lundi 28 septembre 2009

A qui la première place ? Marc 10:35-45 dimanche 18 octobre 2009






Marc 10/35-45


35 Les deux fils de Zébédée, Jacques et Jean, viennent lui dire : Maître, nous voudrions que tu fasses pour nous ce que nous te demanderons. 36Il leur dit : Que voulez-vous que je fasse pour vous ? 37— Donne-nous, lui dirent-ils, de nous asseoir l'un à ta droite et l'autre à ta gauche dans ta gloire. 38Jésus leur dit : Vous ne savez pas ce que vous demandez. Pouvez-vous boire la coupe que, moi, je bois, ou recevoir le baptême que, moi, je reçois ? 39Ils lui dirent : Nous le pouvons. Jésus leur répondit : La coupe que, moi, je bois, vous la boirez, et vous recevrez le baptême que je reçois ; 40mais pour ce qui est de s'asseoir à ma droite ou à ma gauche, ce n'est pas à moi de le donner ; les places sont à ceux pour qui elles ont été préparées.





41Les dix autres, qui avaient entendu, commencèrent à s'indigner contre Jacques et Jean. 42Jésus les appela et leur dit : Vous savez que ceux qui paraissent gouverner les nations dominent sur elles en seigneurs, et que les grands leur font sentir leur autorité. 43Il n'en est pas de même parmi vous. Au contraire, quiconque veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur ; 44et quiconque veut être le premier parmi vous sera l'esclave de tous. 45Car le Fils de l'homme n'est pas venu pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour une multitude.




Marc 10 /35-45

Vous allez sans doute partager avec moi l’indignation des dix quand ils voient deux d’entre eux briguer les postes pour lesquels chacun postule sans doute secrètement. Nous sommes d’autant plus choqués que les deux apôtres concernés sont bien connus, en particulier le second, Jean. Nous ne pouvons pas nous empêcher de faire l’amalgame de toutes les informations que nous avons pèle mêle rassemblées sur eux au cours de nos nombreuses lectures de l’Evangile. Nous savons qu’ils font partie des favoris de Jésus, et même que Jean est appelé le disciple bien aimé dans l’évangile qui porte son nom. Nous avons nettement l’impression qu’ils essayent de profiter de cette situation pour prendre une longueur d’avance sur les autres.

Tout ici nous met mal à l’aise car nous partageons l’indignation des dix autres dans notre for intérieur, mais en même temps nous nous sentons aussi les complices de nos deux amis. Car nous avons, nous aussi conscience que notre rang de membre de l’Eglise nous met dans une situation privilégiée par rapport aux non-pratiquants et surtout par rapport aux païens. Et nous avons tendance à nous placer en bonne place dans la cohorte des élus.

La réponse de Jésus nous gène parce qu’il ne les remet pas à leur place comme nous nous y attendons. Auront-ils part avec lui à la gloire du Christ? Sans doute. Y auront-ils la première place ? On ne sait pas, en tout cas, Jésus ne dit pas non, mais il élève le débat à un développement théologique qui ne nous satisfait pas. Il y aura certes, renversement des valeurs. La norme pour être au premier rang sera la qualité du service auprès des autres. Mais est-ce aussi simple? Les valeurs seraient-elles tout simplement renversées ? Selon cette logique les pauvres deviendraient riches et les riches deviendraient pauvres? Ou bien y aurait-il d’autres critères, qui seraient les critères de Dieu et dont les règles nous échappent.

En fait, notre malaise en face d’un tel passage procède du fait que nous ne sommes pas capables de parler du Royaume de Dieu sans faire abstraction du monde où nous sommes aujourd’hui. Nous projetons dans un au-delà imaginaire des notions bien réelles que nous bricolons pour les faire coïncider avec le donné biblique. Ce faisant, nous inventons un au-delà fantaisiste calqué sur le temps présent dans lequel les situations conflictuelles auraient disparues et les rivalités n’existeraient plus. Au fond de nous-mêmes, nous découvrons que ce monde aseptisé, sans situation de rivalité ne serait pas très drôle à vivre.

C’est sans doute ce qui se dégage de nos concepts théologiques et que les gens du dehors et particulièrement les jeunes générations n’ont pas envie de partager. Un tel monde ne serait pas stimulant. On a du mal à envisager que la situation d’esclave ici proposée puisse être enviable dans l’ au-delà alors qu’elle est repérée ici bas comme relevant de la suprême injustice. Nous nous surprenons à organiser le monde du futur avec des règles de morale que nous ne sommes pas capables de respecter ici-bas mais que Dieu sans doute arrivera à nous imposer dans un monde où il sera le maître, sous peine de rejet dans les ténèbres de dehors où il y a des pleurs et des grincements de dents. Si c’est cette image est le reflet de notre espérance, nous comprenons aisément qu’elle n’est pas racoleuse. Il faut sans doute considérer que ce n’est pas cette image là que Jésus cherchait à donner.

Même s’ils nous choquent par leurs revendications, Jacques et Jean nous donnent cependant une leçon. Même si leur foi est mal formulée, ils nous montrent bien qu’ils ont compris qu’il y avait un lien étroit entre la vie que nous menons ici bas et la vie telle que nous la mènerons dans l’autre monde. Ils ont maladroitement compris que cette vie du futur sera assez attractive pour que l’on commence à la préparer dès maintenant. Ils ne se font pas d’illusions, ils savent qu’il leur faudra mourir, ils savent aussi que le maître mourra. Jésus dans le chapitre précédent leur a parlé de l’imminence de sa propre mort et ici même il y fait une allusion voilée.

Quand les disciples parlent de participer à la gloire de Jésus, ils savent bien qu’il leur faudra affronter l’épreuve de la mort et ils ne doutent pas qu’ils en sortiront vainqueurs. Pour eux cependant leur vision du monde futur leur donnait l’image d’un monde qui ressemblait au nôtre. Ce n’était pas de leur faute s’ils voyaient les choses ainsi, les clichés théologiques sur la question, qui avaient cours de leur temps, leur imposaient cette manière de voir. De nombreux textes nous en parlent. On sait que le monde de Dieu était décrit comme un monde en plusieurs strates de dignité qui s’élevaient de la terre jusqu’aux cieux. Il y avait jusqu’à 7 niveaux du ciel selon Hénoch et 3 selon Paul qui, rappelez-vous, prétend avoir été ravi au 3 eme ciel. Etait-ce dans son corps, est-ce hors de son corps?

