La parabole des vignerons dimanche 2 octobre 2011
Ecoutez une autre
parabole. Il y avait un maître de maison qui planta une vigne. Il l'entoura
d'une haie, y creusa un pressoir et y construisit une tour, puis il la loua à
des vignerons et partit en voyage. 34 A l'approche des vendanges, il envoya ses
esclaves chez les vignerons, pour recevoir les fruits de la vigne. 35 Les
vignerons prirent ses esclaves ; l'un, ils le battirent ; un autre, ils le
tuèrent ; un autre encore, ils le lapidèrent. 36 Il envoya encore d'autres
esclaves, en plus grand nombre que les premiers ; les vignerons les traitèrent
de la même manière. 37 Enfin il leur envoya son fils, en disant : « Ils
respecteront mon fils ! » 38 Mais quand les vignerons virent le fils, ils se
dirent : « C'est l'héritier ! Venez, tuons-le, et nous aurons son héritage. »39
Ils le prirent, le chassèrent hors de la vigne et le tuèrent. 40 Lorsque le
maître de la vigne viendra, comment traitera-t-il donc ces vignerons ?
Si on cherche à trouver le sens de
cette parabole en regardant seulement le titre qu’en donnent les traductions
les plus usuelles de nos Bibles, on constatera que les éditeurs nous engagent à
lire ce texte comme si les ouvriers qui travaillent dans la vigne étaient
mauvais.
En effet les titres qui sont donnés à
ce passage dans les Bibles sont les suivants:
- parabole des vignerons ( Colombe)
- parabole des vignerons homicides (
Jérusalem)
- parabole des vignerons mauvais (
Chouraqui)
- Les métayers révoltés ( TOB)
Un seul de ces titres est neutre par
rapport aux vignerons. Les autres ont déjà formulé un jugement négatif sur eux.
Avant même d’avoir commencé la
lecture du texte, les vignerons sont désignés comme des méchants, si bien que
notre opinion est déjà faite avant d’avoir commencé à lire. Il n’est pourtant
pas évident que les vignerons soient coupables. Cela dépend du regard que l’on
porte sur le droit en vigueur. Les éditeurs font intervenir dans les titres
qu'ils ont donnés les reflets du droit de notre société occidentale orientée
vers le respect absolu de la propriété. Si nous lisions cette parabole dans une
autre société que la nôtre, celle où la maffia par exemple règne en maître on
donnera d'autres titres que ceux que j'ai cité: on aura par exemple:
- histoire d'une révolution avortée
ou
- échec de la libération.
Si on considère que la terre
appartient à celui qui la cultive, on aura encore un autre regard sur cette
histoire.
N’oublions pas qu’un des textes
fondateurs de la Bible nous parle de la révolte des esclaves égyptiens conduits
par Moïse avec la bénédiction de Dieu. Pour Moïse l'aventure a réussi, pour les
vignerons, elle a échoué.
Concentrons-nous sur l’attitude du
propriétaire. Il se comporte d'une manière irresponsable et lâche. Je ne peux
en aucune manière l'identifier à Dieu. Il abandonne les vignerons à leur tâche
et se contente d'envoyer des serviteurs pour réclamer son argent. Il n'établit
aucune relation humaine avec ses ouvriers, il n'y a aucun échange. Il ne
reconnaît pour justifier son comportement que le droit établi en faveur des
privilégiés. Comble de lâcheté le propriétaire envoie son propre fils mater la
révolte, et ce fils se fait tuer. Sans que l'on ne sente aucun chagrin chez
lui, on nous décrit simplement les représailles qu'il ordonne.
Peut être êtes vous irrités par cette
entrée en matière, peut-être vous demandez-vous si je n'essaye pas de justifier
quelques concepts appartenant au courants de la théologie de la libération
chers aux pays d'Amérique Latine et condamnés par le pape ?
Je pense seulement que si on veut
comprendre le message de Jésus, il faut le nettoyer de tous ce que les siècles
ont accumulé de traditions à son sujet. Cela nous amène dans un premier temps à
comprendre que si Jésus donne tort aux vignerons, il ne leur donne pas tort
pour les raisons sociales qui nous viennent à l'esprit. Jésus ne leur donne pas
tort d'avoir molesté les serviteurs et tué le fils, même si cela nous choque,
il leur donne tort d'avoir voulu contraindre leur maître à changer de
comportement vis à vis d'eux.
