jeudi 31 janvier 2013

Luc 9:28-36 la transfiguration 21 février 2016





28 Huit jours environ après ces paroles, il prit avec lui Pierre, Jean et Jacques, et il monta sur la montagne pour prier. 29 Pendant qu'il priait, l'aspect de son visage changea, et ses vêtements devinrent d'une blancheur éclatante. 30 Il y avait là deux hommes qui s'entretenaient avec lui : c'étaient Moïse et Elie 31 qui, apparaissant dans la gloire, parlaient de son départ, qui allait s'accomplir à Jérusalem. 32 Pierre et ses compagnons étaient accablés de sommeil. Réveillés, ils virent sa gloire et les deux hommes qui se tenaient avec lui. 33 Au moment où ces hommes se séparaient de Jésus, Pierre lui dit : Maître, il est bon que nous soyons ici ; dressons trois tentes, une pour toi, une pour Moïse et une pour Elie. Il ne savait pas ce qu'il disait. 34 Comme il parlait ainsi, une nuée survint et les couvrit de son ombre ; ils furent saisis de crainte, tandis qu'ils entraient dans la nuée. 35 Et de la nuée survint une voix : Celui-ci est mon Fils, celui qui a été choisi. Ecoutez-le ! 36 Quand la voix se fit entendre, Jésus était seul. Les disciples gardèrent le silence et ne racontèrent rien à personne, en ces jours-là, de ce qu'ils avaient vu.

Notre  inconscient  véhicule l’idée que plus on s’élève dans les montages, plus l’air se  fait pur, plus les idées se font sereines, plus on se rapproche de Dieu. C’est en regardant vers les hauteurs que celui qui adresse sa prière à Dieu  au psaume 121 se sent plus près de son Seigneur. "  Je lève mes yeux vers les montagnes, d’où me viendra le secours ?" Il n’est donc pas étonnant, qu’ à la suite de Jésus, ses trois plus proches collaborateurs lui emboîtent le pas et s’élèvent avec lui vers les sommets. Dans leurs pensées, comme dans la nôtre, les sommets de la montagne  se confondent  sans doute avec les sommets de l’esprit. C’est sur ces sommets là, à n’en pas douter que Dieu nous  donne rendez-vous.

Les auteurs de l’Evangile ont suivi la trace  de quelques patriarches  qui eux aussi ont entrepris des montées mémorables dans des montagnes qui après leur passage devinrent sacrées. Ils y firent des rencontres particulières avec Dieu et leurs successeurs après eux en tirèrent des leçons telles qu’elles nourrissent notre âme encore aujourd’hui.

Rejoignons  donc le premier d’entre eux, Abraham cheminant solitaire avec ses deux serviteurs et son âne. Il gravissait les pentes de la montagne au sommet de laquelle Dieu l’attendait. Son fils  suivait aussi sans un mot. Isaac ne savait pas encore que Dieu avait convoqué son Père pour qu’il l’offre en sacrifie lui, l’enfant du miracle. Alors que le Père des croyants   montait lentement pour accomplir son destin, il se rendait compte que Dieu restait sourd à sa prière silencieuse. Il le  suppliait  secrètement d’interrompre cette ascension qui devenait un véritable supplice pour lui. Le vieillard, tout entier concentré dans  ses pensées trouvait que l’exigence de Dieu était bien dure  et qu’elle avait même dépassée la limite du supportable. Il montait toujours, recherchant plus la solitude que la compassion.

Sa femme était restée seule en bas,  sous la tente dans l’ignorance de ce qui se tramait. C’était entre Abraham et Dieu que tout se jouait  maintenant, c’est pourquoi il laissa ses serviteurs au pied de la montagne avec l’âne. Il montait toujours vers son Dieu qui lui réclamait son fils.