Dans cette structure hautement hiérarchisée, ils ne doutent pas que leur place est réservée dans l’étage le plus élevé. Mais Jésus va contre leurs principes. Il leur dit que ça ne marche pas comme cela, et que l’au-delà n’est pas conforme au fruit de leur imagination ou de leur savoir, il est tout autre. Il leur montre qu’il y a certes des correspondances entre la réalité future et la réalité présente, mais elle n’est pas liée à un renversement des valeurs comme ils le pensent, elle est liée à une autre manière d’être ou plutôt à une autre manière de vivre le dépassement de la mort. Ce n’est pas seulement un dépassement dans l’espace, c’est bien autre chose. En effet, si la mort est dépassée, elle reste cependant le pivot incontournable à partir duquel les choses présentes ne sont plus comme avant. Elles ne sont pas non plus le contraire des choses passées. S’il y a un renversement des valeurs, il y a surtout un bouleversement général dans la manière d’être présent au monde qui subsiste malgré tout.

Jésus leur parle alors du baptême qu’il va vivre et de la coupe qu’il va boire et qui deviendront les liens par lesquels ses amis continueront à être en relation avec lui. Ce baptême et cette coupe nous amènent à comprendre que notre avenir n’est pas une projection de notre vie actuelle dans un idéal céleste moralement amélioré, mais que c’est tout à fait le contraire qui se produit. Pour que notre avenir puisse avoir lieu il faut qu’il y ait transfert du monde céleste dans notre présent pour le transformer.. C’est le futur qui vient à la rencontre de notre présent, c’est la résurrection qui vient à la rencontre de notre mort pour nous faire anticiper aujourd’hui ce que nous vivrons demain. Ce sont des images difficiles à comprendre, elles expriment que le monde futur est en train de se réaliser dans le présent et que le présent se construit en se remplissant du futur.

La Sainte Cène, le baptême sont ces réalités visibles et actuelles qui appartiennent cependant au domaine du futur et qui transforment notre présent, si bien que c’est à cause de cette venue de Dieu dans notre réalité terrestre d’aujourd’hui que nous devons devenir ici bas les serviteurs les uns des autres afin d’être dès
maintenant dans la gloire du Fils. Les sphères célestes de la théologie conventionnelle s’effondrent, Dieu n’habite plus au 7 eme ciel il est présent dès maintenant dans notre existence et la gloire du Fils se manifeste dans les gestes d’amour et d’humilité que cette situation nous amène à faire.

Mais la gloire du Fils, c’est quoi?

C’est une immense espérance dont nous ne savons dire qu’une chose, c’est qu’elle est l’accomplissement de tout notre être. En opposition à ces deux hommes, Jacques et Jean qui sont les intimes de Jésus et qui demandent à être assis à sa droite et à sa gauche dans un monde mythique, s’impose à moi l’image bien réelle de deux hommes qui partagèrent la mort de Jésus, l’un à sa gauche et l’autre à sa droite et bien qu’ils fussent des bandits ils ont bu la même coupe amère du supplice et ils ont été baptisés dans la même mort. Ce sont donc eux qui selon cet évangile devraient occuper les places revendiquées par les deux apôtres.

Ce constat nous donne bien évidemment une autre conception de la justice selon Dieu. La justice c’est que tous les hommes soient sauvés. C’est pourquoi en extrapolant comme je l’ai fait, j’entends Jésus me dire à moi aussi, « tu ne sais pas de quoi tu parles. » En effet je parle de la gloire de Jésus, mais elle est insaisissable et indéfinissable, la seule chose que nous savons c’est que la gloire divine vient vers nous dans ce monde et qu’elle nous pousse à agir. C’est dans ce sens seul, qu’il faut voir notre relation à l’au-delà, et quant à ce qui se passera quand nous aurons franchi l’étape de la mort, il sera temps à ce moment de constater que cette même gloire qui nous habitait du temps où nous vivions nous habite encore maintenant que nous sommes morts.



mardi 22 septembre 2009

Le jeune homme riche: Marc 10/17 - 24 dimanche 11 octobre


Marc 10




17 Comme il se mettait en chemin, un homme accourut et se mit à genoux devant lui pour lui demander : Bon maître, que dois-je faire pour hériter la vie éternelle ? 18 Jésus lui dit : Pourquoi me dis-tu bon ? Personne n'est bon, sinon Dieu seul.

19 Tu connais les commandements : Ne commets pas de meurtre ; ne commets pas d'adultère ; ne commets pas de vol ; ne fais pas de faux témoignage ; ne fais de tort à personne ; honore ton père et ta mère. 20 Il lui répondit : Maître, j'ai observé tout cela depuis mon plus jeune âge.

21 Jésus le regarda et l'aima ; il lui dit : Il te manque une seule chose : va, vends tout ce que tu as, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel. Puis viens et suis-moi. 22 Mais lui s'assombrit à cette parole et s'en alla tout triste, car il avait beaucoup de biens.



23 Jésus, regardant autour de lui, dit à ses disciples : Qu'il est difficile à ceux qui ont des biens d'entrer dans le royaume de Dieu !






Qu’on le veuille ou non, nous sommes tous des chercheurs de Dieu. Que l’on se positionne clairement comme croyant ou que l’on se classe parmi les esprits forts qui prétendent ne pas avoir besoin de soutien spirituel, on se pose toujours à un moment ou à un autre de notre vie les questions fondamentales qui nous poussent à mettre en cause nos propres certitudes. La question de l’influence d’un Dieu sur nos vies a toujours effleuré un moment ou un autre notre réflexion.

Ne soyons donc pas surpris si le récit de l’Evangile nous relate l’histoire d’un homme qui bien qu’apparemment sûr de lui, s’adresse à Jésus en exprimant ses doutes : « Que dois-je faire pour hériter de la vie éternelle ? » Voilà la bonne question qui est celle de chacun de nous. Dans le bref dialogue qu’il a avec Jésus, nous découvrons qu’il est un croyant pratiquant. Il fait apparemment partie de ces fidèles dont les certitudes théologiques sont tellement ancrées en eux, qu’ils ne sauraient émettre aucune réserve sur leur foi ! Mais détrompez-vous, l’ombre du doute plane dans son esprit.

Quand nos certitudes sont ébranlées, il est bon d’en parler. Jésus s’offre à lui comme un interlocuteur de choix. Pourtant, il ne court pas un grand risque dans sa démarche vis à vis de Jésus. Jésus est perçu pour le moment comme une référence spirituelle fiable, c’est pourquoi il l’appelle Maître (rabbi). Il ne croit pas que Jésus le désavouera, au contraire il s’attend à être montré en exemple.

