dimanche 27 avril 2014

Jean 14:15-21 ; L'amour de Dieu dimanche 25 mai 2014



Jean 14 : 15-21  l'Amour de Dieu - dimanche  25 mai 2014
 
15 Si vous m'aimez, vous garderez mes commandements. 16 Moi, je demanderai au Père de vous donner un autre défenseur pour qu'il soit avec vous pour toujours, 17 l'Esprit de la vérité, que le monde ne peut pas recevoir, parce qu'il ne le voit pas et qu'il ne le connaît pas ; vous, vous le connaissez, parce qu'il demeure auprès de vous et qu'il sera en vous.

18 Je ne vous laisserai pas orphelins ; je viens à vous. 19 Encore un peu, et le monde ne me verra plus ; mais vous, vous me verrez, parce que, moi, je vis, et que vous aussi, vous vivrez. 20 En ce jour-là, vous saurez que, moi, je suis en mon Père, comme vous en moi et moi en vous. 21 Celui qui m'aime, c'est celui qui a mes commandements et qui les garde. Or celui qui m'aime sera aimé de mon Père ; moi aussi je l'aimerai et je me manifesterai à lui.

22 Judas, non pas l'Iscariote, lui dit : Seigneur, comment se fait-il que tu doives te manifester à nous et non pas au monde ? 23 Jésus lui répondit : Si quelqu'un m'aime, il gardera ma parole, et mon Père l'aimera ; nous viendrons à lui et nous ferons notre demeure auprès de lui. 24 Celui qui ne m'aime pas ne garde pas mes paroles. Et la parole que vous entendez n'est pas la mienne, mais celle du Père qui m'a envoyé.

25 Je vous ai parlé ainsi pendant que je demeurais auprès de vous. 26 Mais c'est le Défenseur, l'Esprit saint que le Père enverra en mon nom, qui vous enseignera tout et vous rappellera tout ce que, moi, je vous ai dit. 
 
Une immense bonté habite le monde, mais qui s’en rend compte ? La lecture de nous journaux quotidiens semble même nous dire le contraire. Ils ne cessent de nous énumérer toutes ces choses dont l’humanité  serait victime, si bien qu’on a pris l’habitude de considérer que le monde serait aux mains du « mauvais » et que c’était lui qui en était devenu le maître. Dans le récit de la Tentation rapporté par les évangiles ne nous raconte-t-on pas qu’il se présente comme le maître du monde ?  Si Jésus ne tombe pas dans le panneau, la plupart des humains se laisse avoir.

Sans doute les médias,  aussi se font prendre au  même piège et s’ingénient à présenter le mauvais côté des choses. Cependant,  il suffit de jeter un coup d’œil sur tout ce qui nous entoure pour constater la beauté qui irradie de toute part. Du lever du soleil jusqu’à son couchant, que de merveilles ne défilent pas sous nos yeux !  Avec un peu d’attention nous voyons  la bonté de tous ces humains à l’œuvre quand ils  s’entraident  mutuellement. Nous partageons aussi   cette immense espérance qui fait vibrer nos cœurs  et qui installe en nous  l’idée que demain portera des fruits meilleurs que ceux d’aujourd’hui.
 
Il y a un fond d’optimisme en nous que nous prenons soin de cacher, comme si c’était malsain de voir les choses sous un jour heureux. Ce fond d’optimisme correspond sans doute à la trace de Dieu qui se promène incognito  dans notre monde (1) et qui sème quelques bribes de lui-même partout où il passe. C’est ce qui   nous permet inconsciemment de profiter de la vie.

Pourtant ce sont d’autres idées sur Dieu qui habitent nos esprits. Elles sont assez généralement partagées dans ce monde-ci.  Dieu serait perçu par beaucoup comme  l’ « être suprême » cher aux philosophes des Lumières qui ne se soucierait  pas beaucoup du sort de l’humanité. On le considère, dans le meilleur des cas comme celui qui aurait jeté le monde sur sa lancée, mais qui, depuis le big-bang qu’il aurait initié, le laisserait  évoluer  à sa guise. Ce Dieu ne serait en rien dérangé  par les guerres que se font les hommes entre eux, ni par  les trains qui déraillent, ni par  les petits enfants qui ont faim.

Telle est la vision de Dieu qui se répand dans notre société. Si on croit en Dieu, on ne lui accorde que peu de cas. Notre société évolue sur un fond de panthéisme qui nous suggère qu’à la fin,  notre vie s’achèvera dans un Grand Tout  où curieusement nous conserverons peut-être une partie de notre personnalité. Ce sont les média qui encore une fois accréditent cette idée. En effet, il suffit qu’une personnalité  disparaisse pour que l’on nous suggère que là où elle est désormais, elle nous voit et participe d’une manière ou d’une autre à la suite des événements. Nos contemporains s’approprient volontiers  les idées d’un de nos anciens présidents  défunts qui avant de mourir laissait entendre qu’il ne nous quitterait pas tout à fait parce qu’il croyait aux forces de l’esprit. Mais bien évidemment nous avons du mal à nous y retrouver.

