lundi 27 avril 2009

s'aimer soi-même, aimer les autres et aimer Dieu! Comment gérer tout cela? pour le dimanche 17 mai, Jean 15/9-17


Jean 15/9-17

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Je vous aime comme le Père m'aime. Demeurez dans mon amour.
10 Si vous obéissez à mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme moi j'ai obéi aux commandements de mon Père et que je demeure dans son amour. 11 « Je vous ai dit cela afin que ma joie soit en vous et que votre joie soit complète. 12 Voici mon commandement : aimez-vous les uns les autres comme je vous aime. 13 Le plus grand amour que quelqu'un puisse montrer, c'est de donner sa vie pour ses amis. 14 Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande. 15 Je ne vous appelle plus serviteurs, parce que le serviteur ne sait pas ce que fait son maître. Je vous appelle amis, parce que je vous ai fait connaître tout ce que j'ai appris de mon Père. 16 Ce n'est pas vous qui m'avez choisi, c'est moi qui vous ai choisis ; je vous ai chargés d'aller, de porter des fruits et des fruits durables. Alors, le Père vous donnera tout ce que vous lui demanderez en mon nom. 17 Ce que je vous commande, donc, c'est de vous aimer les uns les autres. »


Jean 15/9-17

- Peut-on aimer si on n'éprouve aucun sentiment pour l'autre?
- Ne pas répondre à la violence de celui qui vous humilie est-ce de l’amour ?
Si on répond par l'affirmative à ces deux questions n'éprouvera-t-on pas une profonde frustration? Peut-on alors trouver une satisfaction dans la frustration ? Derrière ces quelques remarques se cachent bien évidemment toutes les questions que nous formulons quand l'Evangile nous propose de trouver notre bonheur dans des attitudes que nous pourrions qualifier de vexatoires ou d’aliénantes. "Heureux serez-vous quand on vous outragera, aimez vos ennemis, priez pour ceux qui persécutent. Je vous donne un commandement nouveau : aimez-vous les uns les autres". Voila des textes, tant de fois cités qui permettent au nom d’un idéal évangélique mal compris, de justifier des situations parfois choquantes.

Il paraît tout à fait évident et conforme à notre nature humaine de considérer que le but de notre vie est d’être heureux, c'est pourquoi chacun cherche à sa manière le secret du bonheur. Nous pensons qu’il réside dans l’accomplissement de nos dons et de nos désirs. Nous cherchons dans le dépassement de nous-mêmes à réaliser ce qui nous motive le plus et nous pensons ainsi atteindre le bonheur. Mais l’être humain est un puits sans fond. Il n’arrive jamais au terme de ses désirs et en demande toujours plus. Pourtant la plupart d'entre-nous considèrent que l’expression d’une sagesse raisonnable consiste, faute d’avoir vraiment trouvé le bonheur, à se contenter de ce qu'on a et de s'en accommoder comme une succédané du bonheur. Mais on garde par de vers soi le sentiment qu'on aurait toujours pu faire mieux.

Il semble cependant que soit révolue l'époque où jadis les philosophes invitaient chacun à trouver son bonheur dans la satisfaction de l’instant qui passe et où les théologiens l’invitaient à accepter son sort comme un don de Dieu.

Face à ceux qui malgré tout restent satisfaits d’eux-mêmes se dresse l’immense groupe des insatisfaits et des malchanceux. Blessés par la vie avant de l’avoir commencée, ou nés sous une mauvaise étoile, ils sont frustrés et ne trouvent leur satisfaction qu'en exprimant leur révolte. La société où nous vivons attise ces sentiments et ces frustrations en accusant les autres d'être responsables sans jamais dire de qui il s’agit. C'est sur ce point que Jésus nous provoque, il nous invite non seulement à découvrir qui sont ces autres, mais à les aimer. Il ne s’agit cependant pas de subir et d’accepter leurs humiliations, mais de chercher à avoir vis à vis d'eux une attitude telle qu'ils seront amenés à se transformer. C'est ainsi que l'on plaira à Dieu. Car selon lui, c'est dans notre bonne relation avec l'autre, quel qu'il soit, que réside le secret du bonheur et on ne peut être heureux sans plaire à Dieu. Mais comment arriver à ce renversement d'attitude quand c'est l'indifférence, voire même l'hostilité qui préside à nos relations avec les autres?

Selon Jésus nous ne pouvons pas trouver le bonheur en nous-mêmes et nous ne pouvons pas davantage le trouver dans la résignation. Le secret du bonheur se trouve dans notre capacité à aimer. Nous réussirons notre vie et nous serons heureux dans la mesure où nous aurons réussi à aimer. Le secret du bonheur consiste donc à se dépasser soi-même pour se tourner vers l’autre en développant des sentiments d’amour à son égard. Mais on ne peut aimer sur commande semble-t-il. On ne peut pas aimer ceux pour qui nous n’avons aucune attirance et l’injonction de Jésus qui nous pousse vers tous les autres nous paraît suspecte et irréaliste. Quoi qu’il en soit nous savons bien que notre désir de réussite personnelle ne nous apportera aucune impression de bonheur si on n’y introduit pas une grosse part d’altruisme et d’intérêt pour les autres.