En fait, il veut bien exprimer ses doutes, mais il veut surtout être conforté dans ses certitudes. Il vient vers lui, non pas pour que sa foi soit mise en cause mais pour être reconnu dans sa pratique. Il ne doute pas d’être conforté dans ses convictions profondes qui nous apparaissent cependant comme déjà chancelantes, sans quoi il n’aurait pas interrogé Jésus. Mais, C’était mal connaître le maître qui met immédiatement le doigt là où ça fait mal.

Beaucoup de gens, dans notre société sécularisée pourraient se reconnaître dans ce jeune homme. Même si leur situation spirituelle s’oppose totalement à la sienne. Il est habituel aujourd’hui de se dire sans religion et de ne se réclamer d’ aucune foi. Mais ceux qui se réfugient dans ce genre de conviction et qui sont les plus nombreux, ne sont pas aussi solides que ce qu’ils veulent bien dire dans leur profession d’athéisme. Ils ne ressemblent plus du tout à ces athées militants du début du siècle dernier qui s’efforçaient de convaincre leurs concitoyens de la grandeur d’une existence sans religion. Ceux-là pensaient que l’homme moderne pour pouvoir assumer sa destinée devait rejeter toute aliénation spirituelle. Ils regardaient la mort en face et s’approchaient du néant sans vertige et sans crainte apparente. Il y a longtemps qu’ils ont fait taire toute arrogance et qu’ils ont cessé de vouloir construire un monde libéré de la religion, qu’ils qualifiaient d’opium des peuples.

L’homme ne croit plus en la vertu de l’homme pour construire une société plus juste, plus vertueuse et promise à une paix universelle. Il ne croit plus non plus, d’ailleurs en la vertu des religions.

Pourtant, on a fait d’autres prophéties sur ce vingt et unième siècle débutant. On a promis à l’humanité d’aujourd’hui qu’elle s’épanouirait dans un monde spirituel sous peine de disparition. Nos contemporains, n’ayant plus confiance en l’homme espèrent en une puissance qui vient d’ailleurs et qui aurait la complaisance d’endosser leurs échecs, tout en maintenant assez d’espérance en eux pour qu’ils soient sûrs de se survivre à eux-mêmes. Cette certitude apparente est cependant bien fragile, mais tous en ont besoin pour vivre et redoutent de la mettre en cause en affichant un athéisme triomphant. C’est en ce sens que beaucoup d’hommes du vingt et unième siècle ressemblent au jeune homme du récit. Ils vivent séparés de Dieu, mais ne veulent pas admettre que cette situation ne tient pas. Ils ont besoin de conversion, mais ne veulent pas qu’on les y appelle.

Si nos contemporains s’écartent de nos lieux d’église, ce n’est pas tellement par manque d’intérêt, mais par peur d’être amenés à réfléchir sur eux-mêmes, peur de se remettre en cause, peur de voir Dieu intervenir dans leur vie, peur de voir bousculé l’équilibre fragile dans lequel ils ont enfermé leur vie spirituelle. La peur rode autour d’eux et ils prennent leurs distances..



Si la majorité semble suivre le courant que je viens de dire, il existe aussi une minorité de croyants qui refuse également de se mettre en cause. Ils veulent croire que la vérité est en eux et ils cherchent à l’imposer aux autres. Nous retrouvons là le monde des intégristes qui se sont fabriqué une image de Dieu à leurs convenances sur les dépouilles flageolantes des religions révélées qui quant à elles ne leur accordent aucun crédit.

Face à tous ces gens qui ne veulent pas se remettre en cause, j’en reviens à ce jeune homme riche qui fait une tentative louable auprès de Jésus. On a pris l’habitude de l’enfermer dans ses richesses et de le juger sur son étroitesse d’esprit. Pourtant c’est le bien fondé de sa foi qu’il ose mettre en question devant Jésus. Le doute l’a effleuré. Et quand le doute nous effleure, il ne nous lâche plus. Jésus le déçoit parce qu’il ne reçoit pas auprès de lui l’accueil qu’il espère. Et le lecteur que nous sommes, ne comprend pas ce sur quoi Jésus veut attirer son attention, c’est pourquoi nous passons à côté du problème et nous en profitons pour en tirer leçon en glosant sur le mauvais usage des richesses.

Je ne suis pas sûr que ce soit le mauvais usage des richesses qui est la leçon que l’on doit tirer de ce passage. Pour rendre justice à la pédagogie de Jésus, je vais mettre en accusation l’Evangéliste Matthieu et l’Evangéliste Luc qui ont rapporté le même événement dans leur Evangile respectif, avec quelques variantes, il va s’en dire. Mais c’est sans importance.

Nous savons que le plus ancien évangile est celui de Marc, celui que nous avons lu et que les deux autres l’ont utilisé comme référence de base pour écrire le leur. Ils ont généralement amplifié les récits avec des détails que Marc ne donnait pas sauf dans ce récit. Ils ont retiré une petite phrase qui me semble être la clé de l’énigme et je les interroge pour savoir pourquoi ils l’ont enlevée. Naturellement, je n’aurai pas la réponse. Avant de nous livrer le long discours de Jésus sur les richesses, le récit de Marc glisse une petite phrase qui est la suivante ; « Jésus ayant fixé son regard sur lui l’aima »

C’est dans cette expression que se trouve, selon moi, la bonne réponse. A celui qui cherche Dieu, Jésus exprime avant toute chose l’amour de Dieu. Par cette petite phrase l’Evangile exprime la chose la plus inattendue de la part de Dieu :
- à tous ceux qui sont accablés par leurs péchés ou par leur indifférence.
- à tous ceux qui se sont éloignés de Dieu,
- à tous ceux qui se sentent menacés par le feu de l’enfer,
- à ceux qui ne réussissent pas à se convertir,
- à ceux qui sont isolés par la maladie, ou le doute ou la solitude,
- à ceux qui sont enfermés par leurs richesses dans leur égoïsme et dans leur misère,

Jésus affirme qu’ils sont aimés par Dieu. L’amour de Dieu est premier en toute chose, si bien que rien de grave ne peut nous arriver de sa part. Si l’amour de Dieu est premier, Dieu ne peut exercer sur nous aucune sévérité qui pourrait nous nuire ou nous mettre en cause.