Dans le monde antique juif dont nous sommes héritiers et dans lequel vivait Jésus, il n’en allait pas ainsi. On pensait que Dieu était beaucoup plus présent dans le monde dont il avait jeté les bases. On pensait qu’il pouvait intervenir  dans la société des hommes pour faire respecter ses préceptes et ses lois, sans quoi le monde ne pourrait évoluer selon le programme qu'il  aurait établi. Le Dieu créateur aurait fait l’homme libre. Seulement sa liberté se limiterait à discerner sa volonté et à la respecter. Partant de préceptes remontant à Moïse, et même au-delà de lui à Noé, les penseurs de la Bible ont rédigé tout un arsenal de préceptes, au nombre de 613, qu’il fallait respecter, sous peine de voir le visage de Dieu s’empourprer pour laisser éclater sa colère et punir les contrevenants. Dieu était cependant perçu comme infiniment bon  mais sa bonté, pour s’exercer impliquait que l’on respecte ses commandements.

C’est dans ce double contexte du présent et du passé que nous nous approprions le message de Jésus pour ce jour. Il précise  ses rapports avec Dieu et avec nous. Bien entendu il ne s’accorde avec aucune des thèses suggérées  dans mon propos. Ses rapports avec les hommes sont réglés par la notion d’amour. L’amour de Dieu pour les hommes tel que Jésus l’enseigne est inconditionnel. Dieu  est perçu  par Jésus comme un Père essentiellement bon. La bonté de Dieu se répand sur le monde et Dieu la communique aux hommes par le relais de Jésus. Grâce à ce nouveau regard que Jésus porte sur Dieu, les choses prennent un aspect bien différent et notre relation à Dieu prend une allure toute nouvelle. Le vrai visage de Dieu se révèle alors à nous grâce à notre capacité à aimer. Tel serait en quelque sorte le testament spirituel de Jésus avant son départ de ce monde.

Bien que cet enseignement de Jésus nous soit connu de longue date, nous avons conservé de par nous-mêmes  des conceptions de Dieu qui relèvent encore de la conception des contemporains de Jésus auquel il s’est vivement opposé. Un tel portrait de Dieu où la notion d’amour serait dominante nous paraît encore vraiment réducteur. Nous considérons que les attributs traditionnels de Dieu n’ y sont  pas assez pris en compte. Beaucoup trouvent que l’on n’insiste pas assez   sur la toute-puissance de Dieu, ni sur sa capacité à créer, ni sur sa  justice.

 En fait Jésus ne met nullement en cause les attributs de Dieu, mais il rappelle que l’essentiel dans la relation que Dieu veut entretenir avec les hommes est l’amour  qui passe  avant la justice, la loi  et son action de créateur. Si cette capacité à aimer est première en Dieu, elle doit l’être aussi, bien évidemment en l’homme. C’est en mettant l’amour en pratique  que nous maintiendrons une  relation cohérente avec Dieu.

Il est important  de constater que dans notre lecture de l’Évangile, nous avons bien repéré l’insistance que Jésus accorde à l’amour que les hommes doivent avoir les uns pour les autres et aussi pour Dieu. Il est inutile d’énumérer toutes les paraboles qui insistent sur cet aspect des choses. Il est aussi inutile de rappeler tous les passages où Jésus parle du commandement d’amour. Pourtant nous donnons priorité à d’autres valeurs dans nos relations à Dieu, et sans même nous en rendre compte, nous donnons priorité aux anciennes valeurs du judaïsme contre lesquelles Jésus s’est élevé avec force. Nous mettons en avant notre péché, comme s’il fallait encore et toujours négocier notre pardon. Nous nous interrogeons sur notre salut. Nous revêtons Dieu de la toge du juste juge en oubliant   que c’est la notion de Père  aimant que Jésus  a mis  en avant.
Les chrétiens se sont jadis séparés les uns des autres  et se sont érigés en églises distinctes sur des notions de justice.  Ils se sont excommuniés  mutuellement sur des principes légalistes, et aujourd’hui encore ils n’arrivent pas à se réconcilier sur ces mêmes principes alors  que ce qui devrait avoir priorité sur tout le reste devrait être  notre référence à l’amour que Dieu éprouve pour chacun de nous et que nous devrions avoir pour lui et pour les autres.

Selon Jésus le moteur du monde devrait être l’amour, car c’est cette notion qu’il a choisie pour révéler aux hommes sa relation à Dieu qui vient vers eux comme un Père. Cette notion de Père contient en elle  le seul secret  qui nous soit révélé de la part de Dieu et   que nous devons mettre en pratique  pour que le monde  évolue dans la bonne voie. C’est  cet amour que l’on doit  manifester aux autres, même s’ils ne le partagent pas, et même s’ils le combattent.

Jésus savait bien qu’une telle idée serait difficile à faire partager aux hommes, pourtant elle est  la vérité la plus essentielle que Dieu ait voulu nous transmettre. Curieusement les hommes l’admettent volontiers, mais pourquoi ne la mettent-ils pas en pratique ?


