mercredi 30 juillet 2014

Jérémie 20:7-9 Et Dieu dans tout ça? - dimanche 31 août 2014

Chapitre 20
  
7 Tu m'as dupé, SEIGNEUR,

et je me suis laissé duper ;

tu m'as saisi, et tu l'as emporté.

Je suis sans cesse en butte à la dérision,
tout le monde se moque de moi.
8 Car toutes les fois que je parle, je crie,
je proclame : « Violence et ravage ! »
La parole du SEIGNEUR m'expose sans cesse
aux outrages et aux railleries.
9 Si je dis :
« Je ne l'évoquerai plus,
je ne parlerai plus en son nom »,
c'est dans mon cœur comme un feu dévorant,
enfermé dans mes os ;
je me fatigue à le contenir, et je n'y parviens pas.


10 Car j'apprends les mauvais propos d'une multitude :
Effroi de tous côtés !

Annoncez ! Annonçons-le !

— Tous mes amis m'observent
pour voir si je vais chanceler :
Peut-être se laissera-t-il duper,
et nous l'emporterons sur lui,
nous nous vengerons de lui !
11 Mais le SEIGNEUR est avec moi comme un héros brutal ;
c'est pourquoi mes persécuteurs trébucheront
et ne l'emporteront pas.
Ils auront bien honte de n'avoir pas réussi :
ce sera une confusion pour toujours ; on ne l'oubliera pas.


Il nous arrive de  chercher dans la fuite loin de Dieu l’apaisement à nos révoltes Il nous arrive de croire que nous avons  fait  des choses bonnes et de découvrir que les événements se retournent contre nous. Nous croyons suivre les chemins de la foi  et c’est le silence de Dieu qui nous répond.  Nous espérons cependant que Dieu partagera notre révolte, mais la voix de sa sagesse reste muette. Dieu ne semble pas toujours disponible et son mutisme apparent nous fait du mal.

Par ces quelques remarques,  nous rejoignons les préoccupations des prophètes d’Israël qui les ont portées avant nous, car ils cherchaient plus à trouver de la cohérence dans la Parole de Dieu qu’à deviner l’avenir que personne ne peut connaître puisqu’il s’écrit avec Dieu au jour le jour. Mais avant d’aller plus loin dans nos investigations essayons de préciser ce que recouvre pour nous la notion de prophète.

Il n’est pas rare, au cours d’une  conversation, alors que l’on élabore des projets et que l'on ne sait pas exactement comment tourneront les choses, que l’on soit amené, à cours d’arguments à dire qu’après tout, nous ne sommes pas des prophètes. Cela veut dire que le propos nous dépasse et que l’on ne détient pas les secrets de l’avenir. Notre culture actuelle conçoit la notion de prophète dans deux acceptions différentes. La première assez classique, identifie le prophète avec le devin, celui qui serait gratifié d’un don qui lui permettrait de connaître l’avenir. L’autre usage du mot servirait à désigner les fondateurs des grands courants religieux tels Moïse ou Mahomet ou plus proches de nous, Joseph Smith pour les Mormons ou le rev. Moon. Bien que Jésus Christ corresponde à la deuxième de ses définitions, ce sont d’autres titres que l’on a retenus pour lui.

Notre propos de ce jour va consister à nous entretenir  sur les vicissitudes du prophète Jérémie. Ni lui, ni aucun des grands prophètes d’Israël ne correspond aux définitions que je viens d’énoncer. Certes, à l’époque biblique, il existait une fonction officielle de prophètes. Ils vivaient en confréries et étaient sans doute appointés par le pouvoir royal. Leur fonction consistait à éclairer le roi sur l’avenir que Dieu lui réservait. Si cette fonction était bien établie, elle n’a pas laissé beaucoup de traces. Les prophètes dont les noms nous sont parvenus exerçaient une fonction de type charismatique. Ils n’étaient pas  investis  dans cette  fonction par les hommes, mais ils croyaient avoir reçu une vocation de Dieu qui leur permettait d’avoir un éclairage particulier sur les événements. Leurs propos relevaient d’ une lecture clairvoyante des Ecritures  et correspondaient rarement à ce que le roi ou le peuple désiraient entendre  à ce sujet

En fait, c’est à partir de la conscience qu'ils avaient de Dieu qu’ils se prononçaient sur les événements. Il s’agissait pour eux de percevoir quelles étaient les attitudes fidèles que leur suggérait la méditation de la loi. La fidélité à Dieu n’impliquait pas forcément des conséquences gratifiantes pour eux, parfois même, elles étaient en opposition radicale avec la cour, le clergé et le peuple. C’est  dans une telle situation que nous rejoignons Jérémie.

Jérémie a été amené à constater que le comportement du roi et de ses ministres était souvent contraire aux prescriptions de la loi en dépit de ce que pouvaient dire les prophètes officiels ainsi que le haut clergé constitué par le grand Prêtre et son entourage.

Il a compris très vite, encore enfant a-t-il dit,  qu’il lui était demandé de répondre à sa vocation en ne se taisant pas.  Proche des grands  et familier du clergé auquel il appartenait sans en exercer la fonction à cause de son célibat, il était écouté, contesté et malmené. Pourtant, il a réussi à conserver l’amitié et  l’oreille de personnes proches du pouvoir. Son collaborateur, son   ami et son protecteur à la fois fut le secrétaire Baruch. Il nous faut entendre par secrétaire la « fonction de secrétaire d’état », c’est à dire celle de ministre.

Comment pouvait-il porter un  poids  si lourd quand les événements sefaisaient contraires et que Dieu paraissait se jouer de lui ? Comment ne pas douter de Dieu quand les conséquences de ses propos le plongeaient dans des difficultés extrêmes. Sa vie fut souvent en danger et il dut se cacher. Il fut jeté dans une citerne par ordre du roi et sauvé de justesse par le chambellan qui se compromit pour lui.

 Avec le décalage de l’histoire, nous découvrons dans la plainte de Jérémie qui nous est rapportée ici une plainte que nous  pourrions formuler à notre tour. Comme  Jérémie, il nous arrive d’en vouloir à Dieu parce que les événements ne vont pas dans le sens où nous le souhaitons. Par fidélité à Dieu il arrive que nous fassions des choix de vie douloureux et que ces choix se  retournent contre nous. Nous constatons que la vertu n’est pas récompensée à sa juste mesure, que la manifestation de la foi paraît obsolète et  que Dieu reste silencieux face  à notre épreuve.Nous faisons nôtre ce cri de Jésus sur la croix: "Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné?"

A l’exemple de Jérémie, nous devons comprendre cependant que le dialogue n’est jamais rompu avec Dieu en dépit de son silence apparent. La logique humaine voudrait que le croyant déçu abandonne tout  et qu’il s’inspire de la logique de la femme de Job qui lui recommandait au plus fort de l’épreuve de maudire  Dieu et  de  mourir. Jérémie ne cesse d’interpeller Dieu  et même de le mettre en accusation. Par son attitude Jérémie nous apprend que Dieu préfère toujours le dialogue à tout autre attitude, même si Dieu paraît absent.  Jérémie n'est pas ce triste personnage geignard qu'en a fait la tradition. Quand le silence de Dieu  lui donne l’impression qu’il cautionne l’injustice, il n'accepte pas  la situation et  il n'encaisse pas sans rien dire. Même si Le croyant ne comprend pas le sens des événements, il ne doit jamais s’enfermer dans une attitude résignée  face à Dieu  car Dieu n’est jamais à l’origine de ce qui nous accable. Il n’est jamais l’auteur de nos malheurs, même si on  ne comprend pas le sens de ce qui nous arrive.

Quand les événements nous sont vraiment contraires, il n’est pas évident de garder une telle sérénité dans la foi. Ce court passage de Jérémie nous montre qu’avant de ressentir le moindre soulagement en exprimant sa révolte, il doit insister et exprimer sa rancœur et même son désir de rejeter Dieu. Il exprime son projet de s’écarter de la foi et d’abandonner sa vocation de prophète. Et quand il a fini de crier sa révolte, au lieu de trouver son soulagement dans une forme d’athéisme apaisant, il se laisse envahir par une vague de paix. Sa révolte contre Dieu, poussée à l’extrême a nettoyé en lui toute amertume et a rétabli une relation d’amour avec lui, car Dieu n’était en rien dans ses malheurs. Quand l'esprit du prophète oscille entre rejet et résignation, c'est toujours dans le silence accueillant de son Dieu qu'il retrouve sa sérénité.

Rien n’a pourtant changé dans sa situation. Mais une énergie nouvelle s’est emparée de lui. Il sait alors qu’il ne peut avancer autrement qu’en prenant la main  que  Dieu lui tend en espérant qu’un jour les événements lui donneront raison. La suite nous montrera que  non.

Deux mille cinq cents ans nous séparent  de l’époque où a vécu ce témoin courageux. Entre lui et nous s’est alors interposé un autre visage, le visage de celui qui a porté les mêmes détresses et les mêmes révoltes que lui. Il s’agit, bien entendu de Jésus Christ. Il  a portées les révoltes des hommes jusque dans la mort. Même si ce n’est pas par la volonté de Dieu qu’il est mort,
Dieu n’a  cependant pas voulu le soustraire à cette mort. Nous découvrons alors que la fidélité de Dieu à la cause des hommes, va jusque dans la mort et qu’il la transforme en lui donnant la saveur de l’éternité.  Dieu ne nous abandonne pas dans l’épreuve, comme il n’a pas abandonné son fils dans la mort. Il a sublimé sa vie, comme il  sublime la nôtre pour que notre vie s’accomplisse totalement dans le destin qu’il a choisi  de nous faire partager : l’éternité 
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lundi 28 juillet 2014

Matthieu 16:21-27 " si quelqu'un veut me suivre... dimanche 31 août 2014



"Si quelqu'un veut me suivre, qu'il se charge de sa croix..."

Matthieu 16 :21-27

Dès lors Jésus commença à montrer à ses disciples qu'il lui fallait aller à Jérusalem, souffrir beaucoup de la part des anciens, des grands prêtres et des scribes, être tué et se réveiller le troisième jour. 22 Pierre le prit à part et se mit à le rabrouer, en disant : Dieu t'en préserve, Seigneur ! Cela ne t'arrivera jamais. 23 Mais lui se retourna et dit à Pierre : Va-t'en derrière moi, Satan ! Tu es pour moi une cause de chute, car tu ne penses pas comme Dieu, mais comme les humains.
 
24 Alors Jésus dit à ses disciples : Si quelqu'un veut venir à ma suite, qu'il se renie lui-même, qu'il se charge de sa croix et qu'il me suive. 25 Car quiconque voudra sauver sa vie la perdra, mais quiconque perdra sa vie à cause de moi la trouvera. 26 Et à quoi servira-t-il à un être humain de gagner le monde entier, s'il perd sa vie ? Ou bien, que donnera un être humain en échange de sa vie ? 27 Car le Fils de l'homme va venir dans la gloire de son Père, avec ses anges, et alors il rendra à chacun selon sa manière d'agir. 28 Amen, je vous le dis, quelques-uns de ceux qui se tiennent ici ne goûteront pas la mort avant d'avoir vu le Fils de l'homme venant dans sa royauté.


Dans les moments, comme ceux que nous vivons, nous avons parfois l’impression que l’histoire s’accélère. C’est alors que nous nous interrogeons  pour savoir qui préside aux destinés du monde et qui donne du sens à l’histoire ? C’est une question récurrente qui n’est pas aussi banale qu’on le croit, car elle nous pose la question de Dieu et la réponse qu’on lui apporte implique que nous réfléchissions aux fondements de notre foi.

Dieu a-t-il donné le coup d’envoi au monde en lui assignant un programme précis ? Si oui, pourquoi ce programme ne semble-t-il pas être respecté à la lettre? Y a-t-il une autre puissance que celle de Dieu qui soit mise en cause dans cette affaire ? Même si cette manière de voir les choses ne reçoit pas notre adhésion, elle entre cependant dans notre conception. Cela se perçoit facilement dans nos propos habituels quand nous envisageons les choses avec fatalisme : « c’était écrit » dit-on, ou « c’était son destin ! Nous n’y pouvons rien, c’est la fatalité » ou encore « Inch’Allah., Dieu l’a voulu ». C’est ainsi que les choses se disent sans pour autant que nous y voyons une option théologique arrêtée, mais notre inconscient est tributaire de cet état de fait. Nous éprouvons un  certain confort spirituel à penser que les événements, bons ou mauvais se produisent selon une logique programmée à l'avance. Mais la lecture des Ecritures ne nous conforte pas forcément dans ce  sens

Si notre destin est programmé à l'avance et fait partie d’un processus déjà pré établi, notre liberté est gravement mise en cause. A l'inverse, faut-il que l’on se résigne à vivre dans un monde absurde dont personne ne contrôle les éléments et où l’action humaine peut être responsable du pire et du meilleur?


Nous cherchons alors à trouver un moyen terme entre l’hypothèse d’un contrôle de Dieu sur le monde et celle de notre totale liberté. C’est l’enjeu posé aujourd’hui par les questions concernant la sauvegarde de la planète. Il nous souvient que l’Ecriture contient l’affirmation selon laquelle au jour « J » et à une heure connue de Dieu seul, celui-ci mettra un terme à notre humanité ? Alors pourquoi s’inquiéter, puisque tout est prévu ?

Tout cela est bel et bon, mais nous ne sommes pas si sûrs qu’il faille interpréter les choses de la sorte. Nous avons du mal à comprendre que Dieu puisse se servir de nos erreurs et de nos échecs pour accomplir ses projets. Nous pensons plutôt qu’au lieu de provoquer les événements catastrophiques qui mettraient un terme à notre histoire, Dieu se contente d’accompagner les événements. Il se réserverait le rôle d’inspirer aux hommes les actions bonnes qu’ils entreprendraient en toute liberté.

Mais une telle vision des choses, si elle s’accorde avec les idées du moment, ne semble pourtant pas refléter complètement les données bibliques. La Bible laisse entendre qu’un certain nombre de choses seraient prédestinées à l’avance. Les récits des événements de la vie de Jésus nous sont rapportés dans ce sens par les Evangiles. Les actions que l’on prête au personnage de Judas, par exemple, semblent avoir été prévues de tout temps. Qui l'a manipulé pour qu'il agisse comme il l'a fait ?  Est-il né mauvais d'une manière irréversible? Qu'en est-il alors de la théologie de la grâce si chère à saint Paul?

Dans le texte proposé aujourd’hui, c’est la question de la clairvoyance de Jésus par rapport à son avenir qui nous interpelle. Il semble se comporter comme si la désobéissance d’Adam qui a entrainé le péché originel appelait le rachat de l’humanité perdue par un sacrifice parfait, le sien. C'est ce principe qu'a développé Saint Anselme en imaginant que pour sauver  l'humanité,  Dieu aurait prévu de sacrifier son fils pour apaiser sa justice  offensée. Cette théorie du Moyen Age cherche une légitimité que la Bible ne lui reconnait pas. Pourtant une lecture trop rapide des textes, dont celui sur lequel nous réfléchissons nous permet de penser que Jésus va dans ce sens  quand il rabroue Pierre qui s'oppose à une telle vision des choses : « A Dieu ne plaise, cela ne se produira pas » avait-il dit.

Merci Pierre d’avoir réagi comme tu l’as fait ! Tu as réagis sainement.  Tu as réagis comme tu l’as fait parce que tu ne penses pas que Dieu puisse être derrière un tel projet. Tu ne veux pas lier ta foi en Jésus à la conception d’un Dieu qui aurait programmé la souffrance et la mort de son propre fils.

En fait que conteste Pierre ? Il conteste que Jésus puisse mourir d’une mort violente et injuste à ses yeux. Quelques versets plus haut, il a reconnu Jésus comme étant le Messie, le Fils du Dieu vivant. En toute logique, il ne peut concevoir une fin dramatique à son Seigneur mais une telle conception des choses relève de sa logique à lui, pas de celle de Jésus. Cela implique-il  cependant que Dieu ait un projet précis à ce sujet ? C’est cela qui fait problème.

Tout ça n’explique pas pourquoi Dieu aurait prévu une mort violente pour Jésus. Cela nécessite qu’on s’y attarde. Jésus analyse la situation avec clairvoyance. Il se sait chargé d’un message pour l’humanité entière. Ce message remet en cause l’institution religieuse dans laquelle la société de son temps évolue. Il sait que ses propos ont déjà amassé beaucoup de haine sur sa tête et que ses adversaires envisagent déjà sa mort. Jésus montre par ses propos qu’il a choisi d’affronter la mort, car le message qu’il a déjà apporté nécessite une telle attitude pour être entendu et compris.

Les évangélistes  qui ont rapporté cet événement l’ont inséré dans le cadre sacrificiel de cette époque. A ce moment du récit on n’en était pas encore là, mais le processus de mort était déjà enclenché. Jusqu’au bout, Jésus restera maître de la situation, c’est pourquoi il programma le jour et l’heure de son arrestation et affronta la mort sans se dérober. Par une telle attitude il s’est conformé à la logique de sa situation. Jusqu’au bout il revendiquera le fait d' être seul responsable des événements, même s’il connut à Gethsémani des moments de faiblesse et de doute.

Pour défendre les idées qui sont les sienne, il défie les puissants pour  mettre en cause leurs privilèges si bien que quiconque voudra le suivre sur cette voie devra s’attendre à partager son sort. Il faudra qu’il se charge de sa croix et le suive. Jésus n’a pas forcément, à ce moment précis, envisagé de mourir crucifié, comme ses propos pourraient le laisser entendre.

En effet, certains théologiens ont envisagé que Jésus reprenait ici les propos d'Ezéchiel qui demandait aux Israélites qui se voulaient fidèles à la Loi de se marquer du signe du Tau sur le front. Cette lettre hébraïque en forme de croix désignant la première lettre de la Tora. (1) Il aurait s’agit pour Jésus de donner priorité à la loi, telle qu’il s’était efforcé de l’interpréter depuis trois ans.

Ici Jésus ne faisait qu’analyser logiquement sa situation par fidélité à la mission qu'il s'était donnée. Cela signifiait qu'au point où il en était, Jésus ne pouvait faire autrement que d'envisager sa propre mort et de l'organiser. Il ira donc volontairement à la mort puisque la situation présente l’exigeait. En se sens il était fidèle à Dieu, ce qui ne signifiait pas forcément que Dieu ait prévu sa mort  mais  en agissant ainsi, il restait cohérent avec tout ce qu'il avait prêché.  Ce sont les circonstances qui l’exigeaient et non la volonté de Dieu.

En résumé, il  me semble donc que Dieu se révèle à nous comme un Dieu de bonté, qui aime les hommes, qu’il leur inspire des projets généreux. Il  les guide, en les  laissant toujours libres de les mettre en œuvre. C’est donc librement que Jésus est allé à la mort, c’est librement que nous mettons nos pas dans les siens, et c’est librement que nous en assumons les conséquences. C'est ce que les théologiens catholiques ont retenu quand ils ont inscrit cette idée dans la liturgie de la Messe.

Matthieu 16: 13-20 Le Dieu vivant - dimanche 24 août 2014



Matthieu 16 :13-20



13Jésus, arrivé dans la région de Césarée de Philippe, se mit à demander à ses disciples : Au dire des gens, qui est le Fils de l'homme ? 14 Ils dirent : Pour les uns, Jean le Baptiseur ; pour d'autres, Elie ; pour d'autres encore, Jérémie, ou l'un des prophètes. 15— Et pour vous, leur dit-il, qui suis-je ? 16 Simon Pierre répondit : Toi, tu es le Christ, le Fils d
u Dieu vivant. 17 Jésus lui dit : Heureux es-tu, Simon, fils de Jonas ; car ce ne sont pas la chair et le sang qui t'ont révélé cela, mais mon Père qui est dans les cieux ! 18 Moi, je te dis que tu es Pierre, et sur cette pierre je construirai mon Eglise, et les portes du séjour des morts ne prévaudront pas contre elle. 19 Je te donnerai les clefs du royaume des cieux : ce que tu lieras sur la terre sera lié dans les cieux, et ce que tu délieras sur la terre sera délié dans les cieux.

20 Alors il recommanda aux disciples de ne dire à personne qu'il était le Christ.

Et vous  que pensez-vous de Jésus et de son lien avec Dieu ? En actualisant pour chacun de nous cette affirmation de Pierre adressée à Jésus «  Tu es le Christ, le fils du Dieu vivant », nous sommes invités à notre tour à préciser les différents aspects de notre foi.  Sans doute, en avançant sur cette voie allons-nous être interpelés de façon  inhabituelle et devons-nous  nous préparer à  nous émerveiller des certitudes que les propos de Pierre  révèlent. 

Ce n’est pas parce que vous dites avoir la foi que vous êtes arrivés au bout  de vos certitudes. N’allez pas croire que parce que vous avez fait des expériences de foi déterminantes  et que Jésus s’est manifesté à vous de manière significative, que Dieu vous a parlé et qu’il a répondu à vos prières que vous êtes arrivés au terme de la révélation et que vous avez fait le plein des manifestations de Dieu en vous si bien  que  vous estimez  que votre foi a fini de progresser. La foi est une expérience de vie, elle est évolutive et  s’enrichit chaque jour de contacts nouveaux avec Dieu. En  nous accompagnant  au jour le jour, il  établit avec nous de nouveaux programmes de vie qui font  de nous des êtres qui ne sont jamais parvenus au bout de la vie que Dieu leur propose.

De la même façon, que ceux qui ont été affectés par des expériences de vie éprouvantes et qui croient avoir perdu la foi à tout jamais ne disent pas que Dieu est mort pour eux ou qu’il n’a jamais  existé si non dans l’esprit des gens simples, ils se priveraient  d’espérance. Car toute expérience  de vie contient sans doute en elle quelque chose qui nous dépasse et qui, en  ne nous appartenant pas pourrait bien appartenir  à Dieu. Ainsi celui qui a soif de vie doit tôt ou tard s’attendre à rencontrer Dieu. Ce n’est pas parce que nous contestons son existence  qu’il n’existe pas. Je dis les choses ainsi pour  que celui ou celle  qui pense avoir cessé de croire  et qui n’ose se l’avouer à lui-même ne coupe pas les ponts avec l’espérance.



Quand nous fréquentons les lieux de culte, que nous lisons la Bible ou que  nous prions, nous utilisons un vocabulaire  réservé dont nous ne savons pas toujours le sens et dont la portée dépasse la plus part du temps notre pensée et nous met en contact avec des intuitions qui vont bien au-delà de nous-mêmes, car Dieu se cache aussi dans ce mystère  dont nous ne savons pas toujours la portée. Nous utilisons le mot Seigneur, nous disons de Jésus qu’il est le Christ et nous parlons d’un Dieu éternel.  Avons-nous conscience de la valeur de tous ces mots ? Ici les mots qui s’échappent de la bouche de Pierre signifient bien davantage que ce que nous entendons dans le sens immédiat des termes. Ils sont chargés  d’une portée  bien supérieure à celle que nous imaginons : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ». Notre pensée fuit ici jusque dans l’infini et nous y entraîne sans que nous nous en rendions compte

Quand les  expériences de notre existence nous font douter de Dieu et des hommes et que nous perdons pied, il y a toujours quelqu’un pour nous dire que « tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir ». C’est un lieu commun que nous utilisons pour conforter les autres quand devant l’événement qui les éprouve nous ne trouvons pas les mots justes. C’est une banalité qui nous agace parfois, mais dont le sens profond concerne Dieu. Cela signifie que  Dieu seul peut apporter une solution aux problèmes sans solution et une réponse là où il n’y en a pas. Mais laquelle ?
 - Celle que  lui seul pourra nous donner si nous la lui demandons,  et qui nous aidera à éclairer notre existence si nous ne commençons  pas par l’accuser d’être l’auteur des maux qui nous accablent, car Dieu est le pourvoyeur de toute vie, même quand l’espérance de vie a déserté nos pensées. Il n’est en aucun cas à l’origine de nos tourments puisque son action en nous, s’accorde toujours avec le mot vie.

Nous affirmons ainsi  que tout ce qui concerne Dieu est de l’ordre de la vie, même si nous ne croyons pas en lui. Cette affirmation qui est une des plus fortes de tout l’Evangile a été placée dans la bouche de Pierre pour en faire la confession de foi de tous les croyants. Elle contient beaucoup plus de sens que toutes les confessions de foi qui seront écrites après elle.  Elle donne priorité à l’affirmation selon laquelle Dieu est avant tout le pourvoyeur de tout ce qui fait vivre.

Je n’oserais pas dire ces choses si je ne m’étais pas trouvé un jour, de par mes fonctions, sur les lieux du crash d’un avion de ligne explosé en plein vol. Toutes les  apparences de vie avaient disparues, et pourtant seule la foi au « Dieu vivant » dont mentalement je me  répétais l’affirmation me permettait de croire que devant ce désastre où la vie avait fui, la foi au Dieu vivant permettait de porter seulement un regard sur les témoins du désastre sidérés devant  cet anéantissement, car toute parole devenait insupportable et toute mention de Dieu incongrue.  Pourtant j’étais bien conscient que Dieu n’y était pour rien et je savais que dans le silence  derrière lequel  nous le contraignions de se dissimuler, il partageait avec nous l’horreur de la situation.

C’est dans des situations telles que celle que je viens de décrire que l’affirmation du Dieu vivant nous interpelle le plus fort. Pierre anticipe cette  affirmation en commençant par dire  à Jésus« Tu es le Christ ».

Le Christ est celui qui porte en lui toute la réalité du monde présent en relation avec le divin. Ce titre était celui porté par l’empereur  romain lui-même qui jouissait du droit de vie et de mort sur chacun de ses sujets et qui en usait. Ce même mot de Christ, servit aussi aux auteurs de la Bible pour traduire en grec le titre  de « Messie » qui était celui de David et qui fut attribué après lui à tous les rois d’Israël et qui faisait de lui un intermédiaire entre Dieu et les hommes. En donnant ce double titre à Jésus, nous lui conférons la totalité des pouvoirs qui peuvent lui être conférés. En suivant ses préceptes nous faisons de lui le seul référant à Dieu possible.

Quand nous  affirmons  que Jésus est le Christ, nous considérons qu’il porte en lui tout ce qui caractérise Dieu. L’Evangile qui a été écrit en son nom est porteur de tout ce que Dieu nous a communiqué par lui pour épanouir notre vie. Puisque Jésus accorde à l’amour le pouvoir  d’ouvrir l’avenir du monde et  de guider les croyants, il nous laisse entendre que Dieu dirige le monde en s’appuyant sur tout  l’amour dont nous sommes capables pour que l’avenir  se colore d’espérance.

L’Evangile de ce jour nous confie cette phrase prononcée par Pierre, comme fondement de notre propre foi, elle nous ouvre l’avenir dont le sens ultime appartient  à Dieu et confond avec lui toutes les formes que peut prendre la vie, même quand celle-ci est occultée par la mort.  En retenant cette phrase, d’avance nous donnons à Dieu notre adhésion pour lui confier toute notre existence. Nous lui disons que nous comptons sur lui pour qu’il mette en nous la foi nécessaire  afin  que nos entreprises humaines s’imprègnent des couleurs du Royaume que Dieu veut construire avec nous.

Illustrations: quelques image de Jésus :" tu es le Christ"