Exode
22/20- 26
20Tu n'exploiteras pas l'immigré, tu ne l'opprimeras
pas : vous avez été des immigrés en Égypte.
21Vous n'affligerez jamais la veuve ni l'orphelin.
22Si tu les affliges et qu'ils crient vers moi,
j'entendrai leurs cris ;
23je me mettrai en colère, et je vous tuerai par
l'épée : vos femmes seront veuves, et vos enfants orphelins.
24Si tu prêtes de l'argent à quelqu'un de mon
peuple, au pauvre qui est chez toi, tu ne te comporteras pas à son égard comme
un prêteur sur gages : tu n'exigeras pas de lui un intérêt.
25Si tu prends en gage le manteau de ton prochain,
tu le lui rendras avant le coucher du soleil ;
26car sa seule couverture, c'est le manteau qu'il a
sur la peau : dans quoi coucherait-il ? S'il crie vers moi, je
l'entendrai, car je suis clément.
Voir aussi le fils prodigue Luc 15 :11-32
Le Livre
de l’Exode mériterait qu’on s’y attache davantage, car placé en deuxième
position des livres de la Bible, son message est perçu par ceux qui nous l’ont
transmis comme essentiel pour nous dire la révélation de Dieu. Il nous le
présente comme un Dieu qui libère les
hommes de leurs oppresseurs. ( Nous en éclairerons la lecture du fragment
proposé pour ce jour par la parabole du fils prodigue dont nous garderons les
péripéties présentes à l’esprit.) En
fait ce n’est pas Dieu qui libère vraiment, comme ce n’est pas le Père du fils prodigue qui
rend son fils libre, mais il lui en
offre la possibilité. Ainsi Dieu pousse
les hommes à se libérer eux-mêmes et il les accompagne dans cette entreprise.
Sous son
impulsion, les hommes deviennent les instruments de leur propre destin et sous l’inspiration de Dieu ce destin leur
devient favorable. Ainsi, ceux qui nous
ont transmis ces récits ont cherché à nous dire que l’esprit des hommes était
habité par le désir de ne pas vivre captifs des autres quels qu’ils soient, et
que Dieu se trouvait sur le chemin de ceux qui veulent œuvrer à réaliser par eux-mêmes leur propre
histoire. Dieu n’est sans doute pas un Dieu interventionniste qui agirait avec puissance dans le cours des événements,
il se contenterait d’intervenir auprès des hommes par la puissance de son
esprit qui sans cesse les pousse à se prendre eux-mêmes en charge et à
construire leur avenir.
Bien
évidemment, les Hébreux qui sont les héros
de cette histoire vont refuser cette image de Dieu, ils vont même le
provoquer pour qu’il intervienne et Dieu, pour que l’histoire ait du sens accepte d’être perçu comme tel. Il
affirme sa puissance devant le pharaon. Il écarte la mer pour rendre possible le passage des fugitif
vers une terre de liberté, il couvre les buissons de substance nourrissante
pour que le peuple en fuite ne meure pas de faim, il cache des sources sous les
rochers pour qu’il n’ait plus soif.
Cette image de Dieu qui intervient quand on le supplie cache l’autre image de Dieu, celui qui inspire, qui
donne espoir et montre la route à suivre
Ainsi,
deux images de Dieu rivalisent-elles sous nos yeux alors que nous parcourons ce
livre. Il est bien évident que c’est l’image de Dieu qui intervient qui a la
faveur des auteurs de ce récit mais que notre raison récuse. Ces deux images de
Dieu correspondent aussi aux aspirations profondes de l’humanité. En effet, si les humains aspirent à être pris par la
main pour avancer, s’ils aspirent à être protégés quand ils se sentent menacés et s’’ils espèrent que Dieu fera face pour eux aux adversités, leurs pensées profondes s’opposent aussi à ce Dieu auquel ils aspirent mais qui les place sous la dépendance de ses
interventions, comme par magie.
