mardi 20 juin 2017

2 Rois 4 /8-16 On ne s'adresse pas à Dieu sans écouter ce qu'il dit - dimanche 2 juillet 2017



 2 Rois 4 :8-16

On prendra tout le récit  2 Rois  4/8-37

8 Un jour Elisée passait par Shounem. Il y avait là une femme de haut rang, qui le pressa d'accepter à manger. Dès lors, toutes les fois qu'il passait, il se retirait chez elle pour manger.
9 Elle dit à son mari : Je sais que cet homme qui passe constamment chez nous est un saint homme de Dieu.
10 Je t'en prie, faisons une petite chambre en dur à l'étage, et mettons-y pour lui un lit, une table, un siège et un porte-lampes. Quand il viendra chez nous, il pourra s'y retirer.
11 Le jour où Elisée revint, il se retira dans la chambre à l'étage et s'y coucha.
12 Il dit à Guéhazi, son serviteur : Appelle cette Shounamite. Guéhazi l'appela, et elle se présenta devant lui.
13 Elisée dit à Guéhazi : Dis-lui, je te prie : Tu as fait beaucoup de choses pour nous ; que peut-on faire pour toi ? Faut-il parler pour toi au roi ou au chef de l'armée ? Elle répondit : J'habite au milieu de mon peuple.
14 Il dit alors : Que faire pour elle ? Guéhazi répondit : Hélas, elle n'a pas de fils, et son mari est vieux.
15 Elisée dit : Appelle-la. Guéhazi l'appela ; elle se présenta à la porte.
16  Elisée lui dit : A cette époque-ci, l'année prochaine, tu auras un fils dans tes bras. Elle dit alors : Non, mon seigneur, homme de Dieu ! Ne me mens pas, à moi, ta servante !
17 Cette femme fut enceinte ; elle mit au monde un fils à la même époque, l'année suivante, comme Elisée le lui avait dit.
Mort du fils de la Shounamite
18 L'enfant grandit. Un jour qu'il était sorti vers son père, auprès des moissonneurs,
19 il dit à son père : Ma tête ! ma tête ! Le père dit à son serviteur : Porte-le à sa mère.
20 Il l'emporta et l'amena à sa mère ; l'enfant resta sur les genoux de sa mère jusqu'à midi, puis il mourut.
21 Elle monta, le coucha sur le lit de l'homme de Dieu, ferma la porte sur lui et sortit.
22 Elle appela son mari et lui dit : Envoie-moi, je te prie, un des serviteurs et une des ânesses ; je cours trouver l'homme de Dieu et je reviens.
23 Il dit : Pourquoi vas-tu le voir aujourd'hui ? Ce n'est ni nouvelle lune ni sabbat. Elle répondit : Tout va bien.
24 Puis elle fit seller l'ânesse et dit à son serviteur : Conduis-la et marche ; ne m'arrête pas en route sans que je te le dise.
25 Elle partit donc trouver l'homme de Dieu au mont Carmel. Quand l'homme de Dieu l'aperçut de loin, il dit à Guéhazi, son serviteur : C'est cette Shounamite !
26 Maintenant, cours à sa rencontre, je te prie, et dis-lui : Vas-tu bien ? Ton mari va-t-il bien ? L'enfant va-t-il bien ? Elle répondit : Tout va bien.
27 Dès qu'elle fut arrivée auprès de l'homme de Dieu dans la montagne, elle lui saisit les pieds. Guéhazi s'approcha pour la repousser, mais l'homme de Dieu dit : Laisse-la, car elle est amère ; le SEIGNEUR me l'a caché, il ne m'en a pas informé.
28 Alors elle dit : T'ai-je demandé un fils, mon seigneur ? N'ai-je pas dit : Ne me trompe pas !
29 Elisée dit à Guéhazi : Passe une ceinture à tes reins, prends mon bâton et va. Si tu rencontres quelqu'un, ne le bénis pas ; et si quelqu'un te bénit, ne lui réponds pas. Tu mettras mon bâton sur le visage du garçon.
30 La mère du garçon dit : Par la vie du SEIGNEUR et par ta propre vie, je ne te quitterai pas ! Alors il se leva et la suivit.
31 Guéhazi les avait devancés et il avait mis le bâton sur le visage du garçon ; mais il n'y eut ni voix ni signe d'attention. Il revint à la rencontre d'Elisée et le mit au courant en disant : Le garçon ne s'est pas réveillé.
Elisée rend la vie à l'enfant
32 Lorsque Elisée entra dans la maison, le garçon était mort, couché sur son lit.
33 Elisée entra et ferma la porte sur eux deux pour prier le SEIGNEUR.
34 Il monta et se coucha sur l'enfant ; il mit sa bouche sur sa bouche, ses yeux sur ses yeux, ses mains sur ses mains. Il resta courbé sur lui, et la chair de l'enfant se réchauffa.
35 Elisée revint dans la maison et se mit à marcher de long en large ; puis il remonta et se courba sur l'enfant ; alors le garçon éternua sept fois et ouvrit les yeux.
36 Elisée appela Guéhazi et lui dit : Appelle cette Shounamite. Guéhazi l'appela, et elle vint vers Elisée qui dit : Prends ton fils.
37 Elle vint et tomba à ses pieds, prosternée jusqu'à terre ; puis elle prit son fils et sortit.


