La prière sacerdotale Jean 17 :20-26 dimanche 8 mai 2016
( Ce sermon a déjà été publié sur ce même blog le 12 mai
2013)
1 Après avoir ainsi parlé, Jésus leva les yeux au ciel et
dit : Père, l'heure est venue. Glorifie ton Fils, afin que le Fils te glorifie,
2 selon que tu lui as donné pouvoir sur toute chair, afin qu'il donne la vie
éternelle à tous ceux que tu lui as donnés. 3 Or, la vie éternelle, c'est
qu'ils te connaissent, toi, le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé,
Jésus-Christ. 4 Je t'ai glorifié sur la terre ; j'ai achevé l'œuvre que tu m'as
donnée à faire
5 Et maintenant, toi, Père, glorifie-moi auprès de toi-même de
la gloire que j'avais auprès de toi, avant que le monde fût. 6 J'ai manifesté
ton nom aux hommes que tu m'as donnés du milieu du monde. Ils étaient à toi et
tu me les as donnés ; et ils ont gardé ta parole. 7 Maintenant, ils ont reconnu
que tout ce que tu m'as donné vient de toi. 8 Car je leur ai donné les paroles
que tu m'as données ; ils les ont reçues ; ils ont vraiment reconnu que je suis
sorti d'au-près de toi et ils ont cru que tu m'as envoyé.
9 C'est pour eux que je prie. Je ne prie pas pour le monde, mais pour ceux que tu m'as donnés, parce qu'ils sont à toi 10 — et tout ce qui est à moi est à toi, et ce qui est à toi est à moi — et je suis glorifié en eux. 11 Je ne suis plus dans le monde ; eux sont dans le monde, et moi je vais à toi. Père saint, garde-les en ton nom, (ce nom) que tu m'as donné, afin qu'ils soient un comme nous. 12 Lorsque j'étais avec eux, je gardais en ton nom ceux que tu m'as donnés. Je les ai préservés, et aucun d'eux ne s'est perdu, sinon le fils de perdition, afin que l'Écriture soit accomplie. 13 Et maintenant, je vais à toi, et je parle ainsi dans le monde, afin qu'ils aient en eux ma joie parfaite. 14 Je leur ai donné ta parole, et le monde les a haïs, parce qu'ils ne sont pas du monde, comme moi, je ne suis pas du monde. 15 Je ne te prie pas de les ôter du monde, mais de les garder du Malin. 16 Ils ne sont pas du monde, comme moi, je ne suis pas du monde. 17 Sanctifie-les par la vérité : ta parole est la vérité.
18 Comme tu m'as envoyé dans le monde, moi aussi je les ai envoyés dans le monde. 19 Et moi, je me sanctifie moi-même pour eux, afin qu'eux aussi soient sanctifiés dans la vérité.
20 Ce n'est pas pour eux seulement que je prie, mais encore pour
ceux qui croiront en moi par leur parole, 21 afin que tous soient un ; comme
toi, Père, tu es en moi, et moi en toi, qu'eux aussi soient [un] en nous, afin
que le monde croie que tu m'as envoyé. 22 Et moi, je leur ai donné la gloire
que tu m'as donnée, afin qu'ils soient un comme nous sommes un 23 — moi en eux,
et toi en moi —, afin qu'ils soient parfaitement un, et que le monde connaisse
que tu m'as envoyé et que tu les as aimés, comme tu m'as aimé. 24 Père, je veux
que là où je suis, ceux que tu m'as donnés soient aussi avec moi, afin qu'ils
contemplent ma gloire, celle que tu m'as donnée, parce que tu m'as aimé avant
la fondation du monde. 25 Père juste, le monde ne t'a pas connu ; mais moi, je
t'ai connu, et ceux-ci ont connu que tu m'as envoyé. 26 Je leur ai fait
connaître ton nom, et je le leur ferai connaître, afin que l'amour dont tu m'as
aimé soit en eux, et que moi, je sois en eux.
On
nous a enseigné qu’il était redoutable de tomber vivant dans les mains de Dieu.
Celui à qui une telle aventure arriverait se trouverait ipso facto dévoré par
le feu brûlant de la gloire du Seigneur. Dans ce chapitre 17 de l’Évangile de
Jean que d’aucuns se plaisent à dire qu’il est le plus beau chapitre de tous
les Évangiles, sans doute parce que personne ne le comprend vraiment, Jésus
nous introduit dans l’intimité de Dieu au risque de devenir victimes de sa
gloire.
Nous
sommes à la fois admiratifs et mal à l’aise en pénétrant les pensées qui
s’expriment ici. Si nous sommes attentifs au mouvement du texte nous découvrons
que nous sommes aspirés par une forme de pensée en yoyo, c’est à dire une
pensée qui monte et qui descend et qui vire volte tout à la fois. Nous sommes
entrainés dans l’intimité du Christ en gloire. Sous l’effet du mouvement
ascensionnel de sa pensée, nous rencontrons Dieu face à face. Puis, tout aussi
rapidement, nous sommes ramenés sur terre, non pas pour y être anéantis mais
pour y exercer la mission que le Père nous a confiée qui consiste à travailler
dans le monde pour le gagner à la cause de Dieu.
Si
nous sommes désorientés par ce texte, c’est aussi parce que c’est notre nature
de l’être. En effet, nous appartenons à deux réalités qui se contredisent. Nous
sommes à la fois liés à la matière qui compose ce monde et nous appartenons au
monde de l’esprit qui semble ne rien à voir à faire avec le premier.
