mercredi 16 mars 2016

Jean 20: 19-31 Jésus et Thomas - 03 avril 2016



Thomas et la résurrection Dimanche 03 avril 2016- déjà publié et 2012 et modifié en 2016
Jésus apparaît à ses disciples
19 Le soir de ce jour-là, qui était le premier de la semaine, alors que les portes de l'endroit où se trouvaient les disciples étaient fermées, par crainte des Juifs, Jésus vint ; debout au milieu d'eux, il leur dit : Que la paix soit avec vous ! 2 0Quand il eut dit cela, il leur montra ses mains et son côté. Les disciples se réjouirent de voir le Seigneur. 21 Jésus leur dit à nouveau : Que la paix soit avec vous ! Comme le Père m'a envoyé, moi aussi je vous envoie. 22 Après avoir dit cela, il souffla sur eux et leur dit : Recevez l'Esprit saint. 23 A qui vous pardonnerez les péchés, ceux-ci sont pardonnés ; à qui vous les retiendrez, ils sont retenus.
Thomas et le ressuscité
24Thomas, celui qu'on appelle le Jumeau, l'un des Douze, n'était pas avec eux lorsque Jésus vint. 25 Les autres disciples lui dirent donc : Nous avons vu le Seigneur. Mais lui leur dit : Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous et ma main dans son côté, je ne le croirai jamais ! 26 Huit jours après, ses disciples étaient de nouveau dans la maison, et Thomas avec eux. Jésus vient, alors que les portes étaient fermées ; debout au milieu d'eux, il leur dit : Que la paix soit avec vous ! 27 Puis il dit à Thomas : Avance ici ton doigt, regarde mes mains, avance ta main et mets-la dans mon côté ! Ne sois pas un incroyant, deviens un homme de foi ! 28 Thomas lui répondit : Mon Seigneur, mon Dieu ! 29 Jésus lui dit : Parce que tu m'as vu, tu es convaincu ? Heureux ceux qui croient sans avoir vu
Le but de ce livre
30 Jésus a encore produit, devant ses disciples, beaucoup d'autres signes qui ne sont pas écrits dans ce livre. 31 Mais ceux-ci sont écrits pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et que, par cette foi, vous ayez la vie en son nom. -


Merci Thomas d’être celui que tu es, car tu poses les vraies questions et tu nous aides à approfondir notre foi. En effet, la foi chrétienne est toute entière centrée sur la résurrection. "Si les morts ne ressuscitent pas notre foi est vaine" a dit l’apôtre Paul » dans l’épître aux Corinthiens. Paul insiste sur cette vérité incontournable selon laquelle la foi chrétienne n’aurait aucun sens si la résurrection n’en était pas l’élément central.
Pourtant, nous savons que les sondages d’opinion ne confirment pas les convictions de Paul. Seulement 58 % des catholiques font référence à la résurrection dans l’expression de leur foi ; 10% croient en la résurrection des morts, 8 % à la réincarnation, 26% croient qu’il n’y a rien et 53 % pensent qu’il y a quelque chose mais ne savent pas quoi. Ces chiffres sont ceux du « Monde des Religions » publiés il y a déjà quelques années. A quelques variantes près on devrait avoir un pourcentage identique chez les protestants. Il semble donc qu’il y a un sérieux décalage entre ce que nos catéchismes enseignent et ce que les fidèles croient. En fait il semblerait que les chrétiens ne savent plus très bien en quoi consiste la notion de résurrection.
Thomas l’incrédule va nous guider ce matin sur le chemin initiatique de la foi chrétienne pour nous aider à affiner nos questions et nos réponses sur le thème de la résurrection. Il nous apparaît comme un homme particulièrement « branché », comme on dit aujourd’hui, car il refuse de croire ce que les autres disent sans en apporter la preuve. Il est rationnel dans ses pensées. A y regarder d'un peu près, il n’y va pas de main morte. Sans s'en prendre directement à Dieu, il met les autres aux défit de créer en lui une certitude qu’il n’a pas. En fait, il invite Dieu à relever le défi.