Il y a des moments où l’actualité de notre foi se trouve enrichie par l’évocation du passé, si bien que la sécheresse spirituelle qui semble traverser nos communautés aujourd’hui se trouve dynamisée par la glorieuse histoire de nos Pères fondateurs. Tout cela se produit en ces temps ci,  quand nos communautés   éprouvent le besoin d’un nouveau souffle.  A n’en pas  douter, vous avez compris que j’évoque  la  modeste réalité  de nos églises d’aujourd’hui, face à l’ampleur de l’événement  que prend  l’évocation  des cinq cents ans  de la naissance du protestantisme.  Nos églises y puisent avec espoir un renouveau qu’elles espèrent revitalisant. Ce n’est pas la première fois que la sècheresse de l’actualité se trouve irriguée par l’évocation du passé.

Que retiendront les Eglises de cette page d’histoire ? Vont-elles vivre un renouveau ou vont-elles se replonger dans la nostalgie ambiante de ce  XXI eme siècle qui se cherche et qui ne trouve plus dans l’Evangile le carburant nécessaire pour alimenter le moteur de leur  foi ? L’histoire nous le dira.

Nous nous servirons de cet épisode de la geste d’Elisée pour nous aider à comprendre notre propre situation. Mais qui aujourd’hui connait l’histoire d’Elisée et  sait qu’il est compté parmi les grands prophètes de l’histoire d’Israël ?  Aucun livre de la Bible  ne lui est  consacré. On trouve  le récit de son épopée  dans  quelques chapitres du deuxième livre des Rois. Il nous est raconté qu’il reçut avec le manteau d’Elie le double de sa sagesse. Elie, quant à lui, est perçu par la tradition comme le prince des prophètes. Il ne connut pas la mort et fut enlevé vers le ciel par un char de feu, son disciple Elisée vaut le maître.

Elisée qui prit sa suite ne fut  pas le moindre des prophètes. Ce faiseur de roi est connu pour l’abondance de ses miracles. Homme de grande autorité,  il  ne badinait pas avec la morale. Il arriva qu’on l’insultât et  il ordonna aux ours de tuer  ses provocateurs. Ce héro de la foi vivait dans le Royaume du Nord vers l’an –800, à l’époque de la double monarchie. Farouche défenseur du monothéisme de Yahvé, on le trouve à l’œuvre sur tous les plans.

Son histoire fut rédigée beaucoup plus tard après le retour de l’exil, comme la plupart des textes bibliques,  à une époque  où malgré l’activisme des scribes et autres clercs,  on cherchait  à construire  la foi au vrai Dieu.  Le peuple était revenu en Israël après cinquante ans d’exil.  Il  n’y avait plus de roi et si le temple avait été reconstruit, il n’avait pas la splendeur de celui de Salomon. L’ambiance donnait dans le marasme.

Les scribes s’affairaient  en plusieurs écoles à rédiger  les textes de la Bible. Ils étaient sans doute à la recherche de héros dont l’histoire pourrait stimuler la foi. Elisée faisait sans doute partie de ces personnages dont  l’histoire haute en couleur  permettrait de donner du courage à un peuple en manque d’espérance.  C’est apparemment le but de l’épisode que nous étudions dans ce passage. Mais prêtez attention au texte, il agit comme une vraie leçon de théologie, c’est pourquoi   il dit peut être le contraire de ce qu’il raconte  car  la leçon qu’il cherche à donner est ailleurs que dans le récit lui-même.

