vendredi 2 janvier 2009

Comment reconaître la parole de Dieu 1 Samuel 3/3-19 Dimanche 18 janvier 2009





1 Samuel 3/2-19



3 2 Une nuit, le prêtre Héli, qui était devenu presque aveugle, dormait à sa place habituelle. 3 Samuel aussi dormait. Il était dans le temple du Seigneur, près du coffre sacré. Avant l'aube, alors que la lampe du sanctuaire brûlait encore p , 4 le Seigneur appela Samuel. Celui-ci répondit : « Oui, Maître », 5 puis il accourut auprès d'Héli et lui dit : « Tu m'as appelé ; me voici ! » — « Je ne t'ai pas appelé, dit Héli ; retourne te coucher. » Samuel alla se recoucher.


6 Une seconde fois le Seigneur appela : « Samuel ! » L'enfant se leva et revint dire à Héli : « Tu m'as appelé ; me voici ! » — « Non, mon enfant ! répondit Héli, je ne t'ai pas appelé ; retourne te coucher. » 7 Samuel ne connaissait pas encore personnellement le Seigneur, car celui-ci ne lui avait jamais parlé directement jusqu'alors.
8 Pour la troisième fois, le Seigneur appela : « Samuel ! » Samuel se leva, revint trouver Héli et lui dit : « Tu m'as appelé ; me voici ! » Cette fois, Héli comprit que c'était le Seigneur qui appelait l'enfant. 9 Il lui dit alors : « Va te recoucher. Et si on t'appelle de nouveau, tu répondras : «Parle, Seigneur, ton serviteur écoute !» » Samuel alla donc se recoucher à sa place.


10 Le Seigneur vint et se tint là ; comme les autres fois, il appela : « Samuel, Samuel ! » L'enfant répondit : « Parle, ton serviteur écoute. » 11 Le Seigneur déclara à Samuel : « Je vais frapper Israël d'un malheur tel qu'il fera l'effet d'un coup de tonnerre sur ceux qui l'apprendront. 12 Ce jour-là, je réaliserai à l'égard d'Héli et de sa famille tous les malheurs dont je les ai menacés, sans rien négliger. 13 Je l'ai averti que je condamnais sa famille pour toujours ; en effet, ses fils ont péché en me traitant avec mépris, et lui, qui savait cela, les a laissés faire. 14 C'est pourquoi j'ai juré à la famille d'Héli que ni sacrifices ni offrandes ne pourront jamais faire oublier son péché. »


15 Samuel resta couché jusqu'au matin. Puis il alla ouvrir les portes du sanctuaire. Il craignait de raconter sa vision à Héli ; 16 mais Héli l'appela : « Samuel, mon enfant ! » — « Oui, Maître », répondit-il. 17 « Que t'a dit le Seigneur ? demanda Héli ; ne me cache rien. Si tu me caches un seul mot de ce que Dieu t'a dit, je veux qu'il t'inflige la plus terrible des punitions. » 18 Alors Samuel lui raconta tout, sans rien cacher. Héli déclara : « Il est le Seigneur ! Qu'il fasse ce qu'il juge bon. »




Le sermon :1 Samuel 3/5-19


L’esprit humain est particulièrement fécond, jamais il ne cesse de fonctionner, il est toujours en mouvement, si bien que la tête de chacun de nous se trouve remplie d’idées et de pensées qui jamais ne cessent de se bousculer. Elles fonctionnent comme autant de voix intérieures dont on ne saurait trouver les origines ou les aboutissements. C’est ainsi que travaille notre cerveau qui ne se donne jamais de repos.

Parmi toutes ces voix intérieures dont les unes traduisent des désirs, les autres des souvenirs, d’autres encore formulent des projets, d’autres enfin nous font entendre des voix à jamais disparues. Toutes s’entremêlent sans qu’aucun contrôle ne puisse se faire et il arrive que l’on s’interroge pour savoir si Dieu lui-même ne joint pas sa propre voix au concert des autres.

