dimanche 31 mai 2015

Marc 6:1-6 Jésus et Dieu dimanche 5 juillet 2015




Marc 6:1-6:  Jésus et Dieu - Dimanche 8 juillet 2018 

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Parti de là, il vient dans son pays, et ses disciples le suivent. 2Quand le sabbat fut venu, il se mit à enseigner dans la synagogue. Une multitude d'auditeurs, ébahis, se demandaient : D'où cela lui vient-il ? Quelle est cette sagesse qui lui a été donnée ? Et comment de tels miracles se font-ils par ses mains ? 3N'est-ce pas le charpentier, le fils de Marie, le frère de Jacques, de José, de Judas et de Simon ? Ses sœurs ne sont-elles pas ici, parmi nous ? Il était pour eux une cause de chute. 4Jésus leur disait : On ne refuse pas d'honorer un prophète, sinon dans son pays, parmi les gens de sa parenté et dans sa maison. 5Il ne pouvait faire là aucun miracle, sinon qu'il guérit quelques malades en leur imposant les mains. 6Il s'étonnait de leur manque de foi. Il parcourait les villages d'alentour en enseignant.

Il est toujours hasardeux d’aborder un texte de l’Évangile dans lequel Jésus est mis en cause. Le lecteur se trouve bien souvent dans le même camp que ceux qui s’en prennent à lui.  Aujourd’hui nous sommes  interpelés à propos de la relation qu’il y a entre Dieu et Jésus. Bien entendu depuis longtemps nous croyons le problème résolu. Nous croyons savoir tout sur Jésus  et encore mieux, nous sommes sûrs de savoir quelle est sa relation avec Dieu. 

Mais, au fond de nous-mêmes, sommes-nous toujours en accord avec l’enseignement de nos  églises sur ces questions ?  Certes nous affirmons que Jésus est fils de Dieu, mais quelle réalité cela recouvre-t-il ?  En tout cas le problème n’était pas clair pour ses contemporains.  Ils ont eu du mal à accepter qu’il fut un simple homme avec qui Dieu ait décidé de partager ses prérogatives divines. Le seul fait de dire les choses ainsi, jette peut-être déjà le trouble en notre esprit. Nous comprenons vite, que ses contemporains  étaient encore plus troublés que nous.

Est-ce blasphémer si on dit  que Jésus s’est fait si proche de Dieu qu’on l’a  identifié à lui ? C’est  ce que les Chrétiens des  premières générations ont lentement compris  au cours des premiers siècles et ils l'ont laissé transparaître dans les transcriptions qu'ils en ont faites dans les évangiles, mais les gens de Nazareth aussi bien que les contemporains de Jésus ne l'avaient pas encore compris. Ils contestaient même qu'il puisse y avoir du divin en lui. . En retournant dans son village, Jésus a été mal accueilli, c'est alors qu'une polémique s'est  déclenchée à propos de son rapport à Dieu. 

A partir de ce constat, nous pouvons nous interroger à notre tour pour savoir ce que nous pensons de Dieu ? Comment l’imaginons-nous? Dans nos confessions de foi, nous proclamons sa toute puissance. Nous affirmons qu’il est aussi notre créateur. Mais notre pratique de la lecture biblique nous apprend que Dieu s’il est bon peut aussi  être redoutable et qu’on ne s’approche pas impunément de lui.

Jésus en venant chez les siens tient un discours qui apparemment les trouble. Il semble être si proche de Dieu  qu’on peut même se demander s’il ne laisse pas entendre qu'il  partage  en partie  sa  puissance divine. Mais est-ce possible, pour un simple homme dont on connaît les attaches familiales, se demandent les gens de Nazareth? Si  tout ce qu’il a fait  ne lui vient pas de Dieu, cela ne peut que lui venir de Satan, l’adversaire de Dieu. Une telle interprétation est suggérée ici. Dans le récit parallèle de Luc, au sujet de  ce même événement, on  nous dit que ses auditeurs ont tenté de le tuer à cette occasion.

