Esaïe 11 :1-10 Dimanche 8 décembre 2013
J'ai rajouté un autre sermon en 2016 à la suite du premier.
J'ai rajouté un autre sermon en 2016 à la suite du premier.
1 Alors un rameau sortira du
tronc de Jessé,
un rejeton de ses racines
sera fécond.
2 Le souffle du SEIGNEUR
reposera sur lui :
souffle de sagesse et
d'intelligence,
souffle de conseil et de
vaillance,
souffle de connaissance et
de crainte du SEIGNEUR.
3 Il respirera la crainte du
SEIGNEUR ;
il ne jugera pas sur
l'apparence,
il n'arbitrera pas sur un
ouï-dire.
4 Il jugera les pauvres avec
justice,
il arbitrera avec droiture
en faveur des affligés du
pays ;
il frappera la terre du
sceptre de sa bouche,
et du souffle de ses lèvres
il fera mourir le méchant.
5 La justice sera la
ceinture de ses reins,
et la probité, la ceinture
de ses hanches.
6 Le loup séjournera avec le
mouton,
la panthère se couchera avec
le chevreau ;
le taurillon, le jeune lion
et les bêtes grasses seront ensemble,
et un petit garçon les
conduira.
7 La vache et l'ourse auront
un même pâturage,
leurs petits une même
couche ;
le lion, comme le bœuf, mangera
de la paille.
8 Le nourrisson s'ébattra
sur l'antre de la vipère,
et l'enfant sevré mettra sa
main dans le trou de l'aspic.
9 Il ne se fera aucun mal,
il n'y aura aucune destruction,
dans toute ma montagne
sacrée ;
car la connaissance du
SEIGNEUR remplira la terre
comme les eaux recouvrent la
mer.
Le retour des bannis
d'Israël
10 En ce jour-là, la racine
de Jessé
se tiendra là comme une
bannière pour les peuples ;
les nations la chercheront,
et son lieu de repos sera
glorieux.
Il
est des textes bibliques qu’il suffit d’évoquer pour que notre âme soit ravie
et que notre cœur se mette à vibrer de mille émotions fortes. Le passage du
prophète Esaïe qui nous est offert aujourd’hui en fait partie. Il regorge
d’images bucoliques dont on ne se lasse pas. L'évocation du nourrisson s’ébattant
près du serpent venimeux sans qu’il ne lui soit fait aucun mal, ainsi que
la description de ce prince charmant issu de la race royale dont la dynastie ne va
pas tarder à s’éteindre ont l’art de nous ouvrir vers une espérance qui
s’accorde bien avec le temps de Noël. Il
serait vain de vouloir expliquer
ce texte d’une manière rationnelle, car cela en briserait la poésie et l’exégèse
risquerait d’en altérer la saveur alors que depuis des générations il a contribué
à entretenir l’espérance de tant de croyants.
Nous
allons tenter de conserver intact cette
vision idyllique de la fin des temps qui met un terme à toute agressivité et
qui rogne les dents des loups qui se contentent
désormais de paître en compagnie des agneaux et qui se désaltèrent avec
eux de l’onde pure des ruisseaux. Le mal y perd toute efficacité. Tout cela
parvient jusqu’à nous, comme si Dieu parachevait sa création par des gestes
chargés de paix et de douceur.
Mais
nous ne sommes pas dupes. Le charme que provoque
l’évocation d’une fin des temps paradisiaque n’altère pas pour autant l’écho
que fait résonner en nous d’autres textes qui décrivent la fin des temps comme
une série de catastrophes qui engloutiraient la planète entière et qui entraineraient
l’univers dans sa perte. Seuls les
heureux élus pourraient échapper à la catastrophe finale.
Nous
nous interrogeons pour découvrir laquelle de ces deux évocations correspond
vraiment au plan de Dieu. L’Ecriture peut-elle proposer aux croyants que nous
sommes deux issues différentes à la fin des temps ? L’une serait-elle réservée
aux optimistes et l’autre aux pessimistes ?
Il
nous faut donc nous approcher de ces textes avec sagesse sans nous laisser dominer
par des désirs personnels en nous appuyant
sur une première vérité selon laquelle la Parole de Dieu ne peut proposer des
solutions contradictoires en la matière. Si les drames et les guerres
assombrissent notre horizon, si les catastrophes naturelles et les fléaux de toutes sortes mettent notre
vie en danger, ils sont liés au comportement des hommes ou à l’évolution de la
planète et non pas à une décision
divine. Quand ils se produisent ils apportent avec eux des souffrances et la
mort. Or Dieu s’acharne à lutter contre les premières et à rendre vaine la
seconde.