Jésus en a fait un impératif. Il considère que nous ne pouvons pas faire autrement. En fait, toute l’Ecriture nous introduit dans cette perspective qui est la règle de conduite de Dieu lui-même. En effet, si nous pensons au tout premier récit de la Bible, nous sommes témoins d’une histoire d'amour entre Dieu et la réalité de ce qu’il va créer
mais qui n’existe pas encore. Les premiers mouvements créateurs de Dieu sont décrits comme un corps à corps avec le néant. Il doit bousculer ce qui n’existe pas pour libérer la lumière, il doit affronter la masse compacte pour que les eaux s’ordonnent et laisse surgir la terre des profondeurs de l'abîme afin de s’ouvrir à la vie. Mais avant de nous décrire ce combat, il nous est dit que l’esprit couvait le monde avant qu’il ne vienne à la réalité. Ainsi, la motivation profonde de Dieu résidait dans le fait qu’il aimait déjà ce qu’il n’avait pas encore créé et qui s'opposerait à lui dans une adversité hostile.

Si l’être humain est fait à l’image de Dieu, comme il est dit dans les Ecritures, c’est qu’il y a en lui la même capacité à aimer, même ce qui lui est hostile. Cela fait partie de ses structures profondes. Il doit développer cette capacité pour accomplir son destin. Mais l’homme a une faiblesse, c’est celle de retourner toutes ses capacités bienveillantes vers lui-même et à les mettre au service de son propre ego. C’est le cas de sa capacité à aimer. Nous nous aimons nous mêmes en priorité avant de concevoir que nous sommes faits pour aimer les autres. C’est pour cela que Jésus doit nous rappeler que nous sommes conçus pour aimer notre prochain, à égalité avec nous-mêmes. Pourtant, ce n'est pas aussi évident. Quand nous croyons aimer les autres, c’est souvent à nous que nous pensons en premier. "Je ne peux pas vivre sans toi dit l’amoureux à sa bien aimée", en s’exprimant ainsi, c’est à lui qu’il pense en priorité et non à elle. Aimer ce n’est pas ne pas pouvoir se passer de l’être aimé, c’est vouloir que l’être aimé soit heureux. L’homme en quête d'amour doit commencer par lutter contre lui-même. Il doit d’abord en prendre conscience avant d' aller plus loin.

Mais nous avons dit que l’amour ne se commande pas et que nous ne pouvons pas aimer celui pour lequel nous n’éprouvons pas de sentiments. A défaut des sentiments, nous pouvons cependant réfléchir à l’ attitude que nous pourrions avoir si nous éprouvions un sentiment d’amour pour celui que nous n’aimons pas. Nous pouvons aussi penser que puisque Dieu nous pousse à le faire, il nous en donnera la force et fera également jaillir en nous un sentiment que nous ne croyons pas pouvoir éprouver. Nous imaginons alors ce que serait notre société si cette attitude se généralisait. C’est en envisageant une telle perspective que Jésus parle alors de joie. Une telle attitude de la part des hommes comblerait Dieu de joie et le remplirait de bonheur.

Il serait gratifiant pour nous de combler la joie de Dieu, mais à quoi cela nous servirait-il ? Si nous rendions Dieu heureux déciderait-il alors de rendre le monde différent et acceptable pour les hommes ? Le monde tirerait-il un avantage quelconque à participer au bonheur de Dieu ? Autrement dit si le genre humain se mettait à obéir à sa nature profonde et se mettait à aimer ses semblables d’une autre manière qu’il le fait habituellement, Dieu changerait-il d'attitude vis à vis du monde et créerait-il une société paradisiaque? Non. Les hommes n’ont aucun pouvoir sur Dieu, et encore moins celui de le changer. Mais la réponse n'est pas vraiment là. .

La réponse réside dans le constat que la seule impression de participer au bonheur de Dieu suffit à elle seule à changer les hommes en provoquant un immense bonheur dans leur cœur. Plus nous nous ouvrirons à notre prochain, plus Dieu sera heureux et plus heureux serons-nous à notre tour. Il est bien évident que tout cela entraînerait le bouleversement général que Jésus est venu annoncer. En agissant ainsi nous apporterions la conclusion logique à l’œuvre de Jésus qui ne serait pas mort en vain, puisque l’amour dont il a revêtu son sacrifice aurait réussi à modifier nos comportements.

Jusqu’ici le succès de cette entreprise n’a pas été évident. Son échec apparent tiendrait au fait qu’on veut imposer ce comportement d’amour aux autres comme si nous étions différents d’eux ou supérieurs à eux, alors que cet amour ne peut se réaliser que dans la liberté de chacun. L'Eglise n'a pas à convaincre les hommes de la nécessité d'aimer, c'est un point acquis, mais elle doit être un lieu de liberté où l'amour trouvera ses droits. Et ce n'est toujours pas le cas.
Il est cependant réconfortant de réaliser que nous sommes conçus avec la capacité à aimer et que nous avons possibilité de le faire. Jésus nous invite seulement à laisser notre nature profonde s’exprimer sans tenir compte de nos réticences. Nos réticences relèvent de l’ordre du péché et Jésus nous en a délivré. Ne nous a-t-il pas invités à vivre avec audace parce qu’il a mis en nous la capacité à le surmonter? Notre bonheur et notre joie ne peuvent vraiment se réaliser que si nous les partageons avec Dieu qui se révèle à nous dans tout ce qu’il nous donne à aimer.



