vendredi 23 octobre 2020

Matthieu 22/34-40 dimanche 25 octobre 2020

 

Matthieu 22/34-40  

En ce temps-là, les pharisiens, apprenant qu’il avait fermé la bouche aux sadducéens, se réunirent,
et l’un d’entre eux, un docteur de la Loi, posa une question à Jésus pour le mettre à l’épreuve :
« Maître, dans la Loi, quel est le grand commandement ? »
Jésus lui répondit : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit.
Voilà le grand, le premier commandement.
Et le second lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même.
De ces deux commandements dépend toute la Loi, ainsi que les Prophètes. »

Ce serait bien si, dès le réveil, quand nous ouvrons les paupières, nous nous mettions à l’unisson avec Dieu et  que nous  contemplions  par la pensée le monde qui s’offre à nous en pensant à Dieu. C’est alors que le verbe aimer s’imposerait à notre esprit et que nous pourrions nous   mettre  à le  conjuguer à tous les temps de l’indicatif, du subjonctif et du conditionnel. C’est Dieu qui occuperait alors toute la place, car Dieu est amour nous est-il dit dans l’épître de Jean. C’est  en effet par cette notion d’amour que Jésus a décrit sa relation au Père et c’est grâce à tout ce que ce mot suggère que chacun est invité à s’approcher de Dieu et à le contempler.

Nous vivons dans un siècle où la notion d’amour occupe une grande place et le mot lui-même accompagne bien des propos. Les jeunes parmi nos contemporains font usage d’un mot d’argot pour exprimer ce sentiment. Quand ils parlent d’une chose ou d’une personne ils disent qu’ils le kif grave, ce qui veut dire qu’il y a de l’amour dans cette relation. En parlant ainsi, ils pensent se projeter  dans un autre univers d’où la notion classique de l’amour n’aurait plus exactement sa place.

Pour ce qui est de la notion d’amour telle que Jésus l’envisage nous découvrons qu’il  confond en une même notion, notre capacité à aimer les autres et  l’empreinte que Dieu laisse en nous. «  Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur et de tout ton âme et de toute ta pensée dit-il aux pharisiens, et ton prochain comme toi-même ajoute-t-il». Mais le mot amour n’est pas forcément nécessaire pour en exprimer la notion. Nous venons de le voir.  Les animateurs de la jeunesse protestante ont bien perçu ce rapport avec Dieu quand ils ont fait usage de cette expression argotique dont je parlais il y a un instant pour  désigner les rassemblements  de la jeunesse : le Grand Kif. Mais l’expression échappe vite  à notre  contrôle. Avec le temps, pour faire branché, l’idée même d’amour  laisse la place à un logo qui représente un cœur et qui désigne tout ce qui est susceptible d’être aimé. Si donc Dieu est amour, il semble avoir sa place dans tout ce qui représente  l’amour  sans qu’on y prenne garde.

Ne vous illusionnez pas cependant, l’amour et son application à Dieu n’ont quand même pas pour autant envahi notre monde, car la notion d’amour a perdu une partie de son intensité et  désigne simplement dans notre esprit un penchant pour quelque chose  qui sort de l’ordinaire et qui nous fait plaisir.  Pourtant  sait-on seulement que  c’est Jésus qui a imaginé de faire de l’amour le centre de la société de son temps. Ça remonte à loin ! Le mot amour est pour lui celui qui qualifie le mieux notre relation à Dieu. C’est aussi cette notion d’amour qui pour lui  doit qualifier notre relation avec les autres. Pour Jésus la découverte de la relation à Dieu est de la même nature que notre relation à l’autre. Pour lui donc, on ne peut aimer Dieu sans tenir compte des autres et notre bonne relation avec les autres nous conduit forcément à Dieu. Il est donc bon de nous interroger au sujet de  tout ce qui se cache  derrière la notion d’amour.

 Le Petit Larousse  définit le mot amour en disant que ce mot traduit une affection vive pour quelqu’un. Pour éprouver de l’amour, il faut donc puiser au fond de ses sentiments  et user de quelque chose qui nous appartient et d’en faire usage à l’intention de l’autre.  Pour éprouver de l’amour, il faut que nous nous délestions d’une partie de ce qui nous appartient pour le destiner à quelqu’un d’autre qui n’est pas nous.

