lundi 4 août 2014

Matthieu 18:23-35 la justice de Dieu dimanche 14 septembre 2014



Matthieu 18 :23-35 La parabole de l'esclave impitoyable: 23 C'est pourquoi il en va du règne des cieux comme d'un roi qui voulait faire rendre compte à ses esclaves. 24 Quand il commença à le faire, on lui en amena un qui devait dix mille talents. 25 Comme il n'avait pas de quoi payer, son maître ordonna qu'on le vende, lui, sa femme, ses enfants et tout ce qu'il avait, afin de payer sa dette. 26 L'esclave tomba à ses pieds et se prosterna devant lui en disant : « Prends patience envers moi, et je te paierai tout ! » 27 Emu, le maître de cet esclave le laissa aller et lui remit la dette.

28 En sortant, cet esclave trouva un de ses compagnons d'esclavage qui lui devait cent deniers. Il le saisit et se mit à le serrer à la gorge en disant : « Paie ce que tu dois ! » 29 Son compagnon, tombé à ses pieds, le suppliait : « Prends patience envers moi, et je te paierai ! » 30 Mais lui ne voulait pas ; il alla le faire jeter en prison, jusqu'à ce qu'il ait payé ce qu'il devait. 31En voyant ce qui arrivait, ses compagnons furent profondément attristés ; ils allèrent raconter à leur maître tout ce qui s'était passé.
32 Alors le maître le fit appeler et lui dit : « Mauvais esclave, je t'avais remis toute ta dette, parce que tu m'en avais supplié ; 33 ne devais-tu pas avoir compassion de ton compagnon comme j'ai eu compassion de toi ? » 34 Et son maître, en colère, le livra aux bourreaux jusqu'à ce qu'il ait payé tout ce qu'il devait. 35 C'est ainsi que mon Père céleste vous traitera si chacun de vous ne pardonne pas à son frère de tout son cœur. 

Il nous arrive parfois de vivre dans un mode tellement injuste que nous avons l’impression que Dieu l’a oublié, ou pire même qu’il participe aux injustices dont nous sommes victimes. Cette parabole nous en donne une image réaliste. Il y est question d’un roi bienveillant qui pourrait bien être Dieu, cependant son comportement à la fin du récit  nous met singulièrement mal à l’aise.

Ce roi est bon, mais il est versatile.   Par contre, il intervient dans le cours d’une affaire qui ne le concerne pas directement et dans laquelle il n’est apparemment pas lésé, même s’il est conscient du fait  que le comportement de celui à qui il a fait du bien est décevant. En colère, il  ne donne  à personne aucune chance  de s'en sortir ni à celui dont le  comportement est  moralement contestable ni à celui qui en est victime. Il utilise son pouvoir pour imposer sa propre morale au détriment de l’élan de bonté qu'il a manifesté au début.

Ce qui nous dérange aussi, c’est le décalage qu’il y a entre les deux  dettes. La somme d’argent que le premier doit à son maître est 16 millions de fois supérieure à la somme qui est due par le deuxième personnage (1). On a l’impression de se trouver dans le même rapport de force que le modeste citoyen que nous sommes quand il  n'arrive pas à  payer ses impôts  en comparaison à la dette de l'état. Contrairement à ce qui se passe, les responsables de la dette de l’état ne sont pas inquiétés alors que le simple citoyen est durement sanctionné quand il ne paye pas. Dans cette histoire, le responsable de la grosse dette est sanctionné, à notre grande satisfaction, non pas à cause du non-paiement de la dette, mais à cause de son mauvais comportement.

Bien évidemment nous nous sentons très proches du  personnage qui doit une très faible somme par rapport à la somme demandée pour l’autre débiteur. On espère que le roi de la parabole va rétablir la situation et faire pencher le fléau de la balance de la justice en sa faveur Mais il n’en est rien, ni dans la parabole, ni dans la réalité.

Le roi fait preuve d’une immense bonté et nous sommes invités à nous reconnaître dans ce débiteur gracié. Notre péché correspond à cette énorme dette qui serait passible des feux de l’enfer, si Dieu ne nous faisait grâce. Pécheurs sans excuse nous mériterions la mort éternelle si Dieu n’intervenait pas dans le cours des choses par un décret qui n’est explicable que par sa seule bonté.

Cependant le roi revient sur son acte généreux quand il constate le mauvais comportement de son débiteur, et ce faisant, il procède d’une justice qui nous satisfait. Mais s’il juge sévèrement celui qui ne mérite pas sa grâce, il n’intervient pas dans l’histoire du pauvre bougre victime du créancier sans scrupule. Pourquoi le roi suspend-il ici les effets de sa justice  et ne manifeste-t-il pas les effets de sa grâce?

Où nous entraîne donc cette histoire ? Comment la comprendre et qu’est-ce qu’elle veut dire ? Ne nous décrit-elle pas une situation insupportable dans laquelle les plus modestes sont enfermés dans une réalité inextricable d’où personne ne les secourt, pas même Dieu ? Bien que la perversité du puissant indélicat soit sanctionnée, le plus modeste reste soumis à sa dépendance, sans que rien ne vienne modifier le cours d’une telle fatalité.

En fait l’image du roi de la parabole correspond à une image de Dieu qui serait conforme à celle nous imaginons : un Dieu bon et juste qui interviendrait dans le cours de l’histoire du monde pour  corriger des dérives dangereuses. Grâce à son intervention, les projets pervers échoueraient et le monde deviendrait acceptable. Dieu laisserait cependant aux hommes la responsabilité  de gérer au mieux les affaires ordinaires. C’est pour cela que le roi n’interviendrait pas sur le sort du petit débiteur. Dieu veillerait au grain seulement en cas de dépassement des limites tolérables.

C’est bien dans ce sens que va notre foi. Nous pensons que Dieu n’intervient qu’en cas de nécessité urgente, quand les hommes n’y peuvent plus rien. C’est parce que nous voyons les choses ainsi que nous formulons nos prières d’intercession comme nous le faisons. Nous demandons à Dieu d’intervenir là où nous ne pouvons plus rien. Mais ce n’est pas cette image que Jésus a voulu nous donner de Dieu, c’est pourquoi il nous a proposé  cette parabole.

En fait si le roi est bien à l'image du Dieu de miséricorde que nous voyons dans  la première partie de la parabole,  il cesse de l'être quand il devient conforme à la justice telle que nous la souhaitons. Nous sommes heureux qu’il sanctionne son riche débiteur comme il le fait, mais nous voudrions aussi qu’il prenne en charge le modeste débiteur que personne n’a secouru. Mais ce n’est pas à lui de le faire. Il ne nous faut pas renvoyer sur Dieu les responsabilités qui sont les nôtres.

C'est ce qui se passe dans le monde où nous vivons quand nous  refusons de mettre en pratique les effets de la bonté de Dieu dans notre vie quotidienne. Le dernier personnage de la parabole n'est donc pas victime de la colère de Dieu, mais du refus que nous avons de sa trop grande bonté.

Nous devons considérer que Dieu fait de nous des êtres responsables, qui sont sensés intervenir dans l'histoire des hommes  comme il est sensé le faire ici dans la première partie de la parabole en appliquant une justice conforme à la sienne et en parfait décalage avec la conception habituelle de la justice humaine.

Autrement dit le Dieu auquel Jésus rend témoignage est un Dieu  dont les effets de la bonté outrepassent toute notion de bonté que nous pourrions imaginer. Là s’arrête le portrait de Dieu selon Jésus. Ensuite le roi devient conforme à notre  conception de la bonté et de la justice. Il juge et condamne.  A la fin de la parabole nous sommes interpelés  et invités à nous comporter comme Dieu dans les  situations qui nous sont offertes et qui sont très modestes par rapport à ce que Dieu est capable de faire. La pointe de la parabole,  c’est que nous aimerions que Dieu fasse ce que nous sommes sensés faire, mais Dieu n’est pas de cet avis.


L’Esprit de Dieu agit en nous comme le feraient les phares qui guident les bateaux vers le port. Le pilote peut suivre les indications qu’ils lui donnent. Il peut aussi manœuvrer autrement si bon lui semble. Le résultat de sa manœuvre est placé sous sa responsabilité, mais, Dieu ne laisse agir personne sans lui faire entendre la voix de sa sagesse.

(1) J’ai fait approximativement le calcul


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