mercredi 26 mai 2010

Le repas chez Simon Luc 7: 36-50 dimanche 13 juin 2010




Luc 7:36-50

36 Un des Pharisiens pria Jésus de manger avec lui. Jésus entra dans la maison du Pharisien et se mit à table. 37 Et voici qu'une femme pécheresse, qui était dans la ville, sut qu'il était à table dans la maison du Pharisien ; elle apporta un vase d'albâtre plein de parfum 38 et se tint derrière à ses pieds. Elle pleurait et se mit à mouiller de ses larmes les pieds de Jésus, puis elle les essuyait avec ses cheveux, les embrassait et répandait sur eux du parfum. 39 A cette vue, le Pharisien qui l'avait invité dit en lui-même : Si cet homme était prophète, il saurait qui est la femme qui le touche et ce qu'elle est : une pécheresse.
40 Jésus prit la parole et lui dit : Simon, j'ai quelque chose à te dire. — Maître, parle, répondit-il. — 41 Un créancier avait deux débiteurs ; l'un devait cinq cents deniers et l'autre cinquante. 42 Comme ils n'avaient pas de quoi payer, il leur fit grâce de leur dette à tous deux. Lequel l'aimera le plus ? 43 Simon répondit : Celui, je suppose, auquel il a fait grâce de la plus grosse somme. Jésus lui dit : Tu as bien jugé.
44 Puis il se tourna vers la femme et dit à Simon : Vois-tu cette femme ? Je suis entré dans ta maison, et tu ne m'as pas donné d'eau pour mes pieds ; mais elle, elle a mouillé mes pieds de ses larmes et les a essuyés avec ses cheveux. 45 Tu ne m'as pas donné de baiser, mais elle, depuis que je suis entré, elle n'a pas cessé de me baiser les pieds. 46 Tu n'as pas répandu d'huile sur ma tête ; mais elle, elle a répandu du parfum sur mes pieds. 47 C'est pourquoi, je te le dis, ses nombreux péchés sont pardonnés, puisqu'elle a beaucoup aimé. Mais celui a qui l'on pardonne peu aime peu. 48 Et il dit à la femme : Tes péchés sont pardonnés. 49 Ceux qui étaient à table avec lui se mirent à dire en eux-mêmes : Qui est celui-ci, qui pardonne même les péchés. 50 Mais il dit à la femme : Ta foi t'a sauvée, va en paix.
Si vous avez prêté un tant soit peu d’attention à la lecture de ce texte et que vous l’avez écouté non seulement comme un récit issu de l’Evangile mais aussi comme un texte littéraire, vous aurez sans doute été séduits par sa capacité à retenir l’attention de son lecteur. Vous aurez alors remarqué l’art de l’Evangéliste Luc qui retient notre attention en faisant rebondir l’intrigue jusqu’à la conclusion du récit.Celle-ci nous nous laisse perplexe. C’est l’effet recherché. Elle provoque en nous un questionnement qui ne recevra de réponse que de notre propre réflexion. C’est ici l’usage d’ une méthode interactive bien avant que la mode s’en soit répandue.

Que dire en effet de l’association que Jésus fait entre les mots de pardon et d’amour ? Habituellement ces deux mots ne vont pas ensemble et pourtant pour Jésus l’association de ces deux mots devient logique : La femme sera d’autant plus pardonné qu’elle aura beaucoup aimé. Ainsi l’art littéraire de Luc se met-il au service de Jésus pour faciliter la transmission de son Evangile d’une manière remarquable.

Il nous faut voir maintenant comment Jésus en arrive à cette conclusion. Aujourd’hui, le mot « amour » a tendance à se vulgariser. Non seulement on l’utilise à tort et à travers, mais on en fait usage dans toutes les langues et en particulier en anglais. Il a même trouvé ses lettres de noblesse en argot. Notre vénérable Eglise Réformée a osé inviter ses jeunes à un grand « kif », c’est tout dire ! On représente aussi ce mot par un graphisme en forme de cœur ce qui permet de le comprendre dans toutes les cultures. Ainsi on aime la couleur de sa voiture, on aime ses enfants ou sa femme. On aime les voyages ou les idées d’un philosophe à la mode. Les jeunes usent de ce mot avec excès. Sans doute les plus érudits d’entre vous aimeraient intervenir pour rappeler que le verbe aimer se dit de trois façons différentes en grec qui est la langue des philosophes, comme chacun sait. Je ne les mentionnerais que pour mémoire, histoire de faire sérieux. Il s’agit d’héros, d’agapé et de philein.
Mais loin de moi l’idée de m’attacher à ces 3 sens. Je ne suis pas en train de faire une dissertation de philo, et si un candidat au bac se risquait à utiliser mes arguments, il risquerait d’être déçu par la note finale, car je m’exprime en français et le français mélange allègrement les 3 sens du mot qui reste unique dans notre langue.

Même si Jésus utilise le mot « agapé » pour l’associer au mot pardon, nous ne pourrons établir la nuance dans notre langue. Nous n’entendrons pas la distinction que le grec fait entre les 3 termes et nous comprenons donc que la femme sera pardonné parce qu’elle a beaucoup aimé, sans savoir quelle nuance on donnera au verbe aimer.
Notre récit s’ouvre sur la description d’un repas qui nous paraît somme toute assez banal tant il est habituel pour Jésus de manger le soir à la table d’un notable. Ce soir là c’est chez un homme religieux de la tendance des pharisiens qu’il est invité. L’atmosphère semble détendue, mais pour qui sait lire entre les lignes on aura vite perçu qu’il y a une forme de mal entendu ou de tension à peine perceptible entre Jésus et son hôte. Ce dernier, en effet, n’a pas respecté à l’égard de Jésus les convenances prévues par les us et coutumes de ce temps là. On avait l’habitude de laver et d’essuyer les pieds des visiteurs. Cela n’a pas été fait pour Jésus. Etait-ce une forme de mépris affiché pour ce prédicateur de passage que l’on avait invité pour meubler le temps dans ces longues soirée de jadis ? Etait-ce au contraire le signe d’une grande intimité entre Jésus et celui qui l’avait invité puisque Jésus s’est permis de l’appeler par son nom et que dans une telle circonstance on aurait pu ne pas faire de manière ?

