samedi 31 mars 2012

Luc 24:35-48





Dimanche 22 avril 2012

35 Ils racontèrent ce qui leur était arrivé en chemin, et comment il s'était fait reconnaître d'eux en rompant le pain.
Jésus apparaît à ses disciples

36 Comme ils disaient cela, lui-même se présenta au milieu d'eux et leur dit : Que la paix soit avec vous ! 37Saisis de frayeur et de crainte, ils pensaient voir un esprit. 38 Mais il leur dit : Pourquoi êtes-vous troublés ? Pourquoi des doutes vous viennent-ils ? 39 Regardez mes mains et mes pieds, c'est bien moi ; palpez-moi et regardez ; un esprit n'a ni chair ni os, comme vous voyez que j'en ai. 40 Et en disant cela, il leur montra ses mains et ses pieds. 41 Comme, dans leur joie, ils ne croyaient pas encore et qu'ils s'étonnaient, il leur dit : Avez-vous ici quelque chose à manger ? 42 Ils lui présentèrent un morceau de poisson grillé. 43 Il le prit et le mangea devant eux. 44 Puis il leur dit : C'est là ce que je vous disais lorsque j'étais encore avec vous ; il fallait que s'accomplisse tout ce qui est écrit à mon sujet dans la loi de Moïse, dans les Prophètes et dans les Psaumes.45 Alors il leur ouvrit l'intelligence pour comprendre les Ecritures. 46 Et il leur dit : Ainsi il est écrit que le Christ souffrirait, qu'il se relèverait d'entre les morts le troisième jour 47et que le changement radical, pour le pardon des péchés, serait proclamé en son nom à toutes les nations, à commencer par Jérusalem. 48Vous en êtes témoins.

Nous avons ici le récit de la dernière apparition de Jésus relatée dans l’Evangile de Luc. Elle est à la fois habituelle et conforme aux récits racontés dans les autres Evangiles, mais elle en diffère aussi profondément. En l’abordant d’une manière critique, nous allons essayer de répondre à une question qui taraude notre esprit à tous: qui est responsable du désordre qui règne sur le monde ?

Est-ce l’homme qui à l’origine des temps se serait opposé à Dieu ou est-ce Dieu lui-même qui aurait mal géré sa propre maison et aurait laissé les anges se révolter contre son autocratie ?

Ou encore, est- ce que le monde existerait indépendamment de Dieu et que celui-ci essaierait tant bien que mal de s’imposer à lui afin de lui permettre d’évoluer avec sagesse. Mais le monde lui résisterait.

Les théories s’affrontent et une fois encore on nous joue à leur propos la querelle des anciens et des modernes. Chacun, ballotté entre différents courants de pensée, ne sait toujours pas auquel se rallier et la plupart du temps ne se rallie à aucun.

Nous nous sommes habitués, sans y adhérer vraiment à l’explication traditionnelle qui s’appuie sur une lecture littérale des textes. Elle fait état d’un conflit latent entre Dieu et l’humanité qui aurait pour origine le jardin d’Eden où l’homme refusant de se soumettre à un Dieu bienveillant aurait précipité le monde dans sa chute. Dieu aurait mis un terme à cette situation à Pâques en acceptant la valeur rédemptrice de la mort de son fils. Mais malgré tout, beaucoup d’humains aujourd’hui ont du mal à comprendre la théorie selon laquelle les dysfonctionnements du monde seraient liés à la désobéissance d’Adam. Ils ne comprennent pas davantage comment la mort de Jésus a pu apporter une réponse au problème.

Plus on se pose de questions, plus les choses semblent se compliquer
- Dieu a-t-il vraiment voulu la mort de Jésus ?
- Dieu n’aurait-il pas pu faire autrement ?
- Si Dieu n’est pas intervenu pour que ça ne tourne pas à la catastrophe c’est qu’ il ne l’a pas voulu disent les uns ? - C’est qu’il n’a pas pu suggèrent les autres.
- Il ne serait donc pas aussi puissant qu’on le dit en rajoutent d’autres encore!
- Et puis cette histoire du jardin d’Eden a-t-elle vraiment du sens ?
Ainsi s’égrainent les interrogations comme la litanie d’un chapelet sans fin qui nous fatigue ou nous agace ! Mais, tout confirmerait bien l’hypothèse selon laquelle les hommes vivraient en état de conflit permanent avec Dieu

Le texte de ce jour devrait nous aider à y voir un peu plus clair. Il nous rapporte le récit d’une apparition de Jésus ressuscité, encore plus difficile à croire que les autres.

- Que Jésus apparaisse à l’improviste, soit !
- Qu’il montre ses plaies soit !
- Mais qu’il mange, et que ce soit du poisson, cela dépasse l’entendement !

S’il avait mangé du pain, on aurait pu penser que l’évangéliste qui rapporte cet épisode faisait allusion au dernier repas, à la sainte Cène. Dans ce cas nous aurions été invités à spiritualiser l’événement si bien que ce récit aurait fait partie à la fois du domaine du réel et du domaine du spirituel, comme dans l’épisode des disciples d’Emmaüs qui nous est rapporté dans le récit précédent du même Evangile. Mais manger du poisson, voilà qui nous déroute !

