42Ils étaient assidus à
l'enseignement des apôtres, à la communion fraternelle, au partage du pain et
aux prières.
43La crainte s'emparait de
chacun, et beaucoup de prodiges et de signes se produisaient par l'entremise
des apôtres.
44Tous les croyants
étaient ensemble et avaient tout en commun.
45Ils vendaient leurs
biens et leurs possessions, et ils en partageaient le produit entre tous, selon
les besoins de chacun.
46Chaque jour, ils étaient
assidus au temple, d'un commun accord, ils rompaient le pain dans les maisons
et ils prenaient leur nourriture avec allégresse et simplicité de cœur ;
47ils louaient Dieu et
avaient la faveur de tout le peuple. Et le Seigneur ajoutait chaque jour à la
communauté ceux qu'il sauvait.
Quand l’Esprit souffle sur l’Église, c’est
une atmosphère de paix et de sérénité qui s’en dégage, c’est en tout cas ce que
tente de dire ce texte qui en trouve ses origines dans l’évocation de la
première église qu’il nous décrit ici. Elle doit son épanouissement à la
méditation des textes rapportés par les Apôtres, à la prière, à la vie en
commun, au partage du pain, à la mise en
commun des biens et à une joie profonde
qui se dégage de l’existence de
cette église qui s’ouvre à la vie. C’est
comme si ses quelques membres étaient transportés dans un autre monde, le monde du futur, le Royaume
annoncé. Et pourtant tous ont bien les
pieds sur terre. Sous l’impulsion de
l’esprit, l’Église s’était mise à
croître à un tel rythme que le nombre des nouveaux adeptes qui étaient
venus gonfler les rangs des
premiers croyants avaient crû d’une manière extraordinaire. Si cela avait continué, l’église aujourd’hui
compterait plus de membres que la totalité des habitants du monde. Mais il n’en est rien. Quelques chose a
dysfonctionné depuis cette évocation de
l’origine de l’Église.
La suite du récit, dans ce Livre même des Actes montre que le phénomène n’a pas duré. Les rivalités à l’intérieur du groupe n’ont
pas tardé à naître et la défaveur de ceux qui voyaient les choses de l’extérieur s’est retournée contre l’Église naissante, s’est vite transformée en haine et a pris le ton de la
persécution. Un peu plus tard, c’est sur l’enseignement même des apôtres que les membres de l’Église se sont trouvés en désaccord. C'est ce qu'affirmera Paul aux alentours des années 50 dans la première épître aux
Corinthiens ( 1 Cor 1/12) « J’entends que chacun de vous
dit : Moi je suis de Paul, et moi de Céphas et moi de Christ… ». Nous sommes à peine 20 ans après l’événement rapporté ici. Dans les pages suivantes, nous verrons la
communauté se déliter. Le partage des biens sera accompagné de mensonge, et
même le partage du pain de la Sainte Cène donnera lieu à des attitudes
critiquables et même scandaleuses de la
part des membres de L’Église de Corinthe
en particulier. Du côté du baptême, ce ne fut pas mieux, on cherchait à se faire valoir par le
prestige personnel du baptiseur si bien
que Paul se félicitera de n’avoir baptisé
que très peu de personnes de la communauté de Corinthe. Que s’était-il donc passé dans l’Église pour
qu’en moins d’une génération on en soit arrivé là ?
Le problème de la première église sont les
mêmes que ceux de celle d’aujourd’hui. Tout se passe comme si nous n’arrivions
pas à instaurer dans nos rangs une société de fidèles dont la foi serait assez forte pour que les croyants puissent se libérer des
mêmes contraintes que celles auxquelles
sont soumis les gens de ce monde.
Quand, à d’autres moments de l’histoire, on a cru pouvoir y arriver, comme
dans le Genève de Calvin par exemple, on
n’a fait que créer des comportements
sectaires intolérants qui ont rendu la
vie impossible aux habitants de la ville tant
la pratique de l’espionnage des uns
par les autres devenait insupportable ainsi que les sanctions qui s’en
suivaient. Ce genre de phénomène se
produit toujours quand
on essaye de faire fi du péché, c'est-à-dire de tous les comportements qui
opposent les hommes entre eux. Ce sont la convoitise, l’arrogance,
l’orgueil qui ne disparaissent pas d’un
seul coup du moment que l’on s’est converti au message de Dieu et qu’on a accepté son salut.
On a beau savoir que la bonne nouvelle
de la résurrection a changé notre
relation à Dieu et au monde, elle n’a
pas changé notre nature profonde. Il
faut que Dieu lui-même nous entraîne à faire un pas de plus.
