jeudi 11 janvier 2018

Jonas 3:1-10 la miséricorde divine dimanche 21 janvier 2018



*Jonas  3 :1-10


La parole du Seigneur fut adressée à Jonas  une seconde fois: « Lève-toi, va à Ninive, la grande ville païenne, proclame le message que je te donne sur elle. » Jonas se leva et partit pour Ninive, selon la parole du Seigneur. Or, Ninive était une ville extraordinairement grande : il fallait trois jours pour la traverser. Jonas la parcourut une journée à peine en proclamant : « Encore quarante jours, et Ninive sera détruite ! » Aussitôt, les gens de Ninive crurent en Dieu. Ils annoncèrent un jeûne, et tous, du plus grand au plus petit, se vêtirent de toile à sac. La chose arriva jusqu’au roi de Ninive. Il se leva de son trône, quitta son manteau, se couvrit d’une toile à sac, et s’assit sur la cendre. Puis il fit crier dans Ninive ce décret du roi et de ses grands : « Hommes et bêtes, gros et petit bétail, ne goûteront à rien, ne mangeront pas et ne boiront pas. Hommes et bêtes, on se couvrira de toile à sac, on criera vers Dieu de toute sa force, chacun se détournera de sa conduite mauvaise et de ses actes de violence. Qui sait si Dieu ne se ravisera pas et ne se repentira pas, s’il ne reviendra pas de l’ardeur de sa colère ? Et alors nous ne périrons pas ! »

En voyant leur réaction, et comment ils se détournaient de leur conduite mauvaise, Dieu renonça au châtiment dont il les avait menacés.

(Cher lecteur, si vous ne connaissez pas très bien l’histoire de Jonas, donnez-vous la peine de la lire entièrement, elle ne comprend que 4 chapitres et  vous profiterez de la totalité de ce conte.)


Ne  boudons pas notre plaisir et  laissons-nous séduire par ce magnifique conte oriental où l’auteur  nous entraîne dans une aventure  où notre logique ne s’y retrouve pas.  Mais avant d’entrer dans le   ravissement de l’esprit, ne perdons pas de vue  que, ce texte, comme tous les contes a une morale dont nous devons tirer leçon. Il  ne nous met pas toujours dans une situation avantageuse dans nos rapports à Dieu.   Nous allons  être invités à nous identifier à Jonas, le héro de l’histoire et à contester son action,  alors qu’il refuse de partager la miséricorde de Dieu et qu’il  conteste sa bonté. Pourtant intérieurement nous partageons son opposition à Dieu.

Nous allons ainsi découvrir  la  face cachée de notre propre personne  et nous découvrirons que nous sommes capables, nous aussi  de nous opposer à Dieu,  de  refuser à entendre sa parole et de fuir loin de lui. Quand Jonas se met à bouder alors  que la promesse de Dieu est en train de se réaliser, nous aurions tendance à le faire  aussi.  Mais la grande question qui va se poser à nous, c’est d’essayer de comprendre quelle est la réalité de ce Dieu  qui nous est présentée dans cette histoire.

Le conte se déroule dans un décor  qui pourrait être celui d’une scène de  théâtre où l’acteur,  apparemment il n’y en a qu’un Jonas,    évoluerait  entre la grande ville de Ninive, côté jardin, qui représente  tout ce qu’il peut y avoir d’odieux et de dangereux pour le prophète,  et côté cour, il y aurait  l’immensité de la mer qui s’étend jusqu’aux colonnes d’Hercule où les tempêtes  font fureur et  où les monstres marins menacent à tout instant  d’emporter le héro dans les grands fonds.  Entre ces deux dangers mortels, aucun autre choix n’est proposé, si non la bienveillance de Dieu qui est présent quant à lui dans les deux camps

Nous découvrons cependant  que Dieu  accepte ici de s’inscrire  dans  le rôle d’un second personnage  qui ne cesse de mettre Jonas en difficulté tout en s’efforçant de lui faire du bien.  Il y a là une contradiction qu’il faudra approfondir. Mais  derrière  le personnage joué par Dieu se cache  un poète et même un farceur,  nous avons vu qu’il joue avec les gros poissons. Le monstre  qu’il envoie au secours de  Jonas  est  un monstre gentil qui se plie à la fantaisie de Dieu et devient l’instrument de sa miséricorde pour Jonas.  Le ravissement continue. A la fin du conte,  Dieu   va faire pousser un arbre en une seule nuit, ce qui est un exploit,  et en même temps il va commander à un ver glouton de le manger en un rien de temps. Le personnage de Jonas est également étrange,  il passe son temps à se défier de Dieu,  à le fuir et à déverser sur lui sa mauvaise humeur, mais il fait également preuve de sérénité  étrange et compose une magnifique prière de confiance alors que le monstre l’entraîne jusqu’aux racines du monde avant de le vomir sur le sable de la plage comme le rebut de sa digestion. C’est ainsi que Jonas entre en scène pour la deuxième fois.