(1)  Einstein
Illustrations: Puvis de Chavanne sur le thème du bonheur

mardi 22 avril 2014

Jean 14:1-2 Le Chemin, la Vérité et laVie



Jean 14 :1-12: le Chemin, la Vérité et la Vie - dimanche 18 mai 2014

Que votre cœur ne se trouble pas. Croyez en Dieu, croyez aussi en moi.
2 Il y a beaucoup de demeures dans la maison de mon Père. Sinon, je vous l'aurais dit ; car je vais vous préparer une place. 3 Donc, si je m'en vais et vous prépare une place, je reviendrai et je vous prendrai avec moi, afin que là où je suis, vous y soyez aussi. 4 Et où je vais, vous en savez le chemin.5 Thomas lui dit : Seigneur, nous ne savons où tu vas ; comment en saurions-nous le chemin ? 6 Jésus lui dit : Moi, je suis le chemin, la vérité et la vie. Nul ne vient au Père que par moi. 7S i vous me connaissiez, vous connaîtriez aussi mon Père. Et dès maintenant, vous le connaissez et vous l'avez vu.
8 Philippe lui dit : Seigneur, montre-nous le Père, et cela nous suffit. 9Jésus lui dit : il y a si longtemps que je suis avec vous, et tu ne m'as pas connu, Philippe ! Celui qui m'a vu, a vu le Père. Comment dis-tu : Montre-nous le Père ? 10 Ne crois-tu pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi ? Les paroles que je vous dis ne viennent pas de moi-même ; le Père, qui demeure en moi, accomplit ses œuvres. 11 Croyez-moi, je suis dans le Père, et le Père est en moi. Sinon, croyez à cause de ces œuvres. 12 En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit en moi fera, lui aussi, les œuvres que moi je fais, et il en fera de plus grandes, parce que je m'en vais vers le Père ;



« Si je m’en vais et vous prépare une place, je reviendrai et vous prendrai avec moi, afin que là où je suis, vous y soyez aussi, et où je vais, vous en savez le chemin. »

Une fois encore l’Evangéliste Jean entrouvre pour nous les portes du sublime et, en quelques phrases nous met en présence de l’ineffable. Dieu et son fils cohabitent en une harmonie extraordinaire vers laquelle nous nous savons aspirés par une élévation inexprimable de la pensée. Nous cohabitons à notre tour par la magie du verbe avec l’Eternité de Dieu qui nous absorbe dans sa divinité en un mouvement irréversible. La demeure céleste du Père devient comme par enchantement le prolongement de notre demeure terrestre. Notre vie terrestre irradiée par le Christ devient éternité : Vision réconfortante du monde transfiguré qui nous attend, mais monde tellement distant de celui où nous sommes!

Séduit par la magie du verbe, je pourrais pendant de longs moments vous faire rêver de ce monde extatique qui nous aspire. Nous aspirerions alors à nous lover au cœur même de Dieu, si Thomas ne nous interrompait avec son bon sens habituel et ne nous demandait de parler un langage plus accessible. Il nous invite à décoder notre jargon spirituel pour dire ce qui se cache derrière les mots. : « Nous ne savons même pas où tu vas »

J’ai volontairement emprunté en commençant mon propos des images fortes du monde spirituel, pour dire vers quelle réalité inexprimable notre foi au Christ ressuscité nous entraîne. Thomas pour sa part nous ramène dans ce monde matériel où nous somme, car il sait qu’on ne peut impunément s’élever vers le ciel sans tenir compte de la réalité matérielle où nous sommes. Jésus semble parler d’un monde qui n’est accessible que pour ceux qui ont déjà franchi les limites du monde des vivants, il parle d’un au-delà qui ne concerne plus notre réalité physique, c’est pourquoi Thomas ose dire à Jésus qu’il va trop vite et qu’il a du mal à le suivre car Jésus semble escamoter les vrais problèmes. C’est souvent ainsi que fonctionnent ceux qui veulent parler de Dieu et nous instruire des merveilles de la vie future car ils oublient de dire quel lien unit notre vie présente faite de labeur ou d’ennui, de banal ou d’excitant, avec le futur qui nous est promis


Notre vie d’aujourd’hui est en déphasage par rapport à ce futur merveilleux. Nous nous questionnons d’autant plus que la science nous déçoit, la technique ne nous satisfait pas et l‘avenir nous parait bouché. Thomas nous rappelle qu’avant de nous mettre à rêver il faut regarder la réalité où nous sommes, et que c’est à partir de là que l’on peut disserter sur ce qui transcende notre vie.

Comme toujours Thomas, n’a rien compris, mais il n’a pas tort, car son intervention permet de poser le problème à son juste niveau. Il n’a pas encore compris que si nous faisons dès maintenant de Jésus le compagnon de nos vies celui-ci nous fera passer, ipso-facto de ce monde-ci à la réalité céleste du monde de Dieu. Il n’a pas tort de nous rappeler l’importance de notre réalité terrestre parce que, comme chacun de nous il est suffisamment attaché à la réalité matérielle pour savoir que si on se laisse aspirer par le spirituel, sans avoir réglé le problème du matériel, on passe forcément à côté de la Vérité.


Thomas  dans son rôle de naïf pose ici les vraies questions pour demander à Jésus quelle sont les conditions qui permettent de le suivre dans son élévation céleste.

