mercredi 14 juin 2023

Quand Jésus raconte une parabole

 

16 juin 2023

Matthieu 13/1-23

 

01 Ce jour-là, Jésus était sorti de la maison, et il était assis au bord de la mer.

02 Auprès de lui se rassemblèrent des foules si grandes qu’il monta dans une barque où il s’assit ; toute la foule se tenait sur le rivage.

03 Il leur dit beaucoup de choses en paraboles : « Voici que le semeur sortit pour semer.

04 Comme il semait, des grains sont tombés au bord du chemin, et les oiseaux sont venus tout manger.

05 D’autres sont tombés sur le sol pierreux, où ils n’avaient pas beaucoup de terre ; ils ont levé aussitôt, parce que la terre était peu profonde.

06 Le soleil s’étant levé, ils ont brûlé et, faute de racines, ils ont séché.

07 D’autres sont tombés dans les ronces ; les ronces ont poussé et les ont étouffés.

08 D’autres sont tombés dans la bonne terre, et ils ont donné du fruit à raison de cent, ou soixante, ou trente pour un.

09 Celui qui a des oreilles, qu’il entende ! »

10 Les disciples s’approchèrent de Jésus et lui dirent : « Pourquoi leur parles-tu en paraboles ? »

11 Il leur répondit : « À vous il est donné de connaître les mystères du royaume des Cieux, mais ce n’est pas donné à ceux-là.

12 À celui qui a, on donnera, et il sera dans l’abondance ; à celui qui n’a pas, on enlèvera même ce qu’il a.

13 Si je leur parle en paraboles, c’est parce qu’ils regardent sans regarder, et qu’ils écoutent sans écouter ni comprendre.

14 Ainsi s’accomplit pour eux la prophétie d’Isaïe : Vous aurez beau écouter, vous ne comprendrez pas. Vous aurez beau regarder, vous ne verrez pas.

15 Le cœur de ce peuple s’est alourdi : ils sont devenus durs d’oreille, ils se sont bouché les yeux, de peur que leurs yeux ne voient, que leurs oreilles n’entendent, que leur cœur ne comprenne, qu’ils ne se convertissent, – et moi, je les guérirai.

16 Mais vous, heureux vos yeux puisqu’ils voient, et vos oreilles puisqu’elles entendent !

17 Amen, je vous le dis : beaucoup de prophètes et de justes ont désiré voir ce que vous voyez, et ne l’ont pas vu, entendre ce que vous entendez, et ne l’ont pas entendu.

18 Vous donc, écoutez ce que veut dire la parabole du semeur.

19 Quand quelqu’un entend la parole du Royaume sans la comprendre, le Mauvais survient et s’empare de ce qui est semé dans son cœur : celui-là, c’est le terrain ensemencé au bord du chemin.

20 Celui qui a reçu la semence sur un sol pierreux, c’est celui qui entend la Parole et la reçoit aussitôt avec joie ;

21 mais il n’a pas de racines en lui, il est l’homme d’un moment : quand vient la détresse ou la persécution à cause de la Parole, il trébuche aussitôt.

22 Celui qui a reçu la semence dans les ronces, c’est celui qui entend la Parole ; mais le souci du monde et la séduction de la richesse étouffent la Parole, qui ne donne pas de fruit.

23 Celui qui a reçu la semence dans la bonne terre, c’est celui qui entend la Parole et la comprend : il porte du fruit à raison de cent, ou soixante, ou trente pour un. »

 

 

Matthieu 13/1/23

Quand Jésus raconte une parabole, il ne donne pas la clé de l’énigme. Il nous fait cependant confiance pour laisser se taire en nous nos spontanéités et pour laisser nos voix intérieures s’accorder avec ce qu’il veut nous faire comprendre. 

Ainsi nous ne sommes pas dispensés par lui de faire  des efforts pour nous mettre à son écoute. Il ne nous faut pas hésiter au cours de notre méditation à rejeter  nos premières intuitions pour en accepter d’autres qui seraient plus en accord avec ce que son Esprit nous inspire.

 Jésus nous laisse aussi entendre que nous ne sommes pas toujours capables  de comprendre vraiment  ce qu’il a à dire, il sait cependant que son message est suffisamment révolutionnaire pour que nous ne puissions pas l’accepter du premier coup.