Si Jésus, comme tout un chacun puise son origine dans une famille humaine comme la nôtre, ses contemporains voyaient  mal comment il pouvait faire des choses qui relèvent  de l’autorité divine. Comment Dieu peut-il mêler des éléments qui relèvent de sa toute puissance à l’action humaine d’un homme ? Telle était  la question  que se posaient les gens de Nazareth et on comprend qu'ils étaient désemparés.  Si Jésus trouvait son origine dans une famille humaine  comme la nôtre se contemporains ne comprenaient pas qu'il pouvait faire des choses  relevant de l'autorité divine. Comment Dieu pouvait-il mêler  sa toute puissance à l'action  humaine d'un homme?  On comprend que les gens de Nazareth  désemparés,  soupçonnaient un subterfuge. Les questions qui ont perturbé les contemporains de Jésus ont continué à diviser les hommes entre eux jusqu'à ce que se réunissent les grands conciles de Nicée, d’Éphèse et de Calcédoine pour préciser les relations de Jésus avec Dieu. Aujourd'hui, ces questions continuent encore à diviser les croyants entre eux.

 Il reste inconcevable que Dieu  se soit  fait si proche de la réalité humaine en Jésus Christ au point qu’il ait aboli toute  distance qui le sépare de lui, pas même celle du  péché.  Notre entendement n’y résiste pas et ne le tolère pas. Jésus suggérait pourtant  dans son enseignement que désormais toute relation avec Dieu serait  possible, sans intermédiaire, ni contrainte. C’est pour affirmer cela qu’il s’en prendra un peu  plus tard au temple, car le  temple était  le lieu même  où prenaient corps  les contraintes que la relation avec Dieu imposait aux hommes. C’était le lieu des sacrifices, le lieu des pèlerinages le lieu  où Dieu était caché  derrière le voile infranchissable du Saint des saints.  C'était, malgré les apparences, le lieu  où Dieu était le plus éloigné des hommes. La question qui se pose à nous maintenant est  de savoir quelle distance Jésus a maintenu entre nous et Dieu ? 
Pour mieux poser le problème les compatriotes de Jésus s’en sont  pris à ses  frères et à ses sœurs pour dire que si Jésus a une parenté humaine il ne peut  partager en rien la divinité de Dieu. On  affirme son humanité pour détruire l’éventuelle présence de Dieu en lui, car  s’il est porteur un tant soit peu de la puissance de Dieu,  il met Dieu à notre portée, or la trop grande proximité de Dieu est insupportable à la plupart d’entre nous.  

En effet, il ne nous est pas supportable  de savoir que Dieu puisse faire sa demeure en nous.  Nous ne supportons pas davantage de sentir son regard toujours bienveillant se  poser sur nous. Il ne nous est pas possible, non plus  de faire le bilan de nos erreurs sans envisager un châtiment, même léger de la part de Dieu. Et pourtant Dieu aime sans punir selon Jésus. Est-il possible que son pardon soit plus fort que  nos remords et qu’il nous promette une vie meilleure alors que nous n’arrivons pas à nous pardonner nous-mêmes de nos mauvaises actions? 

Ces questions ne sont pas seulement celles des gens de Nazareth,  et même les conciles ne les ont pas effacées, parce qu'elles font partie de notre propre itinéraire spirituel. Ce sont aussi nos questions à nous car la trop grande proximité de Dieu nous  est intolérable  à  nous aussi. La conscience que nous avons de notre péché maintient une distance entre Dieu et nous, et nous souhaitons la garder.  Nous considérons que la proximité  avec Dieu n’est possible que pour les gens exceptionnels,  pour ceux  dont les péchés seraient insignifiants. Seul Moïse a pu approcher Dieu de près, Abraham ne l’a vu que par l’intermédiaire d’un ange, quant à Élie, il n’a senti que la douceur de son souffle.  Je ne parle pas de nous ! Il nous est difficile d'imaginer que notre contact avec Dieu puisse être plus proche que le leur. Notre péché, le plus ténu soit-il, pèse encore trop lourd, croit-on,  pour ne pas offenser Dieu.

