dimanche 23 septembre 2018

Marc 9/38-48 Faut-il se faire violence pour plaire à Dieu? dimanche 30 septembre 2018


Marc  9/38-48



38 Jean lui dit : Maître, nous avons vu un homme qui chasse les démons par ton nom et nous avons cherché à l'en empêcher, parce qu'il ne nous suivait pas.

39 Jésus répondit : Ne l'en empêchez pas, car il n'y a personne qui puisse parler en mal de moi tout de suite après avoir fait un miracle en mon nom.

40 En effet, celui qui n'est pas contre nous est pour nous.

41 Et quiconque vous donnera à boire une coupe d'eau parce que vous appartenez au Christ, amen, je vous le dis, il ne perdra jamais sa récompense.

42 Mais si quelqu'un devait causer la chute de l'un de ces petits qui mettent leur foi en moi, il vaudrait mieux pour lui qu'on lui attache autour du cou une meule de moulin et qu'on le lance à la mer.

43 Si ta main doit causer ta chute, coupe la ; mieux vaut pour toi entrer manchot dans la vie que d'avoir tes deux mains et d'aller dans la géhenne, dans le feu qui ne s'éteint pas

45 Si ton pied doit causer ta chute, coupe-le ; mieux vaut pour toi entrer infirme dans la vie que d'avoir tes deux pieds et d'être jeté dans la géhenne

47 Et si ton œil doit causer ta chute, arrache-le ; mieux vaut pour toi entrer borgne dans le royaume de Dieu que d'avoir deux yeux et d'être jeté dans la géhenne,

48  où leur ver ne meurt pas, et où le feu ne s'éteint pas. 


Loin de nous, l’idée que Jésus nous inviterait à faire violence contre nous-mêmes par souci de fidélité à son Evangile. Nous n’aurions pas assez de bras à couper, ni d’yeux à arracher, ni de jambes à mutiler, tant les actes agressifs que nous commettons quotidiennement contre nos prochains sont nombreux et tant les pensées  que nous formulons contre les autres nous donneraient de bonnes raisons pour le faire si on prenait les recommandations de Jésus à la lettre. Loin de nous l’idée qu’en étant agressifs contre nous-mêmes nous faisons plaisir à Dieu et accomplissons sa volonté. Nous  ne faisons pas la volonté de Dieu en  le devançant dans un châtiment  qu’il ne nous destine pas, car Dieu ne punit personne pour avoir contrevenu à sa volonté. Ce n’est pas ainsi que l’Evangile fonctionne, et ce n’est pas en agissant dans ce  sens que nous rencontrerons Dieu.

Dieu vient vers nous, dans le monde où nous sommes et il ne méconnait  aucun des événements que nous vivons. Nous subissons quotidiennement des agressions de toutes sortes et nous en faisons subir aux autres. Aujourd’hui, les hommes ne trouvent de solutions à leurs problèmes qu’en imaginant de nouvelles formes de violence qu’ils font subir aux autres au nom de leur bon droit. C’est ainsi qu’ils espèrent faire avancer les choses et créer des progrès significatifs dans la société où nous sommes. C’est dans un tel monde que Dieu se propose d’être le partenaire de l’humanité.

N’allez pas croire qu’il méconnait nos arguments quand nous justifions notre bon droit par les agressivités que nous faisons subir aux autres au nom du mieux-être commun. Ainsi les expressions telles que « casser du flic » ou « casser du bourgeois » utilisée dans les manifs, ne nous émeuvent pas beaucoup  et si nous ne les utilisons pas, elles le sont par nos enfants ou des personnes de notre entourage et nous ne nous émouvons pas  outre mesure quand on casse des vitrines ou que l’on brûle des voitures simplement pour  manifester une  indignation que l’on prétend légitime.

Ne soyons donc pas surpris si Jésus utilise des images fortes pour se faire comprendre et parler de Dieu. Ses propos choquants font partie du décor  dans lequel se déroule notre quotidien. Si  Jésus nous demande d’utiliser contre nous-mêmes les violences que la société exerce contre les autres, c’est pour nous dire que Dieu accepte de nous accompagner dans une société qui lui est totalement étrangère.  Si nous sommes choqués par ces propos, comprenez aussi que Dieu est choqué, lui aussi par les comportements de ce monde, mais, pour nous en sortir, il accepte de mettre les mains dans le cambouis.

