dimanche 24 novembre 2013

Esaïe 35:1-10 -



Esaïe 35: 1-10 la terre transformée  - dimanche 11 décembre 2016. Ce sermon a déjà été proposé le 15 décembre 2013

1 Que le désert et la terre manifestent leur joie!
Que le pays sec s'émerveille

et se couvre de fleurs,
2 aussi belles que les lis 
Oui, qu'il se couvre de fleurs, et qu'il s'émerveille à grands cris!
Le  Seigneur lui a donné la splendeur des montagnes du Liban
l'éclat du mont Carmel et de la plaine de Saron.
On pourra voir alors la glorieuse présence du Seigneur,
l'éclat de notre Dieu.
3 Rendez force aux bras fatigués,
affermissez les genoux chancelants.
4 Dites à ceux qui perdent courage:
" Ressaisissez-vous, n'ayez pas peur, voici votre Dieu" 
Il vient vous venger et rendre à vos ennemis
le mal qu'ils vous ont fait, il vient lui-même vous sauver."
5 Alors les aveugles verront et les sourds entendront.
6 Alors les boiteux bondiront comme des cerfs
et les muets exprimeront leur joie.
Car de l'eau jaillira dans le désert,
des torrents ruisselleront dans le pays sec.
7Le sable brûlant se transformera en étang,
et le pays de la soif en région de sources.
A l'endroit-même où les chacals avaient leur repaires
pousseront des roseaux et des joncs.
8 C'est là qu'il y aura une route
qu'on nommera le "chemin réservé".
Aucun impur n'y pourra passer, aucun idolâtre n'y rôdera.
Elle sera destinée au peuple du Seigneur
quand il se mettra en marche.
9 Sur cette route, pas de lion;
aucune bête féroce ne pourra y accéder, on n'en trouvera pas.
C'est là que marcheront ceux que le Seigneur aura libérés.
10 C'est là que reviendront ceux qu'il aura délivrés.
Ils arriveront à Sion en criant de bonheur.
Une joie éternelle illuminera leur visage.
Une joie débordante les inondera,
tandis que chagrins et soupirs se seront évanouis.




Une route s’ouvre dans le désert aride peuplé de bêtes dangereuses devant les immigrants en quête d’une terre d’accueil.  Les broussailles se dressent devant  les pas des voyageurs et leur barrent la route. Elles  les  découragent de s’aventurer plus avant dans ces contrées hostiles. Et pourtant les marcheurs qui n’ont pas d’autres solutions continuent. Il n’y a rien de surprenant dans cette évocation, il s’agit là du paysage habituel du désert si souvent évoqué pour décrire la campagne des pays de la Bible qui était loin de ressembler à un pays où coule le lait et le miel comme l’avait laissé entendre Moïse  aux fugitifs qui l’accompagnaient depuis l’Égypte.



Ils étaient nourris de l’idée qu’ils  allaient prendre possession de ce pays qui allait devenir leur  terre et où une nouvelle vie les attendait en dépit des les déboires de toutes sortes qu’ils allaient rencontrer.  Ces pèlerins audacieux  avaient remplis  leur âme de toutes sortes d’images qui rendent désirable la terre vers laquelle ils orientaient leurs pas.  Tels étaient sans doute les illusions qui permettaient aux  nouveaux venus d’avancer.  D’où venaient-ils ? Le texte ne permet pas vraiment de le savoir.



Étaient-ils des exilés venus du Royaume du Nord fuyant une première déportation. Étaient-ce  des exilés revenus au pays après la deuxième déportation. Qu’importe. Ils avançaient  vers une terre où ils voyaient s’accomplir leur destin et où ils espéraient bénéficier d’une bénédiction divine. A mesure qu’ils avançaient le ciel se faisait plus doux sur leurs têtes, et leurs pas se faisaient plus fermes sur un  sol moins caillouteux. Les ronces laissaient la place à des herbes moins agressives. Du moins le croyaient-ils. Telle n’est-elle pas l’illusion de tous les exilés qui s’approchent d’une terre qu’ils croient plus accueillante que celle qu’ils ont laissés? Même s’ils ne sont pas dupes, ils ont tous animés par la foi en un avenir meilleur et ils s’efforcent de croire que Dieu habite leur espérance.



Dans leurs pensées la campagne se transforme, les lys se mettent à fleurir, la steppe aride fait place à de verts pâturages où gambadent  les agneaux et les cabris. Les paysans en pleines santé qu’ils croisent sur leur chemin ne sont pas fatigués, toujours joyeux, ils manifestent une éternelle jeunesse. Avec un peu d’imagination nous pourrions nous laisser aller à penser que  le prophète Esaïe qui décrit l’arrivée des exilés en terre d’Israël, se soit inspiré du "conte du Prince charmant" bien que ni les dates ni les lieux ne correspondent. Mais l’idéal du pays enchanteur qui s’ouvre après un parcours hasardeux existe dans toutes les civilisations. Le voyageur qui traverse le désert de la soif n’a-t-il pas à l’esprit  le mirage de l’oasis couverte d’une  palmeraie  accueillante.



Notre récit serait-il la description de cette oasis de bonheur jamais atteinte qu’entreverrait le prophète et qu’il décrirait avec complaisance pour aider son peuple à patienter en attendant un bonheur illusoire qui ne viendra jamais ? On a pris l’habitude de lire ce passage dans le temps de l’Avent, ce moment de l’année où on fait place aux contes et légendes pour mieux dominer la rudesse des temps. On se laisse plus facilement saisir par l’émotion en pensant  que Dieu est descendu du ciel pour se geler dans la paille afin de sauver les hommes. Pourtant, nous le savons bien, Noël n’est pas une illusion et les contes  contiennent eux aussi des vérités qu’il nous faut forcer pour en trouver le sens.



