37 En effet, comme ont été les jours de Noé, ainsi sera l'avènement du Fils de l'homme. 38 En effet, aux jours qui précédèrent le déluge, les gens mangeaient et buvaient, se mariaient et mariaient leurs enfants, jusqu'au jour où Noé entra dans l'arche ; 39 et ils ne se doutèrent de rien jusqu'à ce que le déluge vienne et les emporte tous ; il en sera de même à l'avènement du Fils de l'homme. 40 Alors, de deux hommes qui seront aux champs, l'un sera pris et l'autre laissé ; 41 de deux femmes qui moudront à la meule, l'une sera prise et l'autre laissée.
42 Veillez donc, puisque vous ne savez pas quel jour votre Seigneur viendra.
43 Sachez-le bien, si le maître de maison savait à quelle veille de la nuit le voleur doit venir, il veillerait et ne permettrait pas qu'on fracture sa maison. 44 C'est pourquoi, vous aussi, soyez prêts, car le Fils de l'homme viendra à l'heure que vous ne pensez pas.
Ce n’est pas parce que la morosité donne le ton à notre société que ce sermon sur la fin des temps doit en rajouter et que de ce fait votre pessimisme s’en trouve accru. Au contraire, même si le ton de ce texte est provocant, il nous assure de la présence de Dieu dans l’avenir. Et là où se trouve Dieu, là se trouve également la vie et l’espérance. Donc soyez en sûrs, nous sommes en de bonnes mains. Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ?
Naturellement, comme à son habitude, Jésus nous provoque pour mieux guider notre réflexion. Il énumère donc les lieux communs que nous avons l’habitude d’échanger dans ce type de réflexion. Que se passera-t-il au soir du grand soirs nous demandons-nous ? Serons-nous tous emportés par la vague d’un tsunami meurtrier comme ce fut le cas lors du déluge biblique. Serons-nous brusquement tirés de notre sommeil par un tremblement de terre, si bien que l’un sera pris et l’autre laissé ? Serons-nous surpris au milieu de nos activités quotidiennes par une catastrophe que nous avons de la peine à imaginer ? Nous revoyons mentalement des avions percuter des tours jumelles ou un volcan faisant irruption là où on ne s’y attend pas. Chacun se fabrique son « Apocalypse Now » en version perso !
Arrêtons-nous là, car ce n’est pas la bonne méthode d’ imaginer, l’inimaginable. Tous ces comportements ne relèvent que du fonctionnement d’une « machine à se faire peur » qui est bien rodée et qui a déjà fonctionné de nombreuses fois. Un seul mot suffit à Jésus pour arrêter son fonctionnement maléfique : Veillez !
Veillez sur qui ? Veiller sur quoi ? , Encore faut-il savoir ce qu’il faut entendre par ce terme de « veiller », car il y a plusieurs manières de veiller. Il y a la bonne et il y a la mauvaise. Il y a celle qui consiste à se mettre en état d’alerte permanent comme si nous étions continuellement menacés par un risque imminent. Nous prendrions alors pour référence l’attitude du veilleur juché sur le rempart, une paire de jumelles dans les mains, l’œil rivé à l’œilleton fixant l’horizon et guettant le nuage de poussière annonçant l’arrivée des tartares, tels les veilleurs de jadis aux confins des steppes orientales. Plus proche de nous, nous pensons aux veilleurs du Moyen Age une crécelle à la main traversant la cité pendant la nuit et annonçant à chaque carrefour, aux habitants de la cité endormie qu’il ne se passe rien. « Tout est calme dormez en paix bonnes gens! »
Ces méthodes habituellement pratiquées et confirmées par la tradition consistent à déterminer au bon moment ce qui va se passer. C’est une méthode passive et attentiste. En matière de fin des temps, cela ne changera rien. Un tel état d’esprit consiste seulement à maintenir l’angoisse. C’est la mauvaise méthode.
Il y a donc, forcément une autre méthode de veiller. Au lieu d’attendre que l’événement se produise et d’être prêt au moment où il se produira, il s’agit d’agir pour que l’événement ne se produise pas. C’est une méthode constructive de l’avenir qui organise à l’avance les temps qui viennent pour qu’ils soient plus heureux et que les catastrophes redoutées ne se produisent pas. C’est la méthode de la mère de famille qui veille à ce que ses enfants soient bien éduqués afin qu’ils puissent construire leur existence future pour qu’elle soit heureuse. Il s’agit pour elle de veiller d’une manière active. C’est la bonne méthode et elle fonctionne aussi pour les situations proposées pour la fin des temps, et nous allons le voir c’est celle que Jésus préconise.