Nous allons faire une paraphrase de ce texte en insistant sur les éléments clé de ce qu’il raconte. Elisée, trouva grâce auprès d’une femme riche et pieuse qui pourvoyait à ses besoins pendant ses séjours à Sumène, village dont on ne sait rien. Comment la remercier de sa générosité ? Constatant son manque d’enfant et la vieillesse de son mari, le prophète lui promet une naissance prochaine. De quoi se mêle-t-il ?  Une telle promesse aurait mérité un peu plus  de tact et de la délicatesse. Ne se prenait-il pas pour l’ange  qui annonça la future naissance d’Isaac à Abraham ? Mais  il n’était   pas mandaté par Dieu pour cela.


Cette promesse qu’il fit à la femme ne fut pas perçue comme une bonne nouvelle : «  Non, non, mon Seigneur, homme de Dieu ne déçoit pas ta servante » !  Sa protestation  montre peut être qu’elle est porteuse d’un secret que le prophète, malgré son intention de bien faire n’a pas perçu.  Il n’a pas été capable de discernement et il n’a pas compris qu’il s’aventurait dans un domaine où son intrusion n’était pas souhaitée. En cela  il  manquait de la délicatesse dont  il aurait eu besoin  pour  porter un message  de la part de son Dieu qu’il n’a pas consulté, si bien que ses paroles généreuses ne sont pas fondées.

Un enfant  naquit cependant. L’intuition du prophète  avait-elle été bonne ? Mais quand on est homme de Dieu, on ne parle pas par intuition, on parle parce qu’on est chargé d’un message par Dieu, mais Dieu n’avait pas été consulté. Le prophète avait agit  comme s’il savait mieux que Dieu ce qui était bon pour elle.

Puis l’enfant meurt sous le regard assez indifférent de son père. C’est comme si le père blasé s’y attendait, c’est comme s’il s’attendait à l’événement. C’est comme si cette femme mettait au monde des enfants qui ne peuvent pas vivre longtemps. Ce n’était sans  doute pas sa première expérience dans ce sens.  Etait-ce une maladie génétique qui atteignait tous les enfants qu’elle portait, on ne sait ?  Quoi qu’il en soit  Elisée ne comprend toujours pas le double langage de la femme. En la voyant venir à lui, un jour  où il n’y avait pas de raison qu’elle vienne, il aurait du comprendre. Elle lui fit dire que tout va bien alors que tout va mal.  C’est en fait de Dieu qu’elle attend quelque chose  et pas de lui. Mais il met du temps à comprendre son  désarroi.

S’il envoie son serviteur  en toute hâte pour opérer un geste qui semble magique, lui Elisée ne se presse pas. Il espère peut être que son bâton opérera le miracle sans que lui intervienne, comme l’avait fait jadis le bâton de Moïse. Mais ni le bâton de Moïse, ni le sien ne sont magiques. En fait  c’est Moïse qui tenait le bâton et c’est lui,  et non pas le bâton qui accomplit le miracle.  Ici ce n’est pas Elisée qui tient le bâton, et il n’y a pas de miracle. C’est  n’est que sur l’insistance de la femme,  qu’Elisée se déplace, et c’est elle qui invoque l’Eternel et non lui. C’est alors qu’il se permet de faire le même geste qu’Elie avait fait dans une circonstance semblable et qu’il avait réveillé un enfant. Mais à la différence d’Elie, il doit s’y prendre à deux fois, comme si  l’Eternel ne reconnaissait pas sa compétence, mais qu’en fin de compte, par égard pour cette femme il acceptait que l’enfant vive.

On pourrait s’arrêter là, la suite se passe de commentaire. Ce n’est pas parce qu’un homme est célèbre et dont la foi est reconnue que les actes qu’il faits sont le reflet de la volonté de Dieu. Les historiens de la Réforme n’ont pas manqué de souligner les faiblesses des Réformateurs et nous  invitent à en tenir compte. Ici le Livre des Rois nous invite à voir avec sagesse comment, même un prophète prestigieux peut se fourvoyer quand il fait l’économie de la foi dans l’exercice de son ministère. La foi, c’est cette sagesse qui nous vient de Dieu quand on sait avec modestie le mettre au centre de nos préoccupations.

Dans les moments de sécheresse spirituelle, quand on a l’impression que le monde se détourne de Dieu, ce n’est pas l’évocation glorieuse du passé qui redonne du lustre à l’Eglise, c’est l’humble fidélité de chacun de ses membres à l’écoute de la parole par laquelle l’Eglise comprendra quelle est la volonté de Dieu dans ce temps précis où nous vivons.

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