mercredi 24 janvier 2018

Marc 1:29-39 - création de Dieu et Résurrection de Jésus, même combat - dimanche 4 février 2018




29 En sortant de la synagogue, ils se rendirent, avec Jacques et Jean, chez Simon et André. 30 La belle-mère de Simon était couchée elle avait de la fièvre ; aussitôt on lui parle d’elle. 31 Il s’approcha et la fit lever en lui saisissant la main ; la fièvre la quitta, et elle se mit à les servir. 32 Le soir venu, après le coucher du soleil, on lui amenait tous les malades et les démoniaques. 33 Toute la ville était rassemblée devant la porte. 34 Il guérit beaucoup de malades qui souffraient de divers maux et chassa beaucoup de démons ; il ne laissait pas les démons parler, parce qu’ils le connaissaient.


35 Au matin, alors qu’il faisait encore très sombre, il se leva et sortit pour aller dans un lieu désert où il se mit à prier. 36 Simon et ceux qui étaient avec lui s’empressèrent de le rechercher. 37 Quand ils l’eurent trouvé, ils lui disent : Tous te cherchent. 38 Il leur répond : Allons ailleurs, dans les bourgades voisines, afin que là aussi je proclame le message ; car c’est pour cela que je suis sorti. 39 Et il se rendit dans toute la Galilée, proclamant le message dans leurs synagogues et chassant les démons.

En sortant de la synagogue, Jésus ne fit pas comme nous quand nous quittons le temple, il ne va pas acheter le gâteau du dimanche, ni prendre  l’apéritif, ni s’assoir devant le repas du dimanche, il s’occupe des gens qui ont besoin de lui  en l’occurrence, sa belle-mère,  puis les solliciteurs à sa porte et la nuit venue, il prie  pour conjurer les démons. Il  identifie son activité à celle que le psaume 51 attribue à Dieu :  «  il ne sommeille ni ne veille celui qui garde Israël. »

En effet, le récit  commence en racontant  la guérison de la belle-mère de Pierre. Elle est atteinte de fièvre, Jésus la guérit, il n’y a rien de spectaculaire dans cette guérison et on ne comprendrait pas pourquoi ce petit miracle serait rapporté si ce n’était pour faire ressortir un élément qui transparaît au travers des termes utilisés. L’Évangéliste utilise des mots qui sont habituellement réservés à la description de la résurrection. Il est dit qu’elle était couchée et non pas qu’elle était au lit. Elle était étendue, comme le sont les morts. Et il n’est pas dit qu’il la guérit, mais qu’il la fit se lever, et l’expression « faire se lever » désigne habituellement dans l’Évangile l’action de ressusciter !  Évangile se place ainsi sous le signe de la résurrection. On ne pourra comprendre la suite, si on n’a pas compris cela en premier lieu.

Quand Jésus intervient dans l’existence de quelqu’un c’est pour le faire passer d’une situation de mort à une situation de vie, c’est cela la résurrection. Sans que les choses soient dites, il nous est donc donné de percevoir que toutes les relations que Jésus établit avec les humains sont placées dans cette dimension de la résurrection qui devient la réalité profonde de son ministère. Elle  prend alors son sens véritable qui ne désigne pas seulement le fait de survivre à notre propre mort mais qui est le fait de vivre dès maintenant la réalité de la présence de Jésus à nos côtés. C’est cela qui est désormais l’aspect essentiel du message de Jésus.  

Est ressuscité celui qui se sent  libéré de tout ce qui l’entraîne dans la mort. Nous avons ici toute une série d’actions libératrices de Jésus. Ces actions ont lieu en pleine nuit et la foule est nombreuse. Toute la ville est là, est-il dit, c’est dire que tout un chacun est concerné. Il faut comprendre que la notion de nuit à ici une fonction symbolique. La nuit n’est pas seulement l’absence de jour, c’est aussi l’absence d’espérance, La nuit est  remplie de peur. La nuit signifie l’incapacité que l’on a de voir la situation à venir, la nuit n’est pas seulement physique, elle est spirituelle. Elle désigne cette situation qui fait que tous les fantasmes, tous les démons s’en donnent à cœur joie et se comportent comme si Dieu n’avait aucun pouvoir sur eux.