Arrivé au sommet, Dieu n’était pas au rendez-vous ! En tout cas Abraham ne le voyait pas. C’est au moment où  il se préparait à faire le geste fatal qu’il réalisa qu’il n’avait rien compris.  Si Dieu lui demandait la vie de son fils, ce n’est pas de sa mort qu’il parlait. Il lui demandait qu’il lui confie  son fils pour le faire vivre. Il comprit alors, que depuis toujours il avait méconnu ce Dieu qui était son ami. Il y eut comme un sursaut de joie  dans sa tête  quand Dieu arrêta son bras et que la lumière se fit en lui. Il comprit que Dieu avait fait monter son fils avec lui, non pas pour le faire monter sur l’autel du sacrifice  mais pour le faire monter vers lui  afin de le prendre dans  son cœur  pour le faire vivre de son amour.  
Pierre Jacques et Jean montaient  à la suite de Jésus. Leur esprit n’était certainement pas encombré  par  les  mêmes soucis que ceux qui avaient agité les pensées  d’Abraham. Ils espéraient sans doute  rencontrer Dieu sous  un aspect qu’ils ne connaissaient pas encore, mais qu’ils ne pouvaient encore  imaginer. Longtemps avant eux, et c’était encore dans la mémoire  de tous, Moïse avait gravi une montagne, plus redoutable que celle-ci,  où grondait  le tonnerre et dont le front se perdait dans les nuages. Le Dieu qui l’habitait s’annonçait comme le créateur de l’univers, il prétendait dominer les autres dieux et s’imposait à eux. Il demandait l’adoration de tous et réclamait la soumission à  sa loi.


C’était justement pour  recevoir cette loi de ses mains divines que Moïse avait entreprit de gravir la montagne.  Lui aussi avait laissé ses compagnons en chemin et avait achevé l’ascension solitaire. Au sommet il recueillit les précieuses tables gravées en lettres de feu  par le doigt même de Dieu. La première proclamait l’unité de Dieu et réclamait son respect et son adoration. L’autre table, semblable à la première, insistait sur  le souci que l’on doit avoir pour les autres, à commencer par ses proches. Ces préceptes demandant l'amour du prochain avaient la même valeur que  ceux  concernant Dieu. Celui-ci confondait en un même commandement l’adoration que chacun lui doit avec  le service que chacun doit rendre à tous ceux qui l’entourent pour que leur vie  devienne possible et féconde.  C’était encore à une célébration de la vie que Moïse était invité.  Avec l’histoire de Moïse en mémoire nos marcheurs  poursuivaient  leur route sans crainte ?

Leur rencontre avec Dieu allait-elle se faire de la même façon qu’elle s’était faite, jadis  pour Élie, le prince des prophètes. Lui aussi avait  fait une expérience semblable ? Un croutons de pain dans la poche, une gourde d’eau à son côté, Il  avait marché solitaire, pendant  quarante jours. Il  fuyait la colère de la reine Jézabel qui en voulait à sa vie. Il gravissait lui aussi,  la montagne à la recherche de Dieu. Arrivé au somment il ne le vit pas. Il n’était ni dans le vent, ni dans la tempête, comme le récit de Moise l’avait laissé entendre. Il ne se cachait pas non plus, dans cet horizon fascinant qui s’étendait à l’infini. Sans doute fut-il aussi tenté de le chercher dans le coucher du soleil dont le rougeoiement sur le soir, embrase l’horizon et nous plonge dans des ravissements ineffables ?  C’est au fond d’une grotte, le visage couvert de son manteau  qu’il se rendit attentif au souffle d’un faible zéphire  dans lequel Dieu se cachait.  C’est  ainsi qu’il se révéla à lui.

Certainement c’est pour nous rentre témoignage de quelque chose qui le dépasse que l’Evangéliste nous entraîne  dans cette aventure à la suite des trois amis de Jésus qui le suivent dans son ascension. Jésus devant, les disciples ensuite et nous derrière  

Ne soyons pas étonnés  si l’expérience de Moïse et d’Elie se renouvelle  et si nous prenons part nous aussi à la vision  à laquelle ils participent. En arrivant  au sommet, ils voient les deux patriarches qui les ont précédés sur la montagne car leur aventure est partie prenante de ce que Jésus a à leur dire, c’est un enseignement par l’intuition  et non par les mots qu’il leur donne.  L’expérience de Moïse et d’Elie devient leur histoire et devient la nôtre en même temps. Une nuée enveloppe les trois apôtres  ainsi que le Seigneur, puis elle nous  enveloppe, nous  aussi à notre tour. L’extase va-t-elle se prolonger ? Non, il faut redescendre vers les hommes et se taire, car l’expérience vécue par eux leur est propre.  Chacun  à son tour fera la sienne.