C’est sans doute la première hypothèse qui est la bonne, car on sent pointer une forme de soupçon dans la pensée de Simon qui est à l’origine de l’invitation . Il n’ose pas s’exprimer à haute voix, mais Jésus perçoit fort bien une réserve de sa part. « Si cet homme était un prophète, il saurait qui est cette femme ? » Pense-t-il. Il soupçonne donc Jésus de ne pas être ce qu’il est ! On pourrait même penser que c’est volontairement qu’il a laissé s’introduire dans sa demeure une femme inconnue, ou trop connue, à la vertu facile. Soupçon donc !

Jésus ne réagit pas à cette opinion de Simon qui n’a pas été formulée d’une manière intelligible. Il commence donc un enseignement en forme de parabole comme il le fait d’habitude Il est d’ailleurs là pour ça, et il faut bien le dire, c’est là le prix de son repas ! Il raconte une parabole apparemment insignifiante qui traite de la reconnaissance que l’on est en droit d’espérer en échange d’un geste de charité ! Simon interrogé répond juste ! Mais aurait-il pu répondre autrement ? Le plus reconnaissant des deux débiteurs, c’est celui a qui on a remis le plus. C’est évident ! Pourquoi donc avoir fait venir ce prédicateur si c’est pour l’ entendre dire des banalités?

C’est alors que Jésus revient à la femme. Il ne lui a jusque là accordé aucune attention. C’est pourtant elle qui a motivé le sujet de la parabole dont Jésus a fait le récit, mais Simon n’a sans doute pas saisi le déroulement de la pensée du maître. En deux mots Jésus absout cette femme de tous les reproches qu’on peut lui faire. Le seul argument qu’il retient en sa faveur c’est son amour, et de quel amour s’agit-il quand on parle d’une femme à la réputation sulfureuse ?
Jésus utilise certes le mot agapé, celui dont le sens est le plus spirituel. En agissant comme elle l’a fait, la femme a exercé de l’amour envers Jésus. Elle lui a lavé les pieds de ses larmes elle les a essuyés de ses cheveux et elle les a parfumés ensuite. Elle a exercé de l’amour envers Jésus, parce qu’elle a donné de sa personne pour lui apporter un peu de confort. C’est cela l’idée maîtresse de l’Evangile ! L’égard que l’on manifeste pour les autres a plus de valeur que tous les rites, toutes les argumentations, tous les commandements de la Loi. Par son geste cette femme a su prendre de ce qui était à elle pour le seul bien être de Jésus.
Ses larmes, ses cheveux, son parfum ! A quoi cela sert-il ? A rien ! Jésus ne sortira pas plus riche de cette aventure, mais il en sortira honoré et grandi. Le pharisien n’a pas honoré Jésus, il a mis du soupçon dans ses pensées et il n’a pas respecté les règles de bien séance à son égard. Même s’il lui a offert un repas Jésus ne sort en rien grandi par la relation que l’autre a établie avec lui.

Une telle remarque va nous aider à préciser la valeur de l’amour telle que Jésus l’entend. Le monde d‘aujourd’hui est désenchanté. Il essaye de compenser son marasme par la recherche de l’émotion qu’il trouve sans doute dans la surexploitation du mot amour. Mais comment l’entendons-nous ? Ce mot semble ne prendre vraiment d’intérêt que parce qu’il nous valorise nous-mêmes. Nous aimons tout ce qui nous fait sortir de la médiocrité ambiante et qui nous met nous-même en valeur. Nous aimons le soleil et les voyages, nous aimons les bons repas, nous aimons les enfants sages mais sommes-nous capables d’aimer notre prochain comme nous-mêmes ?

C’est dans cette question et dans la manière dont nous saurons y répondre que se joue aujourd’hui le destin du monde. Le monde ne peut évoluer harmonieusement que si quelque chose change dans le comportement des hommes entre eux. La pratique de l’amour consiste à prendre ce qui est à nous pour le mettre au service des autres afin qu’ils aillent mieux. Jésus n’a pas d’autre réponse à apporter pour solutionner nos problèmes. Dieu reconnaît la valeur de nos actes d’amour quand ceux-ci permettent aux autres de se trouver mieux.

Ainsi malgré l’usage excessif du mot amour dans notre société contemporaine, ce n’est toujours pas lui qui mène le monde, c’est le culte de la personnalité, c’est le désir de se valoriser soi-même au détriment des autres. Jésus sera sanctionné pour avoir dit ce qu’il a dit et nous sommes aujourd’hui méprisés si nous essayons de l’imiter. Pourtant, il y a des prophètes modernes qui savent dire encore l’amour avec beaucoup de générosité En le disant, ils réussissent à capter la faculté des peuples à s’émouvoir si bien que le souffle de l’Evangile continue à se répandre même si les poètes qui le disent ne se réclament pas forcément de la même tradition que la nôtre.
« Aimer à perdre la raison ,
Aimer à n’en savoir que dire,
A n’avoir que toi d’horizon… »
disait le chanteur Jean Ferrat, il parlait d’un amour qui coûte à celui qui le pratique
« La faim la fatigue et le froid,
Toutes les misères du monde
C’est par mon amour que j’y crois
En elle je porte ma croix
Et de leur nuit ma nuit se fonde. »

jeudi 20 mai 2010

Melchisédech Genèse 14:18-20 dimanche 6 juin 2010






Melchisédech

Genèse 14

Le roi de Sodome sortit à sa rencontre, après qu'il fut revenu vainqueur de Kedorlaomer et des rois qui étaient avec lui, dans la vallée de Shavé, c'est-à-dire la vallée du Roi. 18 Malki-Tsédeq, roi de Salem, fit apporter du pain et du vin : il était prêtre du Dieu Très-Haut. 19 Il le bénit en disant : Béni soit Abram par le Dieu Très-Haut qui produit le ciel et la terre ! 20 Béni soit le Dieu Très-Haut qui t'a livré tes adversaires ! Et Abram lui donna la dîme de tout.


Hébreux 5

De même, le Christ ne s'est pas octroyé à lui-même la gloire de devenir grand prêtre ; il l'a reçue de celui qui lui a dit : Tu es mon fils, c'est moi qui t'ai engendré aujourd'hui ; 6 tout comme il dit encore ailleurs : Tu es prêtre pour toujours, selon l'ordre de Melchisédek. 7 Aux jours de sa chair il a offert, à grands cris et dans les larmes, des prières et des supplications à celui qui pouvait le sauver de la mort, et il a été exaucé en raison de sa piété. 8 Tout Fils qu'il était, il a appris l'obéissance par ce qu'il a souffert. 9 Une fois porté à son accomplissement, il est devenu pour tous ceux qui lui obéissent l'auteur d'un salut éternel, 10 Dieu l'ayant déclaré grand prêtre selon l'ordre de Melchisédek.