Celui qui se sait ainsi aimé ne peut répondre à l’amour que par l’amour. Si le jeune homme riche perçoit cet amour, il pourra entendre avec intérêt ce que Jésus a à dire sur les richesses, et par amour il fera ce qu’il croit bon de faire. Et même s’il ne peut se résoudre à le faire, il saura qu’il est aimé, et cela change complètement les conclusions que l’on pourrait apporter à l’histoire.



La seule chose que cet homme pieux ne savait pas, c’est que l’amour de Dieu est toujours premier. Dieu l’aime malgré le mauvais usage qu’il fait de son argent. Dieu aime d’abord, et le reste n’est que commentaire !

mardi 15 septembre 2009

Le divorce ; Marc 10-1-12 dimanche 4 octobre 2009








Marc 10: 1-12




L'enseignement de Jésus sur la répudiation
1Parti de là, il vient dans le territoire de la Judée et de l'autre côté du Jourdain. Les foules se rassemblent encore auprès de lui ; selon sa coutume, il se remit à les instruire.



2Des pharisiens vinrent lui demander, pour le mettre à l'épreuve, s'il est permis à un mari de répudier sa femme. 3Il leur répondit : Que vous a commandé Moïse ? 4— Moïse, dirent-ils, a permis d'écrire une attestation de rupture et de répudier. 5Jésus leur dit : C'est à cause de votre obstination qu'il a écrit pour vous ce commandement. 6Mais au commencement de la création, Dieu les fit homme et femme ; 7c'est pourquoi l'homme quittera son père et sa mère et s'attachera à sa femme, 8et les deux seront une seule chair. Ainsi ils ne sont plus deux, mais une seule chair. 9Que l'homme ne sépare donc pas ce que Dieu a uni !




10Lorsqu'ils furent à la maison, les disciples, à leur tour, se mirent à l'interroger à ce sujet. 11Il leur dit : Celui qui répudie sa femme et en épouse une autre commet l'adultère envers la première, 12et si une femme répudie son mari et en épouse un autre, elle commet l'adultère.




Pour un certain nombre de croyants, le monde semble être régi par des lois immuables. Ces lois édictées par Dieu depuis l’origine des temps se trouvent répertoriées dans la Bible. Depuis toujours, ces mêmes croyants sont persuadés que la transgression de ces lois déclencherait la colère de Dieu et le retour inévitable au cahot primitif. Nos contemporains partagent parfois la même angoisse, pour d’autres raisons. La crainte d’avoir manqué au respect élémentaire des lois de la nature trouble un certain nombre d’entre eux. Plus de morale, dit-on ! On ne sait plus ce qui est bien de ce qui est mal. L’avidité est devenue une règle mortelle incontournable. Les liens qui unissent les familles semblent se distendre au point de se détruire. On ne se marie plus, on divorce quand on veut, et comme on veut et le type de la famille devient celui de la famille recomposée..

Dans le texte de ce matin, Jésus semble désapprouver notre conduite. Dieu a créé l’homme et la femme pour former une seule chair et cela ne semble pas devoir se discuter. Et si parfois les humains divorcent, c’est une concession faite par Dieu à la dureté de leur cœur, mais au commencement il n’en était pas ainsi, ajoute-t-il. Devant la situation des hommes telle qu’elle était, au moment où Moïse recevait la loi de Dieu écrite sur les tables de pierre, les exigences de Dieu ont été assouplies, mais en fait, il est dit selon l’interprétation de Jésus que Dieu ne voulait pas du divorce! C’est ainsi que ce texte repris depuis 2 000 ans par des générations de théologiens ne desserre pas l’étau de la Loi divine. Il est incontestable que Jésus a dit ce qu’il a dit, il n’est pas d’usage de douter du texte biblique, mais ce qu’il nous faut chercher à percevoir, c’est l’intention de Jésus. Pourtant, quand Jésus fait allusion à la loi, ce n’est pas pour la durcir et mais pour l’assouplir. Dans sa tendresse, il montre qu’il la dépasse en pardonnant les pécheurs sans condition et en ouvrant les portes de son Royaume à ceux qui ne le méritent pas.

Jésus dans son propos introduit une notion nouvelle, « si Moïse a permis que vous divorciez c’est à cause de la dureté de votre cœur »! Ainsi quand Moïse a donné la loi, Dieu l’a adaptée à une situation nouvelle. C’est Dieu qui s’est adapté lui-même à une situation nouvelle créée par les hommes. Dieu a réagit en face des comportements humains et a modifié ses critère d’exigence. Dieu a fait fi de sa toute puissance pour maintenir une bonne relation avec les hommes. Ce Dieu qui change d’avis pour rester acceptable à l’homme qui n’évolue pas selon ses souhaits perturbe parfois les croyants mais déroute toujours les incroyants.

Les incroyants et les sceptiques nient l’existence de Dieu en partant de l’argument selon lequel Dieu serait le produit de l’imagination des hommes. Ceux-ci seraient insatisfaits d’eux-mêmes et projetteraient sur le Dieu qu’ils inventent leurs désirs de perfection. Ils justifieraient ainsi l’existence de Dieu en le modelant à la dimension de leurs désirs. C’est ainsi qu’au cours des siècles Dieu a pris divers visages.

Dans ce programme de construction de Dieu à l’image des hommes, il semblerait que les désirs collectifs des peuples aient été régis par les prêtres et les prophètes du moment qui modelèrent le visage de Dieu pour qu’il devienne le reflet des aspirations du monde. C’est ainsi qu’aujourd’hui nous assistons à la naissance d’un Dieu pluraliste, qui se pare des attributs des religions révélées et qui en supprime les contraintes.

Pourtant le Dieu de la Bible semble résister à ces courants. Malgré les efforts des hommes pour faire un Dieu à leur image, l’image de Dieu leur résiste et leur échappe. Dieu ne se laisse pas enfermer dans sa toute puissance comme au temps de Moïse, ni dans sa justice, comme au temps des rois, il échappe à la main mise des juifs de l’exil où il les suivit. Il ne se laisse pas confondre avec les dieux de la pensée grecque. Et quand le temple fut détruit, on ne le trouva pas dans ses ruines. Le Dieu de l’Ecriture est un Dieu qui se cache car il est passionné de l’homme et il s’ingénie à le suivre au nom d’un sentiment qui lui est propre et que faute de mieux on appelle amour.