mardi 21 avril 2009

Parabole de la vigne et des sarments Jean 15/1-15 dimanche 10 mai


Chapitre 15/1-15


Le cep et les sarments


1Moi, je suis le vrai cep, et mon Père est le vigneron. 2Tout sarment qui est en moi et qui ne porte pas de fruit, il le retranche ; et tout sarment qui porte du fruit, il l'émonde afin qu'il porte encore plus de fruit. 3Déjà, vous êtes émondés, à cause de la parole que je vous ai annoncée. 4Demeurez en moi, comme moi en vous. De même que le sarment ne peut de lui-même porter du fruit, s'il ne demeure sur le cep, de même vous non plus, si vous ne demeurez en moi. 5Moi, je suis le cep ; vous, les sarments. Celui qui demeure en moi, comme moi en lui, porte beaucoup de fruit, car sans moi, vous ne pouvez rien faire. 6Si quelqu'un ne demeure pas en moi, il est jeté dehors comme le sarment, et il sèche ; puis l'on ramasse les sarments, on les jette au feu et ils brûlent. 7Si vous demeurez en moi et que mes paroles demeurent en vous, demandez tout ce que vous voudrez, et cela vous sera accordé. 8Mon Père est glorifié en ceci : que vous portiez beaucoup de fruit, et vous serez mes disciples.


9Comme le Père m'a aimé, moi aussi, je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour. 10Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme j'ai gardé les commandements de mon Père et que je demeure dans son amour. 11Je vous ai parlé ainsi, afin que ma joie soit en vous et que votre joie soit complète.

12Voici mon commandement : Aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimés. 13Il n'y a pour personne de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. 14Vous êtes mes amis, si vous faites ce que je vous commande. 15Je ne vous appelle plus serviteurs, parce que le serviteur ne sait pas ce que fait son maître. Je vous ai appelé amis, parce que tout ce que j'ai appris de mon Père, je vous l'ai fait connaître
.


Avez-vous déjà vu une vigne avant et après qu’elle ait été taillée, cela mérite le déplacement. Il n’y a pas besoin d’aller bien loin pour assister à cela. Celui qui assiste en promeneur à la taille en a pour les yeux et pour les oreilles. Le pied de vigne qui tend ses branches dénudées vers le ciel gris du mois de mars se trouve en très peu de temps réduit à très peu de choses : un moignon de bois tordu qui est le cep et quelques tiges de sarments mutilés qui porteront à l’automne les fruits qui pressés donneront le vin, signe de vie que le Christ partage avec le monde. Les claquements secs et discrets du sécateur déchirent le silence comme autant de petits cris de souffrance. Les sarments coupés devenus inutiles sont rassemblés en petits tas qu’une flamme claire réduit en cendres. Dans l’air encore frais du printemps qui commence à peine, s’entremêlent curieusement la vie qui va naître et la vie qui s’en va. Les sarments qui ne servent plus à rien disparaissent et la future récolte n’est encore qu’à l’état de promesses.

Nous avons là une image de l’Eglise. Elle n’est sans doute pas attractive, mais elle est porteuse d'espérance. Le cep qui représente son corps n’a d’intérêt que parce que le Christ l’habite. Il ressemble à un vulgaire morceau de bois fiché en terre. Son aspect insignifiant n’a d’intérêt que pour le vigneron qui sous l’écorce racornie perçoit déjà la sève qui murmure. Les quelques rameaux graciles, judicieusement taillés figurent les membres de l’Eglise et portent en eux l’espérance de la récolte. A première vue, l’aspect de la vigne n’est guère engageant et n’offre rien d’attrayant. Telle est l’image que Jésus utilise pour exhorter toutes les églises qui vont naître au cours des siècles. Elles sont averties du fait que leur fidélité dépendra d’une taille appropriée pour que leurs fruits produisent le meilleur vin pour annoncer le royaume qui vient. On croirait à évoquer cette image entendre la voix de Jean Calvin déclarant que l’Eglise réformée est toujours à réformer, comme le vigneron qui chaque année doit tailler sa vigne pour la rendre féconde. Il la réduit pour la faire grandir.

Jésus nous a habitués à d’autres images pour dynamiser son Eglise. Il nous l’a décrite comme une graine qui pousse toute seule et qui d’un seul coup se recouvre de feuillage tellement épais que les oiseaux peuvent s’abriter sous son ombre. Elle peut prendre l’aspect fragile d’une coque de noix livrée à la furie des flots que Jésus calme avec autorité et qui arrive sereinement au port. Paul a utilisé l’image du sportif dans le stade qui court pour recevoir la palme du vainqueur. Par contre ici c’est la seule fois dans l’Evangile qu’on nous décrit l’Eglise comme une plante que l’on mutile pour la rendre plus productive. Les coups de sécateurs sont perçus comme autant de souffrances nécessaires que le Seigneur nous imposerait pour obtenir le triomphe de son Eglise. Nous ne comprenons pas pourquoi Dieu nous soumettrait régulièrement une telle épreuve, comme s’il voulait par avance justifier les souffrances que le sort nous réserve d’une manière inexplicable.