Il se produit parfois qu’au milieu de la nuit, alors qu’on ne sait pas vraiment si on dort encore ou si l’on est déjà réveillé, alors que le flot des pensées s’est calmé ou même s’est tu tout à fait, qu’une question particulière nous assaille. Et si c’était la voix de Dieu? On se demande alors si Dieu ne veut pas nous engager dans un projet qui déjà nous tient à cœur ou s’il cherche à nous entraîner sur un chemin dont on voudrait s’écarter. Comment savoir ? Qui sera pour nous le bon guide? Comment faire le tri dans toutes ces voix qui traversent notre inconscient et comment ne pas accorder du crédit à celle qui en pleine nuit nous a réveillés ?

La lecture du récit de l’appel que Dieu fait à Samuel encore enfant a imprégné la vie des enfants de l’Ecole du dimanche pendant de longues générations. Ce récit nous a été raconté avec une simplicité exemplaire, comme pour nous dire que ceux qui ont le cœur pur pouvaient entrer avec aisance dans les mystères de Dieu. Il est arrivé que certains parmi nous après avoir écouté ce récit se soient imaginés que Dieu pouvait les appeler de la même façon et que c’était même la manière habituelle de Dieu de parler aux hommes. L’expérience ne confirme généralement pas cette réalité, certains même, déçus en sont arrivés à se détourner de Dieu.

Il est vrai que bien peu parmi nous, ont réussi à lire clairement dans leurs propres pensées des messages cohérents de la part de Dieu. Mais il est vrai aussi que si on se donne la peine d’approfondir ce texte nous arriverons à trouver quelques pistes de réflexion qui nous permettrons de comprendre comment Dieu parle aux hommes, car il est vrai qu’il leur parle, sans quoi la Bible ne pourrait pas être perçue comme l’expression de « la parole de Dieu. »



Historiquement, nous savons que nous n’avons pas dans ce texte un message de première main. Ce n’est pas un récit tel qu’aurait pu le transmettre un observateur présent sur les lieux. Il s’agit d’un récit rédigé beaucoup plus tard par un écrivain biblique. A un moment crucial de l’histoire d’Israël : le désastre de l’exil à Babylone, il a cherché à rendre compte d’un des événements fondateurs d’Israël. Il raconte dans ces pages comment Israël est devenu une nation sous la conduite de Samuel. Au moment où les armées de Babylone ont investi la ville de Jérusalem, quand toutes les valeurs d’Israël se sont effondrées, quand le roi exilé a perdu son pouvoir et que le temple démoli n’ a plus rassemblé les fidèles, l’auteur de ce texte s‘est interrogé sur le sens des origines de son peuple. Il a remonté le cours de l’histoire jusqu’à cette époque extrêmement floue où Israël n’existait pas encore en tant que nation, où aucun monarque n’avait encore tenté d’unifier les tributs et où la seule autorité semblait être celle des prêtres qui avaient en garde l’arche de l’Alliance, l’objet le plus sacré héritée de Moïse lui-même. C’est autour de « l’arche de l’alliance » que se constituera l’unité précaire de ces tribus encore éparses. Mais qu’adviendrait-il si l’arche disparaissait ? Or l’arche va disparaître.

Le rédacteur de ce passage cherche dans cet événement la réponse à la question : Y a-t-il encore une cohérence possible pour Israël quand le peuple se trouve brutalement sans roi, sans prêtre, et sans l’arche de l’alliance ? C’est bien ainsi, en effet que se présente la situation au moment de l’exil. Peut-il y avoir encore un élément unificateur ?

Si nous essayons d’interroger ce récit, nous découvrons que la seule réponse possible, c’est que Dieu reste fidèle à sa parole. C’est la fidélité de Dieu à sa parole qui donne cohérence à toute cette histoire. Mais comment reconnaître la Parole de Dieu ? C’est justement cette question qui est posée ici.