Puisqu’il est dans notre nature humaine de douter et de poser des questions, continuons l’exercice. L’apparition qui nous est rapportée pose un vrai problème, étant donné qu’elle se déroule à Jérusalem et que la ville est beaucoup trop loin du lac pour qu’on puisse y consommer du poisson. Si encore ce poisson était séché, on aurait pu comprendre qu’on l’ait en stock, mais il était grillé, comme il est dit ici, c’est dire qu’il était encore frais quelques heures au paravent. Impossible ! Alors, serait-ce un poisson spirituel ? Non bien sûr !

Il semblerait plutôt que cette mention du poisson ait été faite ici pour aider l’auteur, l’évangéliste Luc, à répondre à une question qui est elle-même posée par le texte : Etait-ce un fantôme ? Non il n’était pas un fantôme puisqu’il mange la même nourriture que nous. C’est cela que suggère le texte. Mais Luc qui raconte cela ne connaît pas la Judée, ni la Galilée. C’est un grec qui n’est jamais venu en Palestine. Il fait alors état d’un aliment qu’il croyait être un aliment de base dans toute la Palestine : le poisson, c’était raté ! Pour faire plus vraie encore, certains manuscrits ont rajouté qu’il aurait aussi mangé un rayon de miel ! Avez-vous déjà mangé du poisson avec du miel ? Nous devinons que le détail concernant la nourriture a été rajouté. Nous comprenons aisément que ce n’est pas ce détail qui est important. Ce détail a été rajouté pour faire plus vrai, mais n’a pas forcément de fondement historique. Ce qui est important, c’est que le ressuscité soit bien vivant pour ceux qui étaient présents, même s’ils ne savaient pas ce qui caractérise sa nouvelle nature.

La présence de Jésus vivant au milieu des hommes signifie que Dieu n’a rien à voir avec les forces du mal. Le conflit entre Dieu et les hommes serait donc dépassé. Pourtant ce serait trop simple de raisonner ainsi. La résurrection de Jésus ne semble pas résoudre vraiment le problème, au contraire, elle le complique. Certains s’en servent même pour rallumer le conflit. Alors comment y voir plus clair ?

Reprenons notre texte. Il nous parle de la souffrance de Jésus, de la nécessité de la repentance et du pardon, tout cela dans une seule phrase. C’est la souffrance qui est mentionnée en premier. La souffrance est en fait le thème majeur des Ecritures. Dieu depuis toujours se propose d’aider les hommes à se libérer des souffrances qui les accablent, c’est pourquoi le récit de la sortie d ’Egypte sous la conduite de Moïse a pris une telle importance. Les Evangiles quant à eux s’attachent à montrer que c’est également sur la souffrance que Jésus a concentré ses efforts. Ecoutez-le dans les béatitudes: "Heureux ceux qui pleurent, ils seront consolés...Heureux ceux qui ont faim et soif de justice..."

Pour comprendre cela il faut donc que les hommes se repentent et qu’ils se convertissent, c’est-à-dire qu’ils cessent de penser que Dieu puisse avoir une responsabilité quelconque dans leurs malheurs, au contraire, il faut qu’ils se convertissent à l’idée que Dieu a pour seul souci de les aider à dépasser le mal pour vivre mieux. Son Esprit saint sera pour nous un précieux auxiliaire, c’est ce qui est encore dit dans ce texte. Le saint Esprit agit en nous, comme une source d’énergie qui nous permet de voir au-delà des souffrances la guérison promise et au-delà de la mort la vie que Dieu nous donne. C’est alors que nous entrons dans la dimension de la résurrection.

Jésus a clairement signifié que Dieu était dans le même camp que les hommes et menait le même combat qu’eux pour les aider à se libérer de toutes les formes d’oppression. Il les accompagne dans toutes les adversités et jamais il ne laissera sa main s’appesantir sur les hommes, même si lui même se sent personnellement offensé.

Ainsi, la résurrection de Jésus ne prend vraiment de signification qu’à partir du moment où les croyants acceptent de voir en Dieu le Père bienveillant qui met tout en œuvre pour que les hommes ne souffrent plus et pour que la vie triomphe dans toutes les situations, y compris celle de la mort.

La foi en la résurrection donne aujourd’hui, plus que jamais, à ceux qui croient, la joie de participer dès maintenant à la construction d’un monde qui fait de l’espérance sa règle de vie et qui fait de l’audace le moteur de tout ce que les humains entreprennent pour que les choses aillent mieux. C’est cette attitude qui doit se généraliser dans les églises. Elles doivent chaque jour redécouvrir que leur mission leur est toute tracée par celui qui, ressuscité des morts, les conduit sur les chemins du monde pour maintenir dans une espérance de vie toutes celles et tous ceux qui sont menacés.

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