N’est-il pas étrange ce roi mystérieux, qui semble sortir tout droit d’un conte de fée pour venir rendre hommage à Abraham ? Son histoire relèverait certainement d’une légende si elle ne révélait pas une vérité fondamentale sur Dieu ! Encore faut-il prendre le temps de la chercher. On ne sait ni qui est ce roi, ni d’où il vient, ni où il va. Trois versets suffisent à nous révéler tout ce que l’on doit savoir sur lui. C’est sans doute parce qu’on n’en a pas assez dit que l’on s’est souvent permis d’en rajouter. Pour ce qui nous concerne, nous nous en tiendrons à ce qui est écrit à son sujet dans ces quelques lignes.



Nous dirons cependant que c’est à l’épître aux Hébreux que l’on doit de l’avoir sorti de son mystère pour mieux l’y enfermer. Il serait selon ce texte une image prophétique du Christ. Roi sans lignée, souverain de la ville de Salem, la cité de la paix, grand prêtre d’une religion inconnue qui vénère le Dieu très Haut. Abraham qui reçoit de lui le pain et le vin lui rend un humble hommage et lui paye la dîme. Est-ce suffisant pour exciter votre curiosité ?



Trois lignes de texte ne permettent pas de se livrer à une exégèse trop fouillée. Elle nous permet de dire cependant que nulle part dans l’Ecriture il nous est dit quoi que ce soit sur ce Dieu très Haut. Nous ne sommes d’ailleurs pas très familiarités avec cette expression.. Le Dieu que vénère Abraham et qui nous est présenté par la tradition biblique s’est présenté au patriarche en d’autres termes. Il s’est présenté comme le Dieu de la promesse et par la suite se présentera comme, le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob. Son culte pourrait être à l’origine celui d’une tribut nomade et sera reconnu ensuite comme le Dieu d’Israël dont on nous fera connaître le nom : Yahvé. Perçu comme le Dieu d’une famille il deviendra le Dieu de tout un peuple. Il se fera connaître ensuite comme le Dieu des nations pour devenir le Dieu unique. Mais en bien peu d’endroit, il est question d’un Dieu Très Haut, sans autre attribut que sa toute puissance.



Ces quelques remarques vont nous permettre de dire que la tradition qui concerne ce roi mystérieux est une tradition récente puisqu’elle confère à Dieu une compétence universelle. Les autres dieux ne semblent pas exister devant lui, car il n’y a pas d’autre dieu en dehors de lui, en tout cas aucun autre dieu n’est nommé en même temps que lui. C’est ici une conception tellement moderne que nous sommes surpris de la découvrir au cœur d’un texte qui se réfère à Dieu dans un conteste qui relève d’une tradition plus ancienne. Voilà pourquoi le personnage de Melchisédech nous paraît fascinant.



C’est donc en empruntant à ce court texte, les quelques détails dont nous disposons que nous allons essayer de définir les caractéristiques que lui confère sa divinité. Cette image nous interpelle parce que les théologiens et les penseurs d’aujourd’hui s’appliquent plus à nous transmettre d’un Dieu d’amour que d’un Dieu perdu dans les hauteurs du ciel. Le Dieu d’amour s’efface devant son Fils devenu homme, il se retire même de sa création pour laisser les hommes œuvrer sous l’inspiration de son Esprit. Curieusement, Jésus, le Fils de Dieu qui s’est fait homme pour nous apporter le salut en nous révélant la route à suivre est salué par l’épître aux Hébreux du titre de « sacrificateur selon l’ordre de Melchisédech ». Le mystère s’épaissit, il crée de la distance entre nous et le Christ, et nous avons peur de n’y comprendre plus rien.



Le nom même de Melchisédech est revêtu d’une valeur symbolique. S’il est roi et prêtre au service du Dieu tout Puissant, son nom signifie « roi de Justice » et il règne sur Salem dont le nom signifie la paix. Ces deux notions de justice et de paix vont nous aider à définir les qualités de ce Dieu très haut que vénère cet étrange personnage à qui Abraham se soumet non seulement comme vassal, mais comme adorateur du Dieu pour lequel il exerce la prêtrise. Le Dieu d'Abraham et celui de Melchiédech est bien le même Dieu.



Abraham fut le premier homme selon la Bible à qui Dieu se soit révélé et il s’est révélé à lui en tant que pourvoyeur de vie. Dieu intervint d’abord auprès de lui pour qu’il vienne au secours de son neveu Lot en danger de mort dans la ville de Sodome, et Lot eut la vie sauve. Il se manifesta à Sarah, l’épouse d’Abraham comme celui qui était capable de la rendre féconde alors qu’elle était stérile et qu’elle n’était plus en âge d’avoir des enfants., et elle donna vie à Isaac.



Une grande partie de la relation entre Abraham et Dieu tourne autour du problème de la vie dont Isaac sera l’enjeu. Avec lui surgit la vie à partir d’un couple stérile. Si un jour, Dieu demanda à Abraham de lui sacrifier son fils, c’est pour lui signifier que nul ne peut s’arroger le droit de toucher à la vie d’un homme, même si apparemment, c’est Dieu qui le lui demande. Abraham fit à ses dépends la découverte de l’importance de la vie dans la relation avec Dieu. A tous ceux qui se réclament d’Abraham comme leur père dans la foi, Dieu s’offre à eux comme celui qui donne la vie en dépit de toutes les difficultés et de tous les interdits que les hommes peuvent se donner.



C’est avec Melchisédech qu’Abraham , et le lecteur avec lui, découvrent que Dieu est aussi porteur de justice et de paix. Telles sont les autres qualités qui déterminent la réalité de ce Dieu très haut. La paix que Dieu offre, n’est pas seulement l’absence de violence que les hommes exercent les uns contre les autres, ce qui ne serait déjà pas si mal, mais elle caractérise aussi l’harmonie dans le fonctionnement de tout ce qui se meut et respire. Le monde est en paix sous le regard de Dieu quand les choses se passent comme elles doivent le faire. Les prophètes insisteront sur cette notion de paix en décrivant la nature comme apaisée de tout ce qui pourrait en perturber le bon fonctionnement : « L e loup et l’agneau auront un même pâturage Le lion comme le bœuf mangera de la paille » Es 65 :25 « Inutile d’insister pour comprendre que la sauvegarde de la planète en matière d’écologie fait partie de cette paix dont Melchisédech est le témoin. Il n’en est pas seulement témoin, mais en tant que roi, il a du pouvoir sur elle.