Jésus connaît fort bien toutes nos réticences, c’est pourquoi une grande partie de son enseignement a consisté à dire que Dieu anéantissait nos péchés, qu’il les détruisait et qu’il en gommait les effets. Pourtant   la réalité du péché nous colle à la peau  tant nous avons du mal à accepter la gratuité de son pardon. 

Par contre, il est curieux de constater que nous  n’avons aucun problème à affirmer la toute puissance  de Dieu bien qu’elle ne se voit pas à l’œil nu. Nous considérons, sans discuter qu’il est créateur du ciel et de la terre, mais nous lui contestons la possibilité de détruire nos péchés et de les anéantir. Pourtant, s’il est tout puissant, il est capable de l’un comme de l’autre. Il est capable, tout à la fois, de régner en gloire dans les cieux et de s’incarner dans un homme de notre condition. Et pour que cela soit possible, il gomme les effets de nos exactions. Puisque le péché nous sépare de lui,  il l’anéantit, ainsi  il peut rester tout proche de chacune et de chacun de nous. 

Pourtant, aussi curieux que cela paraisse, si nous refusons que Dieu se fasse homme, par contre, nous concevons fort bien que l’homme  puisse s’élever jusqu’à Dieu, et que par ses propres forces il puisse s’approcher de Dieu.

L’enseignement de Jésus affirme qu’il est impossible de s’élever jusqu’à Dieu, mais  que. Dieu se fait homme pour guider l’humanité  sur le chemin de sa propre humanité et non pas pour échapper à son humanité. On  ne peut se rapprocher de Dieu que si on accepte d’être pleinement l’être humain qu’il a créé. 

Celui qui s’éloigne des hommes et se réfugie au désert pour rencontrer Dieu et pour s’élever dans la sainteté  fait fausse route. Quand Jésus s’est  rendu au désert, c’est le tentateur qu’il  a rencontré et pour résister au tentateur il a du  prendre en compte sa propre humanité. Son séjour au désert l’a fortifié dans son humanité et l’a renvoyé vers les hommes ses frères. Saint Antoine au désert ne retrouve pas Dieu, mais la tentation.

L’erreur serait de croire qu’on pourrait rester au désert sans revenir vers les hommes et passer directement de la fuite au désert à la contemplation de Dieu. Ce serait manquer sa vocation d’homme et rater son accomplissement en Dieu. C’est exactement  cela le péché  qui étymologiquement désigne le fait  pour un tireur de  manquer sa cible 

C’est là que réside le scandale. Il est dit dans l’Evangile que nous avons lu, « qu’il  était pour eux une occasion de chute » le texte  en grec est plus violent il dit qu’il les scandalisait. Le scandale c’est  le fait de refuser de croire que Dieu puisse s’approcher de l’homme au point d’établir une relation d’amour avec lui. Le scandale c’est finalement  le fait de contester à Dieu la capacité de  faire de nous des hommes  authentiques, car tel est le but de notre vie.

L’attitude de Jésus scandalisait les siens parce qu’ils ne comprenaient pas que Dieu avait décidé par amour pour eux de descendre jusqu’à eux pour  qu’ils ne s’égarent pas en cherchant à s’élever jusqu’à lui. L’homme qui accomplit pleinement son humanité rend gloire à son Seigneur qui l’a conçu  ainsi,  afin de partager avec son lui l’éternité qu’il a créée pour leur commune rencontre.

dimanche 24 mai 2015

Marc 5:21-43 le retour à la vie normale de trois femme dimanche 28 juin 2015



Marc  5/ 21-43

21 Jésus regagna l'autre rive en bateau, et une grande foule se rassembla auprès de lui. Il était au bord de la mer. 22 Un des chefs de la synagogue, nommé Jaïros, arrive ; le voyant, il tombe à ses pieds 23 et le supplie instamment : Ma fille est sur le point de mourir ; viens, impose-lui les mains, afin qu'elle soit sauvée et qu'elle vive. 24 Il s'en alla avec lui. Une grande foule le suivait et le pressait de toutes parts. 

