la bonne nouvelle aux pauvres ; il m'a envoyé pour proclamer aux captifs la délivrance, et aux aveugles le retour à la vue, pour renvoyer libres les opprimés, 19 pour proclamer une année d'accueil de la part du Seigneur. 20 Puis il roula le livre, le rendit au servant et s'assit. Les yeux de tous, dans la synagogue, étaient fixés sur lui.
21 Alors il se mit à leur dire : Aujourd'hui cette Ecriture, que vous venez
d'entendre, est accomplie. 22 Tous lui rendaient témoignage, étonnés des
paroles de grâce qui sortaient de sa bouche ; ils disaient : N'est-ce pas le
fils de Joseph ? 23 Il leur dit : Certainement, vous me citerez ce proverbe :
Médecin, guéris-toi toi-même ; tout ce qui s'est produit à Capharnaüm, selon ce
que nous avons appris, fais-le aussi ici, dans ton pays ! 24 Il leur dit encore
: Amen, je vous le dis, aucun prophète n'est bien accueilli dans son pays. 25
En vérité, je vous le dis, il y avait beaucoup de veuves en Israël aux jours
d’Élie, lorsque le ciel fut fermé trois ans et six mois et qu'il y eut une
grande famine sur tout le pays ; 26 et cependant Élie ne fut envoyé vers aucune
d'elles, mais vers une veuve de Sarepta, dans le pays de Sidon. 27 Il y avait
aussi beaucoup de lépreux en Israël au temps du prophète Élisée ; et cependant
aucun d'eux ne fut purifié, mais Naaman le Syrien. 28 Lorsqu'ils entendirent
cela, tous, dans la synagogue, furent remplis de fureur.
29 Ils se levèrent, le chassèrent hors de la ville et le menèrent jusqu'à
un escarpement de la montagne sur laquelle leur ville était construite, afin de
le précipiter en bas. 30 Mais lui passa au milieu d'eux et s'en alla.
Ce sermon de Jésus a eu des effets surprenants. A la différence des autres
prédicateurs qui déclenchent parfois plus la somnolence, voire même le sommeil
que l’agressivité. Jésus ici provoque à lui tout seul toutes les phases de
l’émotion. Il est d’abord séduisant et plonge ses auditeurs sous le charme et
le ravissement, puis il devient inquiétant et on se demande ce qu’il cache. En
fin n’y tenant plus les auditeurs éprouvent des pulsions de haine qui se
transforment en velléité de mort à l'égard du prédicateur. Phénomène rarissime
dans l’histoire du sermon qui mériterait d’être inscrit au livre des recors,
les auditeurs passent à l’acte.
Curieusement, nous avons ici dans un seul sermon comme un résumé de ce que
sera le ministère de Jésus pendant 3 ans. Dans un premier temps qui est celui
du sermon sur la Montagne, Jésus va provoquer chez ceux qui l’écoutent un
immense espoir. Puis on ne comprendra plus très bien ce qu’il veut faire et
inquiets quelques disciples le quitteront. En phase finale, il agacera tout le
monde, les autorités civiles et religieuses conjugueront leurs efforts pour se
saisir de lui et le tuer.
En essayant de comprendre ce qui se passe dans ce sermon, nous comprendrons
sans doute ce qu’il y avait de choquant dans tout son ministère et par voie de
conséquence ce qui fait la spécificité de l’Évangile. Comment se fait-il donc
que ceux qui l’ont adulé se soient retournés contre lui pour réclamer sa mort?
Comment se fait-il donc que la « Bonne Nouvelle de l’Évangile » puisse
provoquer ce retournement de situation? Il est clair que Jésus a provoqué
l’enthousiasme grâce à ses propos accompagnés de miracles. Il donnait alors les
signes évidents que le Royaume de Dieu annoncé par les prophètes était en train
de se mettre en place, c’est ce dont les gens assis au bord du lac à
Capharnaüm avaient été témoins.
Lentement ils ont découvert dans les propos de Jésus que le Royaume de Dieu
n’était pas une série d’avantages réservés aux uns et refusés aux autres. Le
Royaume était pour tous, juifs et païens, pécheurs honnêtes ou pécheurs
scandaleux. Le Royaume n’était pas seulement l’amélioration physique des
infirmes, la guérison des malades et l’apport de nourriture aux foules. Ces
signes réclamaient une transformation intérieure et profonde des individus, et
peut être même de la société, et cela ne se ferait pas sans douleur ni
réticence.
La transformation des individus ne se fait pas seulement par des miracles,
elle demande un effort de chacun et réclame sa collaboration. Et c’est là que
la bât blesse. Tout au long de l’Évangile, nous découvrons que Jésus réclame la
collaboration de celui qu’il secourt. Jésus intervient dans de nombreuses
situations et il accompagne son intervention d’une injonction à agir : « Prends
ton lit et marche » dit-il. Jésus opère le miracle, mais pour qu’il se réalise,
il faut que le bénéficiaire ait la volonté d’agir, en l’occurrence de marcher.
Dieu n’opère rien en nous sans notre accord. Jésus montre que ce n’est pas si
facile.
Dans ce sermon à la synagogue de Nazareth il leur donne l’exemple de 2
miracles opérés, l’un par Élie qui est perçu comme le plus grand des prophètes
et l’autre par son disciple Élisée. Dans les deux cas il s’agit de deux
étrangers païens. Le premier concerne une femme, trop pauvre pour survivre à la
disette et qui serait morte sans le prophète. Dans le deuxième cas, il s’agit
d’un ministre d’une puissance étrangère atteint de lèpre, qu’Élisée a guéri. Les
auditeurs de Nazareth ne sont pas stupides, ils comprennent que les païens ont
part à la même promesse de Dieu qu’eux.
