Marc 10 :2-16 - le
divorce
dimanche 4 octobre 2015
2 Des pharisiens vinrent lui
demander, pour le mettre à l'épreuve, s'il est permis à un mari de répudier sa
femme. 3 Il leur répondit : Que vous a commandé Moïse ? 4— Moïse,
dirent-ils, a permis d'écrire une attestation de rupture et de répudier. 5
Jésus leur dit : C'est à cause de votre obstination qu'il a écrit pour
vous ce commandement. 6 Mais au commencement de la création, Dieu les fit homme
et femme ; 7 c'est pourquoi l'homme quittera son père et sa mère et
s'attachera à sa femme, 8et les deux seront une seule chair. Ainsi ils ne sont
plus deux, mais une seule chair. 9 Que l'homme ne sépare donc pas ce que Dieu a
uni !
10 Lorsqu'ils furent à la
maison, les disciples, à leur tour, se mirent à l'interroger à ce sujet. 11 Il
leur dit : Celui qui répudie sa femme et en épouse une autre commet
l'adultère envers la première, 12 et si une femme répudie son mari et en épouse
un autre, elle commet l'adultère.
13 Des gens lui
amenaient des enfants pour qu'il les touche de la main. Mais les disciples les
rabrouèrent. 14 Voyant cela, Jésus s'indigna ; il leur dit : Laissez
les enfants venir à moi ; ne les en empêchez pas, car le royaume de Dieu
est pour ceux qui sont comme eux. 15 Amen, je vous le dis, quiconque
n'accueillera pas le royaume de Dieu comme un enfant n'y entrera jamais. 16
Puis il les prit dans ses bras et se mit à les bénir en posant les mains sur
eux.
Nous vivons avec en tête,
la vision d’un monde désenchanté car, notre perception de
l’espèce humaine est souvent négative. Nous voyons les humains comme des
gens qui s’agressent entre eux, plus enclins à se quereller et à se
jalouser qu’à s’entraider. Ceux qui nous dirigent visent plus à nous
prémunir contre les actions hostiles des autres contre nous qu’à nous
stimuler pour aller vers eux en vue de les aider. Le vieil adage selon lequel
il faut se préparer à la guerre si on veut vivre en paix relève plus que jamais
de la sagesse des peuples et continue à être la règle de conduite de ceux qui
désirent diriger les nations.
C’est surtout quand les
relations humaines sont mauvaises qu’elles suscitent notre intérêt et
personne n’est vraiment intéressé quand les choses vont bien et que
tout se passe sans heurt.
Ne soyons donc pas
étonnés si, ici la question du mariage est envisagée sous l’angle négatif
du divorce. Dans notre monde, les démons ne restent pas inactifs, le démon de
midi en particulier est toujours à l’œuvre, celui de l’ennui et de
l’habitude, comme celui de la jalousie et du désir d’aller voir ailleurs
lui tiennent compagnie, et tous conjuguent leurs efforts pour détruire les
foyers.
La longue histoire de
l’humanité a estimé que le divorce était la solution la moins douloureuse pour
régler les conflits conjugaux trop graves. Plutôt que de s’accrocher à
recoller les morceaux d’une union détruite il vaut mieux tout recommencer.
Connaissant Jésus comme nous croyions le connaître nous sommes surpris
par sa réaction plutôt rigide, face aux pharisiens, ses habituels
contradicteurs, qui se montraient plus permissifs en la matière. Ils
prêtaient même à Moïse une permissivité que la loi à proprement parler ne
reconnaissait pas vraiment : celle de la lettre de divorce. En effet, qui
à l’époque de Moïse aurait-il été capable d’écrire une telle lettre ?
Mais dira-t-on, le droit
avait évolué depuis Moïse, c’est vrai, mais si c’était le cas, ce n’était plus
Moïse qui l’aurait prescrit, mais les juristes qui au cours des siècles
auraient assoupli les règles du divorce, là où Moïse lui-même n’avait rien
prévu.
Pourquoi alors Jésus
durcit-il le ton là où les successeurs de Moïse avaient assoupli la
règle ? Depuis le début de son ministère, on avait cru comprendre
que Jésus prenait volontiers des libertés par rapport aux prescriptions de
Moïse et qu’il en atténuait généralement la rigueur en préférant la souplesse
de l’amour à la rigidité de la loi. Quand il n’y avait plus d’amour entre
deux personnes n’était-il pas plus charitable de leur rendre leur liberté
plutôt que de les contraindre à vivre ensemble une vie commune qui n’avait plus
d’intérêt pour eux ?
On aurait pu penser
que la rigidité de Jésus visait à protéger la femme rejetée qui se retrouvant
seule dans la nature n’avait d’autre solution que de retourner chez ses
parents. Mais ses parents étaient-ils encore de ce monde et pouvaient-ils la
recevoir ? Dans le cas contraire, elle était destinée à la
prostitution et on pensait que Jésus aurait voulu la préserver de ce sort peu
enviable, mais ici, ce n’était pas le cas. Jésus ne fait aucune allusion à une
telle situation. Contrairement à notre attente Jésus défend une solution
radicale que l’on a de la peine à expliquer.