Ils savent maintenant qui est Dieu et ce qu’il attend d’eux. Comme pour Élie le Dieu qui se révèle à eux, ne se voit pas. Sa présence est d’une autre nature et il n’appartient vraiment à aucun lieu. Dieu leur a fait comprendre qu’il se tient toujours sur le chemin de ceux vers qui il les envoie en qualité de prochain. Car cette vision ne leur a  été donnée  que pour  recevoir l’ordre de mission que  Dieu leur donne. Mais ce chemin est  aussi celui du sacrifice.

A peine descendu, Jésus  prend la direction d’une autre montagne qui a nom Golgotha où il fera le don de sa vie.  C’est alors que nos trois amis,  ainsi que ceux qui graviront après eux  la montagne  à la suite du Seigneur, se souviendront de l’image  d’Abraham gravissant solitaire la montagne. Ils  allaient découvrir, même s’il ne le savait pas encore,    que le don de la vie ne signifie pas la mort, même s’il passe par la mort. Il signifie la vie, la vie nouvelle que Dieu nous donne et que nul ne peut nous ôter.

La montagne que nous gravissons à la suite du Seigneur représente pour nous tous, l’itinéraire que nous avons suivi avant de découvrir la foi. Il débouche en plein ciel pour nous aider à comprendre que tout nous a été donné. Le don de la vie que Dieu nous transmet s’accomplit dans le don de notre vie que nous allons maintenant  consacrer aux autres.  Avec nous ils  graviront d’autres montagnes où Dieu renouvellera pour eux le don de la vie pour que d’autres vies se construisent à leur suite. Cependant, si tout nous est donné, même l’effort à faire pour arriver au sommet, l’étape ne s’arrête jamais là, elle se poursuit  dans la descente vers les autres où chacun mettra en valeur le don de la vie qu’il a reçu.

mardi 22 janvier 2013

Luc 4:1-13


 Luc 4 :1-13  . La tentation au désert dimanche  17 février 2013

1Jésus, rempli d'Esprit saint, revint du Jourdain et fut conduit par l'Esprit au désert, 2 où il fut mis à l'épreuve par le diable pendant quarante jours. Il ne mangea rien durant ces jours-là et, quand ils furent achevés, il eut faim. 3 Alors le diable lui dit : Si tu es Fils de Dieu, dis à cette pierre de devenir du pain. 4 Jésus lui répondit : Il est écrit : L'être humain ne vivra pas de pain seulement.

5 Le diable le conduisit plus haut, lui montra en un instant tous les royaumes de la terre habitée 6 et lui dit : Je te donnerai toute l'autorité et la gloire de ces royaumes ; car elle m'a été livrée, et je la donne à qui je veux. 7 Si donc tu te prosternes devant moi, elle sera toute à toi. 8 Jésus lui répondit : Il est écrit : C'est devant le Seigneur, ton Dieu, que tu te prosterneras, et c'est à lui seul que tu rendras un culte.

9 Le diable le conduisit encore à Jérusalem, le plaça sur le haut du temple et lui dit : Si tu es Fils de Dieu, jette-toi d'ici en bas ; 10car il est écrit :
Il donnera à ses anges des ordres à ton sujet,
afin qu'ils te gardent ;
11 et :Ils te porteront sur leurs mains,
de peur que ton pied ne heurte une pierre.
12 Jésus lui répondit : Il est dit : Tu ne provoqueras pas le Seigneur, ton Dieu.
13 Après avoir achevé de le mettre à l'épreuve, le diable s'éloigna de lui pour un temps.


La lecture de la presse ou les informations  de la radio ou de la télévision nous plongent quotidiennement dans un monde où l’injustice règne en maître et où ceux qui en sont victimes ne reçoivent que notre compassion impuissante, tant nous nous sentons démunis face à une fatalité que nous ne maîtrisons pas. Beaucoup par fatalisme ou par indifférence ne s’en émeuvent même plus. Bien évidemment certains dont nous sommes sans doute, cherchent  à  prendre un peu de hauteur. Ils espèrent sans y croire vraiment à un sursaut de la part de ceux qui dirigent les peuples pour qu’ils orientent les affaires du monde vers un mieux-être généralisé. Ils  œuvrent quant à eux de mille façons  pour inventer des solutions et militent sans relâche dans des associations humanitaires.