Depuis longtemps, nous avons tendance à imaginer une fin des temps tragique, comme si Dieu avait décidé de tout détruire dans un geste de colère en précipitant le monde dans un anéantissement général qui verrait son retour au chaos primitif, tout en préservant un avenir heureux à un certain nombre d’élus qui auraient trouvé grâce auprès de lui. Mais ça ne marche pas comme cela !
Pour se faire comprendre Jésus sollicite notre intelligence. Il faut donc que nous réfléchissions avant de réagir. Il commence son propos en évoquant l’épisode de l’arche de Noé. Il raconte l’histoire en s’arrêtant avant la fin au moment où l’humanité est engloutie dans les flots, non pas parce qu’il ne sait pas comment finit l’histoire, mais parce qu’il sait que nous savons la fin. Il nous laisse le soin de nous en souvenir. Il ne raconte donc pas l’épisode de la colombe et du rameau d’olivier, il ne nous raconte surtout pas l’épisode de l’arc-en-ciel et du repentir de Dieu et de sa promesse de ne plus chercher à détruire l’humanité, car c’est sur ce point que réside notre compréhension de l’avenir.
La fin catastrophique du monde ne se fera donc pas sur une décision de Dieu. Les textes des Ecritures en sont les garants. Depuis ce jour de Noé jusqu’à notre temps, nous devons être persuadés que Dieu n’a pas programmé une telle fin au monde. Si l’Ecriture parfois semble dire le contraire, c’est pour mieux nous inciter à veiller sur la manière dont nous construisons l’avenir afin que les hommes ne fassent pas ce qu’ils reprochent à Dieu d’avoir l’intention de faire. C’est l’homme qui est dangereux pour l’avenir et pas Dieu. Quand Jésus nous demande de veiller, c’est qu’il fait appel à notre esprit de responsabilité. Il nous en fait un impératif absolu pour construire l’avenir. Nous sommes responsables de la tournure que prennent les événements et nous ne devons pas attribuer à Dieu la responsabilité de notre manque de vigilance.
C’est là une injonction faite aux églises pour qu’elles sachent rendre perceptible dans leur programme le message qu’elles ont à donner au monde. Elles doivent sans cesse rappeler les règles de bases en fonction desquelles le monde pourra se construire harmonieusement. Ces règles sont simples et nous les connaissons. L’avenir ne peut se construire que sur la justice, le partage et la fraternité. Si ces éléments simples sont respectés l’avenir s’ouvrira sur un destin heureux et se construira selon le souhait de Dieu. Nous devons aussi reprendre ces principes à notre propre compte afin que tous les humains qui vont et viennent sur la planète sachent dans quelle direction ils doivent orienter leurs pas.
Fondés sur cette espérance, nous ne devons pas hésiter à dénoncer les slogans des sociétés contemporaines qui préconisent l’accumulation des richesses tout en sachant que tout le monde ne pourra en profiter. Ces slogans contribuent à déséquilibrer les relations entre les hommes au risque de faire monter la haine et les conflits de demain. Il sera alors mal venu et contraire aux promesses de Dieu de prêcher la résignation en disant que c’était prévu par Dieu.
Chaque jour qui se lève doit être considéré comme un nouveau commencement. Chaque jour qui se lève voit naître des enfants qui demain seront des adultes dont nous devons structurer l’espérance. Chaque jour voit apparaître des inventions nouvelles, pour lesquelles nous devons veiller à ce qu’elles soient développées seulement dans le but de construire un mieux être pour l’humanité tout entière. C’est pour tout cela que notre vigilance doit être tenue en éveil afin que l’harmonie entre les êtres soit le seul mobile qui préside aux destinés de notre humanité.
Dieu a mis l’espérance à notre disposition. Elle ne peut se ressourcer que dans les Ecritures et s’appuyer sur cette promesse selon laquelle Dieu fait toute chose nouvelle. Notre vocation de croyant est de veiller à rendre visible la nouveauté de Dieu dans tout ce que les hommes cherchent à entreprendre.
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