Marc 6 / 30-34
La Multiplication des pains - dimanche 22 juillet 2018
La Multiplication des pains - dimanche 22 juillet 2018
Ce sermon proposé en 2012 a été réécrit et réactualisé pour 2018
30Rassemblés auprès de Jésus, les apôtres lui
racontèrent tout ce qu'ils avaient fait et tout ce qu'ils avaient
enseigné. 31Il leur dit : Venez à l'écart, dans un
lieu désert, et reposez-vous un peu. Car beaucoup venaient et repartaient, et
ils n'avaient pas même le temps de manger.
32Ils partirent donc dans le bateau pour aller à
l'écart, dans un lieu désert. 33Beaucoup les virent s'en
aller et les reconnurent ; de toutes les villes, à pied, on accourut et on
les devança.
34Quand il descendit du bateau, il vit une grande foule ;
il en fut ému, parce qu'ils étaient comme des moutons qui n'ont pas de
berger ; et il se mit à leur enseigner quantité de choses.
35Comme l'heure était déjà tardive, ses disciples
vinrent lui dire : Ce lieu est désert et l'heure est déjà
tardive ; 36renvoie-les, pour qu'ils aillent
s'acheter de quoi manger dans les hameaux et les villages des environs. 37Mais
il leur répondit : Donnez-leur vous-mêmes à manger. Ils lui disent :
Irons-nous acheter deux cents deniers de pains pour leur donner à
manger ? 38Il leur demande : Combien de pains
avez-vous ? Allez voir. Après s'être informés, ils répondent : Cinq,
et deux poissons. 39Alors il leur ordonna de les
installer tous en groupes sur l'herbe verte, 40et ils
s'installèrent par rangées de cent et de cinquante. 41Il
prit les cinq pains et les deux poissons, leva les yeux vers le ciel et
prononça la bénédiction. Puis il rompit les pains et se mit à les donner à ses
disciples, pour qu'ils les distribuent. Il partagea aussi les deux poissons
entre tous. 42Tous mangèrent et furent rassasiés, 43et
on emporta douze paniers de morceaux de pain et de poisson. 44Ceux
qui avaient mangé les pains étaient cinq mille hommes.
Il est rare
que l’on s’approche de Jésus tout ragaillardi, plein d’enthousiasme et prêt à se mettre à son service sans
discuter. Cela arrive, mais ce n’est pas le cas habituel. La plupart du temps
nous nous adressons à Jésus, quand
fatigués et inquiets, nous espérons de sa part, un peu d’écoute et de compassion. C’est le cas
de ses disciples ce jour là qui rentrent de leur première expédition
missionnaire. Ils sont à la fois excités et en attente de compassion de la part
du maître.
Jésus semble
abonder dans leur sens, c’est pourquoi il les emmène en bateau pour prendre un
peu de distance par rapport à la tous ceux qui le sollicitent. Inutile ! La foule plus
rapide qu’eux les a rejoints. On se reposera plus tard, on mangera à un autre
moment, Jésus leur sacrifie sa disponibilité pour se consacrer à plus démunis
qu’eux, car l'autre, le prochain, le solliciteur a toujours priorité pour Jésus.
Ainsi en
est-il de ceux qui ont choisi de mettre leurs pas dans ceux de Jésus et
de répondre à l’appel de Dieu. Ils sont sans doute fatigués, la mission a été
rude mais Il leur faut aller de l’avant. Ils ont sans doute besoin de
nourriture matérielle, ils ont besoin de partager leur aventure et de dire leur
chagrin à la suite de la mort de Jean Baptiste que le souverain a
lâchement fait exécuter, mais il y a autre chose à faire et Jésus les entraîne dans un nouveau projet.
Eux,
ils espéraient de la compassion pour eux et c’est la foule qui y a droit. Ils s'estimaient privilégiés par rapport à Jésus, mais ce sont les autres qui ont droit à son attention. Si Jésus s'intéresse la foule, ce n’est pas pour s’attendrir sur son sort, et
ce n’est pas non plus pour les prendre tous en charge individuellement.
Il ne va pas non plus les mobiliser derrière lui pour en faire une armée de
partisans qui s’opposeraient pacifiquement aux soldats du tétrarque
et prépareraient une ère nouvelle sur la terre de Palestine. Le
risque serait trop grand, la partie serait loin d’être gagnée, et surtout, ce n’était pas l’ambition de Jésus.
Jésus s'intéresse à eux, parce qu'ils sont comme des brebis sans berger. Curieusement, Jésus ne se
propose pas d’être leur berger. Au contraire il va les préparer à
retourner chez eux, pour reprendre leur
vie comme au paravent, mais avec quelques choses qu’ils n’avaient pas en
venant : L’espérance. Même si dans un premier temps il semble jouer
le rôle de berger, ce ne sera que provisoirement. Il va les
aider à affronter leur destin avec une force nouvelle qui est celle de
l’esprit qu’il leur communique par sa
présence et par ses propos..
Ils doivent
cesser de se comporter comme un troupeau à l’abandon. Des brebis sans
berger n’ont pas d’avenir, elles vont dans tous les sens, ne savent pas
où brouter et sont continuellement en danger d’être volées par les brigands oumangées par le loup. Avec ou sans berger les brebis restent des animaux
dépendants. Le berger leur permet de vivre. Mais Jésus va leur proposer
mieux, même si c’est plus difficile.
