Marc 1 : 21-28
22 On était frappé par son enseignement, car il enseignait en homme qui a
autorité, et non pas comme les scribes.
23 Or, il y avait dans leur synagogue un homme tourmenté par un esprit impur,
qui se mit à crier :
24 « Que nous veux-tu, Jésus de Nazareth ? Es-tu venu pour nous
perdre ? Je sais qui tu es : tu es le Saint de Dieu. »
25 Jésus l’interpella vivement : « Tais-toi ! Sors de cet
homme. »
26 L’esprit impur le fit entrer en convulsions, puis, poussant un grand cri,
sortit de lui.
27 Ils furent tous frappés de stupeur et se demandaient entre eux :
« Qu’est-ce que cela veut dire ? Voilà un enseignement nouveau, donné
avec autorité ! Il commande même aux esprits impurs, et ils lui
obéissent. »
28 Sa renommée se répandit aussitôt partout, dans toute la région de la
Galilée.
Le début
de l’Évangile de Marc nous dit comment ici, tout a commencé. Dans un décor tout
à fait banal, dans une
obscure synagogue d’une petite
ville de Galilée, Jésus va prononcer
quelques simples paroles qui vont
remettre en cause d’une manière radicale toutes les idées reçues jusqu’alors
sur Dieu et sur l’origine du monde. Pourtant le lecteur que nous sommes ne
comprend pas ce qu’il y a de révolutionnaire dans l’événement qui est ici décrit. Il nous est déjà acquis que Jésus allait tout remettre en cause, ça on le savait !
Mais il semblerait qu’il y a quelque chose d’utopique à essayer de nous faire
comprendre cela, à partir d’un événement aussi ténu que celui qui est rapporté
ici. Si on veut y comprendre quelque chose, Il va nous falloir faire un l’effort, pour oublier
ce que nous savons et nous laisser
guider vers Dieu par Jésus lui-même. Même
si l’événement semble banal apriori, il va remettre définitivement en cause nos conceptions habituelles sur Dieu.
Si le
décor est banal, le personnage dont il est question ici, l’est aussi. C’est un homme apparemment dérangé dans sa tête. Il
n’est sans doute pas un fou, il est
quelqu’un qui n’est pas fini, comme on disait dans mon village, un simple d’esprit
qui interpelle en termes grandiloquents Jésus qui est ici un simple prédicateur
de passage. Une seule parole de sa part suffit cependant à remettre les choses en place et à guérir le
provocateur. Il n’en faut pas moins pour que le rédacteur de l’Évangile tire
une conclusion en forme de question qui
concerne tout l’Évangile. «
Est-ce là une nouvelle doctrine donnée
avec autorité » ? La question vaut affirmation ! C’est une
nouvelle doctrine dont l’origine n’est pas dite, mais il nous est facile de déduire que c’est de Dieu qu’elle reçoit son origine, le terme autorité utilisé
ici dit bien sa provenance.
La
nouvelle va désormais accompagner tous les déplacements de Jésus et se répandre
comme une tache d‘huile pour mettre en cause la
religion officielle et accréditer quelque chose de radicalement nouveau,
comme le suggère ce même Évangile de Marc dans ses derniers versets. Il s’achève en effet, sur la description symbolique du voile du
Temple qui se déchire de bas en haut et sur l’affirmation donnée par un
païen : « cet homme était vraiment le Fils de Dieu » (Marc
15/38-39). L’essentiel a été dit. Cette nouvelle doctrine a anéanti le privilège du temple ainsi que le fondement de la religion
juive, et elle accrédite l’autorité de
Jésus qui se trouve reconnu comme fils de Dieu par un païen issu des nations. Le judaïsme est dépassé,
l’univers s’élargit au monde entier.
Quelle
est donc cette nouvelle doctrine que l’on a eu du mal à discerner pour
l’instant ? C’est une simple parole qui a donné autorité à Jésus et qui remet en cause l’ordre normal des choses.
On est en présence d’un homme qui est victime d’un mal qui ne lui vient pas de
Dieu, puisque Jésus détruit son mal en une seule parole. Pour ne pas qu’il y ait
confusion on a bien précisé que Jésus agissait en tant que saint de Dieu. Le
mal ne peut donc venir de Dieu. Les maladies, voire même les catastrophes,
n’ont donc pas Dieu pour origine, sans quoi Dieu ne cautionnerait pas le fait
qu’on les domine en son nom. Dieu ne se sert donc pas de nos maux pour nous
punir de nos fautes passées connues ou
inconnues, comme on le croyait
habituellement. Il n’intervient pas par le mal pour produire du bien en nous. Si
ce n’est pas Dieu qui envoie nos épreuves, qui est-ce ? On ne sait pas, mais il est
clair aussi qu’elles ne sont pas sous le
contrôle de Dieu, mais par l’action de Jésus elles y entrent.