25 Or il y avait là une femme atteinte d'une perte de sang depuis douze ans. 26 Elle avait beaucoup souffert du fait de nombreux médecins, et elle avait dépensé tout ce qu'elle possédait sans en tirer aucun avantage ; au contraire, son état avait plutôt empiré. 27 Ayant entendu parler de Jésus, elle vint dans la foule, par-derrière, et toucha son vêtement. 28 Car elle disait : Si je touche ne serait-ce que ses vêtements, je serai sauvée ! 29 Aussitôt sa perte de sang s'arrêta, et elle sut, dans son corps, qu'elle était guérie de son mal. 30 Jésus sut aussitôt, en lui-même, qu'une force était sortie de lui. Il se retourna dans la foule et se mit à dire : Qui a touché mes vêtements ? 31 Ses disciples lui disaient : Tu vois la foule qui te presse de toutes parts, et tu dis : « Qui m'a touché ? » 32 Mais il regardait autour de lui pour voir celle qui avait fait cela. 33Sachant ce qui lui était arrivé, la femme, tremblant de peur, vint se jeter à ses pieds et lui dit toute la vérité. 34 Mais il lui dit : Ma fille, ta foi t'a sauvée ; va en paix et sois guérie de ton mal. 35Il parlait encore lorsque arrivent de chez le chef de la synagogue des gens qui disent : Ta fille est morte ; pourquoi importuner encore le maître ? 36 Mais Jésus, qui avait surpris ces paroles, dit au chef de la synagogue : N'aie pas peur, crois seulement. 37 Et il ne laissa personne l'accompagner, si ce n'est Pierre, Jacques et Jean, frère de Jacques. 38Ils arrivent chez le chef de la synagogue ; là il voit de l'agitation, des gens qui pleurent et qui poussent de grands cris. 39 Il entre et leur dit : Pourquoi cette agitation et ces pleurs ? L'enfant n'est pas morte : elle dort. 40Eux se moquaient de lui. Mais lui les chasse tous, prend avec lui le père et la mère de l'enfant, ainsi que ceux qui l'accompagnaient, et il entre là où se trouvait l'enfant. 41 Il saisit l'enfant par la main et lui dit : Talitha koum, ce qui se traduit : Jeune fille, je te le dis, réveille-toi ! 42 Aussitôt la jeune fille se leva et se mit à marcher — en effet, elle avait douze ans. Ils furent saisis d'une grande stupéfaction. 43 Il leur fit de sévères recommandations pour que personne ne le sache, et il dit de lui donner à manger.  
  


Deux miracles coup sur coup. Voila de quoi émerveiller les foules, voila de quoi alimenter les prédications de beaucoup de pasteurs pour nous inviter à nous émerveiller et à croire que Jésus joue un rôle  vital dans l’existence de ceux  qui sont en manque d’espérance.

Voila en quels termes pourrait commencer le sermon que je ne vais pas faire. Je vais chercher ailleurs  que dans le merveilleux, d’autres aspects de ce texte à côté desquels je ne voudrais pas passer. Car  en  lisant attentivement ce récit on découvre des aspects du texte auxquels on ne s’attend pas.  Aucun des acteurs n’agit comme on aurait pu le supposer. Ils donnent  tous dans le faux, mais malgré tout leur démarche aboutit. Nous avons là l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire en présence de Jésus et pourtant la démarche qu’ils entreprennent donne le résultat espéré.  Ce texte fonctionne  comme si on nous donnait l’exemple de la prière qu’il ne faut pas faire et de constater que malgré tout, elle  est exaucée. Jésus ne tiendrait aucun compte de nos démarches maladroites ni de nos démarches de foi mal fondées  et de nos  attitudes théologiques bancales pour venir à notre aide et nous  apporter  une attitude réconfortante. Telle serait pour lui la règle de la vie.

 Nous pensons en faisant ce constat à toutes ces différences théologiques qui opposent les églises entre elles depuis parfois des millénaires et qui continuent à les diviser  au point de s’interdire tout  geste de communion entre elles alors que  Jésus les considéreraient comme des points de détails qui mériteraient  à peine qu’on s’y arrête.