La proximité entre Melchisédech et Jésus rapportée par l’épître aux Hébreux nous rappelle que nous sommes, nous aussi, concernés par le maintient de cette paix dans le monde. Melchisédech n’est pas seulement un roi de paix, son nom signifie qu’il est un roi juste. Cela veut dire qu’il sait se comporter de telle sorte que le monde est les hommes agissent en harmonie pour que la paix promise se réalise. Le juste c’est celui qui fait des actes tels que c’est la paix qui en résulte.



Melchisédech s’approcha d’Abraham dans un geste de communion. Il lui offrit le pain et le vin. On ne sait d’où est issue cette tradition, mais on sait quelle valeur lui a donné Jésus et quel sens il a donné à ce partage. L’offrande du pain signifie que celui qui le reçoit entre en communion avec celui qui l’offre et partage avec lui tout ce que signifie ce geste. Symboliquement cela signifie la nourriture que donne le pain. Le vin promet la joie à celui qui le boit. Voilà donc présentées ici la promesse d’une société où il fera bon vivre puisque justice et joie seront la part de tous. Tous ceux qui se réclament d’Abraham sont concernés par cette promesse. Elle concerne donc tous ceux qui se réclament de sa succession, juifs, musulmans et chrétiens, et même ceux qui reconnaissent son Dieu sans se rallier vraiment à une confession précise.



C’est ainsi que la terre évoluera conformément à sa destinée, elle deviendra un lieu où il fait bon vivre pour tous les êtres vivants. Les hommes partageront alors la royauté du monde avec celui qui les invite à y participer. Si on considère donc avec les théologiens modernes que Dieu se retire du monde, ce n’est pas pour le laisser seul à l‘abandon. Il offre aux hommes en se retirant la responsabilité d’assumer sa souveraineté sur les êtres et les choses. Il leur donne ainsi la faculté d’user de la justice pour que la paix du monde devienne une réalité.



Trois versets perdus dans l’immensité des textes ont suffi à nous faire comprendre comment Dieu nous associe à la gestion du monde en participant à sa souveraineté. L’auteur de l’épître aux Hébreux ne s’est donc pas trompé quand il a vu dans l’histoire de ce roi mystérieux les prémices de la vocation de Jésus lui-même. Les choses ont été dites alors en langage mythique, à nous de les traduire en langage concret.







vendredi 14 mai 2010

La Vérité Jean 16:12-15 dimanche 22 mai 2016





La Vérité Jean 16:12-15

12 J'ai encore beaucoup à vous dire, mais vous ne pouvez pas le porter maintenant. 13 Quand il viendra, lui, l'Esprit de la vérité, il vous conduira dans toute la vérité ; car il ne parlera pas de sa propre initiative, mais il dira tout ce qu'il entendra et il vous annoncera ce qui est à venir. 14 Lui me glorifiera, parce qu'il prendra de ce qui est à moi pour vous l'annoncer. 15 Tout ce qu'a le Père est à moi ; c'est pourquoi j'ai dit qu'il prendra de ce qui est à moi pour vous l'annoncer.


Tout au long de l’Évangile de Jean, Jésus va s’interroger sur la Vérité. A la fin de ce même Évangile, Pilate en signant la condamnation à mort de Jésus va se demander ce qu’est la Vérité. Mais en bon politique, il s'en lave les mains.  La recherche de la vérité fait partie des préoccupations spirituelles ou intellectuelles de tous les peuples et de tous les temps. C’est en son nom que l’on a fait les meilleurs et les pires des choses, c’est en son nom que l’on a fait taire les uns en les tuant, ou que l’on a fait crier les autres en les torturant. La Vérité est donc au cœur de la Bible, car le Dieu d’amour, le Dieu de paix ou le Dieu de l’espérance, est aussi le Dieu de vérité, c’est ce que disaient déjà les rabbins à l’époque de Jésus qui lui-même ouvrait la voie qui mène à Dieu en disant « je suis le chemin la vérité et la vie » (14/6)


Dans le passage de l’Évangile que nous avons lu, alors que Jésus parle de vérité, il laisse entendre que la vérité n’est pas encore de l’ordre du présent et qu’elle est de l’ordre du futur: « l’Esprit de vérité vous conduira » dit-il. La connaissance parfaite de la vérité reste quelque chose qui est en devenir. Cela veut dire que notre appartenance à Jésus Christ ne va pas nous permettre de découvrir en un instant la vérité. Elle fait partie de la foi, mais elle n’est pas la foi. La foi est une intuition qui peut brusquement se transformer en certitude. On peut dater le moment où on la reçoit, mais la vérité demandera une plus longue approche, un travail personnel sur soi, une découverte progressive des choses. La foi, c’est la certitude de l’amour de Dieu pour nous, par contre la vérité consiste à pénétrer par la foi, grâce au saint Esprit dans l’intimité du cœur de Dieu. Jésus ici prépare ses proches aux différentes étapes de la vie spirituelle qui les attend. Dans un premier temps ils recevront le choc de la foi en découvrant le tombeau vide. Puis dans un second temps ils chemineront en compagnie de Dieu à la découverte de la vérité.

« Qu’est-ce que la vérité? » Demandera Pilate en se lavant les mains quelques jours après cet entretien de Jésus avec les siens. Pilate signifie par ce geste qu’il ne s’implique pas dans la mort de Jésus. Pourtant il va envoyer à la mort, sans état d’âme particulier, celui qui justement se propose de l’entretenir de la vérité, c’est dire que la vérité n’a aucun attrait pour lui, tout au moins la vérité telle qu’elle émane de Jésus. Pour Pilate, la vérité, c’est l’ordre, la discipline et la soumission. La vérité se limite à sa préoccupation immédiate. Il ne la vit que dans l’instant, mais cette vérité là est éphémère, elle est très vite érodée par le temps. Quelques années plus tard, la décision de l’empereur qui enverra Ponce Pilate en exil changera, sans doute, sa conception de la vérité. De bourreau il deviendra victime, et il méditera alors d’une autre manière sur la vérité en attendant que la mort lui ferme les yeux sur sa propre vérité ou les lui ouvre sur la vérité de Dieu.