Pourtant qui est-il ce Thomas dont les Évangiles parlent peu ? Il ne fait pas partie des apôtres de premier plan. L’Évangile le mentionne seulement une autre fois pour dire qu’il a déjà douté, de la capacité de Jésus à ressusciter Lazare. La tradition l'a l’enfermé dans le personnage de celui qui doute. Dans le cas précis, il prend ses distances par rapport aux autres Apôtres. Pour ma part, je vais vous encourager ce matin à faire de même, en dépit de ce que disent les textes fondateurs. Contrairement à Thomas, ces textes s’appuient sur le témoignage des apôtres à commencer par Paul pour étayer leurs affirmations sur la résurrection, mais ne nous invitent pas à tenter l’expérience.

Thomas nous montre par anticipation que si nous ne faisons pas de la résurrection une affaire personnelle, notre foi ne s’appuie pas sur de vrais fondements. Elle, ne peut être que le résultat d’une expérience personnelle avec Dieu, à l’issue de laquelle nous découvrons ce qu’est vraiment la résurrection : une autre manière d’aborder la vie. C’est alors que Jésus ressuscité se manifeste à nous, qu’il nous parle et qu’il s’empare de notre âme en venant vers nous. Il se propose de partager notre vie et il nous invite à partager la sienne. C’est au cours d’une telle rencontre que nous faisons l’expérience de la résurrection et qu’elle s’impose à nous. Mais encore faut-il faire cette expérience.
Nous avons une fâcheuse tendance à croire que l’expérience des croyants peut aider les autres à croire quand ils n’ont pas encore la foi. C’est une erreur d’imaginer que l’expérience des uns peut provoquer la foi chez les autres. Les non croyants n’ont pas forcément envie de suivre la voie de ceux qui se donnent à eux en exemple. Ils ne se sentent généralement pas au même niveau spirituel qu'eux. Au lieu de les amener à croire, cela provoque plus un sentiment de frustration qu’une envie de les imiter. On leur dit que la foi est un don gratuit de Dieu. Alors pourquoi ne l’ont-ils pas ? Le chercheur de Dieu, celui qui ne sent pas la foi monter en lui comme une sève de renouveau ne trouve pas son compte dans de tels exemples.

Cette frustration est bien celle de Thomas qui ne comprend pas pourquoi il est tenu à l’écart par son Seigneur et il considère le témoignage de ses frères comme un défit qu’il ne peut pas relever.
Certes dans le monde des croyants, c’est une autre affaire. Le témoignage des uns aide les autres à purifier leur foi par comparaison et ils s’édifient ainsi les uns les autres, mais la foi des autres ne sert pas à l’acquérir pour ceux qui ne l’ont n’a pas, puisque elle est le résultat d’une intervention que Dieu fait en eux. C'est un acte créateur que fait Dieu pour chacun de ceux qui croient.
Le chemin de la résurrection leur est-il fermé? Certainement pas !
On s’est interrogé pendant des siècles sur cette question sans donner de réponse satisfaisante. Je sais, pour ma part, que celui qui a le désir de rencontrer Dieu ne sera jamais privé de l'intervention de celui-ci, mais il devra attendre parfois longtemps et cette attente est frustrante. Celui qui désire cette rencontre avec Dieu doit se mettre dans une situation telle qu’il sera capable de recevoir le souffle créateur et d’être transformé par lui. Est-ce à dire qu’il y a un blocage en Thomas qui l’empêche de croire, comme chez tous les chercheurs infructueux de Dieu? Sans aucun doute.
Nous le rejoignons 8 jours après. Il n’a toujours pas cédé à la pression des autres et il attend que Dieu agisse en lui. Mais vous vous rappelez certainement que c’est lui qui  a fixé les critères de la rencontre. Il a défini de quelle manière Jésus ressuscité devait venir vers lui. C’est alors qu’il toucherait ses plaies, mettrait ses doigts dans la marque des clous, voilà ce qu’il veut. Le Jésus qu’il veut, celui auquel il pense, est encore un Jésus terrestre, un homme qui reste dans le prolongement de ce qu’il a déjà vécu avec lui, un homme qui n’est pas vraiment ressuscité puisqu’il porte encore les marques de son supplice et auquel sont encore attachés les lambeaux de la croix. Thomas n’est pas capable d’imaginer une autre réalité qui ne soit au-delà de la vie terrestre.
Pourtant, si Jésus est vraiment ressuscité il doit être revêtu d’un corps nouveau qui ne porte plus les marques de son supplice. Le Jésus ressuscité qu’il espère et auquel il ne croit pas encore devrait être un être recréé par Dieu, d’une autre nature que l’être mortel qu’il a vu pendre lamentablement accroché par des clous au bois de la croix.
Beaucoup de croyants figent leur réflexion en matière de résurrection à ce niveau là. Ils se limitent à un miracle qui serait la réanimation d’un corps, comme si la vie se trouvait enfermée dans une conception matérielle de l’existence. Oserai-je dire que Thomas par sa conception rigide redoute la manifestation de Dieu en lui. C’est le cas de beaucoup de ceux qui se refusent à croire en autre chose que ce que leur propre imagination leur dicte. Ils rangent la foi qu’ils n’ont pas encore dans des catégories de pensée aux quelles il ne veut pas avoir recours.
Dieu est patient, il attend le temps nécessaire pour que chacun soit capable d’accepter Dieu comme Dieu veut être perçu. Pour lui la résurrection n’est pas une vie améliorée, mais une vie recréée. « Crois-tu cela Thomas ? » Thomas est ébranlé par la longue attente. Huit jours est-il dit. Jésus vient, comme il le souhaitait. Il se présente à lui comme ce mort régénéré qu’il attendait. Dieu quand il se manifeste à nous tient compte des limites de nos capacités à le recevoir. Mais en même temps il nous aide à les dépasser. Jésus lui présente ses membres meurtris. Thomas ne les touche pas. Il ne met pas ses mains dans son côté. La résurrection n'est plus pour lui liée à l'aspect matériel du mort qu’il avait connu. Il a dépassé la logique humaine et peut entrer dans celle de Dieu.
« Mon Seigneur, et mon Dieu » dit-il ! Tout a basculé dans le divin. Dans celui qui se présente à lui, il reconnaît Dieu, pas besoin de le toucher, surtout pas ! Pas même besoin de le voir ! Impossible d’exprimer l’inexprimable. Il sait en cet instant que Dieu a créé pour lui une réalité nouvelle. Il est désormais habité par la plénitude du divin. Inutile de voir ou de toucher pour croire. Il suffit de se laisser pénétrer par l’esprit qui crée en lui, comme en nous une réalité nouvelle. Heureux, désormais ceux qui, comme Thomas feront ce parcours, tel un parcours initiatique, car ils pourront croire sans avoir vu..

Le doute.

Je n’ai rien trouvé à corriger à ce sermon écrit il y a  trois ans et que je laisse en l’état, mais je me suis permis une longue réflexion sur le doute pour accompagner le lecteur  qui a du mal à entrer dans l’univers de Dieu. 

En ce matin de printemps où tout  semble  nouveau et où l’espérance s’empare de l’avenir, je regarde, au-delà de la transparence du ciel et  au-delà des nuages qui habillent l’horizon. Ma pensée dépasse tous ces infinis pour penser à Jésus Christ  qui  est ressuscité par un matin de printemps  comme celui-ci, alors que personne de ses proches ne s’y attendait. La vie s’imposait comme terme ultime de l’existence humaine.  Dieu qui semblait assoupi depuis si longtemps  s’imposait au monde comme le garant de la vie et faisait  à nouveau son entrée dans l’histoire des hommes.  Mais en quoi suis-je concerné par ce sursaut de vie  et qu’en est-il, pour moi, maintenant de la réalité de ce Dieu ?

Est-il dans cet au-delà de l’au-delà, si lointain que les astronomes n’arrivent pas  à atteindre avec leurs lunettes les plus  sophistiquées ou est-il plus simplement niché dans les pensées de ceux qui le cherchent ailleurs  au fond de leur être intérieur?  Dans ce cas, il  serait tout près, alors qu’on  est enclin à le chercher  si loin. En fin de compte on se demande s’il existe vraiment. Voila que le doute qui périodiquement nous visite fait à nouveau intrusion dans nos pensées et met en cause tout ce que nous croyons  savoir sur Dieu. Ce doute qui s’oppose en ce moment à la pertinence de Dieu n’est-il pas un autre aspect de cette  même chose on appelait le péché originel dans les siècles passés car l’un et l’autre remplissent la même fonction, celle  de nous séparer de Dieu ?

Mais, loin de nous écarter de Dieu, le  fait de douter n’est-il  constructif de notre pensée et ne nous entraîne-t-il  pas à une rencontre plus   profonde et plus réelle de Dieu ? Pourtant, à l’inverse on peut se demander aussi si le doute qui s’empare de nous ne détruit-il pas les ultimes  lambeaux  qui retiennent  encore vivante notre foi en ce Dieu  qui voudrait se rendre maître de notre vie.

Face à ce questionnement, la Bible n’épargne personne et loin  de nous apporter des solutions simples pour renforcer notre foi, elle s’acharne à étayer les arguments  qui construisent notre doute. C’est à cet exercice  que se livre l’Évangéliste Jean quand il nous rapporte cette aventure de Thomas et il insiste sur la valeur pédagogique du doute qui a accaparé son âme pendant  huit jours jusqu’à  ouvrir à sa foi un chemin inattendu qu’il n’avait pas prévu.  Cette histoire nous explique que l’opinion unanime de tous n’a aucun pouvoir de persuasion sur les arguments que forge notre raison. Thomas reste seul avec ses questions face à ses amis qui n’arrivent pas à le convaincre par leurs arguments.  Ainsi l’opinion de la majorité n’est pas pour lui, porteuse de vérité.

Les autres sont heureux d’avoir fait une expérience de foi qui les a rassérénés, mais  cela n’est d’aucun effet sur le pauvre Thomas. Chacun a beau raconter les merveilles qui l’ont amené à croire, cela n’a aucune incidence sur ceux qui ne croient pas. C’est une mauvaise méthode d’évangélisation que de se  valoriser soi-même, pour amener les autres à croire. Ici, elle ne porte aucun fruit. Les expériences de foi des uns ne sont pas normatives pour les autres. Pour les uns,  comme ce fut le cas de  Paul Claudel il fut saisit d’une extase inénarrable, qui n’eut de valeur que pour lui. D’autres ont put avoir  une vision ou même un contact physique, avec Jésus ressuscité,  peut-être même l' ont- ils  touché, heureux sont-ils !  John Wesley, Saul de Tarce, Marie Madeleine,  Martin Luther King… La liste est bien longue de ceux dont on a rapporté l’expérience et dont le récit nous a rendus  jaloux parce que nous n’arrivions pas à leur niveau spirituel, mais rien n’y fait ! De tels récits ne font que renforcer notre doute  et ne le suppriment pas. Pire, les doutes s’accumulent et viennent se rajouter aux autres.

En fait, ne douterions-nous pas de ce que nous savons déjà ? Si la question de Dieu nous travaille et que nous doutons de sa réalité, c’est que  nous en avons déjà constaté les effets et que c’est de la pertinence de ceux-ci que nous douterions.   En fait c’est de nous-mêmes que nous douterions et non pas de Dieu et de son action dans le monde. Le doute qui habite notre esprit ne serait-il pas alors la dernière étape de notre pensée en quête de certitude ? L’argument est trop  facile, pour qu’on lui accorde trop de valeur.