Le récit, nous l’avons noté,  est fait de  deux récits imbriqués l’un dans l’autre. Il y est question d’une femme guérie en pleine rue,  aux sus et aux vues de  tout le monde sans même que Jésus s’en mêle vraiment.  Dans l’autre récit, il est question d’une autre femme -  une fillette dit le texte, mais est-elle une fillette ? – qui se meurt avant que Jésus intervienne et qu’il rend à la vie  dans le plus grand secret familial.

Pourquoi l’une est-elle guérie en public alors que pour l’autre Jésus, s’enferme avec elle et ses proches pour la réveiller ?  Sans doute  fallait-il, pour que la femme puisse retrouver pleinement  la jouissance de sa vie, que sa guérison  signifie aussi sa réintégration dans la vie sociale puisque sa maladie la rendait inapte à la vie avec les autres à cause de l’impureté qu’elle subissait  du fait des pertes de sang dont elle souffrait. Quant à la jeune femme, son retour à la vie signifiait aussi une guérison de la cellule familiale. Cela relevait alors de l’ordre du privé et n’avait besoin de n’être connu de personne.

Douze ans séparent ces deux femmes. La maladie de la plus vieille a commencé au moment de la naissance de la plus jeune. C’est comme si  la plus vieille  endossait le rôle de la mère de l’enfant  qui n’occupe aucune place ici et qu’on pourrait considérer comme morte si Jésus, au dernier moment,  ne l’exhumait  du néant où elle semblait être enfermée. La mort plane  sur la vie de ces trois femmes dans un non-dit  qu’il nous faut maintenant décrypter. Au moment où la plus vieille retrouve une vie normale, la plus jeune  renaît à la vie, et la mère est rendue à l’existence.   Jésus se charge ainsi aussi bien des morts secrètes que des morts réelles pour répandre la vie  de partout où il est reconnu.

Revenons à chacun des personnages de ce texte. Nous l’avons dit, aucun d’ entre eux  ne fait ce qu’il doit faire. Le récit est présenté de telle sorte qu’il suggère que les croyants font rarement ce que Dieu attend d’eux.  Sous couvert d’une démarche de foi, ils agissent, comme la femme  par superstition, où comme le Père  qui impose à Dieu, en manipulant Jésus la réponse qu’il espère.

L’attitude de la femme malade correspond au type de la démarche superstitieuse. Elle n’en peut plus. Elle est épuisée physiquement par sa  perte de sang qui affaiblit son organisme et par toutes les vaines tentatives qu’elle a entreprises auprès des médecins et en désespoir de cause des guérisseurs.  En outre, la culture de son pays lui interdit tout contact  avec les autres à cause de son impureté permanente.  Ne la blâmons pas si elle pense qu’elle peut s’approprier clandestinement  un peu de l’énergie vitale que Dieu a mise en Jésus.  Jésus ne la blâme par pour son geste, mais pour le secret  avec lequel elle a opéré.  «  Pas besoin de se cacher pour espérer » semble-t-il lui dire. La puissance de vie dont dispose Jésus est pour tous. Par Jésus  Dieu donne à tous  la capacité de vivre, même malade  et même mort. Douze ans de vie et de souffrances viennent de voler en éclat par le seul contact discret, avec Jésus et les effets de  cette  puissance de vie vont  rejaillir sur la jeune fille de l’histoire suivante.
Guérison de la femme atteinte d'une perte de sang  - Catacombe de Rome

Le Père de la jeune fille ne fait pas à son tour ce qu’il devrait faire.  Françoise Dolto a analysé  son cas avec attention.  Elle a montré qu’il a agi à tort envers Jésus  en lui ordonnant de faire ce qu’il doit faire à cause sans doute d’un complexe de supériorité mal assumé. Mais il a aussi   mal agi envers sa fille depuis sa plus tendre enfance dont il s’est totalement emparé au point que la mère ne joue plus aucun rôle auprès d’elle. Il parle de sa fille comme d’une petite fille alors qu’elle a douze ans. En orient, en ce temps là, elle était  à l’aube de devenir femme et se trouvait  déjà  en état d’être bonne à marier. Françoise Dolto estime que cette enfant est  étouffée et privée de possibilité d’entrer dans sa  vie de femme par un Père abusif et possessif.

