mercredi 30 juillet 2014

Jérémie 20:7-9 Et Dieu dans tout ça? - dimanche 31 août 2014

Chapitre 20
  
7 Tu m'as dupé, SEIGNEUR,

et je me suis laissé duper ;

tu m'as saisi, et tu l'as emporté.

Je suis sans cesse en butte à la dérision,
tout le monde se moque de moi.
8 Car toutes les fois que je parle, je crie,
je proclame : « Violence et ravage ! »
La parole du SEIGNEUR m'expose sans cesse
aux outrages et aux railleries.
9 Si je dis :
« Je ne l'évoquerai plus,
je ne parlerai plus en son nom »,
c'est dans mon cœur comme un feu dévorant,
enfermé dans mes os ;
je me fatigue à le contenir, et je n'y parviens pas.


10 Car j'apprends les mauvais propos d'une multitude :
Effroi de tous côtés !

Annoncez ! Annonçons-le !

— Tous mes amis m'observent
pour voir si je vais chanceler :
Peut-être se laissera-t-il duper,
et nous l'emporterons sur lui,
nous nous vengerons de lui !
11 Mais le SEIGNEUR est avec moi comme un héros brutal ;
c'est pourquoi mes persécuteurs trébucheront
et ne l'emporteront pas.
Ils auront bien honte de n'avoir pas réussi :
ce sera une confusion pour toujours ; on ne l'oubliera pas.


Il nous arrive de  chercher dans la fuite loin de Dieu l’apaisement à nos révoltes Il nous arrive de croire que nous avons  fait  des choses bonnes et de découvrir que les événements se retournent contre nous. Nous croyons suivre les chemins de la foi  et c’est le silence de Dieu qui nous répond.  Nous espérons cependant que Dieu partagera notre révolte, mais la voix de sa sagesse reste muette. Dieu ne semble pas toujours disponible et son mutisme apparent nous fait du mal.

Par ces quelques remarques,  nous rejoignons les préoccupations des prophètes d’Israël qui les ont portées avant nous, car ils cherchaient plus à trouver de la cohérence dans la Parole de Dieu qu’à deviner l’avenir que personne ne peut connaître puisqu’il s’écrit avec Dieu au jour le jour. Mais avant d’aller plus loin dans nos investigations essayons de préciser ce que recouvre pour nous la notion de prophète.

Il n’est pas rare, au cours d’une  conversation, alors que l’on élabore des projets et que l'on ne sait pas exactement comment tourneront les choses, que l’on soit amené, à cours d’arguments à dire qu’après tout, nous ne sommes pas des prophètes. Cela veut dire que le propos nous dépasse et que l’on ne détient pas les secrets de l’avenir. Notre culture actuelle conçoit la notion de prophète dans deux acceptions différentes. La première assez classique, identifie le prophète avec le devin, celui qui serait gratifié d’un don qui lui permettrait de connaître l’avenir. L’autre usage du mot servirait à désigner les fondateurs des grands courants religieux tels Moïse ou Mahomet ou plus proches de nous, Joseph Smith pour les Mormons ou le rev. Moon. Bien que Jésus Christ corresponde à la deuxième de ses définitions, ce sont d’autres titres que l’on a retenus pour lui.

Notre propos de ce jour va consister à nous entretenir  sur les vicissitudes du prophète Jérémie. Ni lui, ni aucun des grands prophètes d’Israël ne correspond aux définitions que je viens d’énoncer. Certes, à l’époque biblique, il existait une fonction officielle de prophètes. Ils vivaient en confréries et étaient sans doute appointés par le pouvoir royal. Leur fonction consistait à éclairer le roi sur l’avenir que Dieu lui réservait. Si cette fonction était bien établie, elle n’a pas laissé beaucoup de traces. Les prophètes dont les noms nous sont parvenus exerçaient une fonction de type charismatique. Ils n’étaient pas  investis  dans cette  fonction par les hommes, mais ils croyaient avoir reçu une vocation de Dieu qui leur permettait d’avoir un éclairage particulier sur les événements. Leurs propos relevaient d’ une lecture clairvoyante des Ecritures  et correspondaient rarement à ce que le roi ou le peuple désiraient entendre  à ce sujet

En fait, c’est à partir de la conscience qu'ils avaient de Dieu qu’ils se prononçaient sur les événements. Il s’agissait pour eux de percevoir quelles étaient les attitudes fidèles que leur suggérait la méditation de la loi. La fidélité à Dieu n’impliquait pas forcément des conséquences gratifiantes pour eux, parfois même, elles étaient en opposition radicale avec la cour, le clergé et le peuple. C’est  dans une telle situation que nous rejoignons Jérémie.

Jérémie a été amené à constater que le comportement du roi et de ses ministres était souvent contraire aux prescriptions de la loi en dépit de ce que pouvaient dire les prophètes officiels ainsi que le haut clergé constitué par le grand Prêtre et son entourage.

