Chers lecteurs de ce blog, Nous avons pendant des années essayés de vous proposer un sermon à propos des textes de l’Évangile indiqués pour chaque semaine. Cette année nous allons rester fidèles aux autres textes. Pour les sermons concernant l’Évangile, il vous suffira d'indiquer leurs références sur votre moteur de recherche et vous trouverez les textes publiés les années précédentes.
2 Rois 5 :14-17
Guérison de Naaman le
« lépreux »
1 Naaman, le chef de l'armée du roi
d'Aram, était un homme important aux yeux de son seigneur ; il jouissait
d'une grande considération, car c'est par lui que le SEIGNEUR avait donné la
victoire à Aram. Mais cet homme, ce vaillant guerrier, était
« lépreux ». 2 Lors d'une expédition, des troupes araméennes avaient
ramené captive, du pays d'Israël, une petite fille. Elle était au service de la
femme de Naaman. 3 Elle dit à sa maîtresse : Oh ! si mon maître allait
chez le prophète qui est à Samarie, celui-ci le débarrasserait de sa
« lèpre » ! 4 Naaman vint dire à son seigneur : La jeune
fille d'Israël a parlé de telle et telle manière. 5 Alors le roi d'Aram
dit : Vas-y ; j'enverrai une lettre au roi d'Israël. Il partit en
prenant avec lui dix talents d'argent, six mille pièces d'or et dix vêtements
de fête. 6 Il apporta au roi d'Israël la lettre, où il était dit : Avec
cette lettre je t'envoie Naaman, mon serviteur, afin que tu le débarrasses de
sa « lèpre ». 7 Après avoir lu la lettre, le roi d'Israël déchira ses
vêtements et dit : Suis-je Dieu, pour faire mourir et pour faire vivre,
qu'il s'adresse ainsi à moi afin que je débarrasse un homme de sa
« lèpre » ? Constatez, je vous prie, qu'il me cherche
querelle ! 8 Lorsque Elisée, l'homme de Dieu, apprit que le roi d'Israël
avait déchiré ses vêtements, il fit dire au roi : Pourquoi as-tu déchiré
tes vêtements ? Laisse-le venir chez moi, je te prie, et il saura qu'il y
a un prophète en Israël. 9 Naaman vint avec ses chevaux et son char et s'arrêta
à l'entrée de la maison d'Elisée. 10Elisée envoya un messager lui dire :
Va te laver sept fois dans le Jourdain ; ta chair redeviendra saine, et tu
seras pur. 11 Naaman s'irrita ; il s'en alla en disant : Je me
disais : Il sortira et se tiendra devant moi, il invoquera le nom du
SEIGNEUR (YHWH), son Dieu, il agitera sa main sur l'endroit malade et
débarrassera le « lépreux » de sa « lèpre ». 12 Les fleuves
de Damas, l'Abana et le Parpar, ne valent-ils pas mieux que toutes les eaux
d'Israël ? Ne pouvais-je pas m'y laver pour devenir pur ? Il repartit
en fureur. 13 Mais ses serviteurs vinrent lui dire : Si le prophète t'avait
demandé quelque chose de difficile, ne l'aurais-tu pas fait ? A plus forte
raison s'il te dit : « Lave-toi et sois pur ! »
14 Il descendit alors et se plongea
sept fois dans le Jourdain, selon la parole de l'homme de Dieu ; alors sa
chair redevint comme celle d'un petit garçon : il était pur.
15 Il revint vers l'homme de Dieu, avec toute sa suite.
Lorsqu'il fut arrivé, il se présenta devant lui et dit : Je sais qu'il n'y
a pas de Dieu sur toute la terre, si ce n'est en Israël. Maintenant, accepte,
je te prie, un cadeau de ma part. 16 Elisée répondit : Par la vie du
SEIGNEUR, au service duquel je me tiens, je n'accepterai pas. Naaman insista
pour qu'il accepte, mais il refusa. 17 Alors Naaman dit : Dans ce cas, je
te prie, qu'on me donne, à moi, ton serviteur, de la terre, la charge de deux
mulets ; car je ne veux plus offrir ni holocauste, ni sacrifice, à
d'autres dieux qu'au SEIGNEUR (YHWH) .