Il leur a parlé de la trahison des hommes, il a manifesté son trouble intérieur et il a parlé de sa mort. Comment Jésus gère-t-il tout cela? Comment appréhender les mystères célestes quand nous sommes bouleversés par les épreuves ou tout simplement les soucis? Nous sommes ces hommes et ces femmes du questionnement, insatisfaits de leur quotidien à qui Jésus affirme qu’il est « le Chemin, la Vérité et la Vie »

Je suis le chemin dit-il. Il s’agit bien évidemment du chemin de notre vie, et nous savons tous qu’au bout du chemin il y a inéluctablement l’échéance de notre mort. Mais la présence de Jésus dans notre vie modifie notre manière de voir cette échéance. Notre vie est un long chemin qui se perd dans un futur que l’on ignore, et Jésus agit à côté de nous comme celui qui éclaire ce chemin. Autant de contacts, autant de rencontres aurons-nous avec Jésus, autant de lumières aurons-nous sous nos pas.

Il appartient à chacun de nous de provoquer cet éclairage de Jésus sur le chemin de notre vie. Prière, culte, méditation, lecture de l’Ecriture et bien d’autres, sont autant de lumières ponctuelles qui permettent à Jésus d’éclairer notre existence.
- Comme les disciples d’Emmaüs, nous devons repérer Jésus quand il vient à notre rencontre.
- Comme les pécheurs du lacs nous nous efforçons de le voir dans nos occupations de chaque jour.
- Comme Jaïrus, nous devons le retrouver dans les drames de notre vie. Chaque fois que nous faisons l’effort de repérer sa présence, il éclaire pour nous l’instant que nous vivons. Il ne supprime ni l’épreuve, ni l’obstacle, mais en les éclairant il permet de les dépasser et d’ancrer en nous la certitude que puisqu’il est présent sur notre chemin, il y place aussi sa résurrection, qui devient notre résurrection et c'est elle qui illumine le terme de notre chemin. Cet éclairage ultime devient pour lui, l’expression de la vérité.

La Vérité: Elle concerne notre réalité humaine. Elle nous dit que la résurrection et l’Eternité font partie de l’ordre normal de la création. Jésus essaye de nous convaincre que nous ne sommes pas nés pour finir dans le néant, sans quoi, Dieu lui-même deviendrait incohérent. Il a créé l’Eternité pour nous y accueillir dès maintenant. Encore faut-il lui faire confiance, encore faut-il lui faire l’honneur de croire en sa promesse. La Vérité consiste à croire qu’il y a de l’harmonie dans le plan divin et qu’il ne soumet pas les hommes aux caprices de sa fantaisie. Il nous prie de croire qu’il est un Dieu d’ordre et qu’il a prévu pour nous un devenir qui appartient à l’ordre de sa création. La création de Dieu consiste à faire surgir la vie là où elle n’est pas encore et à la maintenir là où elle est menacée.

La vie, telle que la mène la plupart des humains de cette planète est perçue comme une existence sans lendemain, elle n’est vie qu’en apparence. C’est ce qu’a bien senti Thomas quand il interroge Jésus et qu’il lui avoue qu’il ne comprend pas ce qu’il dit. Jésus qui apparemment semble le désavouer lui donne raison. Jésus laisse bien entendre que la Vérité est au delà du monde sensible où nous sommes. Pour la percevoir, il nous faut faire un effort sur nous-mêmes pour rejoindre Jésus qui chemine dans notre intériorité. Il nous faut faire un effort pour pénétrer la réalité sensible de notre personne. S’il y a une intériorité invisible dans notre existence, elle n’en est pas moins authentique. Au contraire, la Vérité sur notre vie consiste à faire ce travail sur nous-mêmes pour que cette partie invisible habitée par Jésus irradie la partie visible et donne ainsi du sens à ce que nous vivons. Jésus confirme ainsi que sa présence sur le chemin de notre vie nous pousse toujours à dépasser la réalité visible, liée à la matière pour s’attacher au monde de l’esprit qui transcende la matière, le temps et l’espace, et nous introduit en présence de Dieu.

C’est la présence de Jésus en nous qui donne à notre avenir la dimension de l’Eternité, mais il appartient à chacun d’entre nous, non seulement de solliciter cette présence mais de l’entretenir. Il nous faut donc multiplier les rencontres avec lui et nous soumettre à son enseignement selon lequel notre prochain a plus de valeur que nous-mêmes. Il porte en lui le visage de Dieu et il n’y a ni vie ni vérité en dehors de Dieu. C’est ainsi que la vie s’inscrit dans la continuité de l’œuvre créatrice de Dieu. Elle est le complément indispensable de la Vérité, car en Dieu rien n’est vrai qui n’est éternel et la vie en Dieu ne peut être que porteuse d’éternité.

Qui que vous soyez, en méditant ce passage retenez qu’il vous appartient de repérer la présence du Christ en vous et de l’entretenir. Sachez que cette présence seule peut éclairer le chemin de votre vie et que ce chemin débouche dans l’Eternité. Celui qui a compris cela est déjà dans la résurrection du Christ et les portes de l’Eternité sont ouvertes pour lui.

Amen.


vendredi 18 avril 2014

Jean 10:1-10 le bon berger



Jean 10/1-10 « La parabole du bon berger » dimanche 11 mai 2014



1 En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui n'entre point par la porte dans la bergerie, mais qui y monte par un autre côté, celui-là est un voleur et un brigand. 2 Mais celui qui entre par la porte est le berger des brebis. 3 Le portier lui ouvre, et les brebis entendent sa voix ; il appelle par leur nom les brebis qui lui appartiennent et les mène dehors. 4 Lorsqu'il a fait sortir toutes celles qui lui appartiennent, il marche devant elles ; et les brebis le suivent, parce qu'elles connaissent sa voix. 5 Elles ne suivront point un étranger ; mais elles fuiront loin de lui, parce qu'elles ne connaissent pas la voix des étrangers.