Devant le drame de sa fille il somme Jésus d’obtempérer avec condescendance et autorité. Cette attitude pleine de contradictions révèle  le mal être qui est en lui.  il demande  à Jésus de lui imposer les mains comme s’il voulait régénérer la vie de son enfant en manipulant Jésus et par extension Dieu lui-même. Jésus évidemment ne se soumet pas, mais il reprend l’autorité à son compte. C’est lui, maintenant qui dit ce qu’il faut faire. Il rétablit l’unité familiale totalement rompue par la faute du Père en les réunissant avec lui et avec la mère dans la chambre de l’enfant. La jeune fille devient alors capable de vivre à nouveau et de sortir du sommeil léthargique où l’avait  enfermé l’attitude abusive du Père. La seule chose dont la jeune fille a besoin maintenant c’est de manger et de reprendre des forces. Le retour à la vie de l’enfant montre que Jésus avait vu juste. C’est son entourage qui la rendait inapte à la vie. En remettant chacun à sa place, la vie pouvait renaître.

Toute action de Jésus est porteuse de vie. Elle relève simplement de l’évidence selon laquelle, notre foi en Dieu consiste avant tout à reconnaître qu’il est pourvoyeur de vie. Le miracle permanent en nous découle simplement de ce que nous reconnaissons cet état de fait. Ici on l’a vu, il s’agit non seulement de guérison de maladie, mais de guérison de la vie sociale. La malade est réintégrée dans la société, la jeune fille est rendue à la vie, mais elle est aussi guérie des abus que son père a pu lui faire subir et la mère  reprend pied dans la vie familiale.  Jésus ici est entouré d'une atmosphère de mort, mais il suffit qu'il soit reconnu pour que  la vie, toute la vie reprenne ses droits. A nous de comprendre ce que la vie signifie pour Jésus.

mercredi 20 mai 2015

Marc 4:35-41 La tempête apaisée - dimanche 21 juin 215




35 Ce même jour sur le soir, Jésus leur dit : Passons sur l'autre rive. 36 Après avoir renvoyé la foule, ils l'emmenèrent dans la barque où il se trouvait, et il y avait aussi d'autres barques avec lui. 37 Il s'éleva une forte bourrasque, et les vagues se jetaient dans la barque au point qu'elle se remplissait déjà. 38 Et lui, il dormait à la poupe sur le coussin. Ils le réveillèrent et lui dirent : Maître, tu ne te soucies pas de ce que nous périssons ? 39 Il se réveilla, menaça le vent et dit à la mer : Silence, tais-toi. Le vent cessa et un grand calme se fit. 40 Puis il leur dit : Pourquoi avez-vous tellement peur ? Comment n'avez-vous pas de foi ? 41 Ils furent saisis d'une grande crainte et se dirent les uns aux autres : Quel est donc celui-ci, car même le vent et la mer lui obéissent ? 

Reprise du sermon du 21 juin 2009

Il est des vents impétueux qui bousculent le cours de notre vie au moment où nous nous y attendons le moins. Surgis d’on ne sait où, ils remettent en cause notre existence au point que nous risquons de perdre pied et de voir nos sécurités s’effondrer. Les récits bibliques sont pleins d’histoires évoquant des tempêtes terribles. Paul, l’apôtre missionnaire a connu trois naufrages, le prophète Jonas, alors qu’il fuyait Dieu, fut jeté à l’eau par des marins païens pour calmer la tempête que la colère des dieux, croyaient-ils, avait déclenchée contre eux. Tout au début des Ecritures, ne nous a-t-il pas été dit que Dieu arracha toute la création à la furie du Tohu-bohu qui contenait le monde avant même qu’il apparaisse. Nous n’oublierons pas non plus le récit du déluge.