Ainsi quand Dieu regarde l’homme évoluer, il constate qu’il a une faiblesse cardiaque : - l’homme est dur de cœur - Dieu n’envisage pas de corriger l’homme, il ne fait pas de transplantation cardiaque comme sa toute puissance le lui permettrait, c’est lui qui change afin d’être accessible à l’homme tel qu’il est.

Fort de ce qui vient d’être dit, on doit maintenant s’interroger sur ce qui fonde sa spécificité divine. Comment fonde-t-il sa toute puissance ? Cette question en appelle une autre: Pourquoi laisse-t-il le monde livré à l’irresponsabilité humaine ? Nous avons du mal à lui trouver une réponse satisfaisante. Il nous apparaît alors comme un Dieu qui refuse de se manifester par sa toute puissance et qui la délègue à sa créature dont il sait les faiblesses. Est-il irresponsable ou est-il éperdument amoureux?

C’est la deuxième hypothèse bien sûr, que nous retenons car dans l’enseignement de Jésus Christ nous découvrons que Dieu a fait le pari de croire que l’homme saura, malgré toutes ses contradictions découvrir le plan de Dieu et le mettre en oeuvre. Malgré ses errements, il saura discerner, grâce à son génie ou à son intelligence ou à ses échecs répétitifs la volonté de Dieu écrite, non pas sur des tables de pierre, mais diffusée par l’Esprit saint, que Dieu n’arrête pas de souffler sur le cœur des hommes.

Nous ne nous en rendons pas compte mais nous sommes pris comme dans une nébuleuse par le souffle de Dieu, qui enveloppe le monde ainsi que nous-mêmes. Tel un vent de sable qui joue avec les rochers et lentement les façonne, le souffle de Dieu imperceptiblement et patiemment enveloppe le monde dans une nécessité d’amour qui tôt ou tard aura raison de la dureté congénitale du cœur humain.

Le destin du monde est lié à la patience infinie de Dieu. C’est pour cela que je récuse les lectures catastrophiques de l’actualité selon lesquelles le monde évoluerait lentement vers son anéantissement. En fait nous avons peur de l’avenir, car nous ne voyons pas la toute puissance de Dieu s’imposer. Au contraire, Dieu semble absent de ce monde, c’est pourquoi les prophètes de malheurs annoncent son retour en force, pour juger le monde et amener la fin des temps.

Ils se trompent, car Dieu qui travaille au cœur des hommes ne se manifeste pas en puissance et en gloire, au contraire. Ils se révèle dans les œuvres des hommes qui le manifestent. Ne voyez-vous pas dans ce monde qui change et qui évolue les peuples en marche les uns vers les autres, ne les voyez-vous pas se brasser les uns dans les autres mêlant leurs couleurs de peau et leurs traditions et proposant un avenir vivant et coloré à notre occident si terne? Je suis bien conscient du fait que cette lecture de l’actualité est suspecte, mais pourquoi ne pas la vivre comme un reflet de l’évangile plutôt que comme un destin aliénant?

Depuis que Dieu s’est révélé aux hommes, il n’a jamais cessé de se mettre en cause lui-même pour se gagner l’affection et l’amour de la créature humaine. C’est pourquoi nous sommes certains qu’il entend avec sympathie nos questionnements d’aujourd’hui quand nous nous interrogeons sur sa présence dans un monde que l’on dit sans Dieu, car les valeurs où nous le cherchons habituellement sont périmées. On ne le cherche plus dans les inventions du génie humain, car les savants ne sont plus témoins d’un savoir que Dieu pourrait cautionner. On ne le cherche plus dans la sagesse des peuples car l’actualité nous a appris à la craindre plus qu’à l’admirer. On ne le cherche plus dans les grandes manifestations de la planète, aurores boréales, tempêtes et tremblements de terre, car la planète surpeuplée en souffre trop ! Cherche-t-on encore Dieu dans la pompe des Eglises? Nous savons bien que ces fastes attirent les touristes et les superstitieux mais bien peu les croyants. L’époque des « te deum » pour célébrer la grandeur de l’homme avec la complicité de Dieu est périmée. En fait on ne cherche plus du tout Dieu


Cependant on cherche toujours des sentiments et des idées porteuses d’espérance. On cherche l’amour, la générosité, la tendresse. Derrière tous ces sentiments que l’on a évoqués se cachent les attributs à travers lesquels Dieu aime se faire connaître, car Dieu est amour. Celui qui cherche l’amour, la paix et l’espérance n’est pas loin d’avoir trouvé Dieu, et son cœur endurci, n’est-il pas en train d’être refaçonné par son créateur?

Nous nous sommes égarés, bien loin de notre texte, bien loin de la rigide morale qui enferme les humains dans des lois du couple. Jésus n’a certainement pas voulu participer à cet enfermement, mais il s’en est servi pour nous entraîner à redécouvrir quelle relation vraie Dieu voulait entretenir avec les hommes. Vous me reprocherez peut-être de ne pas vraiment avoir répondu à la question sur la Loi? Mais il n’y avait pas de question, car la Loi est toujours dépassée quand on est dans une relation amoureuse avec Dieu. Laissons donc se ramollir la dureté de notre cœur pour nous ouvrir à la tendresse qui nous attend demain, puisque demain est déjà habité par Dieu.

mardi 8 septembre 2009

Les scandales du monde Marc 9:38-52 dimanche 27 septembre 2009




38Jean dit à Jésus : « Maître, nous avons vu un homme qui chassait les esprits mauvais en usant de ton nom, et nous avons voulu l'en empêcher, parce qu'il n'appartient pas à notre groupe. » 39Mais Jésus répondit : « Ne l'en empêchez pas, car personne ne peut accomplir un miracle en mon nom et tout de suite après dire du mal de moi. 40Car celui qui n'est pas contre nous est pour nous. 41Et celui qui vous donnera à boire un verre d'eau parce que vous appartenez au Christ, je vous le déclare, c'est la vérité : il recevra sa récompense. »
Sérieuse mise en garde