6 Jésus leur dit cette parabole, mais ils ne comprirent pas ce qu'il leur disait.

7 Jésus leur dit encore : En vérité, en vérité, je vous le dis, moi, je suis la porte des brebis. 8 Tous ceux qui sont venus avant moi sont des voleurs et des brigands ; mais les brebis ne les ont pas écoutés. 9 Moi, je suis la porte ; si quelqu'un entre par moi, il sera sauvé ; il entrera et sortira et trouvera des pâturages. 10 Le voleur ne vient que pour voler et tuer et détruire ; moi, je suis venu, afin que les brebis aient la vie et qu'elles l'aient en abondance.
 
11 Moi, je suis le bon berger. Le bon berger donne sa vie pour ses brebis. 12 Mais le mercenaire, qui n'est pas berger et à qui les brebis n'appartiennent pas, voit venir le loup, abandonne les brebis et s'enfuit. Et le loup s'en empare et les disperse. 13 C'est qu'il est mercenaire et qu'il ne se met pas en peine des brebis. Moi, je suis le bon berger. 14 Je connais mes brebis, et mes brebis me connaissent, 15 comme le Père me connaît, et comme je connais le Père ; et je donne ma vie pour mes brebis


Nous rajouterons au textes prévu pour ce jour les versets 11 à 1 qui font partie du même contexte;

Nous sommes tellement habitués à cette image du bon berger qui donne sa vie pour ses brebis que nous ne faisons pas attention à tout ce qu’il y a derrière ce texte. Nous oublions la plupart du temps que le métier de berger était dans l’antiquité juive, un métier méprisé et qu’il était réservé aux plus modestes. Leur sort était parfois moins enviable que celui d’un esclave. Quant aux moutons, ils ne font pas partie de la catégorie animale la mieux perçue. Ils sont à juste titre considérés comme des animaux peu doués. On ne les élève que pour la viande et accessoirement pour la laine. Ils sont tous destinés à finir sous le couteau du sacrificateur ou du boucher. On a cependant une tendresse particulière pour les agneaux, quand ils sont tout petits. Mais cette tendresse est purement sentimentale et elle décroît à mesure que l’animal vieillit

Nous apprécions cette histoire en fonction de l’intérêt que nous y trouvons en tant qu’humain. Je vous propose cependant de la regarder du côté des moutons. Nous nous demanderons alors en quoi le sort des moutons est modifié s’ils périssent sous les dents du loup plutôt que sous le couteau du sacrificateur ? Violence et cruauté, mort et souffrance sont au même rendez-vous et l’issue de l’entreprise reste la même : la mort. Si le loup est mis en fuite, le berger du troupeau sauve son capital. Il y trouve son compte,  c’est donc  pour une raison économique qu’il peut envisager d’exposer sa vie pour que le troupeau qui lui appartient ne soit pas anéanti. Le mercenaire n’en a cure, il sauve sa vie sans affronter le loup. Il est dit alors que le « bon berger » donne sa vie pour ses brebis ! La belle affaire, elles seront de toute façon sacrifiées et mangées et ne trouveront aucun intérêt dans cette nouvelle situation.

Pourtant, Jésus a bien pris soin d’attirer notre attention sur un autre aspect des choses. Il nous dit qu’il est le « bon berger » pour que ses brebis aient la vie en abondance. Plus question de mort ou de sacrifice, plus question de transformer les brebis en viande,   plus question de voir le côté utilitaire des choses. Avec Jésus les choses prennent une autre couleur, Il nous entraîne sur un chemin irréaliste qui consiste à octroyer aux moutons un autre destin que celui que nous leurs connaissons. Avec Jésus, les brebis auront un autre avenir que celui de servir de nourriture aux hommes.


Il est bien évident que pour nous approprier quelque chose de ce passage il faut que chacun de nous, à son tour se substitue aux moutons de ce texte et comprenne que chacun d’entre nous fait d’abord partie de cette masse humaine qui recouvre la planète comme un troupeau de moutons qui remplirait l’enclos où il est parqué.

Qui sommes-nous si non un individu parmi les milliards qui s’agitent sur la surface de la terre, malmenés par le hasard, bousculés par les éléments et parfois maltraités par les dirigeants ? A vue humaine Il semble que nous soyons tous destinés à disparaître sans ne laisser aucune trace, à part exception rarissime.

A la lecture de ce récit, les choses changent. Chacun d’entre nous, bien qu’il fasse partie de la masse des 7 milliards d’individus que l’on côtoie sur cette planète prend un visage distinct. Nous découvrons que notre existence prend une autre valeur aux yeux de Dieu que celle de se trouver mêlés à la masse de tous les humains qui peuplent cette terre. Notre existence ne consiste plus à être en survie parmi tous ceux qui nous entourent, mais nous sommes destinés à jouir d’ « une super vie » qui s’individualise sous l’influence de Dieu qui nous prend en charge, chacune et chacun à notre tour.