Détrompez-vous, il n’y a pas ici une esquisse de la doctrine de la rédemption par la souffrance comme certains le souhaiteraient. Il nous faut revenir au texte et repérer comment Dieu s’y prend pour tailler la vigne. En effet, il ne prend pas de sécateur et il ne la fait pas souffrir. C’est sa Parole qu’il produit les effets souhaités et que les rameaux que nous sommes sont taillés. C’est par le moyen de la Parole, que nous avons cru que Dieu était tout entier dans les œuvres de Jésus, c’est
par elle que nous avons décidé de nous attacher au Christ. C’est elle qui guide les étapes de notre vie chrétienne, et si quelque chose est à retrancher ou à enlever de nos vies, c’est par elle que nous les reconnaissons et c’est librement que nous décidons de les enlever. Ce n’est donc pas Dieu qui opère des ablations douloureuses, mais c’est chacun de nous qui régule sa vie selon que la parole le pousse dans un sens ou dans un autre. C’est par fidélité à sa parole que nous faisons les choix qui donnent du sens à notre vie. La Parole de Dieu est l’élément régulateur dont nous nous servons, bien souvent sans nous en rendre compte, pour purifier notre vie et rester fidèlement attachés au cep qui est le corps principal de l’Eglise et sous l’écorce duquel se dissimule le Christ lui-même.

Je me suis plu à dépeindre le cep comme un morceau de bois sans grand intérêt. On ne le remarquerait pas si ses sarments ne se couvraient de feuilles, de vrilles et de pampres prometteurs de fruit et de joie. Le cep n’a de raison d’être que dans ses branches qui lui donnent la récompense de ses efforts. Ses efforts consistent à acheminer la sève jusqu’au plus lointain de ses rameaux. Le cep ne peut vivre sans les rameaux qui ne peuvent vivre sans lui. Le Christ ne peut être vraiment porteur de vie que si les fidèles sont porteurs de vie à leur tour.

Chacun des fidèles que nous sommes est ici interrogé au sujet de lui-même et du témoignage que sa propre vie rend au Christ. Nous, sommes mis en face de nos responsabilités car c’est aux fruits que nous produirons que l’on reconnaîtra le Seigneur et que le Seigneur sera glorifié, et si le Seigneur est glorifié il le sera dans la joie. Notre existence n’a pas d’autre but que de mettre le Seigneur dans la joie, et il sera heureux si l’ensemble de sa création évolue avec harmonie.

Nous avons compris que le Seigneur nous rend efficaces par l’esprit qu’il dépose en nous. C’est la sève qui monte du cep vers les sarments qui permet aux fruits de se gorger de vie avant de devenir le vin nouveau qui abreuve le monde. Si le fruit n’est pas bon et que le vin tourne à la piquette, que se passe-t-il ? Cela vient-il de ce que le cep est trop vieux et qu’il faut le changer, ou cela vient-il du fait que les sarments ont été mal taillés, sucent la sève et ne donnent pas de bons fruits ? D’une manière générale, en ces temps actuels, on a tendance à croire que les idées force qui animent la vie sur terre depuis 2 000 ans sont dépassées, que le cep est trop vieux et qu’il faut le changer. On prétend que le Christianisme a fait son temps et qu’en ce début de millénaire, il faut faire place à de nouvelles spiritualités.

Qui veut tuer son chien l’accuse de la rage, qui veut refuser l’Evangile prétend qu’il est illisible, qui voit la paille dans l’œil des autres ne perçoit sans doute pas la poutre qui est dans le sien. Comment donner du sens à sa vie si on est incapable de s’orienter soi-même ?

L’Evangile que nous reconnaissons comme Parole de Dieu est à notre disposition pour nous aider à nous remettre en cause, pour rejeter ce qui est nocif, pour refus
er ce qui n’est pas porteur d’espérance. C’est ainsi qu’il nous est suggéré de trouver dans l’Ecriture ce qui est porteur de fruit et de rejeter le reste. Si quelque chose ne va pas, c’est en nous qu’il faut le chercher et non pas dans le cep qui nous abreuve de sève.

Le fruit que nous sommes sensés produire, le vin nouveau qui abreuve le monde, c’est l’amour que nous avons en nous-mêmes et qui doit motiver toutes nos relations avec les autres. Si le monde manque d’amour aujourd’hui, et il manque d’amour, ce n’est pas la faute de Dieu qui nous prodigue aujourd’hui comme toujours le même évangile.

Si les choses vont mal c’est que les hommes ne savent plus aimer et quand les hommes ne sont plus capables de s’aimer les uns les autres, ils s’oppriment entre eux, les plus forts violentent les plus faibles pour les déposséder de leurs biens. C’est à cause du manque d’amour que la moitié du monde vit au détriment de l’autre moitié. C’est à cause du manque d’amour que ceux qui ne sont pas des esclaves s’arrogent le droit de commander ceux qui le sont encore. Curieusement, l’Evangile a été prêché jusqu’aux extrémités du monde et l’amour n’a pas suivi. S’il faut à nouveau tailler la vigne, il faudra savoir quels rameaux doivent être taillés et à quelle hauteur ils doivent l’être. « Heureux ceux qui écoutent ma parole et qui la gardent dit le Seigneur. »










jeudi 16 avril 2009

Notre relation à Dieu ignore la mort. Jean 10/7-18 dimanche 3 mai 2009





Le bon berger : mosaïque du Temple de Port Royal (Paris)



