jeudi 13 avril 2017

Actes 2:42-47 La première Eglise dimanche 23 avril 2017




42Ils étaient assidus à l'enseignement des apôtres, à la communion fraternelle, au partage du pain et aux prières.

43La crainte s'emparait de chacun, et beaucoup de prodiges et de signes se produisaient par l'entremise des apôtres.

44Tous les croyants étaient ensemble et avaient tout en commun.

45Ils vendaient leurs biens et leurs possessions, et ils en partageaient le produit entre tous, selon les besoins de chacun.

46Chaque jour, ils étaient assidus au temple, d'un commun accord, ils rompaient le pain dans les maisons et ils prenaient leur nourriture avec allégresse et simplicité de cœur ;

47ils louaient Dieu et avaient la faveur de tout le peuple. Et le Seigneur ajoutait chaque jour à la communauté ceux qu'il sauvait. 

Quand l’Esprit souffle sur l’Église, c’est une atmosphère de paix et de sérénité qui s’en dégage, c’est en tout cas ce que tente de dire ce texte qui en trouve ses origines dans l’évocation de la première église qu’il nous décrit ici. Elle doit son épanouissement à la méditation des textes rapportés par les Apôtres, à la prière, à la vie en commun, au partage du pain,  à la mise en commun des biens et à  une joie profonde qui se dégage de  l’existence de cette  église qui s’ouvre à la vie. C’est comme si ses quelques membres étaient transportés dans un  autre monde, le monde du futur, le Royaume annoncé. Et pourtant tous ont bien  les pieds sur terre.  Sous l’impulsion de l’esprit, l’Église s’était  mise à croître à un tel rythme que le nombre des nouveaux adeptes  qui étaient  venus  gonfler les rangs des premiers croyants avaient crû d’une manière extraordinaire.  Si cela avait continué, l’église aujourd’hui compterait plus de membres que la  totalité des habitants du monde. Mais il n’en est rien. Quelques chose a dysfonctionné depuis  cette évocation de l’origine de l’Église.

La suite du récit, dans ce Livre même des Actes  montre que le phénomène n’a pas duré.  Les rivalités à l’intérieur du groupe n’ont pas tardé à naître et la défaveur  de ceux qui voyaient les choses de  l’extérieur s’est  retournée contre l’Église naissante,  s’est vite  transformée en haine et a pris le ton de la persécution. Un peu plus tard, c’est sur l’enseignement même des apôtres  que les membres de l’Église se sont trouvés en désaccord. C'est ce qu'affirmera Paul aux alentours des années 50 dans la première épître aux Corinthiens ( 1 Cor 1/12) « J’entends que chacun de vous dit : Moi je suis de Paul, et moi de Céphas et moi de Christ… ».  Nous sommes à peine 20 ans  après l’événement rapporté ici.  Dans les pages suivantes, nous verrons la communauté se déliter. Le partage des biens sera accompagné de mensonge, et même le partage du pain de la Sainte Cène donnera lieu à des attitudes critiquables et  même scandaleuses de la part des  membres de L’Église de Corinthe en particulier. Du côté du baptême, ce ne fut pas mieux,  on cherchait à se faire valoir par le prestige personnel  du baptiseur si bien que Paul se félicitera de n’avoir baptisé  que très peu de personnes de la communauté de Corinthe.  Que s’était-il donc passé dans l’Église pour qu’en moins d’une génération on en soit arrivé là ?

Le problème de la première église sont les mêmes que ceux de celle d’aujourd’hui. Tout se passe comme si nous n’arrivions pas à instaurer dans nos rangs une  société de fidèles  dont  la foi serait  assez forte pour que  les croyants puissent se libérer  des  mêmes contraintes que celles  auxquelles sont  soumis les gens de ce   monde.  Quand, à d’autres moments de l’histoire, on a cru pouvoir y arriver, comme dans le Genève de Calvin par exemple,  on n’a fait  que créer des comportements sectaires intolérants  qui ont rendu la vie impossible aux habitants de la ville tant  la pratique de l’espionnage des uns  par les autres devenait insupportable ainsi que les sanctions qui s’en suivaient.  Ce genre de phénomène se produit  toujours   quand on  essaye de faire fi du péché,  c'est-à-dire de tous les comportements qui opposent les hommes entre eux. Ce sont la convoitise, l’arrogance, l’orgueil  qui ne disparaissent pas d’un seul coup du moment que l’on s’est converti au  message de Dieu et qu’on a accepté son salut. On a beau savoir  que la bonne nouvelle de la résurrection  a changé notre relation à Dieu  et au monde, elle n’a pas changé notre nature profonde.  Il faut que Dieu lui-même nous entraîne à faire un pas de plus.

