Jean 3 : 14 Et comme Moïse éleva le serpent dans le désert, il faut, de
même, que le Fils de l'homme soit élevé, 15 pour que quiconque croit ait en lui
la vie éternelle.
16 Car Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, pour que
quiconque met sa foi en lui ne se perde pas, mais ait la vie éternelle.
17 Dieu, en effet, n'a pas envoyé son Fils dans le monde pour juger le
monde, mais pour que par lui le monde soit sauvé. 18 Celui qui met sa foi en
lui n'est pas jugé ; mais celui qui ne croit pas est déjà jugé, parce qu'il n'a
pas mis sa foi dans le nom du Fils unique de Dieu. 19 Et voici le jugement : la
lumière est venue dans le monde, et les humains ont aimé les ténèbres plus que
la lumière, parce que leurs œuvres étaient mauvaises. 20 Car quiconque pratique
le mal déteste la lumière ; celui-là ne vient pas à la lumière, de peur que ses
œuvres ne soient dévoilées ; 21 mais celui qui fait la vérité vient à la lumière,
pour qu'il soit manifeste que ses œuvres ont été accomplies en Dieu
Ce verset de Jean 3/16 fait partie des premiers versets qu’on apprenait par
cœur dans mon enfance à l’École du Dimanche. C’est dire que tous ceux de ma
génération le gardent en mémoire dans leurs souvenirs de jeunesse. Pourtant, ce sermon risque de vous surprendre. J’ai déjà écrit un sermon à propos de ce texte,
mais j’ai voulu le reprendre et le réécrire.
Je le propose à votre réflexion
afin de vous aider à vous situer dans le courant des rivalités entre
créationnisme et évolutionnisme.
Pour peu que l’on fasse une pause de quelques instants pour contempler ce
monde dans lequel nous vivons, nous finirons bien vite par découvrir qu’il est
surprenant. Il est surprenant par sa beauté et par sa variété, il est
surprenant par sa complexité aussi. Pour s’en rendre compte, il suffit de
songer au nombre des espèces qui cohabitent sur notre terre ? Il est
fantastique. Le monde de l’infiniment petit est aussi stupéfiant que le monde
de l’infiniment grand. Le microscope le plus sophistiqué n’arrive pas à rendre
compte des structures les plus secrètes de la matière. Le télescope le plus
puissant ne parvient pas non plus à atteindre les limites des galaxies. Que
l’on s’émerveille ou que l’on s’en étonne, on aura cependant du mal à répondre
à la question : à quoi tout cela sert-il ?
Si cela est le fruit du hasard, on ne peut qu’ en être
stupéfait. S’il y a un créateur à l’origine de tout cela on peut se
demander quel intérêt il y trouve. Depuis toujours les êtres humains retournent
ces questions sans vraiment trouver de réponse satisfaisante. Chose curieuse
cependant, l’être humain est le seul, dans notre galaxie à pouvoir se poser de
telles questions. Cette simple remarque change-t-elle quelque chose au problème
?
L’univers serait absurde, s’il n’y avait personne pour prendre conscience
de sa réalité. Mais une fois ce constat établi, peut-on aller plus loin ? Le monde
est-il soumis au hasard d’une évolution complexe ou y a-t-il un être supérieur
qui oriente son devenir ? L’harmonie de tout cet ensemble pourrait bien être
alors liée au mélange des deux. L’observateur rationnel ne peut aller plus loin
dans son constat. Mais sa pensée, toujours en mouvement le pousse alors à
formuler des théories plus ou moins élaborées pour aller plus loin.
Pourtant, les lois de l’évolution le poussent à constater que le monde
semble évoluer en s’appuyant sur le principe
selon lequel la raison du plus fort est toujours la
meilleure. Il ne faut pas être fin clerc
pour constater que c’est généralement le
dominant qui a raison du plus faible. Force est pour l’homme de réaliser qu’il utilise
ce concept dans nombre de ses
comportements, mais il réalise aussi qu’il
est souvent habité par un sentiment
contraire.
Il a beau être faible et démuni, il a quand même réussi à prendre
l’ascendant sur tout ce qui se meut sur terre.
Plus mystérieux encore, il réalise qu’il
est entraîné par une force
mystérieuse à s’intéresser à ses semblables et, chose encore plus étrange, à
prendre partie pour ce qui est faible et à protéger ce qui est vulnérable. Il a
vite fait de constater que ce sentiment qu’on peut appeler l’amour et qui préside
généralement aux règles de la
reproduction va plus loin encore. Il ne s’attache pas seulement aux autres pour donner libre cours à nos
pulsions sexuelles, mais ce sentiment chez de nombreux individus va plus loin
encore. Là est peut être la clé de l’énigme.