Curieusement cette
position est restée la règle dans beaucoup d’églises qui veulent ainsi
marquer leur fidélité à Jésus. En fait cette rigidité qui rend tant de gens
malheureux aujourd’hui était-elle vraiment l’expression de la volonté du
Seigneur ? Nous allons essayer de suivre sa logique au risque de
trouver l’expression d’une attitude plus nuancée voire même très
différente de celle que le texte laisse entendre.
Avez-vous remarqué que Jésus
parle de la dureté du cœur, c’est-à-dire du péché pour justifier la nécessité
de l’assouplissement de la loi de Moïse revendiquée par les pharisiens.
C’est par là que j’ai commencé ce sermon. J’ai dit que les hommes avaient une
fâcheuse manière de voir le monde, car ils le voyaient sous un angle négatif.
Ils considéraient que leur révolte contre Dieu était de l’ordre du normal, et
que les humains étaient des rebelles à Dieu par nature.
Il est donc normal pour nous
de considérer que les humains aient exclu l’amour des comportements qu’ils ont
entre eux. En affaire, par exemple, on ne fait pas de sentiment, et on met ce
principe scrupuleusement en pratique. Jésus quant à lui voit les choses
autrement. Il ramène ses interlocuteurs au « commencement », au début
de la création, dans un monde encore enchanté ou le péché n’avait pas encore
fait son apparition. Ce monde avait été conçu par Dieu pour le bonheur des
peuples. Au centre de ce monde, l’homme et la femme devenaient par l’amour qui
les unissait un seul corps et une seule âme. Quand Jésus parle du
Royaume qu’il nous invite à construire c’est cette image qu’il a en tête,
et il essaye de provoquer en nous le désir de retrouver cette
période idyllique où les mythes bibliques ont placé l’origine de
l’humanité. Il nous entraîne à réfléchir au problème du divorce avec cette
vision des choses à l’esprit.
Bien évidemment une telle
approche échappe totalement aux adversaires de Jésus et sans doute aussi
à nous-mêmes. Car Dieu a totalement été écarté du problème. Les
adversaires de Jésus parlent de loi et de règlement et se demandent
comment appliquer la loi, et surtout comment la contourner. Ce faisant,
Ils espèrent que Dieu cautionnera leurs arguments. Mais ni Dieu qu’on
ne consulte pas vraiment, ni l’amour qui préside à toutes les
manifestations divines n’entrent ici en ligne de compte. Curieusement,
ceux qui sont les gardiens de la Loi et qui prétendent guider les peuples sous
le regard de Dieu ont totalement omis Dieu dans leur manière d’aborder les
problèmes qui concernent le couple humain quand celui-ci est en état de
dysfonctionnement.
Jésus pour sa part
réintroduit la présence de Dieu dans le problème. Il rappelle que
l’enchantement du monde par la présence de Dieu est toujours d’actualité, mais
il dit aussi que la dureté du cœur des hommes, fait continuellement déraper les
projets de Dieu qui ne peuvent aboutir que par le pardon et l’amour. Il précise
que dans l’intention créatrice de Dieu la rupture entre deux êtres qui s’aiment
était impossible, car l’amour est un ciment qui devrait résister à toute
attaque hostile, c’est pourquoi, Jésus affirme qu’il est impossible qu’une
rupture se produise. C’est dans ce contexte idyllique de la création qu’il
place son argumentation face à ses opposants.
Mais l’impossible se produit
parfois. L’amour peut s’affadir. L’homme et la femme conçus pour
s’aimer se séparent, s’isolent l’un de l’autre, deviennent indifférents
l’un à l’autre et finalement en arrivent à se détruire mutuellement. Quand le
péché a fait son œuvre, seul Dieu peu alors gérer le problème. Le péché
est une atteinte à Dieu et ses effets ne peuvent en être corrigés que par lui,
qui en prodiguant son pardon permet de tout recommencer quand tout a été
détruit.
Le tort des
adversaires de Jésus est d’avoir voulu tenir Dieu à l’écart du problème,
alors que le problème ne peut trouver de solution sans Dieu. C’est parce qu’ils
avaient exclu Dieu que Jésus s’est montré sévère car pour lui, sans Dieu rien
n’est possible. Comme il le fait dans toutes les situations où il croise
des humains en souffrance, Jésus va donc aider chacun à se
reconstruire.
S’il a déclaré que le
couple uni devant Dieu ne pouvait pas être détruit, c’est qu’il voulait rappeler
la force du principe créateur de Dieu. Quand ce principe est attaqué par
le péché au point de le détruire, Dieu seul peut nous prendre en charge en nous
aidant à construire à nouveau l’avenir sans jamais regarder en arrière.
Une autre vie peut alors devenir possible, une autre forme d'amour peut alors
trouver a place, mais le principe d'amour doit toujours rester premier, aussi
bien dans le cas de la rupture que dans celui d'une nouvelle union.
Jésus n’a donc nullement
l’intention d’enfermer ceux qui ne s’aiment plus dans une attitude impossible à
tenir mais il demande d’œuvrer de telle sorte que le principe d'amour reste le
premier dans tous les cas et de tout mettre en œuvre pour trouver des solutions
qui remettront les ex-époux debout, et les rendront capables de
participer à nouveau à l’enchantement créateur de Dieu, qui pour un temps
les avait quitté.
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