C’est alors que nous devons prendre conscience des loups qui nous menacent. Les loups vont s’en prendre à l’aspect grégaire de notre personnalité, ils vont chercher à faire que nous nous comportions comme des moutons sans berger en détruisant en nous ce qui nous distingue des autres. Ils vont nous faire perdre toute spécificité et feront de nous des consommateurs qu’il faut séduire pour mieux les utiliser et les amalgamer au troupeau. Ils vont nous pousser à croire que pour le prix d’une jouissance immédiate, nous devons consacrer toute notre existence à la sacrifier aux lois du marché et de la mode afin de ressembler le plus possible aux modèles qu’on nous propose d’imiter. Ces loups qui dévorent notre autonomie et notre indépendance sont les alliés de tous les mercenaires qui se donnent des allures de bergers.

Ces mercenaires, ce sont tous ceux qui à coup d’arguments nous assurent que le succès de notre société n’a pas d’autres issue que de vendre son âme à la consommation et à la pensée unique. Ils prétendent que le bonheur est dans la jouissance immédiate. Suivant les époques, leurs discours se sont colorés différemment, mais ils ont toujours visés à engloutir la masse des humains dans des projets globalisants où chacun suivrait le même chemin que son voisin et redouterait d’être différent de lui au risque d’être rejeté.

Les faux bergers se cachent aussi derrières les idées du moment. Elles aussi empruntent le même chemin que la mode. Suivant les époques, et les intérêts de ceux qui influent sur nous, elles nous poussent à devenir des va-t-en guerre ou des va-t-en paix et nous entraînent à discriminer les uns pour valoriser les autres si bien que chacun est invité à faire chorus avec la foule. Chacun s’habille comme tout le monde pour finir par penser comme tout le monde. En tant que minoritaires protestants nous sommes avantagés sur les autres car nous devons résisier aux idées du moment pour conserver notre spécificité.

Grâce à Dieu le « bon berger » est là au milieu du troupeau pour faire de nous autres chose que des brebis qui suivent sans retenue celui qui les entraîne. Il est dit qu’il donne sa vie pour nous, c’est à dire qu’il offre son exemple, son évangile, sa manière de penser comme solution alternative aux pressions extérieures qui pèsent sur nous. Il propose le temps et l’éternité là où les valeurs ambiantes proposent l’urgence et les utopies provisoires.
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Il nous propose de trouver en nous-mêmes du sens à notre existence qui ne soit dicté ni par les médias ni par la mode du moment. Il nous apprend que nous ne sommes pas des individus dont la vie est destinée à ressembler à celle de la masse. Il se propose d’enrichir et valoriser notre vie pour qu’elle devienne une super vie. Le bon berger se propose donc de donner de la valeur à notre individu. Il est capable d’aller jusqu’au fond même du cœur de chacun d’entre nous pour y injecter un supplément de vie dont lui seul est dépositaire.

Le « bon berger » ne conçoit nos existences que si lui même  les partage pour y introduire le divin qui est en lui. Ainsi il se propose de nous apporter une originalité qui nous soit propre. Cette originalité consiste à savoir qu’il nous prend lui-même en main et nous propose de vivre selon notre nature profonde qui est marquée du doigt de Dieu depuis les origines de l’humanité. En faisant de nous des individus autonomes et responsables il pèsera sur l’évolution du monde qui s’orientera de ce fait dans le sens où il souhaite qu’il évolue.

Nous n’avons pas vocation à être une goutte d’eau parmi les autres gouttes d’eau, nous avons vocation a devenir des individus distincts des autres au service des autres pour que chacun puisse jouir ici bas d’une vie qui le dépasse. Pour cela il est nécessaire que nous soyons attentifs à la voix du berger et non à celle des mercenaires.



Les illustrations proviennent du Codex Vergilius Romanus

Luc 24:13-35 - Emmaüs



Luc 24:13-35  - Sur le chemin d'Emmaüs -  dimanche  4 mai


Or, ce même jour, deux d'entre eux se rendaient à un village du nom d'Emmaüs, à soixante stades de Jérusalem, 14 et ils s'entretenaient de tout ce qui s'était passé. 15 Pendant qu'ils s'entretenaient et débattaient, Jésus lui-même s'approcha et fit route avec eux. 16 Mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître. 17 Il leur dit : Quels sont ces propos que vous échangez en marchant ? Ils s'arrêtèrent, l'air sombre. 18 L'un d'eux, nommé Cléopas, lui répondit : Es-tu le seul qui, tout en séjournant à Jérusalem, ne sache pas ce qui s'y est produit ces jours-ci ? 19 — Quoi ? leur dit-il. Ils lui répondirent : Ce qui concerne Jésus le Nazaréen, qui était un prophète puissant en œuvre et en parole devant Dieu et devant tout le peuple, 20comment nos grands prêtres et nos chefs l'ont livré pour qu'il soit condamné à mort et l'ont crucifié. 21 Nous espérions que ce serait lui qui apporterait la rédemption à Israël, mais avec tout cela, c'est aujourd'hui le troisième jour depuis que ces événements se sont produits. 22 Il est vrai que quelques femmes d'entre nous nous ont stupéfiés ; elles se sont rendues de bon matin au tombeau et, 23 n'ayant pas trouvé son corps, elles sont venues dire qu'elles avaient eu une vision d'anges qui le disaient vivant. 24 Quelques-uns de ceux qui étaient avec nous sont allés au tombeau, et ils ont trouvé les choses tout comme les femmes l'avaient dit ; mais lui, ils ne l'ont pas vu.