Le doute ne dissimule-t-il pas en fait  notre impatience, tant nous aimerions vraiment croire à ce dont nous doutons encore. C’est alors que nous rejoignons  notre ami Thomas qui ronge son frein depuis une semaine au moins  alors que les autres continuent à le mettre à l’épreuve en lui racontant les richesses de leurs propres expériences.  Le doute fait l’économie de la foi en cherchant à  valoriser le génie de la raison humaine, car tant que nous doutons, nous rejetons ce qu’il y a d’irrationnel dans la foi, et Dieu n’y trouve pas sa place.  En fait tout cela ressemble à un procès au cours duquel, pour trouver la vérité, les avocats rivalisent d’arguments  pour faire peser le doute sur les évidences  afin que le prévenu soit innocenté faute de preuves.

Y aurait-il un procès entre nous et Dieu et le doute y tiendrait-il le rôle de la défense  en prouvant la réalité de Dieu à coups  d’arguments rationnels?  C’est ce que l’on a vraiment cru pendant longtemps et  c’est ainsi qu’on a envoyé au bûchés tant d’hérétiques  qui pour avancer sur le plan de la foi se permettait de douter.

Mais la foi fait basculer tous ces arguments et ne se construit qu’en dénonçant  les arguments qui viseraient à rendre Dieu crédible.  Plus on cherche à démontrer la toute puissance de Dieu, plus on cherche à affirmer sa divinité, plus le doute s’empare de nous  car ce sont les arguments qui s’appuient sur sa faiblesse, sur son amour et son pardon qui séduisent notre âme.

Tous ces doutes que nous émettons au sujet  de Dieu ne font qu’étayer  les arguments en fonction desquels il n’y a pas d’arguments pour démontrer la réalité de Dieu, si non des émotions intérieures que l’on éprouve sans pouvoir les démontrer.  C’est ce qui arrive à Thomas  qui abandonne en un instant tout les arguments que  le doute l’avait aidé à construire.

Pour le chercheur de Dieu aujourd’hui, c’est dans l’humain qu’il rencontre Dieu et non pas dans le divin. Il découvre Dieu quand il s’empare de la souffrance et de la mort pour les pousser à leur paroxysme et les transformer en vie, c’est alors que le doute prend une telle puissance négative qu’il est détruit par  l’espérance qui ne peut avoir de réalité qu’en Dieu. Heureux sommes-nous alors si c’est le visage de Jésus Christ qui au cours de nos hésitations nous révèle celui de Dieu.

Tout ce que nous avons dit faisait partie du chemin solitaire de Thomas qui dans la seule présence de Jésus a découvert la réalité de Dieu. Était-ce dans son âme ou dans une  autre réalité, nul ne le sait car  s’il a vu avec ses yeux, il n’a pas touché avec ses mains mais son âme a été saisie. Si le doute  continue à jouer un rôle, ce n’est plus chez lui  que ça se passe mais chez les autres qui peuvent se demander si leurs certitudes naïves recouvraient la même réalité inexprimable que celle que Thomas vient de découvrir.

Sculpture de Louis Henri Cordier Buenos Aires

mercredi 2 mars 2016

Jean 20:1-9 La Résurrection - dimanche 27 mars 2016


Jean 20 :1 Le premier jour de la semaine, Marie-Madeleine vient au tombeau dès le matin, alors qu'il fait encore sombre, et elle voit que la pierre a été enlevée du tombeau. 2 Elle court trouver Simon Pierre et l'autre disciple, l'ami de Jésus, et elle leur dit : On a enlevé le Seigneur du tombeau, et nous ne savons pas où on l'a mis!

