mardi 15 mai 2018

Jean 15/26-27 et Jean 16/12-15 20 mai 2018 Pentecôte 2018



Jean 15 :26« Celui qui doit vous venir en aide viendra : c'est l'Esprit de vérité qui vient du Père. Je vous l'enverrai de la part du Père et il me rendra témoignage. 27Et vous aussi, vous me rendrez témoignage, parce que vous avez été avec moi depuis le commencement. 
Jean 16 :12« J'ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais vous ne pourriez pas les supporter maintenant. 13Quand viendra l'Esprit de vérité, il vous conduira dans toute la vérité. Il ne parlera pas en son propre nom, mais il dira tout ce qu'il aura entendu et vous annoncera ce qui doit arriver. 14Il révélera ma gloire, car il recevra de ce qui est à moi et vous l'annoncera. 15Tout ce que le Père possède est aussi à moi. C'est pourquoi j'ai dit que l'Esprit recevra de ce qui est à moi et vous l'annoncera. »



« Je suis maître de moi, comme de l’univers, je le suis, je veux l’être » disait  l’empereur Auguste sous la plume de Pierre Corneille dans Cinna. De tels vers ont accompagné  la jeunesse des plus anciens parmi nous, à l époque où on apprenait par cœur les vers célèbres de la poésie classique. A force de les réciter sans faute sous peine de recevoir de mauvaises notes, les jeunes élèves ont été imprégnés d’une philosophie qui a sans doute  durablement marqué leur vie. Ils ont été ainsi préparés à ouvrir leur existence à un avenir glorieux, tel que semblait l’annoncer le théâtre classique.

C’était l’époque des trente glorieuses a-t-on dit,  la prospérité caressait l’avenir d’un monde moderne après  de longues années de troubles et d’agitation. Les guerres coloniales s’apaisaient et  la tourmente de la dernière guerre mondiale était oubliée. L’homme civilisé partait  à la conquête d’un avenir heureux et prospère. A quoi bon alors s’encombrer de problèmes spirituels puisque la  science et la technique devaient  maîtriser toutes les difficultés qui auraient pu surgir. Dieu avait-il encore sa place dans un univers que l’intelligence humaine devait désormais maîtriser ?  On  envisageait  la conquête des  astres après avoir pour la première fois mis les pieds sur la lune.

Aveuglé par sa réussite dont il trouvait les origines dans la littérature, l’homme moderne prenait lentement la place de Dieu. Une telle attitude relève bien évidemment de la tentation de l’homme qui ne trouve aucune limite à son ambition quand tout va bien, mais  quand les choses se mettent à mal tourner, c’est une autre histoire ! Naturellement cette euphorie n’a pas durée, mais la foi en Dieu est-elle revenue ?

On ne se  retourne pas tout naturellement vers Dieu,  quand on l’a abandonné. Quand  les événements se retournent contre nous, on se replie plutôt sur soi-même en se culpabilisant, comme si on avait mal agi et que la cause de notre échec était liée à une erreur  d’appréciation. Il ne s’agit pas de remettre en cause l’intelligence de l’homme, c’est son comportement qui l’est  et qui a déséquilibré tout le système pense-ton. Ce n’est pas faux !

Mais si on se culpabilise en s'accusant de ce qui ne va pas, on croit aussi trouver la réponse dans le mauvais comportement des autres. On considère que la cause de notre désenchantement est dans la perte de notre confiance  dans les hommes  qui avaient pour charge la responsabilité de gérer les nations. On se retourne contre ceux qui avaient le pouvoir et qui tenaient  en main l’avenir de notre société. Les groupes humains s’accusent  alors  mutuellement d’être la cause du dysfonctionnement général.

C’est à nouveau  dans la littérature que l’on trouve l’illustration de ce phénomène. Jean de La Fontaine nous raconte dans « les animaux malades de la pestes »  le désarroi du petit peuple des animaux  en proie à une épidémie et qui croit trouver son salut en sacrifiant un pauvre âne qui avait brouté quelques brins d’herbe dans le champ d’un autre.
 