7Jésus leur dit encore : Amen, amen, je vous le dis, c'est moi qui suis la porte des moutons. 8Tous ceux qui sont venus avant moi sont des voleurs et des bandits ; mais les moutons ne les ont pas écoutés. 9C'est moi qui suis la porte ; si quelqu'un entre par moi, il sera sauvé ; il entrera et sortira et trouvera des pâturages. 10Le voleur ne vient que pour voler, abattre et détruire ; moi, je suis venu pour qu'ils aient la vie et l'aient en abondance.
11C'est moi qui suis le bon berger. Le bon berger se défait de sa vie pour ses moutons. 12Quand il voit venir le loup, l'employé, celui qui n'est pas berger et pour qui il ne s'agit pas de ses propres moutons, s'enfuit en abandonnant les moutons. Et le loup s'en empare, il les disperse. 13C'est un employé : il n'a pas le souci des moutons.
14C'est moi qui suis le bon berger. Je connais mes moutons, et mes moutons me connaissent, 15comme le Père me connaît et comme, moi, je connais le Père ; et je me défais de ma vie pour mes moutons. 16J'ai encore d'autres moutons qui ne sont pas de cet enclos ; ceux-là aussi, il faut que je les amène ; ils entendront ma voix, et ils deviendront un seul troupeau, un seul berger.
17Si le Père m'aime, c'est parce que, moi, je me défais de ma vie pour la reprendre. 18Personne ne me l'enlève, mais c'est moi qui m'en défais, de moi-même ; j'ai le pouvoir de m'en défaire et j'ai le pouvoir de la reprendre ; tel est le commandement que j'ai reçu de mon Père.

Dimanche 2 mai 2009

Jean : 10/7-18

Aucune échappatoire n’est possible pour les moutons. Ils sont malmenés par les bergers, menacés par les voleurs, convoités par les loups. Leur destin est réglé d’avance. Ce que l’Evangile ne dit pas mais que tout le monde sait, c’est qu’ils finiront mangés par les hommes. Leur cause est entendue, on ne les élève que pour ça. Sans tenir compte de ce qui vient d’être dit, bien évidemment nous nous identifions aux moutons, c’est pour cela que l’Evangile nous a rapporté cet enseignement de Jésus : Il pose la question que nous nous posons tous : peut-on échapper à son destin ? Comment vivre alors que la mort nous menace ? Peut-on d’une manière ou d’une autre échapper à la mort ?

Comme les moutons, nous sommes environnés de tous les dangers et fatalement, comme eux nous devons mourir. Les moutons subissent leur sort sans broncher. A la différence des animaux, les tenants de l’espèce humaine n’acceptent pas leur destin. Ils espèrent pouvoir y échapper, ils pensent même que Dieu y pourvoira. Et curieusement, tout en espérant que Dieu les délivrera de la mort, ils l’accusent d’être celui qui décide du moment où celle-ci s’emparera d’eux. Il suffit de lire les faire-part de décès pour en être convaincu : « Il a plu à Dieu de rappeler un tel …ou une telle est retournée auprès du Père… »

Depuis que le monde est monde, nous en sommes toujours là, et rien ne semble vouloir faire évoluer les choses. Tout en mettant notre confiance en Dieu nous nous soumettons à ce qui nous paraît être un décret divin qui se résume assez bien dans l’affirmation selon laquelle « Dieu est celui qui fait mourir et qui fait vivre » ( Deutéronome 32-39). Bien que nous acceptions cette fatalité, nous ne pouvons quand même nous empêcher d'intenter un procès à Dieu parce que nous pensons qu’il aurait pu nous réserver un autre sort que celui des autres créatures. Il y a en nous comme l'idée que si nous avons foi en Dieu, et que s'il s'est révélé à nous, c’est parce qu’il a l’intention de nous réserver un destin particulier. Mais apparemment il n’en est rien.

Les uns se résignent en prétendant que Dieu fait toujours les choses pour notre mieux être. Ils s’accommodent de la situation sans comprendre, et ils acceptent l'arbitraire de leur destin. Les autres élaborent des théories qui innocentent Dieu, mais le rendent impuissant à assumer notre destin. En fait tous pensent que notre vraie relation à Dieu passe par la manière dont il joue un rôle dans le problème de la mort. Il y a selon nous des morts normales qui arrivent au terme d’une longue vie et il y a des morts injustes contre lesquelles nous accusons Dieu de ne rien faire et sur lesquelles Dieu joue sa crédibilité : ce sont les morts accidentelles ou les morts violentes qui sont considérées comme d’autant plus injustes qu’elles s’exercent sur des enfants. Tout se passe comme si notre seule relation à Dieu était réglée par la mort. Et, c'est là que nous avons tout faux.

Cette longue méditation de Jésus sur le sort des moutons nous dit le contraire. Elle insiste sur le fait qu’il n’y a pas d’échappatoire à la mort. C’est alors qu’intervient un mystérieux berger qui revendique des droits de vie sur les moutons. Il s'oppose alors aux bergers salariés qui ont habituellement la charge des moutons. Ces bergers salariés n’ont aucune conscience professionnelle à l’opposé du mystérieux berger qui se laisse tuer plutôt que de laisser les brebis se faire tuer par les voleurs ou les loups. Il paye de sa vie en s’opposant à la fatalité d’une mort programmée. Il se conduit comme si la mort ne faisait pas partie de l’ordre normal des choses, comme si les moutons ne devaient pas finir mangé. On ne comprend pas non plus pourquoi la mort du bon berger devrait avoir pour conséquence la survie du troupeau.