Ce faisant ils ont l’impression de n’être qu’une une goutte d’eau dans un  océan de détresse. En tournant leurs regards vers Dieu, Ils ne peuvent s’empêcher de l’accuser d’être étranger à ce monde dont il s’écarte de plus en plus. Les croyants en arrivent même  à perdre la foi. Ils ont aussi l’impression que le Seigneur reste indifférent au combat qu’ils mènent pour améliorer les choses. Tout cela les rend malheureux. Ils s’accusent à leur tour de ne pas savoir faire ce qu’il faudrait faire et de ne pas agir dans la bonne direction. En même temps, ils se sentent incapables de modifier  quoi que ce soit dans  un système qui fonctionne d’une manière immuable.  Ils songent alors  qu’un changement de vie radical de leur part, faute d’agir sur le monde, leur donnerait meilleure conscience.

Certains l’ont déjà fait ! Ils se sont mis à l’écart de la société,  et ont choisi de vivre dans un univers clos, refermé sur lui-même. Ils pratiquent une piété rigoriste pour plaire à Dieu  et regardent de loin ce monde qui s’autodétruit en attendant que Dieu lui donne le coup de grâce en provoquant la fin des temps. Mais loin de fuir le monde d’autres estiment qu’ils ont à y tenir leur place.

La foi chrétienne nous a habitués à nous libérer de ces tensions et à ne plus nous culpabiliser de nos échecs. Nous espérons qu’un repentir sincère permettra  la transformation de nos individus et  ouvrira nos âmes au pardon et au salut. Mais si cette attitude nous conforte dans la foi, elle ne change  en rien le monde qui nous entoure et dont nous nous voulons solidaires. Nous sommes alors tentés, le mot est enfin prononcé, de nous demander si  nous sommes sur la bonne voie et si en croyant servir Dieu nous ne nous fourvoyons pas. Nos nous demandons même   s’il ne faut pas chercher ailleurs d’autres comportements ou d’autres explications que dans une religion qui paraît dépassée. En nous posant de telles questions, nous plongeons  au cœur de la tentation où Jésus vient nous rejoindre ce matin.

C’est lui qui vient maintenant nous rencontrer dans le désert de nos âmes. Il prend en charge tous nos questionnements. Il nous invite à le suivre sur  le chemin qui mène à Dieu et qui débouche sur une espérance pour ce monde. Mais pour y arriver il faut nous cramponner à la foi qui fut la sienne quand il était sur terre et qui doit être encore la nôtre aujourd’hui.

C’est alors qu’une première tentation nous guette déjà. C’est celle qui consiste à enfermer Jésus dans un monde qui n’est pas le nôtre. Nous sommes tentés de croire que son combat pour sauver le monde ressemblerait à un combat héroïque où il aurait affronté le diable, tel Saint Michel terrassant le démon et nous aurait  délivrés de l’emprise du mal comme par magie. Nous en arriverions ainsi à penser que Jésus nous sauverait malgré nous et  que nous serions de simples spectateurs de l’événement. C’est parce que nous savons que les choses ne sont pas exactement  ainsi, que nous sommes tentés de croire que Dieu s’est écarté le monde.

Les tentations que surmonte Jésus sont les nôtres, elles nous poussent à mettre Dieu en cause, c’est pourquoi  nous aimerions le forcer à agir pour qu’il s’affirme comme Dieu selon notre conception des choses. Nous aimerions qu’il produise du pain en abondance pour que les déshérités cessent d’avoir faim. C’est la première tentation à laquelle le diable soumet Jésus. Cette tentation est bien évidemment  la nôtre. Elle trouve même ses racines dans l’expression de notre foi. Elle se manifeste même  dans la célébration de nos cultes au moment de la prière dite prière  d’intercession.

 Nous y  faisons bien souvent  l’inventaire de tout ce qui va mal dans notre église, dans notre ville et dans le monde. Nous constatons que si Dieu  n’intervient pas dans les situations que nous lui présentons, cela relève de sa volonté. Nous  lui rappelons cependant que nous faisons tout ce qui est  en notre pouvoir pour remédier aux situations que nous lui soumettons. Nous lui disons que nous avons mis la main à la poche et à la pioche, mais nos efforts sont restés vains. Nous ne manquons pas de rappeler que les associations caritatives sont à l’œuvre et que notre église reste fidèle dans la prière. Nous estimons avoir accompli correctement ce que nous devions faire. Malgré tout, notre prière est restée terriblement accusatrice à l’égard de Dieu, car nous nous sommes comportés comme si nous le  tenions pour responsable du fait que  les situations que nous lui avons soumises n’évoluent pas. Nous l’accusons, de ne pas être le régulateur du monde comme  nous l’espérons.

