mardi 9 décembre 2008

Jean1/1-18 Dimanche 14 décembre : la découverte de la vie intérieure


Jean 1/18
"Au commencement était la parole, et la parole était Dieu. Elle était au commencement avec Dieu avec Dieu. Tout a été fait par elle et rien de ce qui a été fait n'a été fait sans elle. En elle était la vie et la vie était la lumière des hommes.
La lumière brille dans les ténèbres et les ténèbres ne l'ont pas accueillie. il y eut un homme envoyé par Dieu, son nom était Jean; Il vint comme témoin pour rendre témoignage à la lumière, afin que tous croient par lui. Il n'était pas la lumière, mais il vint pour rendre témoignage à la lumière. C'était la véritable lumière qui, en venant dans le monde, éclaire tout homme. Elle était dans le monde, et le monde a été fait par elle, et le monde ne l'a pas connue. Elle est venue chez les siens et les siens ne l'ont pas reçue; mais à tous ceux qui l'ont reçue, elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, à ceux qui croient en son nom et qui sont nés, non du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l'homme, mais de Dieu

La parole a été faite chair, et elle a habité parmi nous, pleine de grâce et de vérité; et nous avons contemplé sa gloire, une gloire comme celle du fils unique venu du Père. Jean lui a rendu ce témoignage et s'est écrié: C'est celui dont il a été dit : Celui qui vient après moi m'a précédé car il était avant moi. Et nous avons reçu de sa plénitude grâce pour grâce, car la loi a été donnée par Moïse, la grâce et la vérité sont venues par Jésus Christ.

Personne n'a jamais vu Dieu; Dieu, le Fils unique, qui est dans le sein du Père, lui, l'a fait connaître."


le big bang

La tradition des récits de Noël laisse dans notre souvenir l'idée que Jean Baptiste criait dans le désert, comme l'avait fait le prophète Esaïe avant lui. Bien que ce ne soit pas dit dans ce texte, nous savons qu'il baptisait dans le désert ceux qui venaient à lui en se repentant. Pourtant, ici au début de l'Evangile de Jean, c'est le terme de lumière qui est retenu pour caractériser son message en le présentant comme le précurseur de la lumière. Sa voix se confond avec la parole de Dieu. C'est le son qui génère la lumière, comme si le tonnerre précédait l'éclair, comme si dans l'Evangile les valeurs étaient inversées par rapport aux règles de la physique. Tout ce témoignage sur Jean sur jean semble procéder comme un renversement du temps, comme si l'histoire basculait pour revenir à ses origines.

C'est ici, une bousculade cosmique qui inaugure un temps nouveau où la présence de Dieu deviendrait évidente pour tous les hommes, s'ils étaient disposés à la recevoir. Nous sommes emportés par ce texte dans un retour à l'origine du monde. Nous en revivons la création tout en prenant conscience de notre propre création et toutes deux l'entremêlent comme si nous étions présents dans la conscience de Dieu dès le commencement.
Après cette ascension sonore vers la lumière qui éclaire toute chose dans un big bang impressionnant, l'Evangile à peine commencé suspend sa manifestation par un constat d'échec: Le monde ne l'a pas reçue et les siens ne l'ont pas accueillie. Mais, ce constat à peine fait, l'Evangile reprend de plus belle son envolée pour bien signifier que l'échec n'est qu'apparent. Dans un clin d'oeil vers nos temps modernes, l'Evangile nous dit que si aujourd'hui nous avons peur d'un dérapage du monde, ce n'est qu'une fausse impression. Dieu sait ce qu'il fait. Cependant il faut que nous passions par cette illusion d'échec afin de mieux saisir le mystère de l'action créatrice de Dieu en nous. Il faut que nous revenions en arrière, pour comprendre comment nous avons été créés par Dieu. Quiconque ne fait pas ce retour sur lui-même ne peut pas avoir vraiment le sentiment d'avoir été créé.
Je m'explique: Pour comprendre notre relation personnelle avec Dieu, il faut d'abord comprendre la relation étroite qu'il y a entre Dieu et le monde. Il faut que la lumière de Dieu m'éclaire pour que je comprenne que cette lumière qui éclaire ma propre vie intérieure est la même que celle qui a accueilli le monde quand il a jailli hors du cahot primitif. Jésus explique cela un peu plus loin quand il dit à Nicodème : Il faut que tu naisses de nouveau.

Cependant, pour percevoir l'éclat de cette lumière éblouissante du créateur, il faut accepter de la recevoir. Vouloir et accepter relèvent de notre choix et de notre liberté. La lumière de Dieu ne m'illumine que parce que je le veux bien, mais pour le vouloir, il faut la connaître, il faut sans cesse revenir à l'origine de l'événement. Il nous faut revenir au moment où Jésus n'était pas encore venu mais où la "Voix" annonçait déjà sa venue. Le témoignage de la voix conditionne tout l'Evangile, puisqu'elle salue Jésus comme le Messie. C'est à partir de cette voix que Jésus construira tout son Evangile. Il est donc important que nous nous arrêtions sur l'évocation de celui qui proférait cette voix : Jean Baptiste.

Jean Baptiste a été présenté comme la voix dans le désert. Il citait les anciens prophètes car, comme Jean, ils étaient porteurs de la même voix. Chacun à sa manière a essayé de dire qu'un temps nouveau était en train de se produire. Toutes leurs paroles faisaient état d'une urgence. Il fallait faire vite, car Dieu était en route pour visiter les hommes. Contrairement à toute logique, les gens se déplacèrent en masse pour se faire sermonner dans le désert.

Jean Baptiste n'était pas un inconnu. Il avait revêtu le vêtement traditionnel des prophètes tel que le portait Elie: tunique en peau de chameau et ceinture de cuir. Il se plaçait ainsi volontairement dans la lignée des grands visionnaires dont il répétait le message pour appeler ses auditeurs et ses auditrices à la repentance. Cette repentance n'était pas une simple confession de leurs fautes, mais c'était aussi une descente en eux-mêmes pour découvrir les manques et les vides de leurs vies. Ceux qui faisaient la démarche étaient plongés dans l'eau, non seulement pour y être purifiés, mais pour manifester leur désir de renoncer à leur vieil homme et accueillir l'homme nouveau que le messie allait faire d'eux. Le Messie allait leur découvrir le mystère de leurs origines et de leur propre création. Il les baptiserait de feu, c'est à dire de la puissance de Dieu. Dieu parachèverait ainsi sa création en eux, c'est pourquoi ils étaient dans une attente joyeuse et fébrile de ce qui allait arriver.

Mais d'où lui est venu cette idée de baptême? A vrai dire on ne sait pas vraiment. Certes, la tradition juive voulait qu'on se purifie dans des bains rituels, mais il s'agissait de bains purificateurs et non de repentance. Pas très loin du Jourdain, la fameuse communauté de Qumran pratiquait elle aussi, force de bains rituels, mais ces ablutions ne ressemblaient pas à la pratique de Jean. Cette pratique se répandit, puisqu'après avoir été lui-même baptisé, Jésus se mit lui aussi à baptiser ses adeptes. A partir de là, le baptême deviendra une pratique tellement importante qu'il sera considéré comme le signe nécessaire de l'appartenance au Christianisme.

Le premier élément du baptême Chrétien, celui de la repentance, de la mort à soi-même a été bien évidemment emprunté à jean baptiste. le deuxième élément, celui de la résurrection nous sera apporté bien évidemment par Jésus, et il nous révélera que c'est dans cet acte du baptême que Dieu achève en nous sa création.

Mais c'est le personnage de Jean qui nous intéresse, il nous montre dans cette pratique du baptême que ce qu'il y a de fondamental dans le message des prophètes, c'est à dire dans tout l'Ancien Testament, c'est cette descente en soi-même. Nous l'avons hélas interprété comme une action culpabilisante de reconnaissance de nos fautes. Cette reprise en main par Dieu de notre vie intérieure devient si importante de Jean Baptiste qu'elle va jusqu'à prendre la place des sacrifices et de tout le rituel lié au Temple. Jean était prêtre lui-même, et il a renoncé à exercer son sacerdoce. Son histoire personnelle et les choix qu'il a faits sont là pour nous dire que le grand bouleversement de la foi qu'il est venu initier rend caduques toutes les prescriptions rituelles qui se pratiquaient dans le sanctuaire.

En effet, Jean est né comme beaucoup de grands témoins de la Bible d'une manière miraculeuse. Ses parents devenus vieux n'avaient pas d'enfant. L'ange intervint auprès de son père, le prêtre Zacharie au cours d'un office, pour lui annoncer la naissance qu'il n'espère plus. Saisi par l'émotion, Zacharie perdit la parole et devint incapable de poursuivre son office de prêtre. L'enfant qui naîtra et qu'on appellera Jean était destiné à devenir prêtre à son tour, mais il n'entrera pas dans le sacerdoce et devint prophète, comme si le ministère de prêtre était désormais périmé. Jean mit un terme à tout le rituel du culte juif pour lui donner une nouvelle dimension . Le croyant découvre alors qu'il lui est désormais permis d'entrer dans une intimité personnelle avec Dieu sans le secours d'aucun ministère et d'aucun culte.

A peine baptisé, Jésus va inaugurer un ministère qui reprendra celui de Jean qui ne tardera pas à être arrêté et à mourir de la main du bourreau. A la mort de jean, la plupart de ses disciples suivront Jésus. L'image que nous garderons désormais de Jean Baptiste sera celle du serviteur fidèle qui a tout compris mais qui ne se reconnaît pas digne, cependant de délier la courroie des sandales du Messie bien qu'il appartienne à la même famille que lui selon la tradition de l'Evangile de Luc.

Le portrait de Jean Baptiste ainsi tracé nous invite à explorer notre vie secrète afin de nous rendre disponibles pour poursuivre notre existence sur le chemin où Jésus souffle pour nous son esprit créateur. Cet esprit était déjà à l'origine des temps et il nous projette maintenant dans le Royaume de Dieu



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