En
tant qu’habitants de cette terre nous appartenons à la réalité physique qui la
constitue. Notre corps est constitué par les mêmes composantes chimiques et
biologiques que tout le reste de la planète, nous devenons ainsi partie
prenante de sa réalité physique. Par contre, nous sommes également dotés d’un
esprit qui nous entraîne dans les hauteurs du monde spirituel où la lourdeur de
notre corps a du mal à nous suivre. Nous devenons tout proches de Dieu et nous
réalisons que son Esprit créateur a placé sa marque en nous, c’est pourquoi,
notre personne est à la fois matière et à la fois esprit. Nous ne pouvons pas
exister sans les faire cohabiter. Ne nous étonnons donc pas si Jésus nous prend
pour ce que nous sommes : des êtres de chair et de sang, dotés d’un esprit
capable d’intuition divine.
Cette
intuition nous inquiète. Conscients du fait qu’il y a une réalité spirituelle
au de là de nous-mêmes, nous nous demandons quelle relation il peut y avoir
entre nous et elle, et quelle action elle peut avoir sur nous ? Nous craignons
que l’Esprit Créateur nous sanctionne pour ne pas avoir réalisé ce qu’il
escomptait que nous allions faire. Nous sommes pris d’une peur congénitale
d’avoir commis une faute ignorée qu’il pourrait nous reprocher. Nous redoutons
les conséquences d’avoir fait ce que nous avons fait ou de ne pas avoir fait ce
que nous aurions du faire. La présence du divin provoque en nous une angoisse
dont nous n’arrivons pas à nous libérer.
Dans
ce passage, Jésus prend en charge notre inquiétude et nous rassure. Il nous
rappelle qu’il n’y a aucun danger à nous approcher de Dieu. Mieux, il nous dit
que la gloire de Dieu se trouve amplifiée du fait que nous osons nous approcher
de lui. La gloire de Dieu, c’est que son Esprit puisse cohabiter avec le nôtre
pour créer une harmonie entre lui et nous. Et Jésus offre modestement ses
services pour que nous puissions y participer. C’est pour cela qu’il a joué sa
vie sur la croix.
Le
rôle que Jésus joue ici est capital, il nous entraîne à sa suite pour nous
introduire dans le tout proche voisinage de Dieu et il donne à chacun de ceux
qui acceptent de mettre leurs pas dans les siens la possibilité de vivre de la
plénitude de Dieu sans aucune compensation, si non d’accepter que notre esprit
soit habité par l’esprit de Dieu sans aucune compensations de notre part.
Sur
les chemins du ciel, nous n’avons rien à redouter de Dieu. Il détruit par sa
présence toute incidence que pourraient avoir nos fautes et nos erreurs sur la
suite des événements. Leurs conséquences sont détruites par Dieu qui libère
l’accès de son ciel à quiconque décide d’y suivre Jésus.
Mais
nos esprits sont liés à la matière dont sont faites nos personnes, et nous
sommes insatisfaits car nous voudrions en savoir davantage sur la réalité du
monde invisible où Dieu nous appelle par la voix de Jésus. A quoi ressemble ce
monde de l’Esprit dans lequel Dieu nous absorbe ? Nous sommes déçus parce que
nous restons sans réponse. Nous voudrions être emportés tout de suite vers les
hauteurs de l’Esprit auxquelles nous n’appartenons pas encore.
Jésus
nous demande de ne pas brûler trop vite les étapes, tant que nous habiterons
notre corps physique, tant que le monde de la matière aura de l’emprise sur
nous, nous resterons dans l’impossibilité d’en savoir davantage, c’est pourquoi
après avoir entrevu l’ouverture des portes du ciel, il nous semble bien brutal
de revenir sur terre. Notre mission, en attendant la gloire promise, consistera
à rayonner de la joie parfaite que la foi en cet avenir met en nous. Notre
tâche est donc de rayonner de la joie qui vient d’en haut.
Pensez-vous
alors que l’Église accomplisse bien sa vocation quand nous l’observons d’un peu
près et que nous la regardons agir dans la société des hommes? En quoi
rayonne-t-elle de la joie qu’elle a reçue d’en haut ? C’est à se demander si
l’Église d’aujourd’hui, toutes dénominations confondues, est bien sûre
d’accomplir fidèlement les promesses dont elle a la charge. La plupart des
Églises se sont emparées à leur profit des promesses du Christ et elles se sont
empressées de s’octroyer le privilège de baliser les chemins du ciel. Chaque
Église, de rectifier son code de restrictions, chacun de dire, « hors de mon
Église, pas de salut », hors de nos sanctuaires, pas de salut, hors de nos
règles, pas de salut, hors de nos baptêmes , pas de salut, hors la confession
des péchés , pas de salut.
Notre
péché de tout temps a été de vouloir limiter les effets de la bonté et de
l’amour de Dieu sur les hommes. Nous cherchons, sans y arriver à canaliser le
souffle de l’Esprit vers nos institutions, si bien que nous contribuons à faire
croire au monde que Dieu a le visage de nos assemblées dominicale et qu’il s’identifie
à nos Églises et à nos codes de morale qu’il cautionne.
Nous
faisons comme s’il se trouvait à l’aise dans les sociétés que nous inventons.
Non, Dieu au contraire de nos églises rayonne de joie. Il ne limite pour
personne l’accès de son ciel, les règles de salut édictées par les hommes ne
sont pas les siennes puisqu’il a éradiqué toute forme de péché pour ceux qui
croient, il serait malvenue à nos Églises d’en conserver la trace.
Puissent
un jour nos propres institutions se sentir elles-mêmes libérées des contraintes
qu’elles imposent aux hommes et qu’elles se mettent à diffuser la joie qu’elles
ont la charge de répandre.
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