Ainsi y a-t-il plusieurs vérités, il y a celles qui appartiennent à la logique des hommes, qui varient au gré du temps et des modes. Elles sont t multiples et prennent  différentes formes suivant les temps et les moments. Mais il y a aussi une vérité qui dépasse l’homme qui est d’ordre métaphysique et qui ne s’accomplit qu’en Dieu. Il y a donc des vérités : Il y a la vérité toute relative qui est celle des hommes et qui s’oppose au mensonge tel que les hommes le conçoivent, (mais qu’est-ce que le mensonge?) et puis, il y a une vérité qui nous dépasse, qui vient d’ailleurs et qui est la seule qui soit digne de retenir notre intérêt parce qu’elle vient de Dieu, parce qu’elle est en Dieu. Sa recherche ne préoccupait pas particulièrement Pilate, comme nous l’avons vu, ni ne préoccupe pas beaucoup de nos semblables, comme nous le verrons.

Cette deuxième vérité nous dérange parce que pour y participer, il va falloir y consacrer du temps. On n’y entre que patiemment, et partiellement, en approfondissant sa foi et en se laissant provoquer par le saint Esprit. Cette quête réclame toute notre attention de chrétien, mais nous fait en même temps participer aux battements du cœur de Dieu.

Beaucoup d’entre nous pourtant limitent leurs relations à Dieu à l’acte de foi par lequel ils découvrent qu’ils sont sauvés par grâce. J’ai dit tout à l’heure que cet événement pouvait être soudain, et qu’on pouvait même le dater. Et cela suffit à en satisfaire beaucoup. La liste de leurs noms remplit les fichiers paroissiaux, mais ils ne se bousculent pas sur les bancs de nos temples. Ils sont convaincus de la gratuité du salut ! On le leur a tellement répété qu’ils n’éprouvent pas le besoin de fréquenter nos assemblées pour permettre à leur connaissance de Dieu et de la vérité d’évoluer. A quoi bon venir au culte pensent-ils pour recevoir le pardon qui est sans cesse renouvelé gratuitement? Voltaire riait bien, et n’avait pas forcément tort quand il disait: « il faut bien que Dieu pardonne puisque c’est son métier » ! Pourtant, Calvin flairant le danger, avait enseigné que le salut reçu par la prédestination, n’était pas à tout jamais acquis et qu’une saine fréquentation de nos assemblées pouvait aider à le conserver. Mais nous n’avons pas retenu cet aspect de l’enseignement du Réformateur et nous avons continué à prêcher la gratuité du salut, tout en laissant les moins zélés ou les plus malins priver nos temples de leur présence et nous avons eu raison.

En fait, la foi n’est que le premier aspect, le premier mouvement de notre relation à Dieu. Elle place Dieu devant nous comme Sauveur et Libérateur, mais sauveur de quoi? ou Libérateur de qui? Le secret de notre foi dépend maintenant de la manière dont nous allons approfondir notre connaissance de Dieu. Notre foi doit se remplir d’un contenu qui va donner du sens aux termes de Sauveur et de Libérateur qui qualifient Dieu. C’est ainsi que nous entrons dans la recherche de la Vérité.

Pour cela, Dieu vient vers nous. Son Esprit rencontre notre esprit, il parle à notre intelligence, il donne du sens à notre réflexion et la vérité sur Dieu prend corps lentement. Elle mettra toute notre vie terrestre à se façonner et à approcher au plus près la réalité de Dieu. Le salut est acquis une fois pour toute, mais la connaissance du salut nécessite un compagnonnage de tous les jours avec Dieu dont une des étapes est le temps du culte dominical.

Nous savons bien sûr que la recherche de la vérité n’était pas le seul fait de Jésus. Beaucoup avant lui cherchaient depuis longtemps à approcher la vérité de plus près. Les maîtres de la Loi, ses contemporains disaient que l’existence du monde reposait sur 3 choses: la vérité, la justice et la paix, la Vérité était la première et servait même à définir Dieu.

Dieu n’avait-il pas abordé une première fois cette notion de vérité en donnant la Loi par la main de Moïse? Mais cette Loi, transmise par un homme n’était qu’une ébauche de la vérité et elle impliquait un désir de dépassement que les prophètes avaient formulé de différentes manières. Jésus en rendit la réalisation possible. La mort et le résurrection de Jésus donnaient à la Loi une dimension nouvelle. Elle devenait désormais partage de vie avec Dieu. La Vérité que propose Jésus consiste donc à entrer dans ce partage avec Dieu. L’Esprit de Jésus permet à ceux qui le reçoivent de participer dès maintenant à toutes ses promesses. C’est là le miracle que Dieu fait pour nous, il consiste à bénéficier de l’expérience de la mort de Jésus sans avoir eu à la subir. C’est là le premier pas sur le chemin de la Vérité.

La vérité consiste donc à entrer par l’action du Saint Esprit dans la proximité de Dieu afin que ce soit lui qui inspire les décisions que nous prenons et qui motive les actions que nous faisons. Il ne s’agit donc pas de s’asseoir sur le bord du chemin en disant « Dieu voulant ». et en laissant passivement Dieu agir. Il s’agit plutôt d’un combat sur nous-mêmes où nous prenons nos décisions en fonction de notre relation à Dieu. Cela n’implique pas pour autant des résultats spectaculaires. En agissant ainsi, nous tendons seulement à mettre nos actions en conformité avec la volonté de Dieu, sans préconiser de la suite à venir. En agissant ainsi, nous ne sommes pas plus sauvés que les autres et nous ne les devançons en rien dans le royaume ou dans la faveur de Dieu, nous répondons seulement à notre vocation de Chrétien et ainsi nous permettons que s’entrouvrent un peu plus les portes du Royaume. La seule satisfaction que nous pouvons en retirer c’est d’avoir essayé d’être fidèles à notre Dieu, et de faire un pas avec lui sur le chemin de la vérité.