25 Alors il leur dit : Que vous êtes stupides ! Comme votre cœur est lent à croire tout ce qu'ont dit les prophètes ! 26 Le Christ ne devait-il pas souffrir de la sorte pour entrer dans sa gloire ? 27 Et, commençant par Moïse et par tous les Prophètes, il leur fit l'interprétation de ce qui, dans toutes les Ecritures, le concernait. 28 Lorsqu'ils approchèrent du village où ils allaient, il parut vouloir aller plus loin. 29 Mais ils le pressèrent, en disant : Reste avec nous, car le soir approche, le jour est déjà sur son déclin. Il entra, pour demeurer avec eux. 30 Une fois installé à table avec eux, il prit le pain et prononça la bénédiction ; puis il le rompit et le leur donna. 31 Alors leurs yeux s'ouvrirent et ils le reconnurent ; mais il disparut de devant eux. 32 Et ils se dirent l'un à l'autre : Notre cœur ne brûlait-il pas en nous, lorsqu'il nous parlait en chemin et nous ouvrait le sens des Ecritures ? 33 Ils se levèrent à ce moment même, retournèrent à Jérusalem et trouvèrent assemblés les Onze et ceux qui étaient avec eux, 34qui leur dirent : Le Seigneur s'est réellement réveillé, et il est apparu à Simon ! 35 Ils racontèrent ce qui leur était arrivé en chemin, et comment il s'était fait reconnaître d'eux en rompant le pain. 

Nous connaissons tous l’histoire de ce pilote perdu dans un désert de sable après une avarie de moteur. Sa vie n’avait plus beaucoup de sens, son avenir était compromis quand un enfant, débarqué d’une planète inconnue vint lui expliquer le sens des choses en lui parlant d’un mouton, d’une rose et d’un renard et de mille autres choses apparemment sans importances, mais capitales pour cet enfant qui analysait les problèmes des grands avec sa candeur innocente.

La plupart de ceux qui habitent notre planète sont agités par tant de questions vitales auxquelles on ne donne que des réponses contradictoires qu’ils se découvrent à leur tour comme des naufragés dans un désert sans Dieu en quête d’un petit Prince qui leur expliquerait simplement les mystères de la vie. Nous aimerions nous arrêter un instant dans cette course insensée pour dire au petit Prince : « parle-nous de Dieu ! » Peut-être bien que par des évidences toutes simples, il pourrait nous dire ce qui concerne l’infini de notre âme ? Mais déjà s’installe en nous un doute : le mystère de Dieu est-il aussi simple à résoudre que le problème qui consiste à protéger une rose contre les dents acérées d’un mouton vorace.

Pour les deux hommes qui marchent devant nous sur le chemin qui les mène à un village inconnu le mystère de Dieu reste opaque.  Ce chemin vers l'inconnu, c'est l'histoire de leur vie. Ils sont persuadés que le Dieu auquel ils croyaient les a abandonné si bien que le projet de vie qu’ils avaient élaboré à son sujet s’est effondré, ils marchent vers un village que personne ne connaît et où sans doute personne ne les attend. Ce village va prendre pour nous une valeur symbolique, il désigne notre avenir, tel un lieu où nous dirigerions nos pas et que nous ne connaissons pas. Les informations que nous percevons à son sujet sont contradictoires et souvent inquiétantes. Mais nous allons découvrir que sur ce chemin qui y mène, Celui qui désormais est vivant chemine aussi. Il est Dieu, il est homme, il habite notre avenir.

Il  est certain que les questions que l’on se pose sur Dieu ne sont pas sans intérêt dans cette recherche que nous menons sur l’avenir, mais qui s’intéresse à Dieu ? En fait, ceux qui s’intéressent à Dieu et qui ne tarissent pas d’éloge à son sujet cherchent à nous entraîner dans un programme récupérateur qui placerait les hommes et Dieu dans un monde hors de la réalité et nous n’avons pas envie de plonger dans l’univers glauque des sectes irréalistes. En tout cas ce n'est pas dans cette direction que l'Evangile nous entraîne.

Par contre, si nous interrogeons, nos voisins, nos amis, nos compagnons de travail sur ce même sujet nous les verrons opérer une forme de repli, et leurs réponses nous rapprocheront de ces deux compagnons dont nous suivons la trace. Comme eux ils vont évoquer un passé décevant. Ils vont nous dire que jadis, ils allaient à l’Eglise, qu’ils fréquentaient le catéchisme ou l’école du dimanche, ou même qu’ils ont été enfant de chœur. Puis, tout s’est arrêté.

Déçus par Dieu ou par les hommes, ils ont suivi le penchant ordinaire de ce siècle, ils ont cessé de croire et se sont mis à vivre comme si ce monde avait été déserté par Dieu. Ils prétendent, en tout cas c’est ce qu’ils disent, que l’existence qu’ils mènent sans Dieu n’est pas plus mauvaise que celle qu’ils menaient avant. Ils suivent leur chemin sans se douter que sur la route qui les mène nulle part, quelqu’un marche à leurs côtés.