Comment peut-on éprouver de l’intérêt pour les autres, si ce n’est pour
assouvir ses instincts? Si ce sentiment n’est pas naturel, il vient forcément d’ailleurs. C’est en creusant
ce mystère que les hommes découvrent
qu’il existe une réalité, au-delà
d’eux-mêmes qui ne se confond pas avec le monde, puisqu’elle leur inspire des
sentiments contraires aux règles de la survie des espèces. Il y a donc
antagonisme entre cette réalité qu’ils découvrent peu à peu et les lois qui
semblent présider à l’évolution du monde.
Dieu, car il faut bien l’appeler ainsi, ne se confond pas avec le monde,
puisqu’il s’oppose à lui et semble vouloir le faire évoluer dans une direction
qui ne lui serait pas naturel.
Depuis que les hommes ont développé leur capacité de penser, ils ont en
même temps découvert qu’ils étaient confrontés à un sentiment qui ne leur était
pas naturel. Ce sentiment les pousse
même à agir parfois dans une direction qui ne sert pas leurs propres intérêts
mais les intérêts des autres. C’est à partir de ce constat que certains ont
compris que leur présence donnait du sens à ce monde. Ils se sont alors demandé
s’ils n’étaient pas des instruments que celui que nous appelons Dieu utiliserait pour permettre une évolution à ce monde
qui irait dans un sens qui ne serait pas prévu à l’origine. Ne serait-ce pas par ce moyen que Dieu manifesterait son pouvoir créateur ? Il donnerait ainsi un sens nouveau au monde
grâce à ce sentiment qui ne se
manifesterait que chez l’homme en vertu
duquel il aurait reçu vocation de
modifier les règles naturelles de l’évolution. Arrivés à ce constat, nous
recevons de l’Evangile cette affirmation selon laquelle Dieu a tant aimé le
monde, qu’il a donné son fils unique afin que quiconque croit en lui, ne
périsse pas mais reçoive la vie éternelle.
Il a fallu des siècles et des interventions multiples de Dieu dans le cœur
des hommes, il a fallu beaucoup d’incompréhensions, des erreurs nombreuses, des
échecs de toutes sortes pour que l’espèce humaine comprenne que la règle qui
doit présider à l’évolution est liée au respect de la vie des autres.
Aujourd’hui, a-t-on vraiment compris cela ? Un simple regard sur nos
sociétés nous laisse comprendre qu’il y a encore un long chemin à faire, car
une telle idée ne fait toujours pas partie du mode de pensée de la majorité des
humains ni même de la majorité des chrétiens. La logique, si non la vertu,
semble nous dire que c’est dans ce sens qu’il faut aller sous peine de la
disparition de notre espèce. En effet,
si l’espèce humaine venait à
disparaître, il n’y aurait plus personne pour penser le monde !
A la lumière de ce constat, l’Évangile nous laisse entendre que Dieu prend
un gros risque en proposant une évolution de l’humanité en contradiction avec
les règles du monde. Il se jette dans cette aventure sans avoir prévu de plan
de sauvegarde en cas d’échec. C’est ce que veut signifier Jésus quand il dit
que Dieu a donné son fils unique. Cela veut dire que Dieu s’est investi tout entier dans ce programme d’amour
et qu’il n’ a pas prévu de solution de
rechange. En disant cela Jésus rend compte de la confiance que Dieu fait aux hommes.
Dieu croit en l’homme au point de tout lui sacrifier, y compris l’avenir du
monde. C’est à croire même, qu’en cas d’échec de l’humanité à réaliser une
évolution harmonieuse, Dieu lui-même en pâtirait au point de ne plus exister et
de laisser le monde subir sa destiné. La
fin de l’humanité signifierait du même coup la fin de Dieu, en tout cas tel que
nous le connaissons, et par voie de conséquence ce serait vraiment la fin du
monde.
Tout cela nous amène à nous situer d’une façon nouvelle par rapport à la
théologie traditionnelle qui place en l’homme l’origine de tous les maux et qui
fait du péché la rupture entre Dieu et l’humanité. Il a donc fallu à Jésus une
audace considérable pour prendre à rebours la théologie traditionnelle de son
temps et de lancer l’idée selon laquelle, Dieu ferait de l’homme son
collaborateur pour donner du sens au monde. Selon cette approche, le péché ne
serait plus ce qui entraînerait le monde à sa perte, le péché serait désormais
ce qui empêche l’homme d’entrer dans le programme créateur dans lequel Dieu lui
propose d’entrer.
Dieu inscrit l’homme dans un projet de vie auquel il doit s’associer pour
que le monde soit sauvé. La condition essentielle pour que ce projet aboutisse
est liée à l’amour que les hommes sauront se manifester les uns pour les
autres. Dieu a fait le pari fou de croire que ce projet pourra se réaliser.
C’est en tout cas une manière de comprendre comment la Bible associe
l’homme à son action créatrice.
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