Statue "La vérité méconnue" Aimé-Jules Dalou

lundi 10 mai 2010

Pentecôte Romains 8:8-16 dimanche 23 mai 2010



Romains 8/8

8 Ceux qui sont sous l'empire de la chair ne peuvent plaire à Dieu. 9 Quant à vous, vous n'êtes pas sous l'empire de la chair, mais sous celui de l'Esprit, s'il est vrai que l'Esprit de Dieu habite en vous. Et si quelqu'un n'a pas l'Esprit du Christ, il ne lui appartient pas. 10 Or si le Christ est en vous, le corps, il est vrai, est mort à cause du péché, mais l'Esprit est vie à cause de la justice. 11 Et si l'Esprit de celui qui a réveillé Jésus d'entre les morts habite en vous, celui qui a réveillé le Christ d'entre les morts fera aussi vivre vos corps mortels par son Esprit qui habite en vous. 12 Ainsi donc, mes frères, nous sommes bien débiteurs, mais non pas envers la chair — pas pour vivre selon la chair. 13 En effet, si vous vivez selon la chair, vous allez mourir ; mais si par l'Esprit vous faites mourir les agissements du corps, vous vivrez. 14 Car tous ceux qui sont conduits par l'Esprit de Dieu sont fils de Dieu. 15 En effet, vous n'avez pas reçu un esprit d'esclavage, qui ramène à la crainte, mais vous avez reçu un Esprit d'adoption filiale, par lequel nous crions : Abba ! — Père ! 16 L'Esprit lui-même rend témoignage à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. 17 Or si nous sommes enfants, nous sommes aussi héritiers : héritiers de Dieu, et cohéritiers du Christ, s'il est vrai que nous souffrons avec lui pour être aussi glorifiés avec lui.

Un des buts essentiels et toujours inassouvi de notre vie, est la recherche du bonheur ! Cette recherche est tellement intense qu’elle finit souvent par confondre le plus bref moment de plaisir avec le sentiment de bonheur. La moindre décharge d’adrénaline ou la moindre émotion passagère se trouve chargée de la même intensité que celle que suggère l’idée même du bonheur. Il suffit en effet d’un coup de pied bien ajusté sur un ballon qui entre dans les buts sans que personne ne puisse l’arrêter pour que le journaliste qui rapporte l’événement qualifie de bonheur le résultat de ce coup de pied bien ajusté. Si c’est un match de coupe du monde il parlera même de vrai bonheur ou d’un bonheur total.

Faute de réaliser la plénitude du bonheur, nous nous contentons la plupart du temps d’émotions furtives que nous nous efforçons de faire durer le plus longtemps possible pour en garder la saveur, tel le résultat d’un match gagné en coupe du monde, mais nous savons bien que cela n’est pas le bonheur. Le bonheur est un état qui s’installe durablement dans notre vie et qui nous fait dire que la vie vaut la peine d’être vécue.

Nous cherchons évidemment à réaliser ce sentiment dans notre vie personnelle par tous les moyens . Nous serions pleinement satisfaits si nous pouvions avoir une vie professionnelle épanouie avec une épouse ou un compagnon que l’on aime, entouré d’enfants beaux et intelligents dont les réussites scolaires et sportives nous feraient honneur. Ne serait-ce pas là la clé du bonheur ?

Beaucoup s’en contentent et ne vont pas chercher plus loin pour considérer qu’ils baignent dans un bonheur parfait, mais une telle approche est bien réductrice. Elle ne prend en compte que la réussite matérielle, si bien qu’une telle existence finit par apparaître comme repliée sur elle-même pour celui qui en veut davantage. Elle ne dépasse pas la monotonie du quotidien qui à force de se répéter de jour en jour finirait par engendrer la lassitude. Tout cela nous amène à constater qu’il manque vraiment quelque chose dans notre existence et qu’il nous faut chercher plus loin pour trouver la clé du bonheur !


Il est pourtant bien clair que la notion de bonheur est liée à la notion de réussite, elle implique des succès personnels, elle réclame au moins l’aboutissement de quelques désirs, car faute d’un minimum de désirs réalisés, nous nous considérerions comme des frustrés pour qui la porte du bonheur serait fermée. Mais nous savons aussi que faute de vrai bonheur, il nous arrive d’être visités par des émotions passagères qui envahissent notre esprit et le bousculent. Il suffit pour cela que la lecture d’un livre nous séduise et nous entraîne sur des pistes jusque là ignorées de nous, un film aussi peut provoquer en nous des impressions qui nous ravissent, et je ne parle pas de musique ni de paysages bouleversants ! Il ne nous faut pas oublier les couchers de soleil qui nous plongent parfois dans des ravissements indescriptibles ! Il faudrait un jour faire le bilan du rôle joué dans l’esprit des humains et surtout des artistes par les couchers de soleil.
Cela nous rappelle qu’au-delà de la réussite professionnelle, sociale ou sportive, qu’au-delà des succès matériels, il y a des satisfactions dans notre vie qui s’emparent de notre esprit et qui nous poussent à réaliser que les réalités de l’esprit ont un rôle important à jouer dans notre recherche du bonheur. C’est sur ce point de notre réflexion que Paul vient nous rejoindre ici. « L’esprit rend lui-même témoignage à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu ». Avec une telle affirmation nous faisons un pas de plus dans notre recherche. D’un simple trait de plume, Paul écarte toutes les réussites matérielles qu’il classe un peu vite parmi les réalités charnelles pour se concentrer sur les réalités spirituelles qui seraient les clés par lesquelles pourraient s’ouvrir les portes du bonheur. Ces portes de l’esprit sont celles que Dieu ouvre pour venir vers nous, car lui seul peut apporter la plénitude à notre esprit. C’est lui qui crée en nous ces émotions durables qui nous dépassent. Ce n’est pas nous qui les acquérons par nos propres moyens. Ainsi, c’est Dieu lui-même, qui le jour de la Pentecôte a bousculé les disciples de Jésus, inquiets pour leur vie et terrorisés par les conséquences pour eux des événements récents. Ils ne savaient plus que faire ni quelle orientation donner à leur vie jusqu’à ce qu’ils comprennent ce jour là que l’important se trouvait dans la nouvelle dimension que la résurrection avait apportée à leur vie. C’est par une intervention de Dieu, au niveau de leur esprit que leur vie s’est alors chargée d’espérance. Ils réalisèrent alors que maintenant que tout allait bien dans leur tête, tout allait bien dans leur vie.

La tête, bien évidemment est le siège de l’esprit. C’est lui qui commande tous les mouvements de notre corps. C’est lui qui suscite les sentiments de notre cœur, c’est lui qui provoque en nous les désirs, c’est lui qui ordonne à nos membres de réaliser ce que nous désirons faire, c’est lui qui maintient le contact avec Dieu et qui permet à Dieu d’avoir une emprise sur nous. Quand notre esprit se met en harmonie avec celui de Dieu, notre vie se transforme et le bonheur peut s’installer durablement en nous. L’espérance peut alors s’emparer de toute notre existence. Nous ne pouvons vraiment être heureux que si l’harmonie s’installe entre les désirs qui naissent dans notre esprit et la réalisation de ceux-ci dans notre existence. Or pour que cela se produise, il faut que Dieu lui-même vienne animer nos pensées, car lui seul sait ce qui est bon pour nous .