Il faudra que  nous y revenions à plusieurs reprises pour le comprendre plus à fond. C’est ce qui va se passer avec cette parabole.

En fait, dans chaque parabole Jésus nous alloue un rôle, sans vraiment nous dire dans lequel  nous devons nous retrouver. Il se peut aussi que nous nous retrouvions dans la peau de plusieurs personnages à la fois ou que nous ne comprenions pas vraiment tout de suite quel rôle nous sommes censés tenir. Il se peut aussi que nous ne sachions pas nous reconnaître dans  ce rôle.

Dans cette histoire à quelle place devrait se situer l’interlocuteur de Jésus ? Doit-il  se situer dans le rôle du semeur ? Dans celui de la terre ou dans une autre fonction encore ? Nous devrons cependant faire un choix. On cherche aussi quel rôle joue Dieu ? Mais même ce rôle  n’est pas évident. On a l’impression quelque fois qu’il ne joue aucun rôle du tout ou qu’aucun rôle ne lui convient.

A première lecture,  j’ai bien l’impression que dans cette parabole, je n’ai  pas moi-même ma place. Je n’ai pas davantage l’impression que Dieu y joue un rôle bien précis, si non celui de la nature dont la fonction est  de faire pousser les graines en leur temps. Mais pourquoi y a-t-il alors de la mauvaise terre ?

Ici Jésus nous offre une carte postale représentant la campagne palestinienne à l’époque des semailles d’automne. Nous avons la description d’un champ dévasté par la sécheresse de l’été dont les bords se confondent  avec la pierraille du chemin où seules les broussailles poussent à leur aise.

On peut évidemment extrapoler en imaginant qu’il peut représenter notre monde actuel où les terres riches et fécondes côtoient les terres arides et les savanes  incultes. Immédiatement sautent à notre conscience le sort des populations qui les habitent et  nous repérons les injustices provoquées par les inégalités inhérentes  aux différents  sols.

Ces terres injustement distribuées seraient-elle une image de la création que Jésus nous proposerait ? Dans ce cas il faudrait mettre  Dieu en accusation pour n’avoir pas créé un monde  équilibré où tous pourraient vivre  de la même égalité.

Les courants écologistes qui accusent les hommes qui malmènent la nature et qui détruisent les forêts pour créer des pâturages ou des plantations de palmiers à huile et de soja pour nourrir le bétail et donner de meilleurs rendements aux terres agricoles pourraient se sentir visés par un tel récit.

Cette interprétation qui met en cause la création ne semble pas cependant devoir servir de support à une interprétation de la parabole.  Si la création n’est pas mise en cause, serait-ce que Dieu lui-même serait à mettre en accusation ? En effet, le semeur  de  cette parabole ne prodigue pas sa semence, il se rit de la sècheresse, il fait fi des broussailles, il ignore la mauvaise terre, tout terrain susceptible d’être ensemencé, quel qu’il soit a  droit à sa générosité. Mais quel sens aurait cette parabole si on doit voir l’image de  Dieu dans ce semeur qui prodiguerait  sa semence  sans tenir compte de la pauvreté  des paysans locaux en leur proposant un mode  d’exploitation qui contribuerait à les appauvrir en dilapidant de la semence si dure à acquérir.  I Dans ce cas, Dieu  jouerait un mauvais rôle. Ce ne peut donc être lui le semeur.

En fait si Jésus se sert de la propre vie des paysans de son temps pour illustrer cette parabole c’est parce qu’ils sont concernés par son message.

C’est le texte lui-même qui nous donne une clé pour comprendre. Si on est fidèle à la rigueur du texte grec, il est dit dans les premiers versets que Jésus sortit de la maison  et qu’il alla s’assoir pour enseigner. Et dans son récit il raconte qu’un homme sortit pour semer. L’homme qui sème semble devoir être Jésus lui-même puisqu’il fait les mêmes gestes. La semence serait alors la parole de Dieu et ceux qui écoutent seraient la terre ( Adama en hébreux, le même radical que Adam, l’homme)

C’est la terre, quelle qu’elle soit, dans son état brut, qui reçoit la semence. Pour l’instant qu’elle soit bonne ou mauvaise elle n’a rien à voir avec l’écologie ni la création. Mais cette terre a capacité  de réagir, elle a la possibilité d’accueillir la graine et de la faire croitre  selon sa nature ou de la laisser végéter.