Nous comprenons alors que l’auteur de  ces lignes éprouve un certain agacement au contact  de l’Église  dans laquelle il se trouve quelques 30 ans après la résurrection de Jésus. La société  de l’Église n’a pas changé autant qu’on aurait pu l’espérer. C’est pour cela qu’il ne peut  s’empêcher de décrire L’Église,  non pas telle qu’elle était, mais telle qu’elle aurait du être : il idéalise la première église comme une société  parfaite, capable par  ses propres vertus et  d’abnégation de soi d’attirer tous les hommes à elle.

 Mais en écrivant cela, il mettait le doigt sur un défaut  permanent qui est le nôtre, celui de croire que les hommes par leurs actions, leurs vertus ou leur morale peuvent changer quelque chose au monde si Dieu  n’agit pas à leurs côtés. C’est par l’action de Dieu sur les hommes que ceux-ci  pourront changer quelque chose à la situation existante. Si Dieu, quant à lui, ne veut pas directement intervenir dans  le monde et le faire évoluer dans  le sens où la vie de chacun s’améliorerait et où  le mieux être prendrait le dessus,  ce n’est pas non plus les hommes, indépendamment de lui qui y arriveront.  Il faut que  par leurs actions conjuguées, à savoir : celle de  Dieu qui agit pour que la transformation intérieure des individus  s’opère et celle des hommes qui agissent selon sa volonté pour que  « le mieux » prenne le dessus sur le mauvais. L’homme ne peut agir que par l’action de Dieu qui se révèle en lui et qui le transforme de fond en comble

Seul Dieu, en agissant  sur nous peut changer les choses en profondeur,  mais cela n’est jamais acquis pour toujours. Seule sa présence constante nous en peut modifier nos comportements. Pour cela  il faut que chacun reste fidèle à ce que Dieu lui a révélé. Il faut qu’il  se convertisse à nouveau chaque jour et laisse Dieu agir en lui.  Ainsi il s’appliquera à lui-même, avant de l’appliquer à l’Église cet acquis de la Réforme selon lequel l’Église et nous-mêmes  doivent se réformer  et ne jamais cesser de le faire.

Par quoi  faut-il alors commencer ? Le premier de ces fondamentaux  qu’il doit mettre en valeur et dont  tous les autres découlent est la foi.  La foi devrait-être un sujet de joie, de sérénité et  de satisfaction pour nous. Mais elle est devenue dans nos sociétés d’église un sujet de rivalité entre les croyants, déjà dénoncé par Paul, mais qui n’a fait que s’aggraver depuis.    La  foi  est devenue  un sujet d’exclusion des uns par les autres, de refus de dialogue à tel point que l’on oublie d’abord que la foi est un don de Dieu, liée à l’irruption de la réalité qu’il représente  dans notre vie. Nous ne nous mettons à croire  vraiment que si Dieu lui-même s’est saisi de notre vie et qu’il inspire nos pensées par son esprit qu’il répand sur nous et dont aucun humain ne peut assurer le contrôle pour nous. La foi établit un lien étroit entre nous et Jésus qui mystérieusement partage notre vie et nous ouvre les portes d’un au-delà qui nous était fermé jusque là. La vie en Église est basée sur le partage de cette certitude, sur  la mise en commun de nos expériences et la prière avec Dieu.

C’est alors que le péché que nous croyions  aboli par notre conversion à Dieu risque de prendre sournoisement le dessus. Il consiste à donner priorité  à la pensée humaine et à prétendre que les croyants peuvent assumer la volonté de Dieu sans vraiment  se référer à lui.  Il nous amène à croire que notre propre personne doit être au centre de notre  pensée  et qu’elle nécessite plus d’attention que les autres. Pour  combattre cette tendance mortifère que nous cultivons à plaisir, Jésus nous a donné pour  seul précepte  celui d’aimer les autres comme nous-mêmes,  c’est en faisant cela que nous manifesterons notre amour pour Dieu. Mais sans l’esprit de Dieu qui nous stimule, nous n’y arriverons jamais par nous-mêmes. Chacun se prenant pour le centre de ses propres préoccupations  croit  que Dieu obéit aux mêmes impératifs et  place les  civilisations chrétiennes au dessus des autres, si bien que  celles-ci devraient  s’imposer aux autres.

Nous comprenons alors que si nous ne nous appuyons pas sur ce qui est  fondamental  dans  la foi, c'est-à-dire l’amour du prochain qui rend tous les hommes égaux devant Dieu, nous passerons à côté  de la vision qu’il a  pour le monde et nous le trahirons en croyant le servir. L’avenir de l’Église et du monde passe  donc  par une conversion de nous-mêmes, de L’Église et des autres, c’est alors  que le monde  sera sauvé

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