N’est-ce pas là une tentation  qui nous assaille continuellement ? Elle consiste à croire que Dieu devrait efficacement réguler le monde à sa manière. Mais Dieu n’est pas le régulateur du monde, il en est le créateur. Puisqu’il  a créé libres, les  hommes qui l’habitent, c’est donc à eux de  prendre le monde en charge. Mais nous doutons qu’ils puissent le faire, nous doutons du fait  que Dieu qui a créé toute chose n’ait pas rendu les hommes  capables de  réguler le monde.  Notre tentation est de croire que le monde a besoin d’un miracle  pour se tirer d’affaire et que Dieu se refuse à le faire. Et comme ce miracle ne se produit pas, notre tentation est grande de croire que Dieu  est impuissant à aider l' humanité défaillante. Notre tentation est de croire que l’Evangile  ne peut guider les hommes  dans leur gestion des affaires du monde. Pourtant,  la seule arme dont Jésus dispose face au tentateur est d’affirmer  que la parole de Dieu est assez efficace   en elle-même pour que le monde ne se perde pas.  Il n’a rien d’autre à nous confier.

Pour nous tirer de ce mauvais pas où notre logique nous entraîne, nous persévérons dans l’idée que le monde est soumis au mal. Nous pensons même qu’il a pris le pas sur Dieu. Voilà une nouvelle tentation à laquelle nous succombons continuellement. Elle consiste à nous croire irresponsables de la tournure que prennent les choses  à cause de la fatalité du mal qui pèse sur nous. Nous sommes tentés de nous comporter comme si Jésus ne nous avait pas vraiment libérés par sa résurrection et qu’il ne nous avait pas ouvert les portes de l’avenir en nous montrant que seul l’amour pour les autres était porteur d’avenir. Nous sommes continuellement tentés de plaider notre irresponsabilité en pensant que c’est Dieu qui n’en fait pas assez.

La tentation suprême, c’est celle de ne pas nous faire confiance à nous-mêmes et de faire comme si l’action du Saint Esprit était inefficace en nous. Elle consiste à  croire que le Christ ne serait pas capable de nous aider  à triompher de la fatalité qui pèse sur nous. Encore une fois il nous renvoie à l’Ecriture pour puiser en elle l’enseignement susceptible de nous faire surmonter la tentation. Seul l’intérêt du prochain  a force de loi, et c’est lui qui doit nous aider à jouer notre rôle.

Il nous faut donc  croire que ceux qui œuvrent dans le monde ne restent pas toujours étrangers à cet enseignement. Il nous est permis d’espérer  que par leurs actions les docteurs du monde trouvent parfois  leur place dans le  camp des justes. Est-il alors impossible de penser que le cœur des hommes qui sont aux commandes sur cette planète  peut être assez malléable  pour que l’esprit de Dieu l’atteigne ?  Leur brillante intelligence est  capable de les amener à considérer que seule une attitude semblable à celle préconisée par l’Evangile est susceptible d’améliorer la situation du monde. Serait-il alors impensable que l’Esprit de Dieu puisse travailler l’intelligence de ces hommes  et de ces femmes et les amène à découvrir que l’altruisme est la seule voie porteuse d’avenir ? Ils réaliseront alors que sans le savoir ils sont parfois sur la même route que Dieu.

Nous sommes régulièrement tentés de croire que Dieu n’est pas à la hauteur de ce qu’il promet et que l’homme n’est pas capable de réaliser de telles promesses. Est-ce bien raisonnable ?