3 Pierre et l'autre disciple sortirent donc pour venir au tombeau. 4 Ils couraient tout deux ensemble. Mais l'autre disciple courut plus vite que Pierre et arriva le premier au tombeau ; 5 il se baisse, voit les bandelettes qui gisent là ; pourtant il n'entra pas. 6 Simon Pierre, qui le suivait, arrive. Entrant dans le tombeau, il voit les bandelettes qui gisent là 7 et le linge qui était sur la tête de Jésus ; ce linge ne gisait pas avec les bandelettes, mais il était roulé à part, dans un autre lieu. 8 Alors l'autre disciple, qui était arrivé le premier au tombeau, entra aussi ; il vit et il crut. 9 Car ils n'avaient pas encore compris l’Écriture, selon laquelle il devait se relever d'entre les morts. 10 Les disciples s'en retournèrent donc chez eux.

« L’autre disciple qui était arrivé le premier entra dans le tombeau, il vit et il cru. »


Ce sermon va être un véritable parcours du combattant. Nous allons passer tout notre temps à courir avec deux hommes dans un marathon spécial vers la vie. Sans doute en sortirons-nous essoufflés, à la limite de nos pensées humaines, mais régénérés par le souffle de l’esprit. C'est la vie intérieure de ces deux hommes qui va nous intéresser et nous allons essayer de transférer ce qui se passe en eux à ce qui se passe, peut-être, en nous. Malgré la clarté du matin qui est en train de naître, c’est encore l’obscurité qui emplit les pensées de nos deux amis désemparés, comme elle emplit aussi les nôtres à cause du mystère qu’elle recouvre.

Pourquoi ces deux là courent-ils ? Où vont-ils alors qu’il ne fait pas encore jour ? Un bruit s’est fait entendre dans la nuit, une rumeur est parvenue jusqu’à eux : le tombeau est ouvert. Les voilà partis, l’un à la suite de l’autre, l’un devançant l’autre et l’autre se faisant rattraper pour être devancé à son tour. Course de deux hommes qui cherchent à échapper à leur propre nuit. Deux hommes qui cherchent à comprendre l’incompréhensible.

Leur course dans la nuit de l’incompréhension est aussi la nôtre. Nous allons, nous aussi, courir avec eux à la recherche de la vérité sur la vie, car le mort n’est plus à sa place, la mort est remise en question. Celui qu’ils croyaient mort n’était plus là où on l’avait mis, tout est remis en cause. Nous nous mettons à jouer avec les mots résurrection, vie éternelle, pour dire encore aujourd’hui, et aujourd’hui encore plus que jadis, nos interrogations sur le vrai sens de la mort et corollairement pour nous interroger sur le sens de la vie et de la résurrection qui en devient partie prenante ?

Ces deux hommes courent à la recherche de ce qu’ils ne savent pas formuler. Ils espèrent une réponse à une question qu’ils ne savent pas poser. Quand ils arrivent au tombeau, là où habite la mort, il n’y a plus de mort. L’un entre et l’autre n’entre pas. La situation est cependant la même pour l’un, comme pour l’autre. Le premier voit les bandelettes et n’entre pas et Simon qui le suivait entra et vit les bandelettes. Il y a absence du mort aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du tombeau. Mais la mort n'a laissé aucune trace car tout y est bien rangé.

Une idée nouvelle est en train de jaillir en eux, mais n’a pas encore pris forme. C’est cette idée qui nous rejoint, nous aussi, mais tout reste encore trop obscure dans notre entendement. Ce qu’ils considéraient comme une vérité absolue sur la mort semble ne plus l’être. Dieu est en train visiter leur vie intérieure. Il emprunte les chemins de l’émotion et nos deux amis découvrent que la mort est une autre réalité.

Cette course qu’ils sont en train de faire dans le petit matin, n’est pas seulement une expérience physique. Elle nous raconte aussi l’expérience intérieure qu’ils sont en train de vivre. La provocation insupportable qu’ils ont subie après la mort de leur Seigneur est en train d’ouvrir pour eux un chemin vers une autre vérité.

Ainsi en est-il de nous tous en ce matin de Pâques. On est venu à l’Église parce que l’on croit ce qu’on ne voit pas. On est venu pour conjuguer encore une fois tous ensemble ce même verbe croire : je crois, tu crois, nous croyons, puis chacun retournera chez soi. Telle sera la journée du croyant en ce jour là : une commémoration du jour où on s’est mis à croire que la mort avait cessé d’être le terme de la vie.