Les contes que nous venons d’évoquer contiennent un parcours initiatique qu’il nous faut décrypter si on veut en saisir le sens. Sans la clé du texte, nous n’en découvrons pas l’énigme. Ainsi, le Prince charmant doit-il franchir de nombreux obstacles avant de réveiller la princesse de sa vie qui l’attend depuis cent ans dans un château niché au milieu des bois. Le petit Poucet lui aussi doit suivre un chemin au milieu des bois, mais il connaît la clé de l’énigme et retrouve sa route grâce aux pierres blanches qu’il laisse tomber sur le chemin. Malheur à lui s’il néglige la clé et se croit malin. Il remplace les cailloux par du pain que mange les oiseaux et ce sont les ennuis qui arrivent. Le Petit Chaperon rouge voit deux routes s’ouvrir devant lui. La plus longue contourne la forêt et l’emmène saine et sauve chez sa grand-mère  ainsi que sa galette et son pot de beurre. Elle peut vivre alors sa vie de femme. Malheur à elle si elle fait un mauvais usage de sa clé et si elle brûle les étapes en prenant le chemin qui traverse la forêt. Le loup la devance, mange la grand-mère ainsi que la galette et le pot de beurre et l’enfant par-dessus de la marché .




C’est un chemin semblable qui s’ouvre devant Esaïe, car son récit fonctionne comme un conte de fée. Que l'auditeur ne s’en offusque pas, il sait bien que le récit lui est donné pour qu’il réfléchisse et exerce sa sagacité. Les aveugles ne guérissent pas par simple miracle généralisé, ni les infirmes et l’eau ne jaillit pas en plein désert s’il n’y a pas de source, à moins qu’on l’y amène. Les lions ne disparaissent pas sans qu’on les chasse. Rien ne se fait sur ce chemin du désert si l’homme n’en change le cours des choses.



Et maintenant, où se trouve la clé du texte ? Est-elle dans l’intelligence des hommes et leur bonne volonté ? Le prophète entrevoit-il des jours nouveaux qui se réaliseront quand l’intelligence humaine sera rejointe par la sagesse divine ? L’espèce humaine gagnée par la grâce partagera tous ses talents et chacun échangera son savoir-faire pour le mieux-être de tous. Toute la planète gagnée à l’idéal évangélique deviendra une terre habitable par tous. Ce sera merveilleux, c’est techniquement possible mais ça ne marche  pas ! Et chacun de se poser des tas de questions sans trouver une seule bonne explication.



Les contes évoqués plus haut  pourraient-ils nous ouvrir une autre grille de lecture ?  Même quand on a compris la bonne clé, le conte se poursuit par une incertitude qui est liée à la liberté de chacun et  à laquelle il faut encore apporter une bonne part de hasard. Que sera la suite de la vie de la belle endormie qui se réveille dans les bras de son prince? Nul ne le sait. Quantité de gosses braillards vont-ils hanter le palais au point d’y rendre la vie impossible ? Que chacun imagine la suite. Le petit Poucet revient bien à la maison grâce à ses cailloux, mais la famine n’a pas disparu et l’histoire recommencera  jusqu’à son dénouement, bon ou mauvais. Quelle vie attend  le Petit Chaperon rouge qui a fait le grand tour? Il n’a pour s’ouvrir à la vie qu’un pot de beurre et une galette ! Est-ce suffisant ? Et le danger du loup est-il définitivement écarté ?



Face à ces conclusions,  nous pouvons dire que le prophète Esaïe a  cependant raison. Oui, la transformation de l’humanité est possible, oui le partage des ressources est possible, mais il nécessite une prise en main de notre personne par Dieu. Notre conversion est un acte personnel qu’on ne peut imposer à personne. Elle est liée à une relation personnelle que Jésus établit  avec chacun de nous par l’action permanente de son saint Esprit qui plane sur l’humanité et ce que chacun de nous peut  recevoir mais qui ne s’impose pas à personne.Liberté oblige.



Il existe encore une clé de compréhension que je n’ai pas mentionnée car je la gardais pour la fin, c’est celle de l’action du péché en nous. Malgré notre conversion et la présence de l’esprit en nous, malgré notre bonne volonté et notre désir de bien faire, le péché  ne  s’est pas écarté de chacun de nous. Il continue à habiter nos bas instincts,  il ne cesse de nous tenter et de plaider le faux  pour le vrai. Chacun de nous est vulnérable et se retient  d’entrer  à corps perdu dans l’altruisme et l’amour inconsidéré du prochain. Le pardon, sans cesse prodigué par Dieu nous permet d’avancer et de rester raisonnables, mais le Royaume promis par Jésus n’est pas encore  accompli. Esaïe en avait l’intuition, Jésus nous a donné les clés pour y arriver,  Dieu nous donne, la foi, l’espérance et la patience pour le construire brique après brique. Il nous donne le pardon, sans cesse renouvelé pour toujours repartir quand nous nous sommes  trompés et que nous avons mal agi.Nous  n' avons pas toutes les clés en main mais nous en avons beaucoup à notre disposition. Faisons-en bon usage.

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