18 Voici comment arriva la naissance de
Jésus-Christ. Marie, sa mère, était fiancée à Joseph ; avant leur union, elle
se trouva enceinte par le fait de l'Esprit saint. 19 Joseph, son mari, qui
était juste et qui ne voulait pas la dénoncer publiquement, décida de la
répudier en secret. 20 Comme il y pensait, l'ange du Seigneur lui apparut en
rêve et dit : Joseph, fils de David, n'aie pas peur de prendre chez toi Marie,
ta femme, car l'enfant qu'elle a conçu vient de l'Esprit saint ; 21 elle mettra
au monde un fils, et tu l'appelleras du nom de Jésus, car c'est lui qui sauvera
son peuple de ses péchés. 22 Tout cela arriva afin que s'accomplisse ce que le
Seigneur avait dit par l'entremise du prophète :
et on l'appellera du nom d'Emmanuel,
ce qui se traduit : Dieu avec nous.
24 A
son réveil, Joseph fit ce que l'ange du Seigneur lui avait ordonné, et il prit
sa femme chez lui. 25 Mais il n'eut pas de relations avec elle jusqu'à ce
qu'elle eût mis au monde un fils, qu'il appela du nom de Jésus.
Il est des temps hors du temps. Il est une
histoire hors de l’histoire. Il est une aventure inaccessible. C’est l’histoire
de la goutte d’eau qui pour la première fois se met à vibrer des germes de vie
qu'elle contient. Mettez-vous à la place de Dieu et essayez de songer à l’état
d’esprit qui se trouvait être le sien. Cette apparition de la vie dans
l’univers fut sans doute pour lui un instant d’immense émotion, semblable à celui
qu’il éprouva au moment où Jésus vint au monde portant dans ses gènes tout le
mystère de l’incarnation. Des milliards d’années avant la naissance de Jésus
quelque chose s’était produit quelque part dans les eaux, au cœur de la planète
qui n’était pas encore la terre et la vie avait surgi.
C’était une apparence, une chose indéfinissable, une
cellule peut être, qui pour la première fois se mit à se diviser de l’intérieur
et devint matière vivante. L’événement n’a jamais été raconté et il n’y eut
aucun témoin. On sait seulement que ça a eu lieu. On sait qu’après le fracas
étourdissant que produisit l’onde de choc qui provoqua la naissance du monde,
le Créateur retint son souffle pour que la vibration qui se propagea ne détruise
pas ce qu’il avait en tête de voir se réaliser.
C’est ainsi, nous est-il dit, qu’il y eut un soir et
qu’il y eut un matin, ce fut le troisième jour, et personne n’était là pour
contempler cette merveille, si non Dieu lui-même. Le Créateur qui avait ouvert
l’histoire de l’univers par le fracas du big-bang, dont on ne peut pas imaginer
la puissance, suspendait son souffle pour contempler une goutte d’eau toute
frémissante de la vie qui était en train de se mettre à exister.
Le même miracle de la vie qui surgit là où cela
paraît impossible s’actualise chaque année à cette même époque quand le monde
entier suspend le cours de ses activités pour évoquer le mystère de Noël. Une
fois encore nous nous redisons les uns aux autres que la réalité fragile qui
porte la vie est habitée par Dieu. Nous revivons encore dans un même
émerveillement ce moment unique où Dieu mêle sa divinité à l’humanité, comme
jadis il avait mêlé son souffle créateur à l’apparition de l’ADN qui de proche
en proche avait rempli, la terre de toutes les formes que peut prendre la vie.
A force de science et de patience, les hommes penchés
sur leurs instruments et sur leurs ordinateurs, ont retrouvé les traces de
l’histoire de la vie jaillie dans une goutte d’eau. Forts de leurs découvertes,
au lieu de rendre grâce au Créateur, ils ont pris la grosse tête. Ils ont cru
qu’en ayant découvert les secrets de l’origine de la vie, ils étaient devenus
maîtres de la vie. Non seulement ils ont continué à en disposer à leur guise,
ils ont continué à la supprimer là où elle les gênait. Ils ont aussi cherché à
la soumettre à leur volonté, ils s’en sont pris à son mode de transmission et
de reproduction. Ils croient pouvoir encore faire évoluer la vie à leur guise
sans se soucier de Dieu. Pourtant ils ont des doutes.
Dieu qui contemple tout cela n’en est pas surpris. Il
sait que la goutte d’eau qui pour la première fois a porté la vie avait en
germe cette prétention de la créature vivante à supplanter son créateur. Le
génie humain qui allait se mettre en ébullition au soir du sixième jour de la
création était déjà conçu par Dieu pour se révolter contre son Dieu afin de
trouver dans l’accomplissement de sa révolte le sens de son destin. En effet
dans l’esprit de Dieu tout cela avait du sens et de la cohérence.