C’est maintenant que nous rejoint le texte de l’Évangile :       « Quand sera venu l’Esprit de vérité, dit Jésus, il vous conduira dans toute la vérité ».  Un peu plus haut dans l’Évangile on nous décrit l’Esprit saint comme étant un          « consolateur » ou mieux, comme un « avocat ». Jésus n’a pas besoin d’emprunter  ce long détour  par la littérature classique, comme je l’ai fait, pour pointer du doigt les causes  de notre désenchantement. Jésus sait fort bien notre propension à nous défausser sur les autres des erreurs  entraînées par  nos mauvais  comportements. Depuis Abel assassiné par son frère qui l'accusait d' avoir accaparé les faveurs de Dieu, les accusations n’ont fait que se répéter au cours des siècles. Dieu sait nos penchants à l’esquive, c’est pourquoi il  nous  montre qu’on ne peut pas s’en sortir sans son aide.

Un avocat nous est promis pour arranger les choses. On comprend tout naturellement que les hommes  s’étant écartés de Dieu pour mener leurs affaires à leur guise ont besoin d’un avocat pour se réconcilier avec lui. Si on a mis Dieu à l’écart,  il est nécessaire  qu’on nous aide à retrouver un chemin d’entente avec lui. En fait il n’en est rien. Avant de se réconcilier avec Dieu, il faut avant tout se réconcilier avec les hommes, car si nous   accusons  certains d’avoir rompu l’équilibre qui nous menait à la prospérité, il faut aussi se réconcilier avec ceux qui nous accusent à notre tour d’avoir contribué à ce même déséquilibre. Cette double accusation est incompatible avec une bonne entente avec Dieu.  C’est pourquoi il s’en mêle.

Mais si Dieu s’en mêle, son action n’est pas forcément visible immédiatement. Il ne cherche pas à faire de miracle en s’immisçant dans nos affaires. Il ne cherche pas à   négocier notre retour vers lui  en échange d’un progrès technique retrouvé. Si Dieu intervient, c’est en secret, dans l’intimité de chacun de  nous. Il nous demande de faire une démarche vers lui. Si Dieu nous donne rendez-vous au fond de notre  cœur où il nous attend, il désire cependant que nous fassions un pas vers lui.

Certes, il arrive à tout un chacun de faire une pause dans sa vie et de réfléchir à tout ce qui se passe en lui et autour de lui. Ce moment est perçu par Dieu comme un moment favorable à une rencontre avec lui. Mais ce n'est pas pour autant que le dialogue s'installe entre lui et nous. Il nécessite un effort sur nous-mêmes pour repenser notre vie en sa présence, car Dieu est porteur de vie.  


 A son contact nous devons nous laisser saisir par un dynamisme qui nous vient de lui et qui pourrait provoquer en nous des sentiments qui nous désorientent. Nous ressentons à la fois le poids de nos fautes et la chaleur du pardon. Nous sentons aussi la colère monter dans notre fort intérieur contre les autres et contre  nous-mêmes et en même temps nous ressentons une paix immense et une sérénité qui s’installent  en nous. Ce bouleversement radical  remet en cause notre manière de penser et notre relation aux autres. C'est ainsi que  le saint Esprit  se manifeste en  nous. La suite dépend de nous.

Ce ne sera  peut être qu’une bonne expérience spirituelle, en attendant la suivante, et cela n’aura pas changé les choses   en profondeur dans notre sentiment vis-à-vis de Dieu.  Il  est  à parier que Dieu souhaitait autre chose de notre part car  il a tout fait  pour que nous entamions un vrai dialogue avec lui. Si c'est lui qui a  provoqué cette émotion,   il attendait une suite qui ne dépend plus que de nous. C’est alors que la relation qui  pourrait s'établir avec lui  devrait transfigure notre existence  et nous permettre de voir l'avenir autrement. Ce dialogue  qui s'est établit avec Dieu se fait désormais dans la durée et provoque en nous un bouleversements  radical dans notre vision des choses.  Chacune, des actions que nous entreprenons  se fera désormais sous couvert  de  dialogue avec l’Esprit, qui  blotti au fond de nous-mêmes,nous aide à voir les choses du même regard que Dieu . Ce faisant nous devenons des  êtres  nouveaux, disponibles pour agir  sur des routes nouvelles.

Quiconque se laisse interpeler par Dieu et accepte le dialogue avec lui risque de se sentir investi par lui  et peut se  sentir  appelé pour faire des choses qu’il ne soupçonnait même pas. C’est ainsi que le Saint esprit agit en nous.

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