Illustrations Jérôme Brescia

jeudi 17 janvier 2013

Luc 5:1-11


Luc 5 : 1-11 La pêche miraculeuse  Dimanche  10 février 2013

1 Comme la foule se pressait autour de lui pour entendre la parole de Dieu, et qu'il se tenait près du lac de Génésareth, 2 il vit au bord du lac deux bateaux d'où les pêcheurs étaient descendus pour laver leurs filets. 3 Il monta dans l'un de ces bateaux, qui était à Simon, et il lui demanda de s'éloigner un peu du rivage. Puis il s'assit, et du bateau il instruisait les foules.
4 Lorsqu'il eut cessé de parler, il dit à Simon : Avance en eau profonde, et jetez vos filets pour pêcher. 5 Simon lui répondit : Maître, nous avons travaillé toute la nuit sans rien prendre. Mais, sur ta parole, je vais jeter les filets. 6 L'ayant fait, ils prirent une grande quantité de poissons : leurs filets se déchiraient. 7 Ils firent signe à leurs associés qui étaient dans l'autre bateau de venir les aider. Ceux-ci vinrent et remplirent les deux bateaux, au point qu'ils enfonçaient. 8 Quand il vit cela, Simon Pierre tomba aux genoux de Jésus et dit : Seigneur, éloigne-toi de moi : je suis un homme pécheur. 9 Car l'effroi l'avait saisi, lui et tous ceux qui étaient avec lui, à cause de la pêche qu'ils avaient faite. 10 Il en était de même de Jacques et de Jean, fils de Zébédée, les compagnons de Simon. Jésus dit à Simon : N'aie pas peur ; désormais ce sont des êtres humains que tu prendras. 11 Alors ils ramenèrent les bateaux à terre, laissèrent tout et le suivirent.

 Jean 21 : 1-11
1 Après cela, Jésus se manifesta encore aux disciples, à la mer de Tibériade. Voici comment il se manifesta.
2 Simon Pierre, Thomas, celui qu'on appelle le Jumeau, Nathanaël, de Cana de Galilée, les fils de Zébédée, et deux autres de ses disciples étaient ensemble. 3 Simon Pierre leur dit : Je vais pêcher. Ils lui dirent : Nous venons avec toi, nous aussi. Ils sortirent et montèrent dans le bateau ; cette nuit-là, ils ne prirent rien.
4 Le matin venu, Jésus se tint debout sur le rivage ; mais les disciples ne savaient pas que c'était Jésus. 5 Jésus leur dit : Mes enfants, avez-vous quelque chose à manger ? Ils lui répondirent : Non. 6 Il leur dit : Jetez le filet à droite du bateau, et vous trouverez. Ils le jetèrent donc ; et ils n'étaient plus capables de le retirer, tant il y avait de poissons. 7 Alors le disciple que Jésus aimait dit à Pierre : C'est le Seigneur ! Quand Simon Pierre eut entendu que c'était le Seigneur, il attacha son vêtement à la ceinture — car il était nu — et il se jeta à la mer. 8 Les autres disciples vinrent avec la barque, en traînant le filet plein de poissons, car ils n'étaient pas loin de la terre, à deux cents coudées environ.
9 Lorsqu'ils furent descendus à terre, ils voient là un feu de braises, du poisson posé dessus, et du pain. 10Jésus leur dit : Apportez quelques-uns des poissons que vous venez de prendre. 11 Simon Pierre monta dans le bateau et tira à terre le filet, plein de cent cinquante-trois gros poissons ; et quoiqu'il y en eût tant, le filet ne se déchira pas.


Que  d’aventures, que d’événements ne se sont-ils pas déroulés au bord de ce lac mythique de Génésareth. Jésus aimait s’asseoir sur  les pentes douces de la colline dominant ses berges,  et c’est là qu’il donna ses premiers enseignements.  En se promenant  sur les bords du rivage,  le chercheur de Dieu trouvera à coup sûr l’empreinte de Jésus sur le sable et il reconnaîtra son embarcation parmi les barques  attachées sur le rivage, car c’est là que l’Evangile est né, c’est là aussi que la première église a trouvé ses premiers fondements.

Le promeneur  verra le Seigneur s’attarder  au bord du rivage marchant au bord de l’eau, à moins qu’il ait l’impression qu’il marche sur l’eau tant  les images deviennent irréelles quand le soir arrive.  A la tombée du jour, Jésus ne sera plus qu’une silhouette qui se détache à peine sur l’horizon.  C'est alors  que l’eau se met à  s’agiter  comme tous les soirs. Parfois cependant, le vent se lève, la houle s’amplifie,  la tempête menace.  La barque bousculée par les flots peine contre le vent et ceux qui avaient  embarqués prennent peur. Mais il suffit que Jésus mette le pied  à bord pour que le calme se fasse. Il se peut même qu'il se soit  déjà embarqué  sans que personne ne le sache et qu ’il dorme paisiblement couché  sur  un coussin tandis que  le navire prend de la gite.