42« Celui qui fait tomber dans le péché un de ces petits qui croient en moi, il vaudrait mieux pour lui qu'on lui attache au cou une grosse pierre et qu'on le jette dans la mer. 43Si c'est à cause de ta main que tu tombes dans le péché, coupe-la ; il vaut mieux pour toi entrer dans la vraie vie avec une seule main que de garder les deux mains et d'aller en enfer, dans le feu qui ne s'éteint pas. [ 44Là, “les vers qui rongent les corps ne meurent pas et le feu ne s'éteint jamais” .] 45Si c'est à cause de ton pied que tu tombes dans le péché, coupe-le ; il vaut mieux pour toi entrer dans la vraie vie avec un seul pied que de garder les deux pieds et d'être jeté en enfer. [ 46Là, “les vers qui rongent les corps ne meurent pas et le feu ne s'éteint jamais” .] 47Et si c'est à cause de ton œil que tu tombes dans le péché, arrache-le ; il vaut mieux pour toi entrer dans le Royaume de Dieu avec un seul œil que de garder les deux yeux et d'être jeté en enfer. 48Là, “les vers qui rongent les corps ne meurent pas et le feu ne s'éteint jamais” . 49En effet, chacun sera salé de feu.
50« Le sel est une bonne chose ; mais si le sel perd son goût particulier, comment le lui rendrez-vous ? Ayez du sel en vous-mêmes et vivez en paix les uns avec les autres. »






Il y a beaucoup de choses choquantes dans la société où nous vivons, mais nous nous en accommodons. Nous vivons les scandales que nous offre ce monde sans que cela nous dérange au point de nous entraîner à modifier notre comportement. Nous ne sommes pas tous d’ailleurs sensibles aux mêmes dysfonctionnements de notre société. Pour les uns, ce qu’il y a de plus choquant, c’est la détresse des enfants qui ne mangent pas à leur faim, pour d’autres, c’est la situation intolérable des femmes battues et méprisées, pour d’autres encore ce sont les abus bancaires qui ont été dénoncés ces derniers mois et qui seraient cause de la crise actuelle. Vous serez sans doutes surpris de constater que Jésus ne semble pas faire les mêmes choix que vous.

Pour lui, le plus grand des scandales consiste à offenser un petit dans l’expression de sa foi : « Si quelqu’un scandalise un de ces petits qui croient, il vaudrait mieux lui attacher une meule au coup et le jeter dans la mer ». L'Evangile utilise ici le mot scandale. Ce mot est en général traduit par l 'expression : occasion de chute qui est moins parlante que le mot scandale. Pour Jésus ce type de scandale est inacceptable. A première lecture, nous n’avons pas l’impression d’être en phase avec lui, tant la différence semble grande entre les scandales qui nous choquent le plus et qui ravagent la planète et le scandale qu’il dénonce et qui ne nous semble pas si grave. Même en faisant un effort nous n’arrivons pas à en discerner la portée.

Mais loin de minimiser la position de Jésus, nous allons voir que sa position face aux scandales de ce monde rejoint quand même la nôtre. Elle va même s’imposer à nous comme une évidence. Mais il va falloir d’abord que nous essayons de définir le mot scandale. Pour le petit Larousse ce serait « l’indignation produite par une action coupable. Ce serait aussi la conséquence d’une action immorale révoltante. » Dans la Bible, c’est dans les épîtres de Paul que nous trouverons une explication. Dans l’épître aux Ephésiens, nous trouvons : « nous prêchons Christ crucifié, scandale pour les juifs, folie pour les païens… » Paul reprenant l’image utilisée par Jésus explique qu’il est inconcevable pour la pensée juive que le mystère de Dieu puisse trouver du sens dans la vie et l’œuvre de Jésus. Il est inconcevable pour eux que Jésus puisse d’une manière ou d’une autre participer au salut des hommes. Il serait parfaitement scandaleux pour eux que Jésus puisse révéler la nature profonde de Dieu. Pour Jésus, c’est justement refuser d’admettre cela qui est scandaleux.

Si on renverse les valeurs et que l’on se place du point de vue de Jésus, il serait scandaleux qu’un chrétien dise que Jésus n’est en rien impliqué dans la révélation de Dieu. Jésus confirme donc ici ce qu’il dit par ailleurs dans l’Evangile de Jean : « nul ne vient au Père que par moi ou qui me connaît, connaît le Père ». Dites ainsi, les choses deviennent sans doute plus claires : il est impossible de parler de Dieu en faisant abstraction de Jésus. En d’autres termes la connaissance de Dieu est toute entière contenue dans l’œuvre de Jésus Christ.

Si vous admettez cette vérité, vous comprendrez qu’elle se retourne immédiatement contre vous. Vous allez alors découvrir que vous devez vous ranger au nombre de ceux qui scandalisent les petits. En effet si selon Jésus, Dieu cache son visage derrière celui des petits, et que toutes les fois que l’on fait du bien ou du mal à un petit, c’est à Dieu que nous le faisons, alors il est scandaleux que nous n’agissions pas de telle sorte que Dieu ne trouve pas son compte dans tous nos gestes de la vie sociale, car la présence de Dieu devrait être rendue évidente par les actions que nous faisons à l ‘égard des autres. En fait, ce ne sont pas les actions que commettent les autres qui sont scandaleuses aux yeux de Dieu. mais ce sont les actions que nous nous ne faisons pas qui lui sont inacceptables et qui le scandalisent.

Tout au cours des Evangiles, nous avons pu constater que Jésus provoque souvent ses auditeurs en les poussant dans leurs retranchements pour leur faire comprendre sa pensée. Ici il est provoquant et utilise la caricature. Il préconise une amputation massive de nos membres si ceux-ci sont cause de scandale pour Dieu. Selon lui nous devrions retrancher tous les membres de notre corps qui feraient obstacle à la volonté de Dieu dans nos comportements.

Ce sera le bras, la main ou l’œil dont il nous faudra se séparer d’une manière dramatique et douloureuse pour être fidèles aux comportements que réclame la foi, telle que Jésus nous l’a enseignée. Pour prolonger sa pensée dans le sens de la caricature, on constatera qu’ à force d’amputer les membres fautifs, on finira par être totalement inactifs faute de membre utilisable. Autrement dit Jésus semble préconiser une forme de suicide pour nous en sortir.

Avant d’en arriver là, chacun est bien conscient du fait que pour continuer à vivre dans ce monde, il lui faudra faire quelques concessions tout en constatant qu’il est impossible cependant de se couler dans le moule de cette société. En effet elle ne donne pas aux hommes l’image que Dieu attend de nous.

Les lois qui gouvernent ce monde sont liées à la recherche du profit personnel. Rares sont ceux qui voient dans leur voisin un frère à aimer. Il serait plus proche de la vérité de dire que l’on voit plutôt dans le voisin un rival qu’il faut supplanter, voire même éliminer. C’est en tout cas, le cas dans le monde du travail. Même si les choses ne doivent pas être présentées aussi crûment que je viens de le faire, le spectacle que donne notre monde est celui d’un vaste champ de compétition où les plus chanceux, et pas forcément les plus méritants ou les plus intelligents tirent leur épingle du jeu en dominant la mêlée et en s’appropriant les meilleures places.

