mardi 10 septembre 2013

Luc 17:5-10



Luc 17: 5-10 : Donne-nous plus de foi dimanche 6 octobre 2013


5 Les apôtres dirent au Seigneur : Donne-nous plus de foi. 6 Le Seigneur répondit : Si vous aviez de la foi comme une graine de moutarde, vous diriez à ce mûrier : « Déracine-toi et plante-toi dans la mer », et il vous obéirait.

7 Qui de vous, s'il a un esclave qui laboure ou fait paître les troupeaux, lui dira, quand il rentre des champs : « Viens tout de suite te mettre à table ! » 8 Ne lui dira-t-il pas au contraire : « Prépare-moi à dîner, mets-toi en tenue pour me servir, jusqu'à ce que j'aie mangé et bu ; après cela, toi aussi, tu pourras manger et boire. » 9 Saura-t-il gré à cet esclave d'avoir fait ce qui lui était ordonné ? 10 De même, vous aussi, quand vous aurez fait tout ce qui vous a été ordonné, dites : « Nous sommes des esclaves inutiles, nous avons fait ce que nous devions faire. »


Il nous a été dit que Dieu écrivit un jour avec son doigt, des préceptes à l’usage du genre humain sur des tables de pierre. Mais les hommes ne s’en montrèrent pas dignes selon Moïse qui se considérait comme arbitre entre Dieu et les hommes. Il les jugea incapables de suivre les préceptes divins et brisa les tables que Dieu avait écrites de sa main. Que pensez-vous qu’il arriva ? Quelles furent les conséquences de ce crime de lèse-majesté divine ?


Au lieu de punir le geste inqualifiable de celui qui venait de détruire son œuvre, Dieu enjoignit Moïse de faire de sa propre main une réplique de ce que Dieu avait produit. L’Écriture a tellement légitimé le geste destructeur de Moïse qu’on a du mal à voir ce qu’il pouvait y avoir de choquant dans son attitude. Le crime du peuple qui avait fait une image de Dieu en forme de veau était-il plus irresponsable que celui  de Moïse qui avait détruit le seul écrit existant de Dieu?


La deuxième édition du texte des lois, faite de la main d’un homme fut déclarée sacrée, elle fut enfermée dans un coffre non moins sacré, lui aussi fait de main d’homme, et le tout fut enfermé dans le lieu très saint du sanctuaire, lui aussi sacré et fait de main d’homme. Les pèlerinages dans ces lieux sacrés étaient censés renforcer l’intensité de la foi. Mais tout cela  a disparu au cours des siècles et il n’en reste rien aujourd’hui. Quant à la pierre, brisée par Moïse sur laquelle Dieu écrivit, il n’en a subsisté pas même un éclat. Tout ce qui avait été déclaré sacré, avait été  œuvre d’homme. La montagne sur laquelle cette histoire est censée avoir eu lieu a été déclarée sacrée à son tour, nul ne sait cependant où elle est vraiment, si bien que Dieu, enfermé dans sa divinité reste depuis toujours inaccessible au sacré.


Rien de ce qui est déclaré sacré ne le touche. C’était sans doute une des raisons pour laquelle La Bible a conservé ce récit au sujet du veau d’or et de la destruction des tables de la Loi pour attester la vanité des tentatives humaines de s’approprier le sacré.  Ces quelques constatations préliminaires semblent n’avoir rien à voir avec la prière des disciples : « Donne-nous plus de foi ! » Nous allons voir qu’il y a sans doute un lien entre les deux car les hommes sont toujours à l’affût  des preuves de l’existence de Dieu et de sa présence dans le monde des humains.  Les lieux sacrés comme nous l’avons vu sont le fruit de leur imaginaire inventés par eux pour stimuler leur foi. 


Après  les lieux sacrés qui selon certains croyants pourraient marquer la trace de Dieu dans l’histoire, il y a ensuite les miracles qui seraient les signes de sa présence parmi eux et attesteraient de la faveur divine de ceux qui en bénéficient.


Mais quelle signification ont-ils vraiment ? A y regarder de plus près on constate que Dieu, qui en est l’auteur se met lui-même en porte à faux quand il en fait, par rapport au rôle qu’il est sensé jouer au milieu des hommes. En faisant des miracles, il se conteste lui-même. En effet, si Dieu est juste, ce que nous croyons, les miracles, eux sont injustes. Ils mettent à part leurs bénéficiaires et les séparent de ceux qui n'en profitent pas. Si un malade est guéri au détriment de ceux qui ne le sont pas, Dieu commet une injustice. Pour être juste, tous ceux qui sont atteints du même mal devraient être guéris. Si c’était le cas, si tous étaient guéris, ce mal n’existerait pas et le problème du miracle et de la guérison n’existerait pas non plus, et on n’y chercherait pas la présence de Dieu.