Dans
leurs inquiétudes bien compréhensibles les hommes sont portés à croire que les
malheurs que qu'ils subissent sont les signes de la colère de Dieu qui châtierait la
terre de tous les péchés dont l’humanité l’accable. C'est pour lutter contre eux que les humains célèbrent des cérémonies
expiatoires, organisent des processions, chantent des « dies irae ». Ils espèrent ainsi apaiser la colère de Dieu qu’ils croient avoir offensé. C’est ainsi qu’ils croient pouvoir redonner de l’équilibre à la
nature déréglée ou conjurer la folie des hommes en colère.
Quand
Jésus évoque de tels événements, il nous invite à ne pas être troublés. Il
prétend même que ce ne sera pas la fin. Même si les moments difficiles sont inévitables, il nous recommande la patience, la vigilance
et la prière.
Le
livre de l’Apocalypse que l’on utilise pour accréditer les thèses
catastrophiques affirme lui aussi que
ces événements tant redoutés ne seront pas la fin. Seule la foi en Dieu permet de donner du sens aux
événements quand ils deviennent incompréhensibles. Par contre les signes de la
fin des temps tels que l’Apocalypse les donne s’achèvent sur l’évocation de la paix et donnent des signes d’espérance et non
pas de violence. La fin est décrite comme une nouvelle création qui fait toute
chose nouvelle.
Ce
livre présente les événements derniers, comme l’offrande par Dieu d’une
Jérusalem entièrement renouvelée. Elle descend du ciel comme l’ultime présent du
Seigneur à l’humanité réconciliée avec
lui. Plus bucolique, le texte du prophète Esaïe que nous recevons aujourd’hui
inaugure une ère de paix sans fin. Quant aux l’Evangiles, il ne s’achève pas
sur le récit du supplice atroce du fils
de Dieu cloué sur un poteau de bois, mais sur une invitation faite à toute la terre de jouir de la
résurrection. Ainsi en est-il de la fin des temps où Dieu envisage de recréer
toute chose et où nos personnes seront-elles-même recréées pour une durée de
vie qui est dite sans fin ou éternelle.
Dieu
reste fidèle à sa parole, et chaque
prophète faisant écho aux paroles de ceux qui étaient avant lui parle du désir de
Dieu d’amener tous les peuples à sa connaissance et de provoquer une ère de
paix universelle où l’harmonie unirait le ciel et la terre. C’est ainsi que nos
entrons dans le temps de l’attente où selon les promesses contenues dans les
Ecritures, Dieu nous ouvrira les portes d’un royaume à la tête duquel il a déjà
placé un nouveau roi que nous reconnaissons en Jésus Christ. Héritier de David il nous invite à le suivre pour construire avec lui un avenir
d’espérance. Chacun de ceux qui accepteront de le suivre devra se parer des
vertus de ce souverain évoqué dans le texte
d’Esaïe.
Habité
par les vertus de ce roi promis jadis et
que nous reconnaissons en Jésus, notre
esprit est désormais disposé à discerner le chemin que Dieu dessine pour
l’humanité en recherche des vérités dernières. Il récuse à l’avance ces images et ces textes
qui parlent de Dieu en le figeant dans les trais du souverain juge qui exercerait le droit au
détriment de l’amour. Il sent bien que Dieu ne peut avoir deux visages. Celui
du juge sévère et celui du père miséricordieux.
C’est
alors que l’esprit de ce roi évoqué par
le prophète se met à la disposition de notre foi pour que nous discernions les
critères qui nous permettront d’avancer. Certains refusant d’exercer leur esprit critique s’entêtent
à suivre à la lettre les prophéties de malheur sans aller jusqu’aux conclusions.
Ils s’attribuent à eux-mêmes les faveurs de Dieu et réservent les feux de la
Géhenne aux autres. Ils s'octroient à eux seuls le pardon dont ils dénient aux
autres les bénéfices, si bien que Dieu
perdrait ses capacités à être Dieu s’il limitait lui-même sa miséricorde à ces interprétations humaines exemptes de
charité.
Les
autres lecteurs éclairés par l’esprit qui traverse les Ecritures, ont compris
que Dieu voulait sauver tous les hommes. Ils
prennent pour seuls critères ceux auxquels Jésus
a voulu rester fidèle et ils découvrent
que ces critères sont les mêmes que les vertus attribuées par Esaïe au
roi mystérieux décrit par le prophète. Il ne juge pas d’après ce qu’il voit, il
ne juge pas d’après ce qu’il entend, son attention est toute tendue vers les
faibles et il prend son plaisir dans le service de Dieu.
Nous
reconnaissons que les critères sur lesquels Esaïe étayait sa prophétie sont les mêmes que ceux envisagés sept
siècles plus tard par Jésus. N’est-ce pas alors dans cette direction qu’il nous
faut tourner les regards avec intelligence ? C’est l’esprit du Seigneur
qui nous aide à comprendre ce que dit la Parole de Dieu et nous comprendrons
que nous sommes en accord avec elle si nous avons plus envie d’aimer que de
haïr, si nos actions nous poussent à
vouloir le mieux-être des hommes, y compris ceux que nous estimons coupables, si enfin notre louange monte vers le Seigneur
parce que son Royaume n’est pas réservé aux seuls justes.
Il
ne nous reste plus qu’à œuvrer pour la gloire de Dieu en mettant en accord ce
que nous avons reçu de sa Parole avec les actions que nous sommes amenés à
faire.
Les images du Christ en gloire sont issues des tympans des cathédrales de Vézelay, Conques Amiens, Autun, Bourges, Angoulême ( de haut en bas)
Les images du Christ en gloire sont issues des tympans des cathédrales de Vézelay, Conques Amiens, Autun, Bourges, Angoulême ( de haut en bas)
Trois ans plus tard je vous propose un autre sermon sur ce même sujet:
Esaïe 11 :1-10
Il est
des moments où l’imaginaire se croit complice de Dieu et recrée un monde
différent de celui où nous sommes. Ce
faisant, nous nous sentons complices de
la même vision que celle de Dieu. Cette vision des choses telle que le prophète
la prête à Dieu nous entraine sur les rives du rêve et non sur celle de la
réalité. Une telle vision est attribuée
à Dieu alors qu’elle nous emmène loin des chemins qu’il fréquente. Il nous faut alors considérer que le prophète
emprunte cette voie pour nous provoquer.
Nous y découvrons le monde de demain tel
que nous pourrions l’imaginer et non pas
tel que Dieu voudrait que nous
l’imaginions. Nous serons, en fin de parcours invités à nous dégager de ce
futur qui ressemble plus à celui de la
fée Clochette qu’à celui qu’on pourrait solidement construire en s’ appuyant sur le
respect de la morale et sur la logique scientifique des plus qualifiés de nos
chercheurs. Mais ni l’un ni l’autre de
ces mondes imaginaires ne ressemble au projet de Dieu.
Dans le
premier cas nous pensons que le prophète se fourvoie, qu’il invente un monde du
futur impossible à réaliser et sur lequel ce n’est pas Dieu qui règnerait mais
une absence de Dieu à l’image du monde de Walt Dinsney. Dans le deuxième cas, nous ne pouvons imaginer un futur cohérent sans prendre leçon de l’histoire. Il nous faut alors énumérer tous les
échecs qu’ont connus les sociétés
utopiques construites la plupart du temps dans le nouveau monde par des
idéalistes fuyant le Vieux monde à cause
de son intolérance et en réalisant des
sociétés encore plus intolérantes. Toutes ont échoué.
Pourquoi,
les prophètes de jadis ont-ils mêlés Dieu à nos rêves les plus fous ? Pourquoi leur imagination a-t-elle frisé l’invraisemblable ? Ils nous
invitent à imaginer un monde où les
carnassiers deviendraient des ruminants et où les enfants irresponsables pourraient s’adonner aux exercices les plus
dangereux sans risquer la mort. En fait, dans l’inconscient collectif,
ceux qui se plaisent à évoquer de telles images sont des insatisfaits du monde
où nous sommes et voudraient que Dieu
partage leur insatisfaction, c’est pourquoi Ils vont même jusqu’à indiquer à
Dieu la procédure à suivre, si bien qu’ils deviennent leur propre Dieu en se
séparant de celui qui opère dans le
monde du réel.
Esaïe en
proposant cette prophétie, ne parle pas d’avenir. Il nous provoque en imaginant
que Dieu pourrait nous proposer un monde
futur aseptisé où nous serions privés de toute initiative. Il serait tellement
absent de toute violence qu’il deviendrait
impossible d’y vivre. Le mal n’existerait plus, les injustices non plus.
Mais ceux qui préconiseraient un tel
monde oublient que ce sont eux, les
hommes, qui en sont les principaux acteurs et que, avant d’en éradiquer la
violence, il faut d’abord enlever celle qui est en eux. En effet, si en voulant
faire des loups ou des ours des créatures fréquentables, totalement différentes
de ce qu’elles sont, on ferait violence
à leur nature en désirant les transformer selon nos désirs. Cela
consisterait en fait, à les faire périr plutôt qu’à les faire évoluer. On
voudrait corriger le monde de sa propre violence en lui faisant violence. Ces
quelques boutades nous amènent à
constater que la violence dont nous voudrions éradiquer le monde est d’abord en
nous avant de la repérer chez les autres.