 Comme le bien aimé, nous sommes heureux de croire. Mais croire qui ? Ou croire quoi ou croire en quoi ou en qui? La plus part du temps on n’en dit pas plus. On se contente d’affirmer que l’on croit ? Il est important de croire, dit-on, comme si le verbe croire était une fin en soi. Mais ce n’est sans doute pas suffisant il faut faire encore un pas de plus.

Le fait de croire pour le chrétien, correspond à une adhésion personnelle à une vérité qui le dépasse. Mais de quelle vérité s’agit-il, d’autant plus que cette vérité peut en contenir plusieurs autres qui peuvent s’emboîter l’une dans l’autre, comme des poupées russes : « Je crois en Dieu, je crois en la vie après la mort, je crois en la résurrection de Jésus, je crois en ma propre résurrection, je crois à la vie éternelle. » Toutes ces affirmations se complètent et recouvrent les démarches intérieures de notre foi.

Rejoignons nos deux hommes qui courent et continuons à mettre nos pas dans les leurs. Ils sont à la cherche d’un signe qui leur permettra de mettre des mots sur l’événement qu’ils sont en train de vivre et qu’ils n’ont toujours pas compris. Dans ce cheminement spirituel, s’opère un glissement qui va du visible vers l’invisible, car la foi va jaillir en eux. La foi va jaillir non pas à partir de ce qu’ils voient, puisqu’il n’y a rien à voir mais de ce qu’ils ne voient pas. Nous en sommes au même point.

Les deux hommes qui courent dans la nuit sont dépassés par leur raison. S’ils vont à la tombe en pleine nuit, c’est à la suite des propos d’une femme dont tout le monde sait qu’elle était dérangée. S’ils ont réagi ainsi, c’est qu’ils espéraient déjà, sans le savoir, un événement qui allait les bousculer. Leur raison a été ébranlée par quelque chose qui ne leur venait pas d’eux-mêmes. Dieu était déjà à l’œuvre dans leur doute. A l’énoncé des paroles de Marie Madeleine l’espérance a fait surgir en eux comme une lumière dans leur nuit. Bousculant ce qui est rationnel en eux, ils se sont mis à espérer en quelque chose d’irrationnel.


Ces deux hommes étaient certains que le Dieu de leurs Pères, le Dieu de Jésus, était maître de tout, qu’il avait tout pouvoir et qu’il pouvait faire surgir la vie là où la mort avait fait son œuvre. On avait beau le savoir, c’était quand même du jamais vu ! L’espérance faisait son chemin en eux et ils ne le savaient pas encore.

Il y a des passages obligatoires sur le chemin de la foi. L’espérance en est un. C’est le moment où notre âme est travaillée à l’intérieur de nous-mêmes par une proposition que notre raison réfute, mais qui provoque un sursaut d’énergie en nous. Cette proposition se heurte à notre intelligence qui développe toute sorte d’arguments raisonnables pour nous dire que ça ne tient pas la route, que ça ne peut être vrai et que ça relève de l’absurde ou du rêve.

Ceux qui vivent ce type d’expérience disent qu’ils sont ébranlés. Ils perçoivent déjà que la vérité sur toute chose se situe au-delà d’eux-mêmes, dans une réalité que Dieu seul peut rendre accessible. Le disciple que Jésus aimait en est là. Il est ébranlé, car il découvre que la vérité qu'il sent frémir en lui  est de l’ordre de l’invisible, de la vie intérieure.

En fait nous aimerions garder le contrôle de nos émotions, même de nos émotions religieuses et en limiter la portée. Mais nous ne sommes pas maîtres de la situation qui nous dépasse. Si notre raison a été ébranlée, si l’espérance nous a provoqués, si nous y avons pris de l’intérêt, c’est que cette puissance qui a surgi en nous et qui a bousculé notre manière de comprendre est à l’œuvre en nous. Elle ne nous lâchera pas. Mais, nous ne sommes pas encore arrivés au terme de notre course.