La nuit  est perçue comme un moment où Dieu semble suspendre sa vigilance et laisse la place libre aux forces hostiles. C’est dans ce monde redoutable pour l’homme où Dieu semble être absent que Jésus intervient, comme pour dire qu’il n’y a pas de domaine réservé où Dieu ne puisse agir. L’Évangile de Marc nous dit que Jésus est venu imposer la résurrection dans le domaine de la mort et rétablir une relation avec Dieu qui paraissait interrompue.

Qui fait obstacle à ces relations? Ce sont bien entendu les démons et la maladie. Dans le contexte de l’Évangile, les démons ne sont pas personnalisés, ils sont mis au même rang que la maladie dont l’absence de guérison nous fait douter de Dieu. Nous traversons parfois des événements si terribles que notre raison ne peut les surmonter sans mettre Dieu en cause. Ils sont à mettre au rang des démons auxquels Jésus livre un combat sans merci.
Nous doutons de Dieu, quand nous avons le sentiment que le poids du destin est si lourd que nous pensons que Dieu doit être impuissant  à nous aider  à les surmonter. Pire, s’il n’est pas impuissant, c’est qu’il laisse faire ou qu’il n’a rien à faire d’une créature aussi insignifiante que nous. Ce sentiment d’indifférence ou de total abandon est insupportable car nous n’avons pas la force de faire face à notre destin tout seul. Nous nous sentons enfermés dans une nuit épaisse condamnés à subir un destin que nous ne maîtrisons pas. 
C’est dans cette nuit épaisse que Jésus se tient. C’est là que les disciples le trouvent alors qu’il fait encore noir. Ils lui disent l’angoisse des hommes et Jésus répond qu’il est là pour les soulager. Jésus était sorti dans la nuit pour prier, c’est dire que pendant que les hommes dormaient, Jésus lui veillait alors, semble-t-il que les forces hostiles étaient  à l’affût. 
A ceux qui le cherchent et qui l’interpellent Jésus dit : « allons ailleurs ». Cet «ailleurs» n’est pas là où ils espèrent. Ils espèrent  l’efficacité immédiate de Jésus, mais c’est ailleurs, pour lui que ça se passe. Eux, ils s’attendent à l’efficacité immédiate de Jésus  par un miracle. Le miracle, pour eux  est de l’ordre du confort immédiat comme le ferait un médicament qui à peine administré supprimerait la douleur. La position de Jésus n’est pas tout à fait celle la. Elle est ailleurs.
Les hommes souhaitent qu’en intervenant Jésus corrige les anomalies dont ils sont victimes. Ce n’est pas exactement ce qui se produit. Malgré nos prières, nos angoisses subsistent, les maladies perdurent et parfois nous emportent. Dieu ne veut pas passer son temps à corriger ce qui ne va pas dans le monde. Il se refuse à être le Dieu-Providence qui répond aux nécessités des hommes en manque. Jésus oriente leurs regards vers un ailleurs où ils n’ont pas encore tourné les yeux. Cet ailleurs, nous l’avons déjà désigné au commencement de ce propos, c’est l’événement de la résurrection.
La résurrection s’est manifestée au moment où Dieu, dans la personne de Jésus a décidé de prendre à son compte toutes les malédictions des hommes pour les porter et les assumer dans sa mort.
Grâce à elle nous dépassons nos propres souffrances, en sachant que Dieu a mis en nous assez d’énergie pour que nous les surmontions  et pour faire qu’elles ne soient plus des obstacles à
notre foi et à notre espérance. La résurrection est puissance de Dieu en nous.
Dieu ne détruit pas, comme par l’effet d’une potion magique tous nos blocages, mais il met assez d’énergie en nous pour que nous les dépassions car Dieu croit en l’homme et à sa capacité de dépassement. C’est ainsi  qu’il  poursuit en nous son œuvre  de création. Il fait le pari que si nous lui faisons confiance nous surmonterons par nous-mêmes toutes les épreuves  qui nous font  souffrir. Cela ne l’empêche cependant pas de mettre régulièrement sur notre route des signes effectifs de sa puissance. Les miracles que Jésus opère et qu’il continue encore à faire, sont des sortes de  repères  qu’il met sur notre route, c’est pourquoi il se permet de faire quand même des miracles. Ils agissent sur nous comme le pain et le vin de la cène qui ne nourrissent pas physiquement mais qui nous disent la présence réelle de Dieu dans notre existence.