Pour
répondre à leur détresse, Jésus les enseigne. Celui qui enseigne n’est pas
forcément celui qui prend en charge. On ne sait d’ailleurs pas ce qu’il leur
dit, mais on peut le supposer. Il leur dit que s’ils suivent son enseignement,
ils n’auront plus besoin de berger, l’enseignement qu’il leur donne leur
suffit pour qu’ils deviennent eux-mêmes leur propre berger.
Jésus les
invite à cesser d’être des moutons imbéciles, qui attendent tout de celui qui
veut bien les prendre en charge. Ils n’ont besoin ni de maître ni de gourou.
Jésus leur indique la voie qui donne du sens à leur vie. En écoutant Jésus, ils
sont remplis du désir de vivre. Ils reprennent goût à la vie, même si la vie
qu’ils ont menée jusqu’à présent n’est pas très enviable. C’est aussi le but de
l’Evangile pour tous ceux qui l’écoutent, c'est-à-dire nous.
Il leur dit
que Dieu vient jusqu’à eux et cela leur donne envie de se mettre debout et d’aller plus loin. Il provoque en eux le
désir de vivre malgré leur détresse, c’est pourquoi il les nourrit
miraculeusement. Ici Jésus leur donne un coup de pouce, pour les lancer sur le
chemin d’une autre vie. Ce coup de pouce prend alors figure de miracle. Le
miracle, bien souvent réside dans le fait que les hommes qui ne peuvent plus
avancer se mettent quand même à le faire. Le miracle ici, comme ailleurs
sert à faire jaillir le désir de vie. C’est le coup d’envoi pour eux d’une
nouvelle existence que Dieu partage avec eux. Dieu est celui qui provoque le
désir et le désir rend inventif.
Nul ne sait
de quoi a été fait ce miracle. Beaucoup de propos ont été tenus et de
nombreuses d’explications ont été
données à ce sujet. On a dit que le fait de vouloir nourrir cette
grande foule avec quelques pains et quelques poissons a dénoué les consciences
et que chacun s’est mis à partager avec les autres le casse croûte qu’il avait
emporté. Quoi qu’il en soit l’espoir de vivre une nouvelle vie s’est
transformé en espérance de vie et chacun a été rassasié autant de pain que
d’espérance. Ils ont découvert qu’avec rien, on pouvait faire beaucoup. Ils n’avaient pas à attendre passivement qu’on leur donne, mais ils découvraient
qu’ils avaient en eux la possibilité d’avancer avec rien en poche
De moutons
apeurés sans berger qu’ils sont, il s’est mis à les transformer en humains
responsables. C’est pourquoi Jésus sollicite encore ses disciples. Même s’ils
sont fatigués, il doit encore les mettre à contribution pour
provoquer un désir de vivre chez chacun des membres de cette foule. Il les
remet donc au travail, car le miracle, réside aussi dans le fait que les disciples soient capables de se
mettre au service des autres malgré leur fatigue.
On a pris
l’habitude de considérer que les disciples de Jésus étaient des râleurs qui
comprennent toujours trop tard ce que Jésus attend d’eux et qui se font prier
pour accomplir les désirs du maître. Nous leur ressemblons sans doute. Il n’empêche que malgré leur indisponibilité,
c’est quand même par eux que s’accomplit le miracle. Pourtant Jésus ne leur
demande pas de faire un effort au-delà de leurs forces. S’ils sont épuisés,
Jésus leur a quand même laissé un peu de temps pour se reprendre.
Jésus en
effet n’est pas un bourreau de travail pour les autres. Il connaît parfaitement
leurs limites et il prend soin de les ménager malgré l’urgence du moment. Ainsi
celui qui nous guide sur les sentiers d’une vie nouvelle connaît parfaitement
les gens auxquels il s’adresse, il sait jusqu’où ils peuvent aller. Mais il
sait aussi quel est le but à atteindre et il fait le nécessaire pour qu’il se
réalise.
Inutile de
lui dire qu’il y a urgence. Il le sait. Le soir tombe, la nuit approche. C’est
la nuit de l’angoisse et de l’incertitude. Nuit de ce jour qui s’achève, nuit
aussi dans leur vie intérieure faite d’angoisses et de questionnements. Il faut
que tout soit dit et que tout soit compris avant que les ténèbres ne
surprennent tout le monde. Il faut que chacun reparte, animé d’une puissance de
vie nouvelle qui lui permettra de franchir les obstacles que l’obscurité lui
réserve. Si Jésus a mis en eux
l’espérance d’une autre vie il ne leur a cependant pas donné une potion magique
qui déjoue tous les obstacles. Il leur a
donné une autre vision des choses qui les remplit d’énergie, mais les
difficultés de la vie subsistent
Les chemins
de la vie où ils s’engagent les mèneront sans doute vers le Royaume, mais
chacun devra s’y employer, parfois au-delà de ses forces, comme ce fut le cas
pour les disciples fatigués, qui ont donné du sens au miracle par le dépassement
qu’ils ont accompli sur eux mêmes
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