Parabole de la vigne et des sarments- dimanche 29 avril 2018 texte revu et corrigé du 6 mai 2012
vigne rouge de Vincent Van Gogh |
C'est moi qui suis la
vraie vigne, et c'est mon Père qui est le vigneron. 2Tout
sarment qui, en moi, ne porte pas de fruit, il l'enlève ; tout sarment qui
porte du fruit, il le purifie en le taillant, pour qu'il porte encore plus de
fruit. 3Vous,
vous êtes déjà purs, à cause de la parole que je vous ai dite. 4Demeurez
en moi, comme moi en vous. Tout comme le sarment ne peut de lui-même porter du
fruit, s'il ne demeure dans la vigne, vous non plus, si vous ne demeurez en
moi. 5C'est
moi qui suis la vigne ; vous, vous êtes les sarments. Celui qui demeure en
moi, comme moi en lui, celui-là porte beaucoup de fruit ; hors de moi, en
effet, vous ne pouvez rien faire. 6Si
quelqu'un ne demeure pas en moi, il est jeté dehors comme le sarment et il se dessèche ;
on ramasse les sarments, on les jette au feu et ils brûlent. 7Si
vous demeurez en moi et que mes paroles demeurent en vous, demandez tout ce que
vous voudrez, et cela vous arrivera. 8Mon
Père est glorifié en ceci : que vous portiez beaucoup de fruit et que vous
soyez mes disciples.
Avez-vous déjà vu une vigne avant et
après qu’elle ait été taillée, cela mérite le déplacement. Il n’y a pas besoin d’aller bien loin pour contempler le spectacle. Celui qui y assiste en promeneur en a pour les yeux
et pour les oreilles. Le pied de vigne qui tend ses branches dénudées vers le
ciel gris du mois de mars se trouve en
très peu de temps réduit à très peu de choses : un moignon de bois tordu
qui est le cep et quelques tiges de sarments mutilés qui porteront à l’automne
les fruits dont on pressera le vin, signes de la vie que le Christ partage avec le
monde. Les claquements secs et discrets du sécateur déchirent le silence comme
autant de petits cris de souffrance. Les
sarments coupés devenus inutiles sont rassemblés en petits tas qu’une flamme claire réduits en cendres. Dans
l’air encore frais du printemps qui commence à peine s’entremêlent curieusement
la vie qui va naître et la vie qui s’en va. Les sarments qui ne servent plus à
rien disparaissent et la future récolte n’est encore qu’à l’état de promesses.
Nous avons là une image de l’Église.
Elle n’est sans doute pas attractive, mais elle est porteuse de promesses. Le
cep qui représente son corps n’a d’intérêt que parce que le Christ l’habite. Il
ressemble à un vulgaire morceau de bois fiché en terre. Son aspect insignifiant
n’a d’intérêt que pour le vigneron qui sous l’écorce racornie perçoit déjà la
sève qui murmure. Les quelques rameaux graciles, judicieusement taillés
figurent les membres de l’Église et portent en eux l’espérance de la récolte. A
première vue, l’aspect de la vigne n’est guère engageant et n’offre rien
d’attrayant. Telle est l’image que Jésus utilise pour exhorter toutes les
églises qui vont naître au cours des siècles. Elles sont averties du fait que
leur fidélité dépendra d’une taille appropriée pour que leurs fruits produisent
le meilleur vin qui annoncera le royaume qui vient. On croirait à évoquer cette image entendre la voix de Jean Calvin déclarant que l’Église réformée est toujours à réformer,
comme le vigneron qui chaque année doit tailler sa vigne pour la rendre
féconde. Il la réduit pour la faire grandir.
Jésus nous a habitués à d’autres images
pour dynamiser son Église. Il nous l’a décrite comme une graine qui pousse
toute seule et qui d’un seul coup se
recouvre de feuillage tellement épais que les oiseaux peuvent s’abriter sous
son ombre. Elle peut prendre l’aspect fragile d’une coque de noix livrée à la
furie des flots que Jésus calme avec autorité et qui arrive sereinement au port. Paul a utilisé l’image du sportif dans
le stade qui court pour recevoir la palme du vainqueur. Par contre ici, c’est la
seule fois dans l’Évangile qu’on nous
décrit l’Église comme une plante que
l’on mutile pour la rendre plus productive. Les coups de sécateurs sont perçus
comme autant de souffrances nécessaires que le Seigneur nous imposerait pour
obtenir le triomphe de son Église. Nous ne comprenons pas pourquoi Dieu lui
imposerait régulièrement une telle
épreuve, comme s’il voulait par avance justifier les souffrances que le sort
nous réserve d’une manière inexplicable.
Détrompez-vous, il n’y a pas ici une esquisse de la
doctrine de la rédemption par la souffrance comme certains le souhaiteraient.