Une telle société n’est pas à l’image du Royaume de Dieu que Jésus nous invite à construire. Elle représente même un monde où Dieu est absent car les instructions données par Jésus y sont trop peu respectées. Les seuls signes de la présence éventuelle de Dieu sont ceux que les hommes peuvent donner quand ils se mettent à contre courant des valeurs de ce monde. On les trouve dans les ONG et dans les sociétés de charité auxquelles beaucoup de nous participent, mais qui opposent un trop faible contre poids à la compétition acharnée que se livrent ceux qui dominent ce monde au détriment des plus petits.

Comment s’en sortir alors ?
Quitter ce monde ne serait pas la bonne solution, car ce serait une amputation mortelle à laquelle nul ne pourrait survivre. Jadis les fameux anachorètes du désert, qui ont mis cette injonction en pratique et qui se sont trouvés dépourvus de tout, dans un désert hostile, n’ont du leur survie qu’à la générosité de quelques âmes sensibles qui leur apportaient des subsides et qui continuaient cependant à vivre dans la société injuste et hostile à Dieu que nous avons décrite.

Les caricatures de notre société que fait Jésus et qui nous mettent radicalement en cause ont pour but d’interpeller notre intelligence. Jésus compte sur notre faculté d’adaptation et nous croit capables de trouver des solutions possibles pour répondre à l’impossible des situations. A la fin de son propos, il nous donne une piste de réflexion en nous proposant l’image du sel. Le sel est cet élément invisible dans la nourriture qui la rend comestible. On peut penser ici que le saint Esprit agit en nous comme le sel dans les aliments. Il fait de nous les éléments par lesquels, sans que cela se voie à première vue, la présence de Dieu est perceptible dans le monde parce que nous y agissons avec sagesse et discernement.

Nous avons compris que ce monde tel qu’il est, voile aux yeux des hommes la présence de Dieu, si bien que personne ne pourrait y trouver le chemin qui mène à lui. Et pourtant Dieu fait le pari que nous sommes capables de nous dissoudre dans cette société de telle sorte que par nos comportements apparemment imperceptibles, la présence de Dieu y devienne évidente comme le sel dans a soupe.

Il nous est donc demandé de tenter l’impossible, pour que le visage de Dieu reste visible pour ceux qui le cherchent. Ce défi relève de l’impossible, mais dans l’invisible l’esprit qui agit en nous le rend possible. Dieu fait le pari, quant à lui, que malgré tout, l’impossible est toujours possible. Voici deux mille ans que les choses marchent ainsi et ça continue.

Il nous est donc demandé de ne pas dissocier notre foi de notre vie quotidienne. Jésus sait bien que cela est impossible, mais il sait aussi que nous y arriverons, car c’est ainsi que le saint Esprit fait avancer le monde en se servant de ceux qui ne peuvent rien faire et qui pourtant font beaucoup.



anachorète

mercredi 2 septembre 2009

Qui est le plus grand: Marc 9/30-37 dimanche 23 septembre 2018




30 Partis de là, ils traversaient la Galilée, et il ne voulait pas qu'on le sache. 31 Car il instruisait ses disciples et leur disait : Le Fils de l'homme est sur le point d'être livré aux humains ; ils le tueront, et, trois jours après sa mort, il se relèvera. 32 Mais les disciples ne comprenaient pas cette parole, et ils avaient peur de l'interroger.
Qui est le plus grand ?

33 Ils arrivèrent à Capharnaüm. Lorsqu'il fut à la maison, il se mit à leur demander : A propos de quoi raisonniez-vous en chemin ? 34 Mais eux gardaient le silence, car, en chemin, ils avaient discuté pour savoir qui était le plus grand. 35 Alors il s'assit, appela les Douze et leur dit : Si quelqu'un veut être le premier, qu'il soit le dernier de tous et le serviteur de tous. 36 Il prit un enfant, le plaça au milieu d'eux et, après l'avoir pris dans ses bras, il leur dit : 37 Quiconque accueille en mon nom un enfant, comme celui-ci, m'accueille moi-même ; et quiconque m'accueille, ce n'est pas moi qu'il accueille, mais celui qui m'a envoyé.











Je m’interroge à la lecture de ce texte à propos de cette opposition qu’on y trouve entre le fait d’être grand et le fait d’être un enfant. Si on éclaire ce texte par les textes parallèles dans les autres Evangile, on obtient une précision selon laquelle il s’agit ici d’être grand dans la foi. Ce serait à la foi des adultes que Jésus opposerait la foi d’un enfant  et c’est  la spontanéité  de l’enfant, sa candeur aussi qu’il mettrait en avant en l’opposant à la foi bien structurée des adultes

Nous sommes sans doute mieux placés pour comprendre les propos de Jésus que ses contemporains, car aujourd’hui, les enfants sont au centre des préoccupations de notre société. L’enfant est devenu roi dans un monde où tout tourne autour de lui. Il est devenu le type même du consommateur que les marques cherchent à séduire pour orienter le goût des adultes. On n'hésite même pas à  faire de ces chers petits, des  donneurs de leçon aux adultes pour vérifier qu’'ils  font correctement le tri de leurs ordures ou pour leur dire de ne pas téléphoner en voiture.

Pourtant,      si l’enfant est roi dans les sociétés favorisées,   il ne l’est pas dans les sociétés   défavorisées si bien qu’à côté du monde des enfants rois, il y a aussi le monde des enfants victimes, et c’est à ce monde-là qu’appartenait Jésus.

Il fallait cependant faire le point sur la situation de l’enfant dans nos sociétés post-modernes pour comprendre l’attitude de Jésus.  Il prend un enfant en exemple pour montrer le chemin que l’on doit suivre   si on veut devenir grand aux yeux de Dieu. Dans la société de Jésus l’enfant n’avait pas un sort enviable. Il  était le plus souvent considéré comme une charge. Il était  avant tout une bouche de plus à nourrir. On le faisait travailler très tôt pour un salaire inexistant, c’est ainsi qu’il fournissait une main d’œuvre peu coûteuse dont on avait tendance à abuser.  Victime de la mauvaise alimentation et de l’hygiène déficiente, beaucoup mouraient en bas âge. Sans doute l’enfant, était-il aimé par ses parents, mais il n’était pas choyé comme aujourd’hui. Les chagrins que causait la mortalité infantile poussaient les parents à ne pas trop s’attacher aux tout petits dont beaucoup ne survivaient pas à la petite enfance.