Traduction de la Bible Second révisée. Pour ce sermon nous utiliserons toute la péricope et non pas seulement le passage en référence
Traduction de la Bible Second révisée. Pour ce sermon nous utiliserons toute la péricope et non pas seulement le passage en référence
Quand la
Bible attire notre attention sur un miracle, il ne faut pas se laisser
séduire par l’aspect merveilleux de la situation qu’elle présente, car le
miracle ne vise pas à provoquer notre admiration au sujet d’un personnage particulier
qui aurait été méritant des faveurs de Dieu, si c’est ce que nous cherchons à y découvrir, nous ferions fausse
route. Le miracle vise avant tout à nous
révéler un aspect de Dieu auquel nous n’aurions pas encore prêté attention.
Quel
serait ici le mérite de Naaman qui justifierait qu’il bénéficie de la
faveur de Dieu? Il serait un général
Syrien qui aurait vaincu les armées d’Israël grâce à la faveur de Dieu. Au premier abord, tout se passe comme si
Dieu était passé à l’ennemi et protégeait
l’adversaire. Mais la protection de Dieu n’aurait pas été aussi efficace qu’il
y paraît puisque Naaman fut frappé de la
lèpre, maladie entachée de la malédiction divine. Il y a ici une contradiction
dans les intentions divines que nous ne découvrirons peut-être pas. Certes, il
fut miraculeusement guéri, c’est le sujet du récit, mais au prix de notre
incohérence, c’est à se demander quel jeu Dieu joue ici ?
L’origine du miracle est suspecte elle aussi,
car le miracle se produira grâce à l’intervention audacieuse d’une jeune israélite capturée par les troupes de Naaman, réduite en esclavage par ses soins et mise au
service de sa maisonnée. C’est elle qui le mit sur la voie de la guérison en
parlant d’un prophète puissant en Israël capable de le guérir. C’est ainsi que
tout commença. A la fin du récit le
général ennemi fut guéri et la jeune esclave fut oubliée.
Il est difficile de raconter une histoire plus injuste et d’en rendre
grâce à Dieu.
Que le lecteur sache maintenant que
l’histoire fut écrite à l’époque où Israël était retenu en exil à Babylone.
Elle relaterait un événement qui s’était
produit 3 siècles plus tôt. On peut imaginer que la jeune fille puisse être
identifiée au peuple captif toujours en espoir de libération si bien qu’il est
vraisemblable d’imaginer que la jeune esclave espérait sa libération en
récompense du succès du voyage que de son maître allait entreprendre pour
obtenir sa guérison. C’est une extrapolation que l’on peut faire mais qui n’est
nulle part suggérée. On sait cependant que les prophètes de l’exil ont entretenu
l’espoir d’une libération qui ne se produisit que cinquante ans après le début de la captivité du peuple.
Même si le récit est allégorique, on comprend
mal pourquoi Dieu consentit à ce miracle en faveur d’un général
ennemi. A moins que l’universalisme
que l’on trouve alors dans les récits
des prophètes de l’exil soit en train de s’installer dans l’esprit des
narrateurs. Ce récit porte-t-il en lui l’espérance selon laquelle tous les
peuples seraient invités à rejoindre la foi d’Israël ? On nous montrerait
alors ici par quel chemin Dieu ferait passer tous les hommes pour les gagner à
sa cause.
Si derrière le personnage de Naaman, nous
voyons l’humanité en quête de Dieu, malade de sa propre ignorance et désireuse
de trouver la vraie voie de Dieu, mais
enfermée dans ses vanités humaines, si
derrière la jeune fille esclave, nous voyons les croyants d’Israël privés de
liberté lors de l’exil babylonien, confrontés aux injustices qui les accablent
et pourtant remplis d’espérance en ce Dieu qui sauve, si nous voyons dans tout
cela nos propres questionnements sur la foi, l’espérance et la présence de Dieu
dans le monde, nous risquons de découvrir comment Dieu aide les hommes à se
frayer un chemin au travers vicissitudes
du monde.
En écoutant ce récit dont nous n’avons pas de
raisons de douter de ses origines
historiques, nous gardons cependant à l’esprit l’idée que les écrivains
bibliques ont cherché à répondre aux questions qui habitaient l’esprit de leurs
contemporains au moment de l’exil. Dieu pouvait-il abandonner son peuple dans
la tourmente ? L’espérance qui l’animait encore était-elle
justifiée ? Dieu peut-il nous ab donner ?