Jésus en parlant d’amour nous dévoile une partie de nous-mêmes selon laquelle nous serions capables de nous démunir de quelque chose qui est à nous pour la conférer à d’autres. L’altruisme fait donc partie de ces qualités qui sont en nous et dont nous serions capables de nous délester pour que des relations heureuses puissent s’établir entre les êtres. Et dans cette relation à l’autre Dieu  se trouve concerné.

Cette capacité à aimer est donc quelque chose  qui nous est propre et qui doit nous pousser vers les autres pour  favoriser notre vie avec eux. C’est donc comme cela que Dieu a prévu que nous devons fonctionner et Jésus voit dans ce fonctionnement l’empreinte du divin.

 Pourtant  aujourd’hui on estime que le mot amour  est galvaudé. Nous nous comportons comme si  la relation  entre les humains relevait  plus de l’esprit de domination que de l’esprit d’amour. Il en va de même de notre relation avec Dieu.  On pense que notre relation à Dieu est de même nature  car on estime plutôt que Dieu doit dominer sur nous avant de nous aimer. Dans notre manière de penser habituelle  nous  estimons davantage     que notre relation à Dieu dépendrait  d’abord d’un esprit de domination, qu’il exercerait sur nous, et sur la nature ce qui correspondrait plus à la conception que nous avons de Dieu

Quant à la notion d’amour elle fonctionnerait comme une pratique sélective de nos sentiments. Nous  destinerions   notre amour à Dieu, seulement,  si c’est nous qui décidions de l’aimer en fonction des événements, quant à l’amour pour les autres, nous le réserverions au gens de notre choix, si bien que nous n’aimerions que les gens susceptibles d’être aimés par nous. Même dans ces conditions, nous dit Jésus, l’amour  traduit  quand même quelque chose qui émane de nous et qui relève du divin, et sans que nous le voulions, il y a quelque chose de Dieu qui subsiste dans notre relation avec les autres, même quand cette relation est dénaturée, comme je viens de le dire.

Bien entendu, quand Jésus insiste sur le fait que Dieu se révèle dans notre capacité à aimer, il n’est pas suivi  par ses interlocuteurs et par nous-mêmes. La plupart des philosophes qui invitent les hommes à partager ce qu’ils possèdent pour construire une société plus juste se prétendent athées sans aucune référence à Dieu alors que leurs discours expriment en partie les mêmes idées que Jésus quand il cherchait à définir Dieu.

En réalité, pour beaucoup de croyants, nous l’avons déjà dit, Dieu ne se cache pas derrière un sentiment d’altruisme, mais derrière sa toute-puissance qui gèrerait le monde à sa fantaisie. Cependant, on voit bien que ça ne marche pas. La Covid 19 qui aujourd’hui défie les nations, provoque les scientifiques du monde entier, plonge les politiciens dans un défi permanent qui n’aboutit à rien et dont aucun rite d’apaisement ne vient à bout, signifie bien que ce n’est pas dans  le domaine  de la domination  des obstacles qu’il faut chercher Dieu.

Aujourd’hui, face au virus, Dieu oppose la force d’aimer. Il s’agit d’aimer l’autre en agissant de telle  sorte que rien dans nos comportements ne puisse porter  atteinte à leur vie  Il s’agit de se comporter de telle sorte que les autres iront mieux grâce à notre relation avec eux  et que nous n’opposerons pas notre liberté personnelle à la sécurité des autres.

Dans notre aventure avec Dieu, je voudrais relever  encore, pour terminer,  un aspect qui caractérise Dieu et dont nous venons de parler. Dieu se révèle aussi  à nous dans sa capacité d’intervenir dans la vie qu’il nous donne. Quand il se révéla à Moïse, Dieu se présenta comme le vivant, celui qui préside à tout ce qui vit.

Quand je vous invitais au début de mon propos à évoquer Dieu en conjuguant le verbe aimer, j’aurais pu aussi vous inviter à conjuguer le verbe être : je suis celui qui est, qui était et qui vient avait-il dit à Moïse, je suis le vivant. Le Dieu de la vie se mêle au Dieu de l’amour pour nous entrainer à vivre ces moments difficiles pour nous rappeler qu’il est  celui qui nous aide à vivre en aimant les autres.

 

 

I Jean 9/16 Dieu est amour

Autres lectures :Exode :3/7-14

Cantiques :35/19 Pour que le jour qui se lève soit plus beau

46/02 Seigneur accorde-moi d’aimer

 

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