Les Evangélistes  se sont  souvenus  qu’une autre fois, Jésus organisa un pique-nique  fantastique  sur ce même rivage. On en  on a gardé  le souvenir pendant longtemps. Chacun avait tiré ses provisions de son sac et les avait partagés avec les autres et Jésus les avait bénis.  

Ces mêmes  auteurs n’ont pas oublié  tous ces moments passés avec lui. C’est en les racontant  qu’ils ont donné ses premiers contours à l’Eglise naissante et qu’ils ont formulé des consignes pour les églises à venir !  Les églises à venir avez-vous dit ? Pourquoi pas ! N’avez-vous pas remarqué qu’il y avait deux barques,  et la barque n’est-elle pas le symbole de l’Eglise ? Et là il y en a deux. Affaire à suivre.

La personne de Jésus au bord du lac est si présente qu’il semble faire partie du paysage tant les Evangile nous l’ont rendu familier. Le récit de ce jour  évoque un jour de pêche mémorable. Par une belle matinée, la foule se bouscule  tellement autour de Jésus, qu'il est pressé par les uns et bousculé par les autre. Personne n’a   vraiment d’ égard pour sa personne. Il   a   déjà les pieds   dans le lac. Il  ne peut  se faire entendre.  Il  doit se réfugier sur une barque pour ne pas tomber à l’eau.

C’était la barque de Simon, le patron pêcheur, le futur Pierre. Jésus s’installe confortablement, il s’assied pour être plus stable et aussi parce que c’est assis que l’usage veut que l’on fasse les discours. Il parle d’abondance et tous sont séduits. Il esquisse les premiers traits de la future église  comme un lieu de libre parole. En lisant le récit de cette aventure les membres de l’Eglise, bien plus tard  comprendront  que Jésus a besoin de la participation de chacun pour que son Evangile devienne réalité.

 Mais Jésus sur sa barque montre qu’il n’est pas seul à l’œuvre.  Pour que sa parole puisse porter il faut qu’il reçoive l’aide de Pierre qui bien que fatigué se remet à la manœuvre. Il fait avancer le bateau  en pleine eau pour être à une  distance  raisonnable de la foule et pour ne pas d'être  étouffé par elle, mais il est assez près tout de même pour que la parole amplifiée par l’eau puisse atteindre chacun.

Jésus  se tait au bout d’un moment. Mais ce n’est pas fini. Il remet les marins  au travail. Ils  n’ont pas perdu leur temps  pendant qu’il parlait. Selon l’Evangile de Luc ils ont  lavé leur filet,  selon les autres Marc et Matthieu,  ils les ont  réparés. Disons qu’ils se sont  préparés,   ainsi que leur filet pour donner suite aux  événements car Jésus va  avoir besoin de ces hommes et de leur  filet.    A contre cœur,  ils obéissent à Jésus qui les mobilise pour une nouvelle action.  A nouveau ils  vont peser sur les rames, et  jeter leur filet à l’endroit indiqué.

Il est curieux de constater que les Chrétiens renâclent quand Jésus les met au travail. Ils ont rarement envie de faire ce que Jésus souhaite qu’ils fassent. Aujourd’hui, les Eglises donnent plutôt dans le cultuel, dans le culturel aussi, dans le social parfois. Elles répugnent à s’engager ailleurs. Elles veulent rester dans le politiquement correcte, et elles font la sourde oreille et plaident leur incompatibilité ou leur incompétence quand il s’agit d’avoir un discours subversif ou des attitudes provocantes.

Quoi qu’il en soit de leurs réticences, le miracle se produit quand même. Cet épisode a tellement marqué les esprits qu’il a été repris dans l’Evangile de Jean qui l’a complètement transformé. Il en a fait un événement central de la résurrection sous l’influence de laquelle les disciples remplis d’enthousiasme se sont mis  à réaliser par eux-mêmes le miracle prévu par Jésus. Ils étaient  venus à la pêche pour palier à leur morosité et à leur marasme plus que par nécessité. La vue du ressuscité les a complètement transformés. Elle   a provoqué en eux un dynamisme tellement surprenant qu’ils ont été projetés sur les routes du monde. A partir de ce moment ils n’auront plus qu’un seul souci, celui de  donner aux hommes l’envie de vivre. C’est ainsi qu’ils sont devenus  pêcheurs d’hommes  comme Jésus leur en avait fait la promesse de son vivant, jadis  sur les bords de ce lac.