C’est alors que se produit comme un hiatus dans le texte. Il se passe comme un glissement, on oublie subitement les moutons et les bergers et on passe sans transition à la relation de Jésus avec Dieu et avec nous-mêmes. Dieu est alors présenté comme un Père. Ce Père nous permet de comprendre que le bon berger et lui sont en étroite relation. C’est à cause de l’amour qui les unit que la vie des moutons semble préservée. Dieu le Père intervient comme celui qui a le pouvoir de contrarier le destin et de s’opposer à la mort. Ce pouvoir s’exerce par l’action de Jésus Christ, le bon berger.

Comment ce prodige peut-il alors avoir lieu ? Il y a ici un non-dit, de la part de Jésus. Dans sa manière de comprendre les choses, Dieu n'aurait aucun lien avec la mort. Dieu s'opposerait donc aux lois de la nature selon lesquelles tout ce qui vit est appelé à mourir, car la vie s’entretient des morts successives. Les êtres vivants se nourrissent de la vie des autres avant que leur propre vie serve à alimenter d’autres vies à leur tour, car il en est ainsi des cycles incessants de la nature. Dieu dans ce passage se propose de casser ce cycle et promet un changement chez les individus que nous sommes. Si la mort atteint notre corps qui continue à obéir aux lois de la nature, elle ne détruit pas pour autant notre personne, car Dieu se refuse d'avoir un lien quelconque avec la mort.

Mais tout n’est pas aussi simple, car les Ecritures semblent établir un lien étroit entre le péché, et la mort. « Le salaire du péché, c’est la mort » est-il écrit, ce qui ferait de la mort un instrument aux mains de Dieu pour faire respecter ses lois. Or Nous l’avons dit, la mort ne relève pas des attributs de Dieu. Comment se sortir de ce dilemme ?

Pour s’en sortir, il faut faire une autre approche des choses, c’est celle que Jésus a faite pour nous et qui lui a coûté la vie. Jésus s’est opposé aux idées reçues et les a combattues pour que nous voyions la mort sous un autre jour. Par son enseignement, ses actions et ses miracles Jésus a toujours plaidé la cause de la vie. Selon lui, Dieu avait pour seul souci de préserver la vie à l'humanité. Là encore on n’a pas compris Jésus. Ses propos ont été considérés comme des blasphèmes contre Dieu alors qu’il brossait le portrait d’un Dieu Père infiniment bon, toujours attentif à faire reculer l’échéance de la mort et à proposer une autre alternative à la vie quand la mort mettait un terme à l’existence humaine.

Son attitude semblait si choquante qu’on a provoqué sa propre mort pour le faire taire ! Mais c'est la vie qui l’a emporté sur la mort. Tué par la main des hommes il a conservé la vie par l’action de Dieu. Les Evangiles en sont témoins, ils promettent à quiconque reconnaît que Dieu est le maître de la vie une vie semblable à celle de Jésus qui bien que mort persiste à vivre, car tout ce qui est en Dieu ne peut mourir.

Comme on ne peut s’opposer à l’évidence et comme on ne peut s’opposer à Dieu, force nous est donnée de construire désormais notre vie sur cette promesse selon laquelle la vie repose en Dieu et que tous ceux qui vivent aujourd’hui pourront voir leur propre vie se prolonger dans une nouvelle réalité, à l’image de celle que l’Ecriture a retenue de Jésus après sa mort.

Nous devrions nous arrêter là, mais ce serait oublier que les hommes vivent sans doute les choses d’une autre manière. Comme toujours ils essayent de contrôler les mystères de Dieu et par voie de conséquence ils essayent de le limiter en le mettant en contradiction avec lui-même ! Beaucoup acceptent, bien évidemment cette nouveauté de vie pour eux-mêmes mais ils la contestent pour certains autres. Qui a droit à la vie se demandent-ils ? Es- ce que les pécheurs non repentis ou mal repentis et ceux qui nient l’existence de Dieu, et les incroyants, les athées et les incrédules auront part à la vie ?

« J’ai d’autres brebis qui n’appartiennent pas à cette bergerie… » dit Jésus, comme pour dire : « mêlez-vous de ce qui vous regarde en n’empiétez pas sur le domaine de Dieu. Dieu ne peut donner que la vie, pourquoi certains veulent-ils limiter son action en cherchant à écarter de la vie ceux qui ne correspondent pas à leurs propres critères. Il n’y a pas de réalité sur Dieu dans la mort, toute réalité le concernant est forcément immergée dans la vie, car il promet à tout son troupeau la vie en abondance et lui seul sait qui en fait partie, à moins que le nombre de ses brebis soit infini ? Lui seul connaît la réponse à cette énigme.


lundi 6 avril 2009

Qui est responsable du désordre dans le monde? Luc 24/35-48 pour dimanche 26 avril 2009

Luc 24/35-48

Jésus apparaît à ses disciples


36Comme ils disaient cela, lui-même se présenta au milieu d'eux et leur dit : Que la paix soit avec vous ! 37Saisis de frayeur et de crainte, ils pensaient voir un esprit. 38Mais il leur dit : Pourquoi êtes-vous troublés ? Pourquoi des doutes vous viennent-ils ? 39Regardez mes mains et mes pieds, c'est bien moi ; palpez-moi et regardez ; un esprit n'a ni chair ni os, comme vous voyez que j'en ai. 40Et en disant cela, il leur montra ses mains et ses pieds. 41Comme, dans leur joie, ils ne croyaient pas encore et qu'ils s'étonnaient, il leur dit : Avez-vous ici quelque chose à manger ? 42Ils lui présentèrent un morceau de poisson grillé ( et un rayon de miel ). 43Il le prit et le mangea devant eux.