Jésus était très conscient de ce fait, c’est pourquoi quand il opérait lui-même des miracles, il recommandait le silence. En les faisant, il cherchait à rendre compte de la réalité d’une puissance qui nous dépasse, il voulait montrer la victoire à venir de Dieu sur le mal. En même temps il ne voulait pas que Dieu puisse être perçu comme injuste en privilégiant certains et non les autres. Il ne voulait pas que l’on puisse penser que Dieu créait des catégories de gens méritants au détriment des autres. En opérant des miracles trop visibles il aurait laissé entendre que certains pouvaient avoir plus de foi que d’autres, si bien que la demande des apôtres aurait été légitimée : « Seigneur donne-nous plus de foi. » Nous voilà arrivés à la pointe du texte.


Quand on prête attention un instant à l’histoire des croyants, on réalise que c’est le contraire qui se passe. Ceux dont la foi a été donnée en exemple, ceux que la tradition a classés parmi les saints, n’ont pas bénéficié de miracles et sont morts martyrs. Par contre, ceux qui ont été au bénéfice d’un miracle, n’en ont pas profité sans déclencher des jalousies (Exemple de l’aveugle en Jean 9: 1-41). Il nous faut sans doute réviser notre théologie du miracle. Il nous faut aussi mettre en cause les actions des hommes qui viseraient à prouver la supériorité de la foi de certains sur celle des autres. Il nous faut donc veiller à ne pas confondre foi et religiosité.


Si donc Dieu se cache et si les miracles ne sont pas les bons repères pour marquer sa présence parmi les hommes, quels seraient alors les critères sur lesquels nous pourrions nous appuyer pour parler de foi ? Il n’y en a sans doute pas. Pour enfoncer le clou, Jésus va nous faire une démonstration par l’absurde sur l’impossibilité de quantifier la foi des croyants. Il émet l’hypothèse selon laquelle la foi pourrait-être mesurable. Pour cela il suggère de prendre la plus petite unité de mesure qui soit à notre disposition : le grain de moutarde. A partir de là il déduit que si la foi était quantifiable, le plus humble des croyants pourrait faire des miracles extraordinaires avec le peu de foi dont il dispose. En conséquence, ceux de ses interlocuteurs qui pensent avoir une foi supérieure à celle des autres devraient être inscrits au livre des records en matière de miracle. Jésus ne cherche pourtant pas à nous dire que si nous n’arrivons pas à faire des miracles, c’est que nous n’avons pas la foi, mais il veut montrer qu’il est impossible de la mesurer.


Il n’est donc pas question d’augmenter les doses de foi des fidèles pour avoir une église triomphante et efficace. Il faut s’y prendre autrement. Nous avons compris que la foi ne se démontrait pas, or nous sommes ainsi faits que nous ne croyons qu’à ce qui se démontre, nous ne croyons qu’à la visibilité des faits. Nous voulons voir, nous voulons toucher, faute de preuves nous demeurons incrédules.


Or la foi chrétienne repose sur l’affirmation selon laquelle, l’infini de Dieu peut investir le monde fini des hommes. Nous croyons que la vie peut prendre le pas sur la mort. Nous affirmons que la résurrection est au cœur de notre foi. Cela ne se démontre pas, mais cela se ressent et se vit. Il y a donc des certitudes qui s’établissent en nous sans preuves apparentes.


Peut-on aller plus loin  ? Il semblerait que la foi soit provoquée par une rencontre intérieure. Il nous arrive  d’éprouver des intuitions qui ne viennent pas de nous mais qui nous séduisent. Elles nous viennent d’ailleurs. Nous découvrons qu’il y a un ailleurs au-delà de nous-mêmes qui ne nous appartient pas, mais qui provoque en nous des impressions et des désirs de dépassement que nous adoptons comme nôtres.


Il nous faut cependant  aller plus loin encore. Nous découvrons que ces vérités intérieures que nous qualifions de foi ont été ressenties par d’autres avant nous avec autant d’intensité et parfois plus. Elles nous motivent d’autant plus qu’elles ont laissé des traces qui ont été consignées par écrit par ceux qui les ont ressenties. Ces traces nous les retrouvons dans ce qu’il est convenu d’appeler les Ecritures. Autrement dit la Bible.


Jésus a vécu cela avec une telle intensité que la mort n’ a pas eu aucune  prise sur sa vie et sur ses dire. Nous découvrons avec lui que si Dieu demeure caché dans tout ce qui est sensible, il se livre à nous dans ce que nous ressentons à l’intérieur de nous-mêmes, qui ne nous appartient pas et qui vient d’ailleurs. Il nous entraîne ainsi dans les mystères de l’infini où nous nous trouvons bien. Nous rejoignons dans le secret de notre être ceux qui ont fait les mêmes expériences en particulier Jésus Christ. La vie s’impose alors à nous comme un mystère que nous accueillons dans un joyeux dépassement.

Que faut-il dire de plus, si non qu’il est vain de demander à Dieu de nous augmenter la foi, puisque nous avons la plénitude de Dieu en nous. Ce contact avec Dieu, appuyé sur le témoignage de Jésus devient pour nous le seul critère dont nous avons besoin pour vivre avec exaltation tous les dépassements nécessaires à notre épanouissement


1. psaume 139

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