Avons nous vraiment réalisé que Dieu est esprit, et qu’il ne peut agir en nous que par son esprit? Si quelque chose doit se passer entre lui et nous, c’est par l’esprit que cela se passera et c’est sur notre esprit qu’il exercera son influence. La nouveauté apportée par Jésus dans le monde des humains a consisté à leur révéler que toute relation avec Dieu était d’abord et avant tout une relation spirituelle, c’est dire que notre relation à Dieu commence toujours par la découverte selon laquelle l’esprit de Dieu est en train d’agir en nous.

La place prise par l’esprit est considérable dans les évangiles, car c’est par lui qu’il nous est dit que Dieu agit en nous. Encore faut-il que nous nous rendions disponibles. Au cours des siècles les hommes ont cherché à s’approprier les chemins du ciel. Ils ont cherché par les sacrifices et les actions charitables à se concilier les faveurs de Dieu ! Ne le font-ils pas encore ? Ils ont cherché par leurs longues prières, par leur ascèse, par leurs jeûnes et leurs privations à pénétrer dans les lieux où Dieu pouvait habiter. A Pentecôte, c’est le ciel lui-même qui a été ébranlé et c’est Dieu lui-même qui est venu vers les hommes. C’est lui qui a pénétré leur demeure. Il a pénétré en eux par le feu de son esprit et les hommes ont été transformés de l’intérieur. Ainsi, ont-ils découverts que le chemin du ciel était celui par lequel Dieu venait vers les hommes et que la clé du bonheur était celle qui permettait à chaque individu d’ouvrir son esprit pour que Dieu y pénètre et se saisisse de sa vie.

C’est seulement quand nous avons compris cela et que nous avons entrepris de le réaliser, que le bonheur peut s’installer en nous d’une manière durable.La nouveauté de Pentecôte, c’est donc de considérer que le bonheur durable est à notre portée si nous laissons Dieu prendre en main notre vie et la diriger.


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lundi 3 mai 2010

L'ultime prière de Jésus Jean 17 20-26 Dimanche 16 mai 2010




J'ai déjà publié ce même texte, l'an dernier à la même date .

Jean 17/11-26

Je ne suis plus dans le monde ; eux sont dans le monde, et moi, je viens à toi. Père saint, garde-les en ton nom, ce nom que tu m'as donné, pour qu'ils soient un comme nous. 12Lorsque j'étais avec eux, moi, je les gardais en ton nom, ce nom que tu m'as donné. Je les ai préservés, et aucun d'eux ne s'est perdu, sinon celui qui est voué à la perdition, pour que l'Ecriture soit accomplie. 13Maintenant, je viens à toi, et je parle ainsi dans le monde pour qu'ils aient en eux ma joie, complète. 14Moi, je leur ai donné ta parole, et le monde les a détestés, parce qu'ils ne sont pas du monde, comme moi, je ne suis pas du monde. 15Je ne te demande pas de les enlever du monde, mais de les garder du Mauvais. 16Ils ne sont pas du monde, comme moi, je ne suis pas du monde. 17Consacre-les par la vérité : c'est ta parole qui est la vérité. 18Comme tu m'as envoyé dans le monde, moi aussi je les ai envoyés dans le monde. 19Et moi, je me consacre moi-même pour eux, pour qu'eux aussi soient consacrés par la vérité.

20Ce n'est pas seulement pour ceux-ci que je demande, mais encore pour ceux qui, par leur parole, mettront leur foi en moi, 21afin que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi, qu'eux aussi soient en nous, pour que le monde croie que c'est toi qui m'as envoyé. 22Et moi, je leur ai donné la gloire que tu m'as donnée, pour qu'ils soient un comme nous, nous sommes un, 23— moi en eux et toi en moi — pour qu'ils soient accomplis dans l'unité et que le monde sache que c'est toi qui m'as envoyé et que tu les as aimés comme tu m'as aimé. 24Quant à ce que tu m'as donné, Père, je veux que là où, moi, je suis, eux aussi soient avec moi, pour qu'ils voient ma gloire, celle que tu m'as donnée parce que tu m'as aimé avant la fondation du monde. 25Père juste, le monde ne t'a jamais connu ; mais moi, je t'ai connu, et eux, ils ont su que tu m'as envoyé. 26Je leur ai fait connaître ton nom et je le leur ferai connaître, pour que l'amour dont tu m'as aimé soit en eux, comme moi en eux.


Seule la foi en Jésus Christ peut nous permettre de comprendre que l’espérance peut jaillir au cœur d’un échec total. Seul Jésus peut dire un échec en termes positifs et dire l’espérance au cœur des drames. Mais est-il toujours possible de voir la main de Dieu agir quand tout s’effondre autour de nous? Qui saura faire avec sagesse le bilan positif d’une vie anéantie? Tout cela nous pose vraiment question, cependant notre existence n’aurait aucun sens si Dieu ne venait accompagner par sa présence les drames de notre vie. Mais comment voir cette présence quand nous sommes aveuglés par ce qui devient incompréhensible à notre raison? Pourquoi Dieu semble-t-il absent quand nous souffrons le plus ? A travers l’expérience de Jésus nous espérons trouver une réponse, car nous savons que Dieu agit même si le malin nous cache sa présence.

Dans ces paroles de la prière sacerdotale, que l’Evangéliste Jean place dans la bouche de Jésus, nous avons la réponse de Dieu à tous les drames vécus par les hommes. Jésus se trouve dans une situation d’échec total et la mort en est la seule issue. Plus rien ne devrait avoir de sens pour lui. Ses amis qui sont encore autour de lui ne comprennent rien à sa situation et chacun à son tour va l’abandonner à la nuit du désespoir. Il va mourir d’une mort qu’il a choisie mais que personne ne comprend, et cela ne fait qu’accroître le sentiment d’abandon qu’il ressent. Le traître est déjà en train de faire son œuvre. Ce décor d’angoisse que je viens de décrire a été planté par les autres Evangiles, mais il reste en toile de fond dans cette ultime prière que Jésus prononce pour nous.