Il nous faut revenir au texte et repérer comment Dieu s’y prend pour tailler la
vigne. En effet, il ne prend pas de
sécateur et il ne la fait pas souffrir. C’est sa Parole qui produit les effets
souhaités et c'est par elle que les rameaux que nous sommes sont taillés. C’est par le moyen de la Parole à laquelle
nous avons cru que Dieu agit. C’est grâce
à elle que nous avons décidé de nous attacher au Christ. C’est elle qui guide
les étapes de notre vie chrétienne, et si quelque chose est à retrancher ou à
enlever de nos vies, c’est par elle que nous le repérons et c’est
librement que nous décidons de l’ enlever. Ce n’est donc pas Dieu qui opère
des ablations douloureuses, mais c’est
chacun de nous qui régule sa vie selon que la parole le pousse dans un sens ou
dans un autre. C’est par fidélité à sa parole que nous faisons les choix qui donnent du sens à
notre vie. La Parole de Dieu est l’élément régulateur dont nous devons nous servir pour purifier notre vie et rester fidèlement attachés au cep qui est le
corps principal de l’Église et sous l’écorce duquel se dissimule le Christ
lui-même.
Je me suis plu à dépeindre le cep comme un morceau de bois
sans grand intérêt. On ne le remarquerait pas si ses sarments ne se couvraient
de feuilles, de vrilles et de pampres prometteurs de fruit et de joie. Le cep
n’a de raison d’être que dans ses branches qui lui donnent la récompense de ses
efforts. Ses efforts consistent à acheminer la sève jusqu’au plus lointain de
ses rameaux. Il ne peut vivre sans les rameaux qui ne peuvent vivre sans lui.
Le Christ ne peut être vraiment porteur de vie que si les fidèles sont porteurs
de vie à leur tour.
Chacun des fidèles que nous sommes est
ici interrogé au sujet de lui-même et du témoignage que sa propre vie rend au
Christ. Nous, sommes mis en face de nos responsabilités car c’est aux fruits
que nous produisons que l’on reconnaîtra le Seigneur qui nous anime et que le
Seigneur sera glorifié, et si le Seigneur est glorifié il le sera dans la joie.
Notre existence n’a pas d’autre but que de mettre le Seigneur dans la joie, et
il est comblé quand l’ensemble de sa
création évolue avec harmonie.
Nous avons compris que le Seigneur nous
rend efficaces par l’esprit qu’il dépose en nous. C’est la sève qui monte du
cep vers les sarments qui permet aux fruits de se gorger de vie avant de
devenir le vin nouveau qui abreuve le monde. Si le fruit n’est pas bon et que
le vin tourne à la piquette, que se passe-t-il ? Cela vient-il de ce que
le cep est trop vieux et qu’il faut le changer, ou cela vient-il du fait que les
sarments ont été mal taillés, sucent la sève et ne donnent pas de bon
fruit ? D’une manière générale, de nos jours, on a tendance à
croire que les idées forces qui animent la vie sur terre depuis 2 000 ans
sont dépassées, que le cep est trop vieux et qu’il faut le changer. On prétend
que le Christianisme a fait son temps
et qu’ il doit faire place à de nouvelles spiritualités.
Qui veut tuer son chien l’accuse de la
rage, qui veut refuser l’Évangile prétend qu’il est illisible, qui voit la
paille dans l’œil des autres ne perçoit sans doute pas la poutre qui est dans
le sien. Comment donner du sens à sa vie si on est incapable de s’orienter
soi-même ?
L'Évangile que nous reconnaissons comme
étant Parole de Dieu a été mis à notre
disposition pour nous aider à nous remettre en cause, pour rejeter ce qui est
nocif, pour refuser ce qui n’est pas porteur d’espérance. C’est ainsi qu’il
nous est suggéré de trouver dans l’Écriture ce qui est pouvoyeur de fruit et de
rejeter le reste. Si quelque chose ne va pas, c’est en nous qu’il faut le
chercher et non pas dans le cep qui nous abreuve de sève.
raisins et autres fruits de Vincent Van Gogh |
Le fruit que nous sommes sensés
produire, le vin nouveau qui abreuve le
monde, c’est l’amour que nous avons en nous-mêmes et qui doit motiver toutes
nos relations avec les autres. Si le monde manque d’amour aujourd’hui, et il
manque d’amour, ce n’est pas la faute de Dieu qui nous prodigue aujourd’hui
comme toujours le même évangile.
Si les choses vont mal c’est que les
hommes ne savent plus aimer et quand les hommes ne sont plus capables de
s’aimer les uns les autres, ils s’oppriment entre eux, ils violentent les plus
faibles et les dépossèdent de leurs biens. C’est à cause du manque d’amour que
la moitié du monde vit au détriment de l’autre moitié. C’est à cause du manque
d’amour que ceux qui ne sont pas esclaves s’arrogent le droit d’opprimer les
autres et de les rendre dépendants. Ce qu’il y a de consternant c’est que
ceux-là ne s’aperçoivent même pas de ce
qu’ils font et sont portés à croire que le monde entier leur ressemble.
Curieusement, l’Évangile a été prêché jusqu’aux extrémités du monde et l’amour
n’a pas suivi. S’il faut à nouveau tailler la vigne, il faudra savoir quels
rameaux doivent être taillés et à quelle hauteur ils doivent l’être.
« Heureux ceux qui écoutent ma parole et qui la gardent dit le
Seigneur. »
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