Jésus n’a pas hésité à suivre l’intuition qu’il avait de Dieu, quand il s’est offert à la violence des hommes et que  ceux-ci l’ont tué.  Jésus en tenant ces propos choquants sur l’automutilation voulait sans doute provoquer tous ceux qui croyaient pouvoir trouver Dieu en le cherchant dans  les eaux calmes d’un monde factice fait de règles de piétés, et de pratiques pieuses qui les mettaient en dehors de la vie quotidienne des petites gens qui subissaient de plein fouet la violence causée par la famine, la pauvreté  ou la maladie. Bien évidemment, Jésus prends fait et cause pour les petits et il les défend  contre les agressions  qui leurs sont faites. Il  retourne ces agressions  contre leurs agresseurs qui leur sont indifférents en leur proposant, à titre d’exemple de s’automutiler, non pas pour le faire vraiment, mais pour qu’ils comprennent l’horreur des souffrances que les petits subissent au quotidien.

Qui sont ces petits  qui croient ?  Bien évidemment, nous comprenons que ceux qui ont rapporté ces paroles de Jésus en rédigeant l’Evangile quelques  quarante ans  après qu’elles aient été prononcées sont les fidèles de l’Eglise naissante persécutés par leurs opposants du moment. Mais au moment où vivait Jésus, le contexte était différent, les petits  étaient sans doute tous ceux qui étaient exploités par la société de l’époque tels les propriétaires terriens, les occupants romains, et les  prêtres et les scribes qui faisaient peser  sur eux la dîme et autres impôts ecclésiastiques. Mais en parlant de ces petits qui croient, l’Evangile se garde bien de dire en qui ils croient. Nous interprétons un peu vite en pensant que c’est évidemment en Dieu qu’ils croient, mais il faut sans doute voir dans le flou volontaire du texte, toutes les idées en lesquelles on croit et qui donnent à  espérer.

Il faut y voir bien entendu le Dieu dont parle Jésus qui n’est pas forcément celui de la tradition, mais celui qui prend en charge toutes les espérances qui donnent aux hommes une envie irrésistible de vivre. C’est le Dieu qui veut faire un pacte de vie avec tous ceux qui pensent que Dieu est un facilitateur de vie pour tous. Derrière la notion de croire, Jésus semble mettre la notion  d’espérance  au sens le plus large que peut prendre ce mot.

Si Jésus préconise alors, que l’on attache à leur cou une meule de moulin, c’est à dire qu’on les tue, cela semble vouloir dire que ces gens bienpensants qui ignorent  les petits  n’ont pas leur place dans la société des hommes telle que Dieu la conçoit. Dieu n’est pas absent de ce monde et il le voit avec un regard que Jésus vent nous communiquer. C’est un monde où l’espérance doit prendre la première place dans tous les rapports humains, c’est elle aussi qui prend la première place dans notre quête de Dieu. Nous découvrons cela dans tous les gestes que l’Evangile nous rapporte au sujet de Jésus qui sont tous porteurs d’espérance.

Revenons  à la question concernant  tous ces petits qui croient. Qui sont-ils en fait ? Ce ne sont pas seulement tous les enfants à qui  la société antique ne réservait qu’une toute petite place, mais c’étaient eux aussi. Ce n’étaient pas seulement les adeptes de Jésus méprisés par les scribes et les pharisiens, ou plus tard les premiers chrétiens persécutés, mais c’étaient eux aussi. Ce sont tous ceux qui se sentent frustrés par l’existence et qui malgré tout espèrent sans savoir en qui ou en quoi ils espèrent vraiment. C’est pour tous ceux-là que Jésus dessinait le visage nouveau d’un Dieu qui prenait en charge leurs espérances.

C’est en laissant entendre que Dieu prenait d’abords en charge les petits, tous les petits que Jésus devenait à son tour scandaleux pour  tous ceux qui prêtaient à Dieu un autre visage, un visage qui serait fait de règles et  de conventions religieuses ainsi que  de morale rigide

 En se faisant défenseur des petits qui croient, Jésus présentait Dieu comme celui de l’espérance. Les croyants ressentaient la joie de vivre  à son contact.  Par les propos violents qu’il tenait, Jésus faisait de Dieu celui qui s’incarne au quotidien dans notre monde. Il montrait par-là qu’il n’était pas celui que les hommes fabriquaient à l’image de leurs désirs,  mais qu’il était celui qui les entraînait  à transformer le monde et à y vivre heureux tous ensemble. Ce Dieu dont Jésus était le témoin était perçu comme le créateur d’un monde nouveau, toujours appelé à progresser. Ce n’est donc pas l’homme qui était capable de créer un tel Dieu, c’était un Dieu qui en se faisant présent dans le monde des hommes les rendaient capables d’y vivre mieux tous ensemble.






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