Ils croient suivre une route solitaire, mais il n’en est rien. Ils croient même avoir perdu la foi, mais il n’en est rien. La seule chose qui ne va pas en eux c’est qu’ils ont perdu leurs repères. C’est pour cette même raison que les deux pèlerins que nous suivons ont quitté Jérusalem. Pourtant la suite de l’histoire va nous montrer que la vérité était à Jérusalem qu’ils viennent de quitter et qu’ils vont désormais vers l’inconnu où la vérité est absente.

Pour nos contemporains qui suivent des itinéraires parallèles, peut-on dire que le passé vécu dans une foi chancelante contient plus de vérité que le présent où il n’y a plus apparemment de manifestation de la foi ? C’est sans doute là que se situe le problème.

Les deux hommes sur le chemin d’Emmaüs entrent facilement en conversation avec l’inconnu qui marche à leur côté tant il est vrai que l’on se confie facilement quand on a une détresse à partager. C’est même une bonne manière d’exorciser son chagrin. Ils ouvrent leur cœur à l’inconnu, ils parlent de leurs déceptions, du prophète assassiné qui a emporté dans la mort tous leurs projets. Ils rapportent aussi tous les signes d’espérance qu’ils avaient reçus avant leur départ, les propos des femmes, le tombeau vide. Ils savaient tous ça, mais ils n’avaient rien compris. Ils avaient maintenant besoin qu’on leur parle de ce qu’ils savaient déjà mais cette connaissance n’avait encore produit aucun effet en eux.

Ils étaient le portrait type de ces hommes et de ces femmes d’aujourd’hui qui ont rejeté Dieu parce qu’ils n’ont pas su en repérer la trace dans leur vie. Sans doute ont-ils été choqué par un détail qui avait heurté leur logique ou parce que Dieu ne leur apparait pas comme ils se l’imaginent. Ils ne savaient pas et ils ne savent toujours pas que Dieu lui-même est un infatigable compagnon de marche. Il accompagne les hommes sans obéir à leur volonté. Il donne volontiers des explications si on ne lui impose pas ce qu’on croit être les bonnes solutions. Il ne nous impose pas de croire ce que notre raison refuse d’admettre. Il se tient dans le silence de notre être.

Il est toujours accessible à toute forme de contact avec nous, dans la mesure où nous acceptons de nous laisser accompagner par lui sans lui dire ce qu’il doit être ni ce qu’il doit faire.

L’Evangile ne s’arrête pas le jour de Pâques. La bonne nouvelle de la résurrection n’est pas seulement un événement que l’on commémore à date fixe. Ce n'est pas une façade qui ne recouvre aucune réalité. La résurrection, c’est aussi lune fenêtre ouverte sur une autre vie possible. Cela signifie que Dieu chemine avec nous sur cette terre et qu’il nous mobilise dans toutes sortes de projets qui donneront vie aux hommes.

Mais comment Dieu se fait-il connaître ? Comment sait-on qu’il est là ? Dans le récit que nous en a fait Luc. L’inconnu entre dans l’auberge avec eux et il s’assoit. Il rompt le pain et dit la bénédiction. Ce sont là les gestes de la vie quotidienne, ce sont les gestes de la vie sociale, de l’amitié partagée. Il n’y a aucun prodige dans ces gestes, pas de miracle non plus. Mais toutes les fois que quelqu’un les fait en notre présence, cela nous rappelle que Jésus est mort en les accomplissant et qu’en les faisant, il rendait visible la présence de Dieu au cœur de tous les hommes.

Tout au cours du parcours qu’ils ont suivi avec Jésus, les deux hommes ont bien senti que quelque chose brûlait à l’intérieur d’eux-mêmes quand ils marchaient avec l’inconnu. Le saint Esprit était à l’œuvre alors qu’ils marchaient. Il en va de même pour chacun de nous. Dieu nous réserve des instants d’émotion et des moments où l’on sent vibrer des sensations au fond de nous-mêmes. C’est dans ces moments là qu’il faut apprendre à écouter ce qui se passe en nous.

C’est alors que Jésus se laissera connaître et que nous pourrons comprendre  qu'il agit en nous au nom de Dieu. C’est alors que les choses prendront du sens, nous découvrirons que tout ce que nous devons savoir sur Dieu est déjà en nous comme un gisement encore inexploitée. Il suffit de prêter attention à celui qui crée des émotions en nous pour que nous sachions, sans le savoir vraiment que ce que nous pressentons devient réalité en nous.

La découverte de l’action de Dieu en nous relève donc de la même logique que celle du Petit Prince qui ne comprenait pas pourquoi les adultes rendaient si complexe ce qui était si simple pour l’enfant. Dieu ne nous a pas abandonnés sur les chemins du monde sans aucune provision pour la route et sans compagnon pour marcher avec nous. Il nous demande quand même de faire un effort pour le remarquer. Dieu a tout mis en nous, le savoir et le dynamisme, mais c’est à nous qu’il appartient de nous mettre en route. C’est ce que font alors nos deux amis qui cessent de diriger leurs pas vers le village inconnu mais qui tournent leurs regards vers le lieu de vie qui est ici représenté par Jérusalem.


illustrations  Janet Brooks Gerloff ; Claudio Pastro