S'il m’a semblé nécessaire aujourd’hui de
retourner si loin dans le passé, c'est qu'il fallait rappeler qu’il n’y a pas
dans l’histoire du monde d’événement plus important que l’histoire de cette
première goutte d’eau et l’histoire de la naissance de Jésus. L’une fait suite
à l’autre à des milliards d’années d’intervalle. Le monde mettait en œuvre ce
que Dieu avait décidé. Dans un premier temps il s’agissait de provoquer le
jaillissement de la vie dans l’univers et dans un deuxième temps il s’agissait
pour Dieu de venir s’installer au cœur de l’humanité. Toutes ces choses
compliquées, la Bible nous les redit avec la simplicité naïve que nous
trouvons dans les récits de la nativité.
-Tout nous est dit sur le
projet de Dieu qui vient habiter l’humanité. C’est le récit de la vierge
devenue mère qui nous en rend compte.
- Tout nous est dit sur la fragilité
de l’existence et sur les menaces de mort qui planent sur la vie à peine
éclose. C’est ce que nous découvrons dans le comportement du roi Hérode qui
arme ses soldats pour tuer un enfant. Il confirme par son geste l’arrogance de
ceux, qui arrivés au faîte du pouvoir le confisquent à leur profit.
- Tout nous est dit des combats que
livrent les hommes à Dieu pour lui ravir ses secrets. Nous les repérons en
contemplant les savants de Jérusalem qui consultent les Écrits, compulsent la
Torah, vérifient les prophéties pour repérer que Dieu a choisi la petite ville
de Bethléem pour s’incarner.
- Tout nous est dit de la tranquille
assurance avec laquelle Dieu contrôle les puissances hostiles et déjoue les
comportements du malin. C’est pour cela que les anges entrent en action, que
Joseph écoute et obéit et que tout se passe conformément à ce qui avait été
dit.
- Tout nous est dit sur l’espérance
offerte à tous les hommes. Mages et bergers, tous sont là pour entendre et
rapporter tout ce que l’humanité est en droit d’espérer.
Malgré cela, le monde continue à fonctionner comme si
cette histoire n’était qu’une fiction, et comme si le récit de Noël n’était
qu’un conte pour enfants. Nous avons du mal à comprendre que Dieu vient au plus
intime de la réalité humaine pour la transformer en une réalité divine. Nous
n’arrivons pas à croire que Dieu en intervenant dans l’humanité transforme
notre destin à tout jamais et nous avons du mal à croire que l’éternité fait
désormais partie intégrante de notre avenir. Nous avons du mal à admettre que
notre destin n’est pas lié aux promesses d’un progrès humain illimité mais à la
certitude que Dieu habite dès aujourd’hui notre vie. Si nous ne savons pas ce
que signifie ce mystère nous devons cependant réaliser qu’il est
l’aboutissement de la création et que Dieu a prévu que nous soyons concernés.
Tout se tient dans ces deux événements où Dieu crée la vie et où ensuite, il
vient lui-même habiter la vie.
L’enfant qui naît à Noël n’est que l’enfant d’un jour.
Il provoque notre émotion et nous rend conscients de notre vulnérabilité. Nous
comprenons au contact de son histoire que si les moutons qui l’entourent dans
la bergerie sont inoffensifs, il y a cependant des loups dehors qui tel Hérode
cherchent à se nourrir de la vie des autres. Le monde est un monde où les
pouvoirs s’affrontent, les vaincus disparaissent et les vainqueurs deviennent
plus forts, mais disparaissent à leur tour, vaincus par plus forts qu’eux.
C’est la loi du genre. Mais Dieu ne s’y résigne pas.
En effet, si nous cherchons la vérité il faut la
chercher ailleurs que dans les faits marquants de l’histoire des hommes. En se
révélant dans un enfant Dieu nous apprend que la vérité reste invisible aux
yeux des puissants et que même les savants ne la voient pas. L’enfant a grandi
et la vérité sur Dieu est devenue plus pertinente à mesure qu’il se développait
et qu’il enseignait.
Nous découvrons dans ce qu’il a dit que Dieu dépose
dans tous les hommes, un ferment d’éternité. Il ne peut se développer que
si la sauvegarde de la vie prend le dessus sur toutes les activités humaines.
C’est en valorisant la vie de tous ceux avec qui nous sommes en contact
que l’éternité pourra jaillir en nous, par une osmose subtile entre Dieu et
nous. L’éternité n’est pas une valeur abstraite sur laquelle nous pouvons
disserter sans fondement. Elle fait partie de l’espérance et nous ne pouvons y
accéder que si nous la recevons de Dieu quand il nous met en relation avec nos
semblables. Pour entrer dans l’éternité, il nous faut donc deux partenaires,
Dieu et nos frères en humanité.
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