Habités par ces questions, nous pouvons aller
à la rencontre de Naaman. Imbu de sa prestance de général vainqueur, il croit
qu’il peut se sortir de sa situation sans perdre sa prestance alors que la
maladie qui l’a atteint risque de le défigurer
et d’anéantir sa vie sociale. Le
statu de notable se croit supérieur à tous ceux qui lui sont inférieurs est
incompatible avec la vie que Dieu
propose à tout un chacun. Nous allons voir comment Dieu le conduit à renoncer à tout ce qui flatte son orgueil
pour le prix de la vie qu’il lui propose. Sa conversion à ce Dieu
qui fait cas de sa personne, indépendamment de ses privilèges va pourtant le rend heureux. C’est là que se tient le vrai
miracle.
Mais d’abord Naaman doit renoncer à tout ce qui le valorise à ses propres yeux.
Nous en avons l’énumération dans les préparatifs qu’il fait pour son voyage. Il
met dans ses bagages tout ce qui caractérise son rang, dix uniformes et
vêtements d’apparat, la lettre de recommandation du roi de Syrie dont seul un
haut dignitaire peut se prévaloir, une
escorte digne de son rang. Toute cette opulence a pour effet de produire la
terreur du roi d’Israël qui le reçoit et
qui croit déceler un piège dans tout cet artifice. Conduit chez le prophète
Elysée, puisque tel est le but de son voyage, celui-ci ne le reçoit pas et lui
fait dire d’aller se baigner dans un
ruisseau boueux, le Jourdain qui coule à
quelques dizaines de kilomètres de là. Ce n’est pas digne de lui et il se met
en colère devant ce manque d’égards à son endroit. Il faut la sagesse de ses
serviteurs pour qu’il ne reparte pas et obéisse à la recommandation du
prophète. Mais il n’est pas arrivé au
bout de ses peines. Il doit s’humilier lui-même, se défaire de ses beaux vêtements et se mettre à nu devant toute sa suite avant
d’entrer dans les eaux. C’est alors que se produisit le miracle.
Le miracle est-il dans sa guérison ou dans l’acceptation d’avoir reconnu qu’il était un simple
humain contraint par des événements indépendants de sa volonté à se
comporter comme un citoyen ordinaire. Le résultat de sa guérison le ramène à un
état d’ enfant. « Sa chair devint claire comme la chair d’un jeune
garçon » Cette remarque nous renvoie à la rencontre de Jésus avec Nicodème quand il lui dit : « si un
homme ne naît de nouveau, il ne peut entrer dans le Royaume de Dieu » Jean
3ss. Mais il n’est pas encore quitte. Sa fortune qu’il a emportée, que va-t-il
en faire ? Le prophète la dédaigne,
« Va en paix lui dit-il » en la refusant.
Pour en arriver à l’acte de foi qu’il
confesse alors, il a fallu l’intervention anonyme d’une modeste esclave victime
de ses propres faits d’armes, il a fallu l’action convaincante de tous ses
serviteurs qui l’ont accompagné et conseillé avec sagesse. Dieu a mobilisé tous ces hommes et ces femmes pour arriver à
sa conversion.
Et maintenant il appartient à chacun de se
demander où se situe vraiment le
miracle ? Il est sans doute dans tout ce déploiement de personnages que
Dieu a mis en action pour le convaincre de partir et pour l’accompagner tout au long de son voyage. Il est aussi,
bien entendu dans la vie nouvelle dont il se trouve revêtu en sortant de l’eau,
comme une anticipation du baptême.
Si
l’histoire est allégorique, nous
trouverons dans l'explication du retour d’exil d’Israël
la récompense que la jeune esclave espérait .
Mais direz-vous encore : « Vous n’avez pas parlé de Jésus dans
tout ce sermon ! » Il n’est pas besoin de parler de lui pour qu’il
soit présent. C’est bien à cause de
Jésus et de son regard sur les Ecritures
que j’ai compris ce texte comme j’ai tenté de l’expliquer. Si non j’aurais considéré
que Dieu avait été injuste et qu’il n’aurait pas sauvé Naaman par grâce mais
pour d’autres intérêts. Si l’histoire a
une issue favorable pour Naaman et l’a amené à la découverte de la patience, de
l’amour et de la persévérance de Dieu,
l’histoire nous dit aussi que Dieu déploie la même force et la même énergie
pour chacune et chacun de nous, et
certainement aussi pour la jeune
esclave dont nous avons interprétée l’issue heureuse par allégorie. Cela n’a sans
doute pas échappée à la sagacité de l’écrivain biblique qui a fait confiance à
notre culture biblique pour nous laisser le découvrir.
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