On pourrait même dire que c’est parce qu’elle est en nous qu’on la
repère d’autant mieux chez les autres.
Quand les prophètes se plaisent à décrire un monde improbable qui correspondrait mieux à la volonté du Dieu qu’ils imaginent, c’est en fait à l’image de
Dieu lui-même qu’ils s’en prennent. En
agissant ainsi, c’est Dieu qu’ils
veulent transformer, et non pas les hommes que nous sommes. Nous l’avons
compris, c’est pour nous provoquer qu’ils agissent ainsi Ils
veulent nous aider à affronter la
violence du monde et la menace de la
mort qui rôde autour de nous sans pour autant la nier.
Cette prophétie, n’est pas la description d’un
avenir enchanteur dans lequel Dieu envisagerait de nous voir évoluer en
récompense de notre fidélité et de nos
comportements vertueux. Ce n’est pas la
redécouverte d’un paradis perdu qu’il chercherait à restaurer. Le prophète
conteste au contraire notre passivité et notre refus de nous impliquer dans la
construction d’un avenir meilleur pour le monde. Ce qu’il dénonce, c’est notre refus
d’ agir et notre désir de voir les
choses s’accomplir sans que nous n’ayons rien à faire, car
si ce monde doit avoir un avenir meilleur, c’est que nous sommes impliqués personnellement dans son
histoire et que c’est avec nous qu’il se construira ou qu’il ne se construira
pas.
Nulle
part dans les Ecritures, nous voyons la promesse de voir se créer ’une société
passive où tout se passerait sans que
les hommes n’aient à intervenir. Leur bonne conduite, leur religiosité, leur
vertu et leur morale sont insuffisantes pour dresser les bases de la société de
demain. Il faut aux hommes quelque chose d’autre pour que ce projet réussisse.
Ce quelque chose d’autre qui nous est nécessaire, c’est l’esprit de sagesse et d’intelligence, de
conseil et de vaillance, un esprit avec lequel le monde sera géré avec
justice. C’est de cela que parle le
prophète au tout début de son intervention et c’est la condition indispensable de la venue d’un monde
meilleur.
Bien
évidemment ces qualités particulières nous les avons reconnues dans les vertus
du Messie attendu, de Jésus Christ en qui nous reconnaissons le rejeton du
tronc d’Isaïe. Il fut tué par les hommes
parce qu’il a cherché à mettre en place,
d’une manière efficace toutes ces vertus
décrites ici. Il a commencé par
préconiser la « justice », c'est-à-dire l’équité à l’égard de tous
ceux qui sont en manque d’une manière ou d’une autre. Manque de pain et manque
d’espérance, manque de foi aussi, santé déficiente et violence de toute sorte subies par eux. Jésus
est venu vers eux au nom de Dieu, il a remédié, dans la mesure de ses faibles
forces à leurs manques.
Si Jésus
en est mort, c’est parce qu’il s’est senti désigné, comme celui que les
prophètes annonçaient. Il a mis en pratique ce qu’ils disaient, et il en est mort, mais il n’aurait pas connu un tel
destin, et il ne serait pas mort s’il
avait été suivi par tous ceux qui avaient reconnu qu’il agissait au nom de Dieu.
Ils auraient tout mis en œuvre avec lui pour que la justice divine soit
appliquée, pour que les pauvres ne soient pas condamnés à le rester et pour que
les petits ne désespèrent plus d’être refoulés au plus bas de l’échelle
sociale.
Le monde
voulu par Dieu n’était donc pas un monde de rêve où tout serait en
contradiction avec les règles de la nature, mais un monde nouveau en
contradiction avec les règles de la société que les hommes ont établies à leur
profit sans jamais avoir consulté Dieu. Jésus a payé de sa personne pour avoir
voulu répondre au désir de Dieu de vouloir changer les choses pour évoluer vers
ce Royaume que Jésus appelait de ses
vœux.
Allons-nous
maintenant laisser son sacrifice sans suite ? Il est possible de réaliser le rêve de Dieu si nous nous mettons à
l’œuvre dans le sens où Jésus le souhaite. Il souhaite une forme de justice
telle qu’elle s’appuie d’abord sur l’amour du prochain. Il n’est pas question
de tergiverser sur le fait de savoir si
cet amour est justifié ou mérité, car en vérité, nous savons qu’il n’est jamais
vraiment mérité, et Jésus nous demande d’écarter cette question pour entrer
dans l’application de sa vérité selon laquelle nous devons être témoins de son
amour injustifié et immérité pour tous les hommes, et de le mettre en pratique
là où nous sommes.
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