Il leur donne tort d'avoir rompu le
contrat qui les liait à leur maître en lui confisquant le droit d'être le
maître. Qu'il soit loin ou près, qu'il soit bon ou mauvais, que sa propriété de
la terre soit légitime ou pas, le problème n'est pas là. Il est dit qu'il loua
la terre aux vignerons, c'est à dire que les vignerons n'étaient pas des
esclaves, mais qu'ils étaient liés au maître par contrat librement consenti.
Ils devaient normalement payer au maître ce qui lui revenait sans tenir compte
de l'éloignement qui les séparait. En agissant comme ils ont fait, ils ont
voulu contraindre le maître à exister d'une autre manière, ils ont voulu le
reconstruire à leur manière et en fait ils le contraignent à ne pas exister,
c'est pourquoi ils tuent le fils. Plus de fils, plus d’héritier, plus de
maître. Telle est leur logique.
C'est là où nous en sommes. Oublions
pour un temps le propriétaire terrien et entrons dans l'allégorie de la parabole
telle qu'elle nous est suggérée par le prophète Esaïe ( Es. 5/1-7 (1) ), dont
Jésus emprunte une partie du texte. Considérons, pour un temps tout au moins,
que le propriétaire représente Dieu, le vignerons sera donc celui qui fait
contrat avec Dieu, c'est donc le juif pratiquant, circoncis le 8 eme jour,
fidèlement assidu aux pèlerinages et aux sacrifices et par extension, ce sera
le bon chrétien, baptisé, confirmé et bien dans sa peau de membre de l'Eglise.
C'est donc le fidèle que nous sommes qui est mis en garde afin qu'il ne
dénature pas la personne de Dieu, et qu'il ne tue pas Dieu en croyant bien
faire.
Quand je dis le "bon
chrétien", je devrais dire que tout chercheur de Dieu est concerné, car le
chercheur de Dieu est celui qui est déjà en train d'établir un contact avec son
Seigneur: Toute personne qui se sent liée à Dieu est concernée de près ou de
loin par cet avertissement qui lui est fait de ne pas dénaturer la réalité de
Dieu en le modelant à notre manière. C'est en agissant ainsi qu'on le tue.
Pour éviter cela, Dieu a suscité de
nombreux témoins dont l’Écriture nous rapporte l’histoire. Ils ont dit à leur
manière la vraie nature de Dieu. Pourtant, beaucoup de gens, et même parfois
des prédicateurs éliminent des aspects de Dieu qui ne leur conviennent pas,
ainsi le déforment-ils au risque de le tuer. Ils prêchent un universalisme béat
en prétendant qu'il suffit de faire le bien! Mais qu'est-ce que faire le bien ?
Ils disent qu'il suffit d'aimer son prochain! Mais qui est mon prochain? Ils
disent que Dieu pardonne toujours. Mais ils oublient que le pardon pour exister
doit être précédé par la repentance et qu'il doit être suivi par un changement
d'attitude.
Nous sommes invités à mieux lire
l’Écriture, et à approfondir notre approche de la foi pour ne pas tomber dans
le piège qui consiste à faire comme les autres, à suivre naïvement le troupeau,
à faire confiance à la tradition aussi respectable soit-elle. Or la parole de
Dieu récuse le bon droit de la tradition, parce qu'elle nous provoque toujours
à la nouveauté. Elle nous provoque là où nous n'avons pas envie qu'elle nous
interpelle. Elle nous propose des itinéraires que nous n'avons pas envie de
suivre, elle met sur notre chemin des prochains que nous n'avons pas envie
d'aimer.
Ni les patriarches, ni les prophètes
ni les apôtres n'ont souhaités suivre les chemins que Dieu les a invités à
emprunter; mais ils les ont suivis à cause justement de cette relation étroite,
puisée dans l’ l’Écriture, qu'ils ont établie dans la vérité avec Dieu et que nous
sommes tous invités à établir.
Je ne voudrais pas être mal compris.