Nous comprenons alors que l’auteur de ces lignes éprouve un certain agacement au
contact de l’Église dans laquelle il se trouve quelques 30 ans après la
résurrection de Jésus. La société de l’Église n’a pas changé autant qu’on
aurait pu l’espérer. C’est pour cela qu’il ne peut s’empêcher de décrire L’Église, non pas telle qu’elle était, mais telle
qu’elle aurait du être : il idéalise la première église comme une société parfaite, capable par ses propres vertus et d’abnégation de soi d’attirer tous les hommes
à elle.
Mais
en écrivant cela, il mettait le doigt sur un défaut permanent qui est le nôtre, celui de croire
que les hommes par leurs actions, leurs vertus ou leur morale peuvent changer
quelque chose au monde si Dieu n’agit
pas à leurs côtés. C’est par l’action de Dieu sur les hommes que ceux-ci pourront changer quelque chose à la situation
existante. Si Dieu, quant à lui, ne veut pas directement intervenir dans le monde et le faire évoluer dans le sens où la vie de chacun s’améliorerait et
où le mieux être prendrait le
dessus, ce n’est pas non plus les hommes,
indépendamment de lui qui y arriveront.
Il faut que par leurs actions
conjuguées, à savoir : celle de
Dieu qui agit pour que la transformation intérieure des individus s’opère et celle des hommes qui agissent
selon sa volonté pour que « le
mieux » prenne le dessus sur le mauvais. L’homme ne peut agir que par l’action de
Dieu qui se révèle en lui et qui le transforme de fond en comble
Seul Dieu, en agissant sur nous peut changer les choses en
profondeur, mais cela n’est jamais
acquis pour toujours. Seule sa présence constante nous en peut modifier nos
comportements. Pour cela il faut que
chacun reste fidèle à ce que Dieu lui a révélé. Il faut qu’il se convertisse à nouveau chaque jour et laisse
Dieu agir en lui. Ainsi il s’appliquera
à lui-même, avant de l’appliquer à l’Église cet acquis de la Réforme selon
lequel l’Église et nous-mêmes doivent se
réformer et ne jamais cesser de le
faire.
Par quoi
faut-il alors commencer ? Le premier de ces fondamentaux qu’il doit mettre en valeur et dont tous les autres découlent est la foi. La foi devrait-être un sujet de joie, de sérénité
et de satisfaction pour nous. Mais elle
est devenue dans nos sociétés d’église un sujet de rivalité entre les croyants,
déjà dénoncé par Paul, mais qui n’a fait que s’aggraver depuis. La
foi est devenue un sujet d’exclusion des uns par les autres,
de refus de dialogue à tel point que l’on oublie d’abord que la foi est un don
de Dieu, liée à l’irruption de la réalité qu’il représente dans notre vie. Nous ne nous mettons à croire vraiment que si Dieu lui-même s’est saisi de
notre vie et qu’il inspire nos pensées par son esprit qu’il répand sur nous et
dont aucun humain ne peut assurer le contrôle pour nous. La foi établit un lien
étroit entre nous et Jésus qui mystérieusement partage notre vie et nous ouvre
les portes d’un au-delà qui nous était fermé jusque là. La vie en Église est
basée sur le partage de cette certitude, sur
la mise en commun de nos expériences et la prière avec Dieu.
C’est alors que le péché que nous
croyions aboli par notre conversion à
Dieu risque de prendre sournoisement le dessus. Il consiste à donner
priorité à la pensée humaine et à
prétendre que les croyants peuvent assumer la volonté de Dieu sans vraiment se référer à lui. Il
nous amène à croire que notre propre personne doit être au centre de notre pensée
et qu’elle nécessite plus d’attention que les autres. Pour combattre cette tendance mortifère que nous
cultivons à plaisir, Jésus nous a donné pour
seul précepte celui d’aimer les autres comme nous-mêmes, c’est en faisant cela que nous manifesterons
notre amour pour Dieu. Mais sans l’esprit de Dieu qui nous stimule, nous n’y
arriverons jamais par nous-mêmes. Chacun se prenant pour le centre de ses
propres préoccupations croit que Dieu obéit aux mêmes impératifs et place les
civilisations chrétiennes au dessus des autres, si bien que celles-ci devraient s’imposer aux autres.
Nous comprenons alors que si nous ne nous
appuyons pas sur ce qui est fondamental dans la foi, c'est-à-dire l’amour du prochain qui
rend tous les hommes égaux devant Dieu, nous passerons à côté de la vision qu’il a pour le monde et nous le trahirons en croyant
le servir. L’avenir de l’Église et du monde passe donc par une conversion de nous-mêmes, de L’Église
et des autres, c’est alors que le
monde sera sauvé
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