La pointe du texte ne  serait-elle pas de nous dire que quel qu’il soit, l’homme a capacité de réagir en fonction de  ce qu’il reçoit de Dieu. Il nous est suggéré que quiconque reçoit la parole de Dieu a capacité de réagir et de rendre compte de ce qu’il reçoit. Ne pourrait-on pas lire alors cette parabole de Jésus comme une invitation à améliorer le milieu où nous sommes sous l’injonction de Dieu quand il nous visite. Dieu tiendrait compte de nos capacités à réagir et nous aiderait à le faire face à la situation où nous nous trouvons.

Ne pourrait-on pas lire alors  cette parabole, en tenant compte des moments que nous vivons comme  une possibilité qui nous est donnée d’améliorer la création, quand nous y sommes confrontés en ayant pour visée, le sort du prochain que Dieu nous confie avec pour mission d’améliorer son sort et d’améliorer la nature pour qu’elle lui devienne plus favorable.

Il s’agirait donc  de l’améliorer et de la faire valoir, pour qu’elle devienne l’expression de la volonté de Dieu  dans tous les lieux où les hommes reçoivent vocation de la féconder.

Nous serions donc partenaires de Dieu pour que la nature devienne ce que Dieu a prévu qu’elle devrait être, pour qu’ensemble, hommes et création agissent  pour le mieux-être de l’un et de l’autre.

L’homme habité par la parole de Dieu devient partenaire de la création. C’est ainsi, grâce à lui, elle  accomplit sa vocation au service du projet que Dieu a pour elle. La création encore inachevée serait donc en attente de la perfection que Dieu lui destine sous la conduite de l’homme quand il est rempli  de l’esprit de Dieu.

Si donc le semeur est Jésus, on comprend qu’il ne ménage ni sa peine ni sa semence. Il répand sa graine sans  s’interroger, sur le lieu où elle tombe, car il a vocation de féconder la terre par sa parole. Par contre, prenant  à notre compte le sort du semeur palestinien, nous avons mission d’adapter la parole du Seigneur à la situation qui nous est proposée. Compte tenu de la situation qui  nous est décrite, nous devons intelligemment  tenir compte de la quantité de la semence que nous avons et de la qualité du sol où nous devons semer. Nous prenons la place du semeur palestinien  qui va certainement chercher à économiser, malgré tout, sa semence, même s’il ne maitrise pas le lieu où elle tombe.

Il fera attention à ce qu’elle ne tombe pas trop sur le chemin ou dans les ronces, même si c’est difficile de les distinguer les uns des autres. 

Nous agissons, comme cela en étant économes de notre semence, nous concentrons notre attention sur  la terre qui doit mobiliser nos soins. Si Jésus ne le fait pas, c’est qu’il nous confie le soin de le faire.

Nous n’avons donc pas à chercher vers qui  Dieu nous envoie. Il fait confiance à notre capacité de comprendre la situation en fonction  de notre relation avec le prochain  qui a besoin de notre action pour que la parole de Dieu puisse prendre effet dans sa situation. Nous comprenons que Dieu nous  donne pouvoir de séparer la bonne terre de la mauvaise terre et de ne rien semer dans celle qui portera  des broussailles.

Sans nous en rendre compte, nous nous basons sur des critères liés à notre  bon sens pour déterminer notre action. C’est donc en pensant à la nécessité  de notre prochain que nous déciderons nous-mêmes de notre action.  Jésus compte sur nous pour avoir cette réflexion et comprendre ainsi sa parole.

Il est suggéré ici, que si nous endossons le  rôle du semeur, à l’image de Jésus, nous devons prendre  soin de toute terre qui nous est offerte et, ce qui n’est pas dit dans le texte, c’est grâce à nous  qu’elle portera du fruit.

La création dans laquelle nous vivons et agissons est comme ce champ de Galilée. L’homme  qui le travaille a vocation de le prendre en charge dans sa totalité car c’est ainsi, semble-t-il que Dieu nous confie  sa création pour qu’elle porte fruit, partout où l’homme est mis à son service.

 

 

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