C’est donc dans ce contexte que Jésus intervient en plaçant   un enfant devant   eux à titre d’exemple. On se demande alors en quoi un enfant aurait-il pu donner un exemple de grandeur ?   Un enfant n’avait pas d’instruction et   il n’avait aucun savoir. Une société faite seulement d’enfants aurait été vouée à une disparition certaine. On ne voit pas en quoi les enfants pourraient nous mettre sur le chemin de la sagesse spirituelle qui plairait à Dieu ?  Pourtant  c'est bien en s'appuyant sur la sagesse des enfants que Jésus a quelque chose à nous dire sur notre relation à Dieu.

En fait les enfants ne sont pas des adultes en miniature. Ils ne pensent pas comme des adultes, ils ne réagissent pas non plus comme eux. Ils ont un comportement qui leur est propre. Ils ont en particulier une faculté d’émerveillement que n’ont pas les adultes. En contrepartie, les adultes ont le savoir et la science ou la sagesse dont ils font beaucoup de cas en matière spirituelle. Aujourd’hui, comme jadis à l’époque de Jésus, on donne un enseignement religieux aux enfants pour qu’ils puissent acquérir les notions élémentaires de la foi. Pour faire partie d’une communauté chrétienne, encore aujourd’hui, ne faut-il pas avoir franchi les étapes du catéchisme et avoir fait ses premiers pas comme catéchumène ?

Des adultes dûment patentés sont chargés d’enseigner les enfants, ils sont à la fois des enseignants et des gardiens de la tradition. C’était la même situation à l’époque de Jésus. Il était nécessaire   de connaître les 613 articles de la Loi ou tout au moins les dix commandements qu’il fallait respecter, pour espérer communiquer avec Dieu et grandir dans la foi. C’est sur ce point que Jésus semble en désaccord avec nous et avec les adultes de son temps. Il semble contester le fait   que pour être un homme de foi il faille avoir acquis l’expérience   auprès de plus savant que soi.

L’enfant, peut-être  plus que l’adulte, sait           observer ce qui se passe en lui. Il découvre très vite que son cœur est habité de pensées bonnes et de pensées mauvaises. Il sait aussi que des sentiments parcourent son âme. Il a un sens de la beauté, de la justice, de la droiture qui lui est propre, sans que les adultes comprennent ce qui se passe en lui.  Mais, sans doute l’enfant  ne sait pas mettre un nom sur l’origine de ces phénomènes, il ne sait pas que Dieu travaille en lui, mais il en constate les effets dans sa naïveté sans pour autant comprendre vraiment ce qu’il ressent.  Pourtant,  très vite les adultes interviennent   pour expliquer ces mystères et pour lui indiquer la bonne voie à suivre et l’enfant perd sa candeur et sa faculté d’émerveillement. Très vite ses parents puis ses enseignants vont lui apprendre à maîtriser le cours de sa vie intérieure, et ils vont lui enseigner en même temps tout ce qu’il faut savoir sur Dieu sur le péché sur la loi et l’enfant passe de la spontanéité   enfantine à la raison de l’adulte.

L’enfant va   alors apprendre ce que les hommes savent depuis des siècles sur   Dieu, et c’est ainsi qu’il deviendra un   adulte bien élevé et un croyant honnête face à Dieu, croit-on.  Mais Jésus trouve que les choses vont trop vite et que l’on ne donne pas à cette naïveté le temps de faire son œuvre.

Ainsi sans que les adultes, parents ou éducateurs s’en souviennent leur premier contact avec Dieu, à eux aussi,  s’est fait à partir d’expériences      de vie intérieure  qu’ils ont faites quand ils étaient enfants.  En ont-ils gardé le souvenir? De fait on leur a vite enseigné ce qu'ils devaient savoir sur le  vrai Dieu.

Quelle que soit la façon dont les enfants entendent parler de Dieu par les adultes, cela                 se passe   toujours de la même manière. Les adultes donnent une information sur Dieu sans se soucier des émotions              que  peut avoir eu le petit enfant dans sa vie intérieure.

Jésus sait bien, quant à lui, que ce sont les expériences de la vie intérieure qui nous amèneront les uns et les autres à une connaissance personnelle de Dieu. Il invite donc ceux qui l’écoutent           à  faire une descente au fond d’eux-mêmes avec la même naïveté que le ferait un enfant qui ne sait pas encore s’exprimer et qui découvre que « ça » parle au fond de lui.

Il nous invite donc à retrouver une spontanéité intérieure. Elle a été sans doute altérée par ce que l’éducation nous a apporté et qui a fait de Dieu une réalité extérieure à nous-mêmes, si bien que nous ne savons plus très bien entendre quand  Dieu Dieu s’adresse  à nous au plus profond de notre âme. Jésus ne méprise pas pour autant l’enseignement   de la loi, il ne rejette pas la tradition rapportée par les ¨Pères, mais il dit aussi   que nous ne pouvons pas progresser dans la foi si nous n’essayons pas de converser avec Dieu dans notre intimité, là où personne ne peut nous accompagner ni venir avec nous.

Si aujourd’hui beaucoup d’hommes se détournent de Dieu, c’est  sans doute parce qu’on leur a enseigné à se référer à un Dieu qui parle à l’extérieur d’eux-mêmes au travers des textes et des traditions et ils découvrent que      ce Dieu là n’est pas en adéquation avec le monde moderne. Ceux qui désespèrent de ne pas trouver dans le Dieu que prêchent les hommes, la voie de leur salut, la trouveront quand même s’ils essayent de retrouver un cœur d’enfant et  de  s'émerveiller          de  l’action de Dieu en écoutant ce qu’il leur dit  au plus profond de leur personne.

Jésus nous invite à dépasser les conventions de la religion, pour retrouver une vie intérieure  et tenter d'écouter Dieu qui a choisi l'humain pour en faire son interlocuteur. Il ne veut pas lui donner un message connu d'avance qui serait inscrit de tout temps dans les Ecritures, mais il veut l'inviter à un dialogue interne avec Dieu dont il découvre, bien évidemment la pertinence dans les Ecritures qui lui serviront désormais à éclairer le dialogue intérieure qu'il aura avec Dieu.