Le Dieu auquel Jonas a à faire,  nous surprend aussi. Il se présente comme un Dieu de justice qui règne sur le monde entier et qui exige que sa justice soit respectée sur tout l’univers, même dans des lieux aussi étranges que la ville de Ninive,  présentée ici comme le repère du vice et où le  nom  de Dieu est ignoré. Quoi qu’il en soit cette ville rebelle mérite son châtiment.  Mais en même temps, Dieu ne peut se dispenser de la tendresse qu’il a pour tous les hommes, y compris ses ennemis les plus déclarés. C’est pour cela qu’il s’intéresse à  Ninive et tente d’épargner  sa population des effets de sa colère.  Il   entreprend alors une tentative de sauvetage dont Jonas sera l’instrument même s’il désapprouve Dieu.

Pour étayer cette thèse, l’actualité  nous a mis en présence de Jonas modernes  qui ont réussi dans de telles entreprises. La haine, la condamnation et la vengeance ne sont donc pas les instruments qui garantissent la meilleure justice. Nelson Mandela l’a bien compris ! Il s’est comporté comme Dieu souhaitait que Jonas le fasse. Il a brillamment démontré que cette autre forme de justice, préconisée ici était capable de porter des fruits insoupçonnés. Mais même la Bible prête le flanc à la critique.


Le lecteur fidèle des Ecritures  se trouve mis en contradiction avec une autre histoire, bien connue, celle de Sodome et Gomorrhe où Dieu ne laissa pas la chance à Abraham de plaider la cause de la ville  et la détruisit d’une manière spectaculaire. Pourquoi Ninive a-t-elle eu un autre sort ? Sans doute ces deux histoires sont-elles véhiculées par des traditions différentes, mais le courant porteur de la Bible donne sa faveur à l’histoire de Ninive où on voit déjà pointer une théologie que Jésus  développera bien plus tard quand il demandera de prier pour nos ennemis et faire du bien à ceux qui nous persécutent.

Nous avons ici  les premiers aspects d’un Dieu  qui prendra sa pleine dimension dans les Evangile. Certes, il  prend sa justice au sérieux mais il  donne plus de place à sa miséricorde qu’à sa justice. La réaction de Jonas, nous montre bien que Dieu n’est pas  compris quand il tente de donner une place importante à sa miséricorde, qu’il donne sa chance  même aux plus méchants et qu’il  estime que leur repentir est toujours possible.  Dieu accorde aussi toute son attention à Jonas quand il se rebelle contre lui. Il le secourt  dans son refus de comprendre et  il ira même le chercher quand le monstre marin l’entraînera aux racines du monde, a où seule règne la mort.  

Ce récit n’est pas aussi légendaire qu’il y parait. Il affirme une vérité sur laquelle on ne peut revenir, celle de la bonté  incommensurable  de Dieu, alors que les hommes, comme Jonas  cherchent à en poser  les limites.  Ce conte repose sur un fond historique,  il est témoin  des préoccupations du vrai prophète Jonas, car il y en a eu un.  Jusqu’à maintenant nous avons eu à faire  à un héro de légende, alors que  l’autre Jonas vivait sous le règne de Jéroboam II, roi de  Samarie qui fut en butte tout au long de son règne à l’acharnement des rois de Ninive. Ils auront raison de  ses successeurs et  les entraîneront dans la mort. Ils emmèneront en exil sa population et terrifieront ses  descendants qui avaient trouvé refuge dans le royaume de Jérusalem.  L’évocation de  cette ville honnie  dont le souvenir restait dans les mémoires comme celui de l’abomination de la désolation ne pouvait qu’attiser les haines et les rancœurs ainsi que  le désir de vengeance. Les événements ont démenti  ce que le récit de Jonas a rapporté, puisque Ninive fut quand même détruite par les Perses en 612 ? Mais ce détail que l’auteur du conte semble vouloir ignorer n’entre pas en ligne  de compte.

Ce  récit nous est rapporté sous  forme de légende ou de parabole pour nous dire la  vraie nature de  Dieu et nous aider à comprendre  qui est ce Dieu dont la Bible se veut le témoin. Qui donc est ce Dieu qui préconise un salut universel, et qui s’acharne à préserver la vie de ceux qui s’affichent comme ses ennemis déclarés ?  Nous reconnaissons en lui celui  dont Jésus  se présentera comme le fils.  Ne nous étonnons donc pas du sort que les hommes ont alors réservé à Jésus,  car ses propos étaient inacceptables pour la plupart des humains et le sont encore pour la beaucoup  d’entre nous, car ils appellent  une  véritable conversion.  Ne  soyons donc pas surpris si l’Eglise a minimisé son message et s’est efforcé de l’inscrire dans un autre contexte, celui  que les conciles, plus tard  ont décrit comme  étant celui de la vraie foi.  

Comprenez alors quel fut  la frustration de Jonas qui assista à la sauvegarde de Ninive et comprenez sa révolte contre Dieu qu’il exprima  à l’abri  de  son   ricin  qu’un ver  mandaté par Dieu entreprit de détruire. Le récit ne s’est pas  inquiété de la vérité historique et n’a pas relaté la vraie fin de Ninive. Il a voulu  nous aider à entrer  dans la découverte de l’incommensurable amour de Dieu  que les pires comportements des hommes ne peuvent altérer.  Les hommes qui ont compris cela sont en bonne voie pour devenir les imitateurs de Jésus.   

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