Dans ce décor de cauchemar, jaillit la plus forte protestation d’espérance que peut proférer un humain. L’Evangéliste nous montre que Dieu peut être présent dans les drames de la vie, même si ce n’est pas cette présence que nous souhaitons. Nous comprenons qu’il peut donner du sens à l’aventure humaine, même quand elle n'en a plus. Nous pouvons alors actualiser tous nos échecs dans ce récit et entendre Jésus dire pour chacun de nous: « Père, je veux que là où je suis ceux que tu m’as donnés soient aussi... ». Mais si nous comprenons que Dieu est présent et donne du sens à ce qui n’en a pas, nous ne comprenons pas pourquoi il reste impuissant à modifier le cours des choses et à faire simple alors que tout nous paraît si compliqué.

Jésus se situe dans ce monde ci, celui où nous sommes, mais il se tient à la frontière d’un autre monde que nous ne connaissons pas encore mais où se situe la vérité de Dieu. Le monde où nous sommes avec ses drames et ses échecs fait écran et nous empêche de voir une autre réalité qui est tout aussi réelle que celle du monde où nous sommes. Jésus nous permet d'entrevoir cette nouveauté et crée de la sérénité là où nous ne voyons que tristesse et souffrance.

Il ne puise pas sa sérénité dans une sagesse spéciale qu’il serait le seul à connaître. Il la puise dans sa compréhension des Ecritures où il trouve un motif d'espérance. Il intègre complètement cette espérance et nous la rend possible. A son contact elle devrait devenir nôtre. Il l’intègre tellement qu’il finit par s’identifier à Dieu au point d’être confondu avec lui. C'est par l'espérance qu'il puise dans l'Ecriture qu'il se fait si proche de Dieu qu'il se confond avec lui. Jésus ne devient pas alors fils de Dieu par une naissance miraculeuse qui l'aurait mis à part, mais il le devient parce qu'il se fait porteur de l'espérance qu'il puise dans les Ecritures au point qu'il se trouve absorbé dans la divinité de Dieu. Etant de même nature que Jésus, nous avons accès au même sort que lui. Il nous devance seulement sur le chemin de la connaissance du salut. Tous nos désespoirs et tous nos échecs trouvent alors leur aboutissement en Dieu. Jésus s’avance sur le chemin de la connaissance de Dieu aussi démunis que nous le sommes, mais il nous encourage à le suivre et à l’imiter. C'est ainsi qu'en partageant son espérance nous devenons comme lui, un enfant de Dieu. Le chemin qu'il propose est celui que peut suivre tout individu, s’il est guidé correctement. Jésus nous donne l’exemple et se propose d’être notre guide, tel Virgile dans la divine comédie guidant les pas de Dante ou tel l'ange guidant les pas de Jean dans l'Apocalypse.

Rien ne se fait sans peine et sans effort. Tout a commencé à l’origine du monde. Pour comprendre cela il va falloir que nous fassions un long retour en arrière jusqu’aux temps de la création comme Jésus nous y invite quand il dit : « Tu m’as aimé dès avant la fondation du monde » Il nous ramène à l’origine de toute chose, quand après que le monde ait surgi hors du néant Dieu s’est intéressé à lui. Jésus a compris, le premier avant tous, qu’avant même que le monde soit, Dieu qui était déjà amour, se préparait à animer de cet amour les êtres pensants qui allaient devenir ses vis à vis et qu'il commençait déjà à aimer. Autrement dit, avant même que ne retentisse dans l’univers qui n’existait pas encore, le fracas du big bang qu’aucune oreille n’avait pu entendre puisqu’il n’y en avait pas une seule, avant même que ce moment mythique ne se produise, existait déjà une pulsion d'amour qui allait animer ce qui n'était pas encore créé.

Mais cela ne voulait pas dire que l’évolution du monde ne se ferait pas sans souffrance. Il n’était pas dit que malgré l’amour que Dieu allait prodiguer aux hommes, ceux-ci échapperaient aux difficultés de l’existence qu’ils allaient mener. Il n’était pas dit non plus que les hommes par leur péché allaient en rajouter. Jésus a fait de la notion d'amour le code de lecture indispensable pour lire les Ecritures. C'est avec cette intuition, que Jésus a décrypté les Ecritures pour nous. Il a compris que cet amour était présent à chaque étape de la révélation. Ce n'était pas seulement une idée sublime, capable de nous faire rêver, il a découvert que l’amour pouvait se matérialiser. Toute sa personne a rendu compte de cette réalité et il est devenu dans sa personne l'expression de l'amour tel que Dieu l’avait conçu.

On aurait pu penser que s'étant approché de Dieu jusqu'à ce point, il allait entrer tout vivant dans le mystère de Dieu. Il n’en fut rien. Il aurait pu être comme ces grands sages de l’Inde qui à force d’ascèse et d’abstinence arrivent à s’identifier au divin si bien que leur apparence physique tend à s’estomper jusqu’à disparaître. On aurait pu croire que Jésus allait vivre la même initiation et que sa vie allait se terminer en étant absorbé par le divin. . Mais il en a été autrement. Pour entraîner tous les hommes à sa suite il a consenti à aller jusqu' aux portes du néant pour que le néant s’ ouvre sur l’Eternité pour tous ceux qui le suivraient. Tout cela ne pouvait s’achever dans une pirouette où on aurait vu Jésus disparaître dans le divin. Il fallait que son action concerne aussi la matière. L’affrontement avec la mort devenait inévitable. Il fallait que le divin s’empare du néant et de la mort. La fin de Jésus telle que nous la connaissons devenait désormais inévitable.

C’est donc porteur des promesses déjà contenues dans tout ce qui a préludé à la création que Jésus a vu venir la mort vers lui et qu’elle est devenue vie et éternité. La victoire sur la mort signifie donc qu’il n’y a désormais aucun lieu d’exclusion, aucune situation d’échec irrémédiable où Dieu ne puisse apporter une note d’espérance. Tout cela en termes clairs signifie que depuis toujours Dieu s’efforce d’intégrer tous les drames humains, qu’il n’est indifférent à aucun échec. Jésus a montré que par sa mort le désespoir n’a aucune place dans les projets de Dieu pour les hommes. Bien entendu, le malin s’acharne à brouiller les cartes et à mettre en nous la perturbation, mais il ne peut anéantir l’espace d’éternité que Dieu a inscrit en chacun de nous.