Dieu, qui a mis tout cet émoi en éveil a l’intention d’aller encore plus loin et de venir réguler le cours de notre vie. Il désire habiter nos pensées et inspirer nos projets. Pour cela, il nous réserve encore, l’expérience d’un face à face personnel avec le ressuscité. Ainsi contrairement à ce qui est écrit, après cela les deux hommes n’ont pas fini leur course. Dieu, en la personne de Jésus, s’est imposé à eux, d'un manière personnelle, comme celui qui avait franchi le passage vers l’éternité et qui avait ouvert pour eux un chemin jusque là ignoré. C’est alors qu’ils feront la rencontre du ressuscité. Jésus viendra vers  eux. Est-ce dans leur âme est-ce dans une vision intérieure est-ce dans la réalité de la vie, nul ne le sait. Mais il deviendra le compagnon invisible de leur vie et leur vie en sera changée.


Pierre et Jean courant au sépulcre Eugène Burnand


Réflexion à propos de Pâques 



Fini l’hiver, même s’il n’a pas été froid. Bonjour le printemps, les petites fleurs, les chants d’oiseaux et les œufs de Pâques. C’est ainsi que de nos jours on salue le retour à la vie de la nature endormie. Certes, on n’a pas oublié que la tradition nous fait entrer dans le  renouveau par la célébration de la plus importante  fête chrétienne, celle de la résurrection de notre Seigneur Jésus Christ. Voila un rappel qui va donner un ton plus respectable à ce message. Pour ceux qui fréquentent les Eglises et don la foi s’enracine dans cet événement, il n’y a pas de mystère, ils sont heureux d’entendre à nouveau cet appel à la vie. Ils  vont entendre une fois  encore  leur Seigneur qui leur rappelle que la vie est sacrée, qu’il a donné la sienne pour que nous en appréciions la valeur et qu’il nous demande de consacrer la nôtre à améliorer celle des autres. C’est ainsi que la face du monde sera changée et que le destin du monde s’ouvrira à l’espérance.
Mais ce matin, si les petites fleurs et les chants d’oiseaux sont au rendez-vous, l’espérance n’y est peut être pas. Les nouvelles qui nous parviennent de la terre entière nous laissent entendre qu’une profonde inquiétude habite le monde et que la bonne nouvelle de la résurrection a du mal à percer les nuages de l’angoisse qui planent sur les peuples. 

Comment se fait-il que le message ne passe plus, que la voix de ceux qui croient soit aussi inaudible ? C’est comme si Dieu se taisait et que le tombeau  avait oublié de s’ouvrir. Tout se passe comme si nous n’y croyons plus et que la rumeur des foules inquiètes couvrait le son de la voix de Dieu. Pourtant, les petites fleurs dans les près ont eu l’audace de colorer de leur couleur de soleil les prairies qui reverdissent si bien que la nature n’hésite pas à chanter le renouveau. Il nous faut donc entrer, nous aussi,  dans ce même mouvement et faire par conviction ce que la nature fait d’instinct.

La fête que nous célébrons ne tire pas seulement leçon de la nature qui comme chaque année sort du sommeil de l’hiver.  Nous dépassons cette habitude pour affirmer que la vie que Dieu nous donne n’obéit pas seulement  au cycle de la nature, mais qu’elle relève  d’un miracle que Dieu opère en nous pour nous garantir une vie qui dépasse la mort.

A Pâques, nous célébrons un événement de portée cosmique. Dieu engage l’humanité  dans un mouvement qui relève de la vie éternelle. Nous renouvelons dans nos célébrations la certitude que Dieu a scellé un pacte de vie et d’espérance avec les hommes. La vie qu’il donne  entre dans la durée et dépasse la mort, l’espérance nous charge de dynamisme et les croyants s’arment d’audace pour changer le monde maussade en terre habitable par Dieu et par les hommes.