44Puis il leur dit : C'est là ce que je vous disais lorsque j'étais encore avec vous ; il fallait que s'accomplisse tout ce qui est écrit à mon sujet dans la loi de Moïse, dans les Prophètes et dans les Psaumes. 45Alors il leur ouvrit l'intelligence pour comprendre les Ecritures. 46Et il leur dit : Ainsi il est écrit que le Christ souffrirait, qu'il se relèverait d'entre les morts le troisième jour 47et que le changement radical, pour le pardon des péchés, serait proclamé en son nom à toutes les nations, à commencer par Jérusalem. 48Vous en êtes témoins. 49Moi, j'envoie sur vous ce que mon Père a promis ; vous, restez dans la ville, jusqu'à ce que vous soyez revêtus de la puissance d'en haut.

Qui est responsable du désordre dans le monde ? Est-ce l’homme qui à l’origine des temps se serait opposé à Dieu ou est-ce Dieu lui-même qui aurait mal géré sa propre maison et aurait laissé les anges se révolter contre son autocratie ? Ou encore, est- ce que le monde n’obéit à aucune loi, et que Dieu, venu d’ailleurs, essayerait tant bien que mal d’y pénétrer pour l’amener à un peu plus de sagesse ? Les théories s’affrontent et une fois encore on nous joue la querelle des anciens et des modernes. Chacun, ballotté entre différents courants de pensée, ne sait pas toujours auquel se rallier. Si même pour des raisons de commodité, on en arrivait à nier la réalité de Dieu, cela ne changerait rien au problème, car, à n’en pas douter, le monde continuerait à dysfonctionner.

On explique cette incompréhension des choses qui dure depuis toujours en, imaginant un conflit latent entre Dieu et l’humanité. Pour ce qui le concerne Dieu, selon la théologie chrétienne, y a mis un terme à Pâques. Mais malgré tout, beaucoup d’humains ont encore du mal à comprendre en quoi l’événement de Pâques apporte une solution.


Mieux, on en a rajouté ! Notre esprit inquisiteur nous entraîne à nous poser des questions qui ne font que rendre les choses plus compliquées : Pourquoi a-t-il fallu que Jésus meure, se demande-t-on? Dieu n’aurait-il pas pu faire autrement ? Si Dieu n’est pas intervenu pour que ça ne tourne pas à la catastrophe c’est qu il ne l’a pas voulu disent les uns ? C’est qu’il n’a pas pu suggèrent les autres. Il ne serait donc pas aussi puissant qu’on le dit en rajoutent d’autres encore! Ainsi s’égrainent les questions comme la litanie d’un chapelet sans fin qui nous fatigue ou nous agace tout en confirmant l'hypothèse d'un conflit permanent avec Dieu!



Pourtant si nous nous donnons la peine de chercher, nous devrions trouver la réponse dans les Ecritures. Le texte de ce jour devrait nous aider à trouver une réponse. Il nous raconte une apparition inhabituelle du ressuscité , encore plus difficile à croire que les autres. Que Jésus apparaisse à l’improviste, soit ! Qu’il montre ses plaies soit ! Mais qu’il mange, et que ce soit du poisson, cela dépasse l’entendement ! S’il avait mangé du pain, on aurait pu penser que l’évangéliste qui rapporte cet épisode faisait allusion au dernier repas, à la sainte Cène. Dans ce cas nous aurions été invités à spiritualiser l’événement si bien que ce récit aurait fait partie à la fois du domaine du réel et du domaine du spirituel, comme on le trouve dans les autres récits d’apparition. Mais manger du poisson, voilà qui nous déroute !

Puisqu’il est dans notre nature humaine de douter et de poser des questions, continuons l’exercice. L’apparition qui nous est rapportée pose un vrai problème, étant donné qu’elle se déroule à Jérusalem et que la ville est beaucoup trop loin du lac pour qu’on puisse y consommer du poisson. Si encore ce poisson était séché, on aurait pu comprendre qu’on l’ait en stock, mais il était grillé, comme il est dit ici, c’est dire qu’il était encore frais quelques heures au paravent. Impossible ! Alors, serait-ce un poisson spirituel ? Non bien sûr !



Il semblerait plutôt que cette mention du poisson a été faite ici pour aider l’auteur, l’évangéliste Luc, à répondre à une question qui est elle-même posée par le texte : Etait-ce un fantôme ? Non il n’était pas un fantôme puisqu’il mange la même nourriture que nous. C’est cela que suggère le texte. Mais Luc qui raconte cela ne connaît pas la Judée, ni la Galilée. C’est un grec qui n’est jamais venu en Palestine. Il fait alors état d’un aliment qu’il croyait être un aliment de base dans toute la Palestine : le poissons, c’est raté. Pour faire plus vraie encore, certains manuscrits rajoutent qu’il a mangé aussi un rayon de miel ! Avez-vous déjà mangé du poisson avec du miel ? Nous comprenons aisément que ce n’est pas ce détail qui est important. Ce détail a été rajouté pour faire plus vrai mais n'a pas forcément de fondement historique. Ce qui est important, c’est que le ressuscité soit bien vivant pour ceux qui sont présents, même s’ils ne savent pas ce qui caractérise sa nouvelle vie.