Il a compris très vite, encore enfant a-t-il dit,  qu’il lui était demandé de répondre à sa vocation en ne se taisant pas.  Proche des grands  et familier du clergé auquel il appartenait sans en exercer la fonction à cause de son célibat, il était écouté, contesté et malmené. Pourtant, il a réussi à conserver l’amitié et  l’oreille de personnes proches du pouvoir. Son collaborateur, son   ami et son protecteur à la fois fut le secrétaire Baruch. Il nous faut entendre par secrétaire la « fonction de secrétaire d’état », c’est à dire celle de ministre.

Comment pouvait-il porter un  poids  si lourd quand les événements sefaisaient contraires et que Dieu paraissait se jouer de lui ? Comment ne pas douter de Dieu quand les conséquences de ses propos le plongeaient dans des difficultés extrêmes. Sa vie fut souvent en danger et il dut se cacher. Il fut jeté dans une citerne par ordre du roi et sauvé de justesse par le chambellan qui se compromit pour lui.

 Avec le décalage de l’histoire, nous découvrons dans la plainte de Jérémie qui nous est rapportée ici une plainte que nous  pourrions formuler à notre tour. Comme  Jérémie, il nous arrive d’en vouloir à Dieu parce que les événements ne vont pas dans le sens où nous le souhaitons. Par fidélité à Dieu il arrive que nous fassions des choix de vie douloureux et que ces choix se  retournent contre nous. Nous constatons que la vertu n’est pas récompensée à sa juste mesure, que la manifestation de la foi paraît obsolète et  que Dieu reste silencieux face  à notre épreuve.Nous faisons nôtre ce cri de Jésus sur la croix: "Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné?"

A l’exemple de Jérémie, nous devons comprendre cependant que le dialogue n’est jamais rompu avec Dieu en dépit de son silence apparent. La logique humaine voudrait que le croyant déçu abandonne tout  et qu’il s’inspire de la logique de la femme de Job qui lui recommandait au plus fort de l’épreuve de maudire  Dieu et  de  mourir. Jérémie ne cesse d’interpeller Dieu  et même de le mettre en accusation. Par son attitude Jérémie nous apprend que Dieu préfère toujours le dialogue à tout autre attitude, même si Dieu paraît absent.  Jérémie n'est pas ce triste personnage geignard qu'en a fait la tradition. Quand le silence de Dieu  lui donne l’impression qu’il cautionne l’injustice, il n'accepte pas  la situation et  il n'encaisse pas sans rien dire. Même si Le croyant ne comprend pas le sens des événements, il ne doit jamais s’enfermer dans une attitude résignée  face à Dieu  car Dieu n’est jamais à l’origine de ce qui nous accable. Il n’est jamais l’auteur de nos malheurs, même si on  ne comprend pas le sens de ce qui nous arrive.

Quand les événements nous sont vraiment contraires, il n’est pas évident de garder une telle sérénité dans la foi. Ce court passage de Jérémie nous montre qu’avant de ressentir le moindre soulagement en exprimant sa révolte, il doit insister et exprimer sa rancœur et même son désir de rejeter Dieu. Il exprime son projet de s’écarter de la foi et d’abandonner sa vocation de prophète. Et quand il a fini de crier sa révolte, au lieu de trouver son soulagement dans une forme d’athéisme apaisant, il se laisse envahir par une vague de paix. Sa révolte contre Dieu, poussée à l’extrême a nettoyé en lui toute amertume et a rétabli une relation d’amour avec lui, car Dieu n’était en rien dans ses malheurs. Quand l'esprit du prophète oscille entre rejet et résignation, c'est toujours dans le silence accueillant de son Dieu qu'il retrouve sa sérénité.

Rien n’a pourtant changé dans sa situation. Mais une énergie nouvelle s’est emparée de lui. Il sait alors qu’il ne peut avancer autrement qu’en prenant la main  que  Dieu lui tend en espérant qu’un jour les événements lui donneront raison. La suite nous montrera que  non.

Deux mille cinq cents ans nous séparent  de l’époque où a vécu ce témoin courageux. Entre lui et nous s’est alors interposé un autre visage, le visage de celui qui a porté les mêmes détresses et les mêmes révoltes que lui. Il s’agit, bien entendu de Jésus Christ. Il  a portées les révoltes des hommes jusque dans la mort. Même si ce n’est pas par la volonté de Dieu qu’il est mort,
Dieu n’a  cependant pas voulu le soustraire à cette mort. Nous découvrons alors que la fidélité de Dieu à la cause des hommes, va jusque dans la mort et qu’il la transforme en lui donnant la saveur de l’éternité.  Dieu ne nous abandonne pas dans l’épreuve, comme il n’a pas abandonné son fils dans la mort. Il a sublimé sa vie, comme il  sublime la nôtre pour que notre vie s’accomplisse totalement dans le destin qu’il a choisi  de nous faire partager : l’éternité 
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