Il y a donc
un autre aspect du divin auquel nous aspirons. Il correspond à ce moment où quittant l’enfance, nous
cherchons à rejeter la tutelle de nos parents pour se laisser habiter par des idées
nouvelles et prendre en charge notre vie nous-mêmes. Apparemment c’est cet aspect de Dieu qui nous pousse à
devenir responsables de nous-mêmes, qui prend le pas sur cet autre
aspect de Dieu dans cette histoire. Mais
ces forces qui émanent de Dieu rivalisent entre elles et nous préférons que
Dieu réalise nos désirs de vie plutôt que de les réaliser nous-mêmes sous son
inspiration. Malgré le désir d’indépendance que Dieu nous inspire, malgré le
désir d’assumer nous-mêmes nos responsabilités,
nous n’osons pas le mettre en pratique et nous cherchons quand même à nous réfugier sous la protection de ce Dieu que nous aimerions
voir agir à notre place.
C’est
dans cette double tension vis-à-vis de
Dieu que nous nous réfugions aujourd’hui. Nous refusons ce Dieu
interventionniste au nom de nos philosophies contemporaines et au nom de la
science qui a lentement édulcoré cette image de Dieu. Mais nous refusons aussi l’autre image de
Dieu, car nous voulons être maîtres de notre destin en contestant le fait que
Dieu puisse nous inspirer ce que nous devrions faire ou penser. Nous pensons qu’il peut y avoir des idées nouvelles qui
font l’économie de Dieu. Nous voila dans la situation du fils prodigue qui veut
faire sa route tout seul et qui se croyant capable de diriger sa vie tout seul se prive de son père et se trouve
très vite en situation d’échec. Il se précipite alors dans les bras paternels espérant que celui-ci interviendra, comme
quand il était un petit enfant.
Les
peuples et les individus en passent tous par là et Jésus a bien vu la situation
quand il raconte cette parabole célèbre du fils prodigue. La parabole s’achève
sur un question ouverte et on ne sait pas comment elle peut finir. Mais
le livre de l’Exode ne s’arrête pas sur une interrogation comme la parabole, au
contraire il s’achève sur l’espérance d’une marche en avant en compagnie de
l’Eternel dans le respect de sa volonté.
Mais en
quoi consiste la volonté de Dieu ? Elle réside dans la découverte d’un secret concernant le mieux vivre ensemble dont dépend la réussite de toute entreprise
humaine. Ce secret, chacun devra le
découvrir mais aura du mal à l’accepter.
Il réside dans la manière dont chaque
individu et chaque peuple se comportera vis
à vis de l’autre. L’autre, le
prochain le frère, doit avoir priorité dans toutes nos actions.
C’est ce
que le frère du fils prodigue n’a pas
compris quand il reste à la porte du
jardin pour bouder au lieu d’accueillir son frère. Cette découverte de la valeur de l’autre doit
triompher de notre égoïsme et contient le secret de la vie, car l’amour qui lui donne sa valeur est la
définition même que Jésus donne à Dieu. Ce Dieu cesse alors d’être le Dieu interventionniste pour devenir
celui qui nous pousse à vivre en
compagnie des autres car c’est la seule manière d’accomplir heureusement son
destin
Encore
une remarque avant de clore cet entretien.
Si dans le commentaire qui est fait de la loi dans les versets qui ont
été lus pour soutenir ce sermon les écrivains bibliques ont laissé planer l’idée de mort contre ceux
qui ne la respecteraient pas, il ne s’agit pas d’une mort due à la condamnation
des transgresseurs par Dieu, bien que cela soit suggéré, mais il s’agit là de
la conséquence inéluctable du manque
d’amour à l’égard de l’autre, du prochain, ou
du frère. En fait ce n’est pas Dieu qui punit mais c’est la conséquence
de nos comportements discriminatoires à
l’égard des autres que l’on voudrait
faire endosser à Dieu mais qui découle
tout naturellement du mauvais
comportement que nous pourrions avoir avec les autres.
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