En
intervenant, Jésus prive l’esprit impur
de parole : « tais-toi » lui dit-il. Le fait que Jésus l’invite
à se taire laisse entendre le
pouvoir que la parole va prendre non seulement dans ce récit, mais
dans beaucoup d’autres. C’est par une parole que l’action du mal est détruite et que l’homme possédé redevient
normal. La parole de Jésus devient
créatrice et l’action de l’esprit impur est anéantie. Par la parole de Jésus,
Dieu reprend le pouvoir sur cet homme et l’esprit impur le perd. L’homme entre
alors dans l’univers des gens normaux ?
Vous avez
sans doute remarqué que nous étions
entrés dans le cadre de la création, tel que le récit des origines nous la
raconte. Il y est dit, qu’au commencement Dieu se trouva confronté par le chaos.
Il le soumit à sa discrétion par sa
parole. C’est ainsi que la Bible en son tout début nous raconte la
création. On aurait tort de penser que
ça s’est arrêté là. Mais ce ne fut qu’un
début et la création a continué depuis l’hors à se faire, car il y a encore dans le monde de
nombreux endroits où le chaos n’est pas encore maîtrisé et continue à défier
Dieu, jusqu’à ce que Dieu en prenne possession avec l’aide de l’homme qu’il s’est choisi pour collaborateur. C’est
la scène à laquelle nous venons d’assister. Ce n’était pas l’expression d’une
nouvelle doctrine, c’était la réalité de Dieu.
Mais depuis belle lurette, on a oublié que Dieu avait voulu depuis
l’origine que les choses en soient
ainsi. Etait-ce à cause du
péché ? Les théologiens de tous les temps se sont engagés dans cette
brèche. Explication facile ! Trop facile ! Or Jésus n’utilise pas ici
ni le mot « péché » qu’il ne prononce pas, il ne fait même pas
allusion à l’idée ! Il nous
provoque ainsi dans nos certitudes théologiques. Ce ne serait cependant pas une
raison suffisante pour ne pas tenir
compte des effets du péché sur nous et sur notre relation à Dieu.
Il
ressort de cette première approche que la nouvelle doctrine dont il est fait
état ici correspond à cette capacité que les humains ont de collaborer avec
Dieu pour que le processus de création continue,
et c’est pour cela que Dieu leur a réservé
un sort particulier dans l’ordre de la création. Son rôle est de
permettre à la nature, pas encore totalement maîtrisée par Dieu de se trouver
en harmonie avec lui.
Bien
évidemment l’homme a du mal à entrer dans cette manière de voir les choses. Le
péché, auquel nous avons fait une brève allusion, consiste à remettre ce
principe en cause et à rendre difficile toute collaboration entre l’homme et Dieu.
C’est dans ce domaine que Jésus va jouer un rôle particulier, celui de rétablir
l’idée qu’une collaboration est possible
entre les hommes et Dieu. C’est ce qu’on appelle le salut. C’est le grand défi
que Jésus propose à l’humanité. Plusieurs doctrines ont été élaborées pour
soutenir cette idée. Mais au lieu de chercher à voir ce qui les harmonise les
hommes se plaisent à les opposer et à
rendre, encore aujourd’hui, le projet de Dieu difficile à comprendre.
C’est
maintenant que l’on peut parler du rôle
des scribes qui jouent un rôle négatif
dans ce récit qui fait une brève allusion à leur action en son tout début. Il y est dit simplement qu’ils n’avaient pas d’autorité, c'est-à-dire
que leur enseignement ne permettait pas de voir réellement comment Dieu et les
humains pouvaient collaborer. Ils se s’appuyaient
que sur leurs théories qui contrairement à ce qu’ils croyaient et enseignaient ne
relevaient pas de l’autorité de Dieu. Ils privaient ainsi le monde de l’action
bénéfique de Dieu qui ne pouvait pas exercer pleinement sa fonction de
créateur. Ce qui semble important dans
tout cela c’est que Dieu cherche la collaboration des hommes et que l’amour
qu’il a pour eux est susceptible d’annuler l’action du péché qui fait obstacle
à la compréhension de la volonté de Dieu.
Apparemment
tout a été dit et se trouve confirmé par le développement qui s’en suivra dans le cours de l’Évangile. La résurrection
de Jésus détruit tous les obstacles qui
pourraient encore nous séparer de Dieu et nous permettent désormais de collaborer avec lui pour que se
poursuive l’œuvre de la création entreprise
par lui dès l’origine des temps pour se poursuivre jusqu’en éternité.
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