Luc 12 : 49-59 Voir l'avenir sans être hypocrite: Dimanche 14 août 2016 - Reprise du même sermon du dimanche 18 août 2013
49 Je suis venu mettre
un feu sur la terre ; comme je voudrais qu'il soit déjà allumé ! 50
J'ai un baptême à recevoir ; comme cela me pèse d'ici qu'il soit
accompli !
51 Pensez-vous que je
sois venu donner la paix sur la terre ? Non, je vous le dis, mais plutôt
la division. 52 Car désormais cinq dans une maison seront divisés, trois contre
deux et deux contre trois ; 53 père contre fils et fils contre père, mère
contre fille et fille contre mère, belle-mère contre belle-fille et belle-fille
contre belle-mère.
54 Il disait encore
aux foules : Quand vous voyez un nuage se lever à l'ouest, vous dites
aussitôt : « La pluie vient. » Et cela arrive. 55 Et quand c'est
le vent du sud qui souffle, vous dites : « Il va faire chaud. »
Et cela arrive. 56 Hypocrites, vous savez apprécier l'aspect de la terre et du
ciel ; comment pouvez-vous ne pas savoir apprécier ce temps-ci ?
57 Et pourquoi ne jugez-vous pas par vous-mêmes de ce
qui est juste ? 58 Lorsque tu vas avec ton adversaire devant un chef,
tâche en chemin de te dégager de lui, de peur qu'il ne te traîne devant le
juge, que le juge ne te livre à l'huissier, et que l'huissier ne te fasse
mettre en prison. 59 Je te le dis, tu n'en sortiras pas que tu n'aies payé
jusqu'au dernier lepte.
(Pour ma part, je trouve plus de cohérence à ce texte si on le prolonge jusqu'au verset 59 plutôt que de le couper au verset 53 comme dans la liste de lectures proposées)
Quand les idées sont bonnes et
pourraient donner naissance à l’espérance, elles sont rapidement combattues par
de solides adversaires qui s’opposent à elles. Ils cherchent à les tourner en
dérision et tentent par tous les moyens
à les ridiculiser. Ce fut en particulier
le sort qu’a connu l’évangile de
Jésus-Christ, qui à peine formulé s’est trouvé en but à la vindicte de
nombreux opposants qui n’ont eu de cesse
que de provoquer la mort du maître. Ce phénomène se produit chaque fois que des
idées nouvelles et généreuses sont formulées. Bien entendu, nous allons essayer
de le comprendre.
Jésus, quant à lui, en fut bien conscient. Il a même prophétisé que si la nouveauté qu’il
était en train d’enseigner avait quelques chances de porter des fruits elle
susciterait en même temps des tensions chez les hommes qui la partageraient et provoqueraient
des mouvements d’hostilité à leur égard. Leurs propres familles se diviseraient
même à son sujet. Quand on sait ce qui s’en suivit, on aurait pu se demander si
le jeu en valait la chandelle. Pourquoi a-t-il fallu que tant de haine et de
dissensions se répandent avant que
l’évangile ne soit accepté ? On peut même se demander s’il a vraiment été
accepté puisque les idées de respect réciproque, de tolérance et d’amour qu’il
véhicule n’ont toujours pas triomphé.
Les chrétiens, pour ne parler que de leur histoire, n’ont jamais
cessé de se faire la guerre et de s’opposer entre eux. Mais le phénomène ne concerne pas seulement
le christianisme, il est partagé par bien d’autres religions. Pourquoi donc les religions sont-elles à
l’origine de tant de rivalités entre les hommes et apportent-elles tant de
violence dans le monde alors que la plupart d’entre elles se réfèrent à un
Dieu bienveillant qui propose aux hommes de vivre dans l’harmonie la concorde
et la paix ? La doctrine de la
plupart des religions propose à l’humanité un projet de paix universelle et de
tolérance entre les peuples. C’est à n’y rien comprendre.
Alors que ses discours avaient
du succès, Jésus voyait poindre l’orage
à l’horizon. Il prophétisa alors sa
venue et parla des dégâts qui s’en suivront. Il voyait déjà les familles se
diviser au sujet de ses idées et
leurs membres se dresser les uns contre
les autres. Plus loin Jésus a clairement
décrit l’ampleur que prendra le
phénomène ainsi que les persécutions que
connaîtront ses amis. On verra même les nations se dresser les unes contre les
autres à cause de l’évangile.
En annonçant ainsi ce qui va se passer, Jésus ouvre les
hostilités en rendant les hommes responsables du phénomène. Il les accuse
d’hypocrisie, car ils ne savent pas appliquer aux réalités spirituelles les
comportements qu’ils sont capables de manifester par rapport aux simples prédictions
météorologiques auxquels ils ne cessent de recourir. Qu’un nuage apparaisse dans un coin du ciel,
qu’un souffle de vent s’élève soudainement, et chacun sait parfaitement dire ce qui va se passer et en tirer les
conséquences. Ce sera la pluie, l’orage ou la tempête. Les hommes exercent
alors leur science pour s’en prémunir et protéger leurs récoltes et leurs
biens.