jeudi 18 janvier 2018

Marc 1/21-28 : Dieu créateur dimanche 28 janvier 2018



Marc 1 : 21-28

21 Ils entrèrent à Capharnaüm. Aussitôt, le jour du sabbat, Jésus se rendit à la synagogue, et là, il enseignait.
22 On était frappé par son enseignement, car il enseignait en homme qui a autorité, et non pas comme les scribes.
23 Or, il y avait dans leur synagogue un homme tourmenté par un esprit impur, qui se mit à crier :
24 « Que nous veux-tu, Jésus de Nazareth ? Es-tu venu pour nous perdre ? Je sais qui tu es : tu es le Saint de Dieu. »
25 Jésus l’interpella vivement : « Tais-toi ! Sors de cet homme. »
26 L’esprit impur le fit entrer en convulsions, puis, poussant un grand cri, sortit de lui.
27 Ils furent tous frappés de stupeur et se demandaient entre eux : « Qu’est-ce que cela veut dire ? Voilà un enseignement nouveau, donné avec autorité ! Il commande même aux esprits impurs, et ils lui obéissent. »
28 Sa renommée se répandit aussitôt partout, dans toute la région de la Galilée.


Le début de l’Évangile de Marc nous dit comment ici, tout a commencé. Dans un décor tout à fait banal,  dans  une   obscure synagogue  d’une petite ville de  Galilée, Jésus va prononcer quelques simples paroles   qui vont remettre en cause d’une manière radicale toutes les idées reçues jusqu’alors sur Dieu et  sur l’origine du monde.  Pourtant le lecteur que nous sommes ne comprend pas ce qu’il y a de révolutionnaire dans l’événement  qui est ici décrit.   Il nous est déjà acquis que Jésus  allait tout remettre en cause, ça on le savait ! Mais il semblerait qu’il y a quelque chose d’utopique à essayer de nous faire comprendre cela, à partir d’un événement aussi ténu que celui qui est rapporté ici. Si on veut y comprendre quelque chose,  Il va nous falloir faire un l’effort, pour oublier ce que nous savons et nous  laisser guider vers Dieu par Jésus lui-même.  Même si l’événement  semble banal  apriori,  il va remettre définitivement en cause nos  conceptions   habituelles sur Dieu.

Si le décor est banal, le personnage dont il est question ici, l’est aussi. C’est  un homme apparemment dérangé dans sa tête. Il n’est sans doute pas un fou,  il est quelqu’un qui n’est pas fini, comme on disait dans mon village, un simple d’esprit qui interpelle en termes grandiloquents Jésus qui est ici un simple prédicateur de passage. Une seule parole de sa part suffit cependant  à remettre les choses en place et à guérir le provocateur. Il n’en faut pas moins pour que le rédacteur de l’Évangile tire une conclusion en forme de question  qui concerne tout l’Évangile.     «  Est-ce là une nouvelle  doctrine donnée avec autorité » ? La question vaut affirmation ! C’est une nouvelle doctrine dont l’origine n’est pas dite, mais  il nous est facile de déduire que   c’est de Dieu qu’elle  reçoit son origine, le terme autorité utilisé ici dit bien sa provenance.


La nouvelle va désormais accompagner tous les déplacements de Jésus et se répandre comme une tache d‘huile pour mettre en cause la  religion officielle et accréditer quelque chose de radicalement nouveau, comme le suggère ce même Évangile de Marc  dans ses derniers versets. Il  s’achève en effet,  sur la description symbolique du voile du Temple qui se déchire de bas en haut et sur l’affirmation donnée par un païen : « cet homme était vraiment le Fils de Dieu » (Marc 15/38-39). L’essentiel a été dit. Cette nouvelle doctrine  a anéanti le privilège du temple  ainsi que le fondement de la religion juive,  et elle accrédite l’autorité de Jésus qui se trouve reconnu comme fils de Dieu par un païen  issu des nations. Le judaïsme est dépassé, l’univers s’élargit au monde entier.

Quelle est donc cette nouvelle doctrine que l’on a eu du mal à discerner pour l’instant ? C’est une simple parole qui a donné autorité à Jésus et  qui remet en cause l’ordre normal des choses. On est en présence d’un homme qui est victime d’un mal qui ne lui vient pas de Dieu, puisque Jésus détruit  son mal  en une seule parole. Pour ne pas qu’il y ait confusion on a bien précisé que Jésus agissait en tant que saint de Dieu. Le mal ne peut donc venir de Dieu. Les maladies, voire même les catastrophes, n’ont donc pas Dieu pour origine, sans quoi Dieu ne cautionnerait pas le fait qu’on les domine  en son nom.  Dieu ne se sert donc pas de nos maux pour nous punir de nos fautes passées  connues ou inconnues, comme on le  croyait habituellement. Il n’intervient pas par le mal pour produire du bien en nous. Si ce n’est pas Dieu qui envoie nos épreuves,  qui est-ce ? On ne sait pas, mais il est clair  aussi qu’elles ne sont pas sous le contrôle de Dieu, mais par l’action de Jésus elles y entrent.

En intervenant, Jésus prive l’esprit  impur de parole : «  tais-toi » lui dit-il. Le fait que Jésus l’invite à se taire  laisse entendre le pouvoir  que la parole  va prendre non seulement dans ce récit, mais dans beaucoup d’autres. C’est par une parole que  l’action  du mal est détruite et que l’homme possédé redevient normal.  La parole de Jésus devient créatrice et l’action de l’esprit impur est anéantie. Par la parole de Jésus, Dieu reprend le pouvoir sur cet homme et l’esprit impur le perd. L’homme entre alors dans l’univers des gens normaux ?


Vous avez sans doute remarqué que nous  étions entrés dans le cadre de la création, tel que le récit des origines nous la raconte. Il y est dit, qu’au commencement Dieu se trouva confronté par le chaos. Il le soumit  à sa discrétion par sa parole. C’est ainsi que la Bible en son tout début nous raconte la création.  On aurait tort de penser que ça s’est arrêté là.  Mais ce ne fut qu’un début et la création a continué depuis l’hors  à se faire, car il y a encore dans le monde de nombreux endroits où le chaos n’est pas encore maîtrisé et continue à défier Dieu, jusqu’à ce que Dieu en prenne possession avec l’aide de l’homme  qu’il s’est choisi pour collaborateur. C’est la scène à laquelle nous venons d’assister. Ce n’était pas l’expression d’une nouvelle doctrine, c’était la réalité de Dieu.  Mais depuis belle lurette, on a oublié que Dieu avait voulu depuis l’origine  que les choses en soient ainsi.  Etait-ce à cause du péché ?  Les théologiens  de tous les temps se sont engagés dans cette brèche. Explication facile ! Trop facile ! Or Jésus n’utilise pas ici ni le mot « péché » qu’il ne prononce pas, il ne fait même pas allusion à  l’idée ! Il nous provoque ainsi dans nos certitudes théologiques. Ce ne serait cependant pas une raison suffisante pour ne pas  tenir compte des effets du péché sur nous et sur notre relation à Dieu.

Il ressort de cette première approche que la nouvelle doctrine dont il est fait état ici correspond à cette capacité que les humains ont de collaborer avec Dieu pour que le processus de  création continue, et c’est pour cela que Dieu leur a réservé  un sort particulier dans l’ordre de la création. Son rôle est de permettre à la nature, pas encore totalement maîtrisée par Dieu de se trouver en harmonie avec lui.

Bien évidemment l’homme a du mal à entrer dans cette manière de voir les choses. Le péché, auquel nous avons fait une brève allusion, consiste à remettre ce principe en cause et à rendre difficile toute collaboration entre l’homme et Dieu. C’est dans ce domaine que Jésus va jouer un rôle particulier, celui de rétablir l’idée qu’une collaboration est  possible entre les hommes et Dieu. C’est ce qu’on appelle le salut. C’est le grand défi que Jésus propose à l’humanité. Plusieurs doctrines ont été élaborées pour soutenir cette idée. Mais au lieu de chercher à voir ce qui les harmonise les hommes se plaisent  à les opposer et à rendre, encore aujourd’hui, le projet de Dieu difficile à comprendre.


C’est maintenant que l’on peut parler  du rôle des scribes  qui jouent un rôle négatif dans ce récit qui fait une brève allusion à leur action en son  tout début. Il  y est dit simplement  qu’ils n’avaient pas d’autorité, c'est-à-dire que leur enseignement ne permettait pas de voir réellement comment Dieu et les humains pouvaient collaborer.  Ils se s’appuyaient que sur leurs théories qui contrairement à ce qu’ils croyaient et enseignaient ne relevaient pas de l’autorité de Dieu. Ils privaient ainsi le monde de l’action bénéfique de Dieu qui ne pouvait pas exercer pleinement sa fonction de créateur.  Ce qui semble important dans tout cela c’est que Dieu cherche la collaboration des hommes et que l’amour qu’il a pour eux est susceptible d’annuler l’action du péché qui fait obstacle à la compréhension de la volonté de Dieu.

Apparemment tout a été dit et se trouve confirmé par le développement  qui s’en suivra dans le cours de l’Évangile. La résurrection de Jésus  détruit tous les obstacles qui pourraient encore nous séparer de Dieu et nous permettent  désormais de collaborer avec lui pour que se poursuive l’œuvre de la création  entreprise par lui dès l’origine des temps pour se poursuivre jusqu’en éternité.

jeudi 11 janvier 2018

Jonas 3:1-10 la miséricorde divine dimanche 21 janvier 2018



*Jonas  3 :1-10


La parole du Seigneur fut adressée à Jonas  une seconde fois: « Lève-toi, va à Ninive, la grande ville païenne, proclame le message que je te donne sur elle. » Jonas se leva et partit pour Ninive, selon la parole du Seigneur. Or, Ninive était une ville extraordinairement grande : il fallait trois jours pour la traverser. Jonas la parcourut une journée à peine en proclamant : « Encore quarante jours, et Ninive sera détruite ! » Aussitôt, les gens de Ninive crurent en Dieu. Ils annoncèrent un jeûne, et tous, du plus grand au plus petit, se vêtirent de toile à sac. La chose arriva jusqu’au roi de Ninive. Il se leva de son trône, quitta son manteau, se couvrit d’une toile à sac, et s’assit sur la cendre. Puis il fit crier dans Ninive ce décret du roi et de ses grands : « Hommes et bêtes, gros et petit bétail, ne goûteront à rien, ne mangeront pas et ne boiront pas. Hommes et bêtes, on se couvrira de toile à sac, on criera vers Dieu de toute sa force, chacun se détournera de sa conduite mauvaise et de ses actes de violence. Qui sait si Dieu ne se ravisera pas et ne se repentira pas, s’il ne reviendra pas de l’ardeur de sa colère ? Et alors nous ne périrons pas ! »

En voyant leur réaction, et comment ils se détournaient de leur conduite mauvaise, Dieu renonça au châtiment dont il les avait menacés.

(Cher lecteur, si vous ne connaissez pas très bien l’histoire de Jonas, donnez-vous la peine de la lire entièrement, elle ne comprend que 4 chapitres et  vous profiterez de la totalité de ce conte.)


Ne  boudons pas notre plaisir et  laissons-nous séduire par ce magnifique conte oriental où l’auteur  nous entraîne dans une aventure  où notre logique ne s’y retrouve pas.  Mais avant d’entrer dans le   ravissement de l’esprit, ne perdons pas de vue  que, ce texte, comme tous les contes a une morale dont nous devons tirer leçon. Il  ne nous met pas toujours dans une situation avantageuse dans nos rapports à Dieu.   Nous allons  être invités à nous identifier à Jonas, le héro de l’histoire et à contester son action,  alors qu’il refuse de partager la miséricorde de Dieu et qu’il  conteste sa bonté. Pourtant intérieurement nous partageons son opposition à Dieu.

Nous allons ainsi découvrir  la  face cachée de notre propre personne  et nous découvrirons que nous sommes capables, nous aussi  de nous opposer à Dieu,  de  refuser à entendre sa parole et de fuir loin de lui. Quand Jonas se met à bouder alors  que la promesse de Dieu est en train de se réaliser, nous aurions tendance à le faire  aussi.  Mais la grande question qui va se poser à nous, c’est d’essayer de comprendre quelle est la réalité de ce Dieu  qui nous est présentée dans cette histoire.

Le conte se déroule dans un décor  qui pourrait être celui d’une scène de  théâtre où l’acteur,  apparemment il n’y en a qu’un Jonas,    évoluerait  entre la grande ville de Ninive, côté jardin, qui représente  tout ce qu’il peut y avoir d’odieux et de dangereux pour le prophète,  et côté cour, il y aurait  l’immensité de la mer qui s’étend jusqu’aux colonnes d’Hercule où les tempêtes  font fureur et  où les monstres marins menacent à tout instant  d’emporter le héro dans les grands fonds.  Entre ces deux dangers mortels, aucun autre choix n’est proposé, si non la bienveillance de Dieu qui est présent quant à lui dans les deux camps

Nous découvrons cependant  que Dieu  accepte ici de s’inscrire  dans  le rôle d’un second personnage  qui ne cesse de mettre Jonas en difficulté tout en s’efforçant de lui faire du bien.  Il y a là une contradiction qu’il faudra approfondir. Mais  derrière  le personnage joué par Dieu se cache  un poète et même un farceur,  nous avons vu qu’il joue avec les gros poissons. Le monstre  qu’il envoie au secours de  Jonas  est  un monstre gentil qui se plie à la fantaisie de Dieu et devient l’instrument de sa miséricorde pour Jonas.  Le ravissement continue. A la fin du conte,  Dieu   va faire pousser un arbre en une seule nuit, ce qui est un exploit,  et en même temps il va commander à un ver glouton de le manger en un rien de temps. Le personnage de Jonas est également étrange,  il passe son temps à se défier de Dieu,  à le fuir et à déverser sur lui sa mauvaise humeur, mais il fait également preuve de sérénité  étrange et compose une magnifique prière de confiance alors que le monstre l’entraîne jusqu’aux racines du monde avant de le vomir sur le sable de la plage comme le rebut de sa digestion. C’est ainsi que Jonas entre en scène pour la deuxième fois.

Le Dieu auquel Jonas a à faire,  nous surprend aussi. Il se présente comme un Dieu de justice qui règne sur le monde entier et qui exige que sa justice soit respectée sur tout l’univers, même dans des lieux aussi étranges que la ville de Ninive,  présentée ici comme le repère du vice et où le  nom  de Dieu est ignoré. Quoi qu’il en soit cette ville rebelle mérite son châtiment.  Mais en même temps, Dieu ne peut se dispenser de la tendresse qu’il a pour tous les hommes, y compris ses ennemis les plus déclarés. C’est pour cela qu’il s’intéresse à  Ninive et tente d’épargner  sa population des effets de sa colère.  Il   entreprend alors une tentative de sauvetage dont Jonas sera l’instrument même s’il désapprouve Dieu.

Pour étayer cette thèse, l’actualité  nous a mis en présence de Jonas modernes  qui ont réussi dans de telles entreprises. La haine, la condamnation et la vengeance ne sont donc pas les instruments qui garantissent la meilleure justice. Nelson Mandela l’a bien compris ! Il s’est comporté comme Dieu souhaitait que Jonas le fasse. Il a brillamment démontré que cette autre forme de justice, préconisée ici était capable de porter des fruits insoupçonnés. Mais même la Bible prête le flanc à la critique.