Je ne voudrais pas que l'un ou l'autre parmi-vous se mette à penser à la suite
de ce texte que Dieu est comme le maître de la parabole et qu'il se venge au
point de détruire ceux qui n'entrent pas dans ses projets et qui dénaturent son
image. Dieu ne ressemble pas au propriétaire de la vigne, pas plus que vous ne
ressemblez à ces vignerons mal intentionnés. Cette histoire nous est racontée
pour nous dire que quand on veut modifier l'image de Dieu, Dieu ne répond pas à
nos désirs et ne se conforme pas à ce que nous voulons.
N'imaginez pas, sous prétexte d'être
fidèles au texte que Dieu va punir les infidèles comme le fait le maître de ce
récit, au contraire, vous le savez bien, Dieu va s'acharner à gagner à lui tous
les hommes en commençant par les vignerons de la parabole. C'est là que réside
la difficulté de cette parabole. Elle ne nous demande pas d'identifier les
personnages du récit avec Dieu ou avec nous-mêmes. Elle nous demande d'apprécier
la situation ici décrite afin que nous corrigions, en fonction de ce que nous
avons compris nos comportement défectueux à l'égard de Dieu.
Les illustrations proviennent d'
enluminures de l'Evangéliaire d'Echtermach
(1)
Esaïe 5:1-7
1 Laissez-moi, je vous prie, chanter pour mon ami
le chant de mon bien-aimé pour sa vigne.
Mon ami avait une vigne
sur un coteau fertile.
2 Il en travailla la terre, ôta les pierres
et y planta un cépage de choix ;
il bâtit une tour au milieu d'elle,
il y creusa aussi une cuve.
Il espérait qu'elle produirait des raisins,
mais elle a produit des fruits puants !
3 Maintenant, habitants de Jérusalem, hommes de Juda,
soyez juges, je vous prie, entre moi et ma vigne !
4 Qu'y avait-il encore à faire à ma vigne
que je n'aie pas fait pour elle ?
Pourquoi, quand j'espérais
qu'elle produirait des raisins,
a-t-elle produit des fruits puants ?
5 Maintenant laissez-moi, je vous prie, vous faire savoir
ce que je ferai à ma vigne.
J'en arracherai la haie,
pour qu'elle soit dévorée ;
j'ouvrirai des brèches dans sa clôture,
pour qu'elle soit foulée aux pieds.
6 Je la réduirai en ruine :
elle ne sera plus taillée, ni sarclée ;
les ronces et les épines y croîtront.
Je donnerai mes ordres aux nuages,
afin qu'ils ne laissent plus tomber de pluie sur elle.
7 Or la vigne du SEIGNEUR (YHWH) des Armées,
c'est la maison d'Israël,
et les hommes de Juda,
c'est le plant qu'il chérissait.
Esaïe 5:1-7
1 Laissez-moi, je vous prie, chanter pour mon ami
le chant de mon bien-aimé pour sa vigne.
Mon ami avait une vigne
sur un coteau fertile.
2 Il en travailla la terre, ôta les pierres
et y planta un cépage de choix ;
il bâtit une tour au milieu d'elle,
il y creusa aussi une cuve.
Il espérait qu'elle produirait des raisins,
mais elle a produit des fruits puants !
3 Maintenant, habitants de Jérusalem, hommes de Juda,
soyez juges, je vous prie, entre moi et ma vigne !
4 Qu'y avait-il encore à faire à ma vigne
que je n'aie pas fait pour elle ?
Pourquoi, quand j'espérais
qu'elle produirait des raisins,
a-t-elle produit des fruits puants ?
5 Maintenant laissez-moi, je vous prie, vous faire savoir
ce que je ferai à ma vigne.
J'en arracherai la haie,
pour qu'elle soit dévorée ;
j'ouvrirai des brèches dans sa clôture,
pour qu'elle soit foulée aux pieds.
6 Je la réduirai en ruine :
elle ne sera plus taillée, ni sarclée ;
les ronces et les épines y croîtront.
Je donnerai mes ordres aux nuages,
afin qu'ils ne laissent plus tomber de pluie sur elle.
7 Or la vigne du SEIGNEUR (YHWH) des Armées,
c'est la maison d'Israël,
et les hommes de Juda,
c'est le plant qu'il chérissait.
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