La Bible nous précise que dans chacune de ces tempêtes Dieu était présent pour sauvegarder la vie des hommes en péril. Certes tous les drames ne finissent pas bien. Les ouragans font des dégâts considérables et beaucoup d’humains y perdent leurs biens et souvent ils y perdent aussi la vie. Nous le constatons chaque fois que les media nous parlent d’une catastrophe qui s’est produite quelque part sur notre terre.

Nous savons par expérience  que les croyants ne sont pas  plus épargnés  que les autres et que Dieu ne provoque pas davantage de miracles en leur faveur. Il ne faut pas imaginer que Dieu pourrait-être assez injuste pour préférer ses adorateurs au détriment des autres. Ne nous appesantissons pas sur ce constat, mais interrogeons-nous cependant sur ce que notre foi peut nous dire quand les vents du destin nous deviennent contraires.

L’Evangile nous a ciselé ici un petit joyaux en forme de récit de miracle pour nous stimuler quand nous traversons des zones de turbulences. Il y est question de la traversée d’une rive à l’autre d’un lac, le soir dans une barque. Tous ces éléments nous rappellent que cette expédition sur le lac peut aussi représenter la traversée de notre vie et que la barque pourrait être aussi  notre existence quand elle est  en danger. Certains Pères de l’Eglise ont voulu voir dans la barque une allégorie de l’Église agitée par les persécutions. Mais ne soyons pas trop restrictifs et contentons-nous de nous imaginer nous-mêmes dans une situation de détresse, comparable à celle de ces hommes en proie à une tempête au milieu des flots agités.

Que nous soyons croyants ou pas, les préoccupations ordinaires de la vie se déroulent pour nous, la plupart du temps, à l’écart de Dieu. Dieu est bien souvent apparemment absent de notre existence quotidienne. On ne le rencontre pas dans la routine journalière du métro-boulot-dodo. On n’a pas besoin de lui pour vérifier chaque soir si les devoirs de notre progéniture sont bien faits. On ne fait pas appel à lui pour surveiller les enfants dans leur bain et ce n’est pas lui qu’on appelle, mais le plombier quand il y a une fuite d’eau dans la cuisine. Si on va au culte le dimanche, c’est bien évidemment pour rencontrer Dieu, mais c’est pour recharger ses batteries ou pour réfléchir en sa présence aux grands problèmes de l’humanité, et non pas pour régler nos problèmes domestiques. Nous ne le mêlons pas au train-train quotidien.

Quand les difficultés arrivent, et elles arrivent alors qu’on ne s’y attend pas, nous nous culpabilisons d’avoir tenu Dieu à l’écart de notre existence habituelle. C’est la situation qui est décrite sur ce bateau alors que Jésus dort à l’avant confortablement, la tête reposant sur un coussin dont les autres Evangiles ne parlent pas. Il est rare que les Evangiles fassent allusion à un détail qui n’aurait pas d’importance. En fait le coussin est mentionné ici pour nous déculpabiliser ou plutôt pour déculpabiliser ses disciples. Il est mentionné pour dire que les choses se passent sur le bateau comme elles doivent être. Chacun s’occupe comme il doit et Jésus qui n’est pas utile à la manœuvre fait une sieste confortable. Ce n’est pas qu’on l’ait négligé puisqu’il se repose sur un coussin. Ce n’est pas non plus qu’on l’ait oublié, mais c’est comme cela, il s’est assoupi et personne n’est coupable de rien, et surtout pas de négligence. Beaucoup de croyants se sentent coupables, quand les drames les frappent, de ne pas avoir eu une vie de foi. Ils se persuadent que le malheur ne serait pas tombé sur eux s’ils avaient eu une foi plus active. Erreur ! Dieu ne récompense pas la piété par ses faveurs, il ne favorise pas ceux qui sont pieux au détriment des autres, sans quoi il n’y aurait jamais eu de martyrs dans l’Eglise. Le coussin est là pour nous rappeler que tout était normalement en ordre, même si Dieu ou Jésus était apparemment absent.