La présence de Jésus vivant au milieu des hommes signifie que Dieu n'a plus rien à voir avec les forces du mal. Le conflit avec Dieu devrait donc être terminé. Pourtant il n'en est rien car la mort de Jésus ne semble pas vraiment résoudre le problème, au contraire, elle le complique. Certains s’en servent même pour rallumer le conflit. Alors comment y voir plus clair ?



Jésus ici renvoie aux Ecritures, il parle de sa propre souffrance, de la nécessité de la conversion et du pardon, tout cela dans la même phrase. C’est la souffrance qu’il mentionne en premier. La souffrance est en fait le thème majeur des Ecritures. Dieu depuis toujours se propose d’aider les hommes à se libérer des souffrances qui les accablent. L’événement le plus connu, rapporté par les Ecritures, est l’histoire de la sortie d’Egypte qui est un thème récurrent dans la littérature prophétique. A la suite de ce récit, il nous est aisé de constater que la plupart des humains sont accablés de maux de toutes sortes, la soif, la faim et la maladie qui mène à la mort, mais aussi l’oppression des faibles par les puissants. Pour confirmer que le premier souci de Dieu est bien de les en libérer, les Evangiles s’attachent à montrer que c’est également dans ces deux domaines : la souffrance causée par le destin et la souffrance causée par les autres hommes que Jésus a concentré ses efforts. Ecoutez-le dans les béatitudes: "Heureux ceux qui pleurent, ils seront consoléés...Heureux ceux qui ont faim et soif de justice..."



Pourtant la plupart du temps les hommes l’entendent d’une autre oreille. Quand les difficultés surviennent et que la maladie les accable ils se culpabilisent et se demandent en quoi ils sont responsables de leur situation : « qu ‘ai-je pu faire pour que cela m’arrive ! Je n’ai pourtant pas mérité cela ! »



Pire, ils ont considéré pendant longtemps que leurs malheurs venaient de Dieu. Ils ont été jusqu’à penser qu’il les leur envoyait en représailles de leurs fautes connues ou pas. C’est d’ailleurs à cause de ce sentiment de culpabilité que les religions se sont organisées. En raisons d’une tradition solidement établie, Dieu voudrait que les hommes ressemblent tous au modèle qu'il aurait préétabli à l'avance et se soumettent sans discuter à sa divine volonté. Ils ont fait de Dieu, et c’est encore le cas pour beaucoup aujourd’hui, un autocrate divin exigeant des hommes qu’ils respectent les rites qu’il aurait établis à l’avance. Tout se passe comme si Dieu ne pouvait lui-même exister que si les hommes se soumettaient à ses règles et qu’ils se conformaient aux rites établis par lui et suivaient à la lettre les lois de sa morale divine.



Jésus une fois pour toutes a inversé l’ordre des choses. Son Evangile a clairement établi que Dieu était dans le même camp que les hommes et menait le même combat qu’eux pour se libérer de toutes les formes d'oppression. Il les accompagne dans toutes lleurs adversités et jamais il ne laissera sa main s’appesantir sur les hommes même s’il se sent personnellement offensé.


Cette idée selon laquelle Dieu se manifesterait sous les traits d’un père compatissant traverse l’Ecriture de part en part, mais elle n’est pas la seule. Il y a aussi dans la Bible des courants contradictoires qui présentent Dieu sous les traits d’un despote autoritaire. Jésus quant à lui a fait un choix très net. Il conteste vigoureusement cette vision des choses, c'est pourquoi il s’est vigoureusement opposé à la représentation d’un Dieu, jaloux de ses lois et de ses traditions telles que les scribes et les prêtres cherchaient à les imposer. En voyant Jésus s’en prendre aux sacrifices, les sadducéens percevaient en lui, celui qui s’attaquait à la tradition qui les faisait vivre. Quand Jésus se permettait d’interpréter la Loi sur laquelle ils fondaient leur autorité, les pharisiens, à leur tour, voyaient en lui un ennemi.

Dans ce contexte, la mort de Jésus était assurée. Après sa mort, ceux qui avaient cru en lui se rallièrent à son interprétation des Ecritures, ils se convertirent à l’idée que Dieu se battait contre tout ce qui opprimait les hommes et faisaient obstacle à la vie.

Ainsi, la résurrection de Jésus ne prend vraiment sa valeur pour chacun de nous qu’à partir du moment où il accepte le portrait de Dieu tel que le présentait Jésus : un Père bienveillant qui met tout en œuvre pour que les hommes ne souffrent plus et pour que la justice soit la règle de comportement pour tous les humains. Le pardon de Dieu deviendrait alors la règle de la foi et enjoindrait chacun à rejoindre Jésus pour lutter contre le mal sous toutes ses formes et promouvoir la vie.


La foi en la résurrection donne aujourd’hui, et plus que jamais, à ceux qui croient, la joie de participer dès maintenant à la construction d’un monde qui fait de l’espérance la règle de la vie et qui fait de l’audace le moteur de tout ce que les humains entreprennent pour que les choses aillent mieux. C’est cette attitude qui doit se généraliser dans les églises. Elles doivent chaque jour redécouvrir que leur mission leur est toute tracée par celui qui, ressuscité des morts, les conduit sur les chemins du monde pour maintenir dans une espérance de vie toutes celles et tous ceux qui sont menacés.