Le lecteur fidèle des Ecritures  se trouve mis en contradiction avec une autre histoire, bien connue, celle de Sodome et Gomorrhe où Dieu ne laissa pas la chance à Abraham de plaider la cause de la ville  et la détruisit d’une manière spectaculaire. Pourquoi Ninive a-t-elle eu un autre sort ? Sans doute ces deux histoires sont-elles véhiculées par des traditions différentes, mais le courant porteur de la Bible donne sa faveur à l’histoire de Ninive où on voit déjà pointer une théologie que Jésus  développera bien plus tard quand il demandera de prier pour nos ennemis et faire du bien à ceux qui nous persécutent.

Nous avons ici  les premiers aspects d’un Dieu  qui prendra sa pleine dimension dans les Evangile. Certes, il  prend sa justice au sérieux mais il  donne plus de place à sa miséricorde qu’à sa justice. La réaction de Jonas, nous montre bien que Dieu n’est pas  compris quand il tente de donner une place importante à sa miséricorde, qu’il donne sa chance  même aux plus méchants et qu’il  estime que leur repentir est toujours possible.  Dieu accorde aussi toute son attention à Jonas quand il se rebelle contre lui. Il le secourt  dans son refus de comprendre et  il ira même le chercher quand le monstre marin l’entraînera aux racines du monde, a où seule règne la mort.  

Ce récit n’est pas aussi légendaire qu’il y parait. Il affirme une vérité sur laquelle on ne peut revenir, celle de la bonté  incommensurable  de Dieu, alors que les hommes, comme Jonas  cherchent à en poser  les limites.  Ce conte repose sur un fond historique,  il est témoin  des préoccupations du vrai prophète Jonas, car il y en a eu un.  Jusqu’à maintenant nous avons eu à faire  à un héro de légende, alors que  l’autre Jonas vivait sous le règne de Jéroboam II, roi de  Samarie qui fut en butte tout au long de son règne à l’acharnement des rois de Ninive. Ils auront raison de  ses successeurs et  les entraîneront dans la mort. Ils emmèneront en exil sa population et terrifieront ses  descendants qui avaient trouvé refuge dans le royaume de Jérusalem.  L’évocation de  cette ville honnie  dont le souvenir restait dans les mémoires comme celui de l’abomination de la désolation ne pouvait qu’attiser les haines et les rancœurs ainsi que  le désir de vengeance. Les événements ont démenti  ce que le récit de Jonas a rapporté, puisque Ninive fut quand même détruite par les Perses en 612 ? Mais ce détail que l’auteur du conte semble vouloir ignorer n’entre pas en ligne  de compte.

Ce  récit nous est rapporté sous  forme de légende ou de parabole pour nous dire la  vraie nature de  Dieu et nous aider à comprendre  qui est ce Dieu dont la Bible se veut le témoin. Qui donc est ce Dieu qui préconise un salut universel, et qui s’acharne à préserver la vie de ceux qui s’affichent comme ses ennemis déclarés ?  Nous reconnaissons en lui celui  dont Jésus  se présentera comme le fils.  Ne nous étonnons donc pas du sort que les hommes ont alors réservé à Jésus,  car ses propos étaient inacceptables pour la plupart des humains et le sont encore pour la beaucoup  d’entre nous, car ils appellent  une  véritable conversion.  Ne  soyons donc pas surpris si l’Eglise a minimisé son message et s’est efforcé de l’inscrire dans un autre contexte, celui  que les conciles, plus tard  ont décrit comme  étant celui de la vraie foi.  

Comprenez alors quel fut  la frustration de Jonas qui assista à la sauvegarde de Ninive et comprenez sa révolte contre Dieu qu’il exprima  à l’abri  de  son   ricin  qu’un ver  mandaté par Dieu entreprit de détruire. Le récit ne s’est pas  inquiété de la vérité historique et n’a pas relaté la vraie fin de Ninive. Il a voulu  nous aider à entrer  dans la découverte de l’incommensurable amour de Dieu  que les pires comportements des hommes ne peuvent altérer.  Les hommes qui ont compris cela sont en bonne voie pour devenir les imitateurs de Jésus.