Ils comprennent, en extrapolant les propos de Jésus, qu’il n’y a pas de
privilèges aux regards du Seigneur. Ni privilège par la naissance, ni privilège
par la fortune et que le fait d’appartenir au peuple élu leur est d’aucun
avantage. Ils comprennent que pour participer à cette bonne nouvelle du
Royaume, ils doivent d’abord opérer une conversion vers l’autre. Dieu aime les
autres autant que nous, même les étrangers, même les étrangers qu’on ne connaît
pas. Pour que cette conversion se réalise il faut que nous travaillions sur
nous-mêmes pour la désirer. Mais il n’est pas naturel de désirer une telle
transformation. Dieu aime les autres autant que nous! C’est déjà dur à
entendre. Il aime autant le non croyant que le croyant, c’est encore plus dur à
entendre et il nous demande d’agir de telle sorte que les autres, quels qu’ils
soient, bénéficient de la même situation que nous. Mieux, il nous demande de le
souhaiter. Reprenez l'actualité de ces dernières semaines sur les émigrés et
vous comprendrez mieux ce que cela a d'outrecuidant dans ses propos.
Ce changement est sans doute possible, mais parfaitement inacceptable,
c’est pourquoi les auditeurs de Nazareth décident de tuer le ver dans le fruit
avant qu’il contamine le monde entier et ils essayent de passer à l’acte. Jésus
sait très bien que ce qu’il suggère est difficile à imaginer et qu’ils vont
refuser ses propos, c’est pourquoi il les prévient : « Vous allez me dire,
médecin guéris-toi toi-même ou nul n’est prophète en son pays ». Cette
conversion que Jésus propose est impossible à moins que nous ne la désirions.
Pour que nous la désirions, il faut encore que Dieu s’en mêle, il faut que nous
acceptions qu’il travaille en nous et qu’il aille encore plus loin que nous ne
pensons. En principe nous ne sommes pas opposés au changement en nous? Nous le
souhaitons même. Nous nous savons pécheurs et nous désirons ne plus l’être.
Nous savons que nos comportements et nos pensées déplaisent souvent à Dieu et
nous souhaitons les améliorer. Nous désirons que Dieu fasse fondre nos cœurs de
pierre. Tout cela les prophètes l’avaient déjà dit. Jean Baptiste, le
précurseur de Jésus s’en était fait une spécialité. Mais Jésus lui va
radicalement plus loin.
Il réclame notre changement à l’égard de l’autre. Cela mérite quelques
instants d’attention: Jean Baptiste dénonçait les manques d’égard aux autres.
La deuxième table de la Loi fait l’inventaire des manquements vis à vis des
autres: le vol, le meurtre, la convoitise, le mensonge...mais si cela concerne
que notre attitude vis à vis des autres, cela ne concerne que nous. Pour
Jésus cela va beaucoup plus loin, l’intérêt que nous devons porter à
l’autre est tel qu’il doit provoquer un changement radical en lui, car
nous devons agir de telle sorte qu’il désire se tourner vers ce Dieu qui nous a
poussé à agir.
Jusqu’à la venue de Jésus, la morale exigeait que nous ne soyons pas les
agresseurs de l’autre et que l’autre se trouve mieux à notre contact, et c’est
tout. Pour Jésus nous devons mettre tant d’amour dans notre relation à l’autre
que l’autre désire venir vers Dieu. La veuve de Sarepta ne s’était pas
seulement trouvée mieux de la présence d’Élie pour qui elle était devenue la
servante, mais elle est entrée dans une relation constructrice avec Dieu.
Nahaman le Syrien n’a a pas seulement été soigné, mais on peut dire qu’il
s’est converti à la cause de Dieu, relisez les texte.
Ces exemples nous montrent que le service qu’on leur apporte doit être
d’une telle qualité que les autres découvrent Dieu à l’œuvre dans ce que nous
faisons et désirent le rejoindre.
Nous pouvons considérer qu’il nous faut œuvrer de telle sorte que l’autre, désire se tourner vers Dieu afin
qu’à son tour il travaille lui même à l’édification du Royaume de Dieu. Si nous
projetons ce genre de réflexion sur le débat actuel concernant la déchéance de
nationalité, nous découvrirons bien facilement que la bonne réponse ne se situe
pas dans le parti de l’exclusion. Nous comprenons alors de quelle nature doit
être le message des chrétiens. Il faut que ceux que nous aurions tendance à
rejeter éprouvent une telle joie d’être parmi nous qu’ils désirent changer pour
devenir comme nous ! Est-ce que je rêve ?
Mais qui sont ces autres dont on parle ici et vers lesquels Jésus nous
envoie? Ils sont préfigurés par la veuve de Sarepta et Nahaman le Syrien, ils
sont au départ des étrangers païens dont l’une et pauvre et sans avenir et dont
l’autre est riche, ministre et peut être ennemi potentiel. Aujourd’hui ce sont
toujours des étrangers d'une autre religion pour la plupart qui sont demandeurs.
Dieu semble avoir besoin d'eux pour qu’ils édifient son Royaume avec nous et
avec lui. Ils ont vocation à le connaître et nous avons vocation à les y
encourager. Il y a ainsi au fond de chaque Chrétiens un missionnaire qui
sommeille sans qu’il le sache et sa mission se conjugue avec ses rencontres des
autres au quotidien. "Seigneur donne-nous aujourd’hui notre pain de ce
jour, Seigneur donne-nous chaque jour un prochain à aimer…"
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