Le miracle ne  relève pas tellement du prodige à cause  d’une pêche particulièrement fructueuse qui est à l’origine du récit rapporté d’abord par Luc et modifié ensuite par Jean, mais il consiste à transformer des hommes passifs en  acteurs capables de donner l’envie de vivre aux autres  sous la conduite de Dieu.

Mais ce n’est pas tout.  Pour que le miracle puisse  se produire il a fallu le concours d’une deuxième barque qui est venue en aide à la première. On avait signalé sa présence dès le début de l’histoire, mais on n’avait pas dit qui était dans cette deuxième embarcation. C’étaient les fils de Zébédée. Il faut entendre par là Jacques et Jean. Le récit de l’Evangile de Jean ne mentionne pas cette autre embarcation, et les autres évangiles, ceux de Marc et de Matthieu s’ils parlent d’une autre barque ne font aucune allusion au miracle. Il y a sans doute ici,  sous-jacent,  un problème d'une autre nature ! Mais avant de l’aborder, regardons avec quelle minutie  la technique de pêche est rapportée.

Les hommes de la première barque font signe à ceux de la deuxième de les rejoindre.  Ils ne les hèlent pas comme des amateurs pourraient  le faire parce qu'il ne faut pas faire de bruit afin de  ne pas faire fuir le poisson. Les autres s’approchent donc  avec précaution et pour que le filet ne se  rompe pas, ils ne le sortent pas de l'eau mais  ils déversent directement le contenu  dans les barques qui enfoncent  tant la charge est lourde.  L’auteur de l’Evangile de Jean ne prend pas les mêmes précautions. Il se contente de dire que Pierre tire le filet à terre au risque justement de perdre une partie du produit de la pêche, mais il ne se rompt pas.

Ce récit  tel que le raconte Luc  avec art, semble être pris sur le vif, pourtant nous savons que plus de quarante ans séparent le  moment où il a été écrit du moment où il s’est produit. La manière de le raconter reflète  certainement l’atmosphère de l’époque où il a été rédigé, mais l’habileté du narrateur fait que le lecteur ne s’en rend pas compte.  A ce moment-là, de profondes dissensions avaient déjà creusé des brèches dans l’unité de l’Eglise naissante.  « La grande église » comme se plaisent à l’appeler les historiens, c’est-à-dire l’église constituée autour du nom de Pierre s’était déjà imposée comme église dominante. Mais l’église dite « judéo chrétienne » issue de la prédication de Jean s’opposait à elle et refusait toute rupture avec les milieux juifs comme l’avait déjà fait l’autre église. Deux tendances s’affrontaient déjà.

Nous avons compris, par le rôle qui est dévolu à Pierre que le  récit de Luc   insiste  sur la prédominance  de la " grande église". Cependant, il  n’accrédite pas   encore  la rupture entre les deux courants. Il présente son récit comme si l’autre partie de l’église, celle qui s’est constituée autour du nom de Jean (1) et qui est identifiée à la seconde barque, fait encore partie de l’église apparemment unie.  Dans le récit de l’Evangile de Jean, sans doute issu des milieux de la deuxième église, on veut oublier la situation conflictuelle, on ne tient pas compte de la division. Ce récit  ne connaît qu’une seule église, mais retire l’autorité à Pierre pour la donner à Jean qui est le  seul à reconnaître le Seigneur ressuscité. Quant à Pierre, il reste  hésitant parce qu’il ne sait pas encore où est la bonne voie pour lui.

En dépit des ruptures qui se préparent, Luc  n’hésite pas  à encourager les diverses factions de l’église à faire front commun face au vaste chantier que représente l’évangélisation du monde à qui il faut donner vie. Ce mot d’ordre qui ne tient pas compte des divisions  doit   traverser les siècles et devenir  le nôtre aujourd’hui. Qu'on se le dise!

(1) Jacques, l’autre fils de Zébédée était mort depuis longtemps ( en 42)