Si le Seigneur a embarqué avec ses amis sur le même bateau, il ne faut pas oublier qu’il y avait aussi d’autres barques. Elles seront, tout autant que la sienne, malgré son absence, épargnées par la tempête. Curieusement cependant, ceux qui sont embarqués avec Jésus ont un comportement étrange. Ce n’est pas le fait de le réveiller qui est surprenant, c’est qu’ils le culpabilisent de ne pas s’être réveillé à temps. : « Tu ne te soucies pas de ce que nous périssons » disent-ils.

Nous découvrons ici qu’ils ont un comportement qui nous est familier. C’est celui de chercher un responsable du mauvais sort qui nous arrive, si ce n’est pas de notre faute, c’est forcément de la faute d’un autre. La culpabilité est comme une médaille à deux faces. Ici le récit joue sur les deux faces. Nous avons déjà évoqué la première face en disant que nous ne sommes pas responsables de l’événement qui nous est contraire à cause de notre impiété. La deuxième face est plus sournoise. Il s’agit de trouver une responsabilité chez un autre. C’est l’âne de la fable « des animaux malades de la peste » ou c’est le bouc émissaire de la tradition juive. Ceux qui sont sur la barque rendent Jésus coupable de ne pas s’être réveillé assez tôt. 

Combien de croyants ne perdent-ils pas la foi parce qu’ils accusent Dieu de négligence ! On l’accuse de ne pas avoir préservé les passagers de l’avion qui vient de cracher ou de ne pas intervenir pour secourir ceux qui périssent actuellement en Méditerranée sur des rafiots mal équipés. Le  jour où nous serons provoqués par une épidémie, c’est encore lui qui en portera la responsabilité dans la pensée de beaucoup.

En fait, face aux épreuves de la vie nous cherchons toujours un coupable. Que ce soit nous ou que ce soit l’état ou que ce soit Dieu ou les deux à la fois car les choses doivent avoir une cause explicable ! Nous vivons en fait comme si les lois du hasard n’existaient pas ou mieux, comme si Dieu devait nous protéger du hasard quand celui-ci nous est défavorable.

Bien évidemment, la suite du récit nous trouble car elle laisse entendre qu’avec une foi suffisante les événements qui nous sont hostiles devraient avoir une fin heureuse. L’expérience nous apprend le contraire. Inutile d’évoquer le nombre de prières qui se sont trouvées sans réponse apparente et la consternation des malades qui n’ont pas trouvé la guérison espérée. Les situations qui se sont terminées par des drames ne se comptent plus. Pourtant la foi de tous ces gens ne doit pas être mise en cause. La réponse, s’il y en a une est ailleurs. Et cet ailleurs ne peut être qu’à la portée de notre foi.

Si le texte apporte une fin heureuse à cette histoire, c’est bien évidemment pour dire que malgré l’hostilité apparente du monde, Dieu maîtrise son destin et garde autorité sur les événements. Mais cette réponse est un peu courte et insatisfaisante.

Pour ma part, j’insisterai sur un détail du texte que nous n’avons pas encore relevé. C’est l’expression : « il se fit un grand calme. » Nous avons par cette expression la réponse qui ne peut être accueillie que par la foi. Elle caractérise les effets de la présence de Dieu en nous. Cette présence nous permet de voir au-delà de l’événement la réalité de Dieu qui transcende le temps et l’espace. La foi nous permet de nous situer en Dieu dans un temps qui n’est plus le temps présent mais qui est un temps où la résurrection nous a déjà introduits au cœur de l’être divin.

La foi que l’esprit de Dieu anime en nous, nous permet de dépasser les limites du monde sensible. Par elle nous comprenons que Dieu nous accompagne au-delà du mur que la mort semble avoir mis au terme de notre existence. Nous pénétrons déjà avec lui dans une dimension de l’existence qui n’est plus celle du monde présent. Nous devons donc nous laisser envahir par ce calme dont il est fait état ici pour faire face aux événements de notre existence. Cela nous permet d’accepter sans nous révolter, que personne ne soit rendu responsable des revers que la vie nous apporte. Seule notre foi nous donne la capacité de surmonter les événements qu’aujourd’hui nous ne comprenons pas.

Illustrations: de haut en bas
E. Delacroix
Jan Styka
Van Ruisdael
Willem van de Velde





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