C’est à Silo que se produisit l’événement, bien avant que Salomon ait construit un temple à Jérusalem. Silo était ce que l’on appelle un Haut Lieu, c’est à dire un sanctuaire. Et c’est là que l’arche de l’Alliance avait été déposée et confiée au ministère du prêtre Eli et de sa descendance. La pratique du culte, à ce moment là était sans doute assez sommaire et consistait vraisemblablement à faire des sacrifices et à recevoir des oracles pour le service des quels les fils d’Eli se faisaient grassement payer. En fait, nous l’avons compris, le prêtre était tombé en disgrâce, du fait de la mauvaise conduite de ses fils. Peu après le récit de la vision de Samuel dans le sanctuaire, on va nous raconter la mort d’Eli et la capture de l’arche par les Philistins. Etait-ce la fin, alors que rien n’avait encore vraiment commencé ?

C’est dans un tel contexte, sans doute assez obscur pour qui n’est pas initié, que nous allons nous interroger pour savoir comment Dieu parle. Tout va tourner autour d’un enfant, Samuel, qui n’est pas très aidé par ceux qui ont la charge de le former. Eli, à ne pas confondre avec son homonyme Hélie le prophète, qui est sensé lui apprend les rudiments de la religion ne sait même plus reconnaître la voix de Dieu qui doit s’y prendre à trois fois pour se faire entendre. L’enfant, quant à lui, semble ignorer complètement que Dieu peut lui parler.

Personne n’a encore compris le rôle que Dieu voudrait voir jouer à l’enfant. C’est dire qu’il n’est pas facile de décrypter les projets de Dieu, même quand cela paraît évident. En effet, quand enfin Samuel prend conscience que Dieu lui parle, Dieu ne lui fait qu’une description de la situation et lui expose les conséquences qui en découlent, mais il ne lui dit rien de ce qui le concerne. Ce sera à lui, d’en déduire ce que Dieu attend de lui. A partir de ce premier constat, on peut déjà dire, semble-t-il, que nous portons déjà en nous les éléments par lesquels Dieu nous fera connaître sa volonté. C’est ici le cas de Samuel, le contexte de sa vie est suffisamment explicite pour que l’on comprenne le choix de Dieu. Mais il devra découvrir tout seul que ce sera à lui d’assumer le destin d’israël. La voix de Dieu n’a pas d’autres fonctions que de le révéler à lui-même.

Même si Dieu le prépare depuis sa naissance à accomplir les fonctions qui font cruellement défaut à Israël. Il faudra qu’il découvre tout seul qu’il a en lui la capacité de les exercer, même s’il n’est pas prêtre, même s’il n’est pas de la famille d’un chef.




Celui qui rédige ce texte bien après l’événement tirera de tout cela deux conclusions importantes. La première, c’est que la parole de Dieu pour être comprise doit se révéler à partir d’une situation déjà existante, la deuxième c’est que Dieu ne tient aucun cas des traditions dont le maintien risquerait de compromettre l’avenir. En effet, ici, à partir de l’expérience de Samuel, le rédacteur inconnu du récit projette sur la nouvelle situation de l’exil les certitudes qu’il vient d’acquérir, c’est que Dieu ne construit l’avenir ni sur une dynastie royale, sur laquelle certains textes ont affirmé que Dieu s’était lié pour toujours, ni sur un clergé qui serait indispensable à la pratique du culte, ni même sur un Temple où le peuple pourrait retrouver les rites qui marquent la foi. Ce qui était valable avant que ne commence l’histoire, ne le sera-t-il pas encore quand l’histoire s’arrêtera ?




C’est ce que comprennent les rédacteurs au moment de l’exil. Nous devons comprendre à notre tour que Dieu est fidèle à sa parole qu’il prononce toujours pour le bien des hommes, même s’il doit apparemment se renier lui-même. La parole de Dieu se comprend à partir d’une situation précise et elle invite celui qui la reçoit à se situer lui-même comme instrument de Dieu au service d’une réalité présente en dépit de la nostalgie que fait naître en lui le passé.




Pour que la parole de Dieu puisse être entendue, il faut que celui qui la reçoit soit averti de l’actualité du moment, il doit également être au clair sur lui-même, pour savoir dans quelle mesure il est compétent pour se mettre au service des hommes de la part de Dieu dans un moment précis lié à l’actualité. Cela requiert de sa part une totale confiance en Dieu, et une conscience lucide de sa propre situation. Dans cette compréhension des choses, n’y a-t-il pas là comme une parole vraiment révolutionnaire de la part de Dieu ?

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