Alors que l’on sait réagir au
mieux quand le tonnerre gronde dans le ciel, pourquoi n’applique-t-on pas la
même méthode quand les foules font
retentir le tonnerre que provoque leur indignation quand elles descendent dans les rues et
réclament une autre forme de justice,
revendiquent le droit d’avoir des
idées qui n’ont pas cours dans ce lieu ou tout simplement l’égalité et le pain
quotidien ? Pourquoi ceux qui réclament une vérité au nom de Dieu se
voient-ils opposer une autre vérité qui se réclame elle-aussi du même
Dieu ? Pourquoi Dieu lui-même reste-t-il enfermé dans son ciel sans
départager les adversaires ? Il n’envoie pas non plus son feu du ciel sur
personne. Ce sont les hommes qui s’en
chargent à leur guise et en son nom.
La parole de Jésus se fait alors
incisive. Hypocrites ! Chacun dans
son camp se réclame d’une justice ou d’une philosophie qu’il a érigée au rang
de parole de Dieu. Le nom de Dieu n’est pas toujours prononcé, mais on a élaboré des principes
qui en tiennent lieu et à cause des quels
on se bat. « Si Dieu existe qu’il agisse disent les uns » et les
autres de répondre : « on n’a pas besoin de lui, car notre Dieu, c’est
notre bon droit »
Jésus face à la tourmente n’a
qu’une parole à opposer aux hommes qui se battent pour leurs principes :
hypocrites ! Il ne désigne pas plus un camp qu’un autre. Il désigne un
état de fait. Dans tous les conflits, les hommes cherchent leur intérêt
personnel, qu’il soit justifié ou pas. Ce qui rend leur attitude hypocrite,
c’est qu’ils sont capables de se mettre
d’accord à propos des prévisions météorologiques et qu’ils ne le sont pas à propos
des orientations qu’ils doivent donner à leur vie.
En fait, pour ce qui concerne la
météo, il s’agit du même intérêt pour
tous, si bien qu’ils orientent leurs
actions dans le même sens. Il s’agit de protéger leurs champs, leurs maisons,
leurs biens, leurs familles. Tous sont d’accord sur la manière de réagir
Par contre quand les intérêts
sont divergents, c’est alors que le ciel s’embrase. Chacun sacralise sa cause
en opposant des principes qui ne s’accordent pas entre eux. On est plutôt
enclin à prendre fait et cause pour le plus démuni qui revendique son bon droit contre le plus nanti qui le lui refuse. Mais pour comprendre le phénomène il faut aller plus loin, car chacun en sacralisant sa cause
y a impliqué Dieu ou ce qui prend pour
lui la place de Dieu.
C’est là maintenant qu’il faut
chercher ce qu’il y a derrière le mot hypocrite
que Jésus a prononcé et qui se trouve tout au centre de ce récit, c’est
dire l’intérêt que le texte lui porte.
En fait, tout a déjà été dit au
sujet de Dieu car l’Évangile insiste en tout premier lieu sur le respect absolu
que l’on doit avoir pour l’autre et
contre lequel nul ne doit exercer aucune violence. Il réclame au contraire douceur et
abnégation. Dieu n’a rien d’autre à ajouter.
Ce principe existe non seulement
dans l’évangile mais il existe aussi dans la plupart des grands courants
spirituels. On l’a même inscrit en
d’autres termes dans la Déclaration des Droits de l’Homme.
Tant que les hommes n’auront pas
compris cela, ils ne s’en sortiront pas dit Jésus car ils devront commencer par appliquer ce principe
universellement reconnu. De tout temps les hommes ont voulu l’ignorer et les
croyants qui ne le pratiquent pas trahissent l’évangile quelles que soient les
bonnes raisons qu’ils utilisent pour se justifier
Les contemporains de Jésus, dont
l’univers étaient limité au bassin de la Méditerranée ne le savaient pas,
mais ce principe était reconnu ailleurs
par d’autres courants religieux que le leur. Tout se passe comme si, avant que
les textes des grandes religions aient été écrits Dieu avait déjà établi ce
principe et lui avait donné une portée universelle.
Il est donc hypocrite de
s’opposer les uns aux autres par la violence, car Dieu a fait comprendre au
monde qu’il n’avait rien à voir
avec la violence que nous pratiquons pour
régler nos conflits avec les autres. Les hommes n’hésitent cependant
pas à l’y impliquer pour masquer leur incapacité à dépasser les situations
conflictuelles dans lesquelles ils se
sont engagés.
Mais déjà des voix s’élèvent pour contester ce qui vient d’être
dit et accuser leur auteur de trahison car son propos sous-entendrait que
toutes les religions se valent et que le message de Jésus n’est pas distinct de
celui des autres religions. Voilà que la discorde est en train de naître et que la violence pointe à nouveau son nez. Pourtant il est
clair que le principe de base énoncé par Jésus était déjà dans la Loi de Moïse
et a pris place dans le message de bien d’autres penseurs que lui. Il se trouve
donc que ce principe est revêtu d’une valeur universelle.
Ceci étant énoncé, il appartient à chacun de
développer les critères de sa propre foi
à l’école du penseur qui lui parle le mieux, mais le principe commun à tous est celui du respect
absolu du prochain. Jésus en a fait son Évangile et l’a enseigné comme étant la
volonté première de Dieu. Beaucoup d’autres religions se réclament de la même
vérité. Allons-nous nous battre les uns contre les autres à cause de ça ?
Le Christ bénissant le monde: Tympan de Eglise de Beaulieu sur Dordogne
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire